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17/05/2023 | FRANCE | N°21NC02308

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre, 17 mai 2023, 21NC02308


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le GAEC Suck a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 11 avril 2019 par lequel le maire d'Epping a sursis à statuer sur sa demande de permis de construire portant sur la construction d'un bâtiment agricole destiné à stocker du matériel et des machines rue des Lilas.

Par un jugement n° 1906326 du 10 juin 2021, le tribunal administratif de Strasbourg a, d'une part, annulé l'arrêté susmentionné et, d'autre part, enjoint au maire de la commune d'Epping de délivrer le

permis de construire sollicité par le GAEC Suck dans un délai de deux mois à compt...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le GAEC Suck a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 11 avril 2019 par lequel le maire d'Epping a sursis à statuer sur sa demande de permis de construire portant sur la construction d'un bâtiment agricole destiné à stocker du matériel et des machines rue des Lilas.

Par un jugement n° 1906326 du 10 juin 2021, le tribunal administratif de Strasbourg a, d'une part, annulé l'arrêté susmentionné et, d'autre part, enjoint au maire de la commune d'Epping de délivrer le permis de construire sollicité par le GAEC Suck dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 12 août 2021 et 7 mars 2022, la commune d'Epping, représentée par Me Schneider, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 10 juin 2021 ;

2°) de rejeter la demande présentée par le GAEC Suck devant le tribunal administratif de Strasbourg ;

3°) de mettre à la charge du GAEC Suck une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'arrêté du 11 avril 2019 n'est pas entaché d'incompétence ;

- la délibération du 19 décembre 2019 ayant approuvé le plan local d'urbanisme intercommunal du Pays de Bitche - Partie Est n'est pas entachée d'illégalité ;

- l'arrêté du 11 avril 2019 ne méconnaît pas les articles L. 424-1 et L. 153-11 du code de l'urbanisme.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 13 et 20 octobre 2021 et le 17 février 2022, le GAEC Suck, représenté par la SCP Hennard-Odenheimer, conclut au rejet de la requête, à ce qu'il soit enjoint à la commune d'Epping de lui délivrer le permis de construire sollicité dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et à ce que soit mise à la charge de la commune d'Epping une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que les moyens soulevés par la commune d'Epping ne sont pas fondés.

Procédure d'exécution :

Par une lettre enregistrée le 27 décembre 2021, le GAEC Suck a demandé à la cour, sur le fondement de l'article L. 911-4 du code de justice administrative, d'assurer l'exécution du jugement n° 1906326 du 10 juin 2021 frappé d'appel.

Par lettre du 28 décembre 2021, la présidente de la cour a invité le maire d'Epping à justifier de l'exécution du jugement.

Par un courrier enregistré le 2 février 2022, le maire d'Epping a informé la cour de ce que la commune mettait tout en œuvre pour délivrer le permis de construire dont s'agit.

Par un courrier du 17 février 2022, le GAEC Suck a pris note des observations de la commune mais a relevé qu'aucune décision concrète n'est intervenue.

Par une ordonnance du 3 mai 2022, la présidente de la cour a ouvert une procédure juridictionnelle sous le n°22NC01141.

Par des mémoires, enregistrés le 18 mai 2022 et le 8 février 2023, la commune d'Epping demande à la cour de constater que le jugement n° 1906326 du 10 juin 2021 a été exécuté.

Par un mémoire, enregistré le 6 décembre 2022, le GAEC Suck demande à la cour de constater qu'il n'y a plus lieu de statuer sur sa demande et à ce que soit mise à la charge de la commune d'Epping une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Sibileau, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Antoniazzi, rapporteure publique,

- et les observations de Me Schneider, pour la commune d'Epping.

Considérant ce qui suit :

1. Le 21 décembre 2018, le groupement agricole d'exploitation en commun (GAEC) Suck (" le GAEC Suck ") a déposé un dossier de demande de permis de construire portant sur la construction d'un bâtiment agricole destiné à stocker du matériel et des machines rue des Lilas à Epping. Par un arrêté du 11 avril 2019, le maire d'Epping a sursis à statuer sur la demande de permis de construire, pour une durée de deux ans, au motif que le projet est de nature à compromettre l'exécution du futur projet de plan local d'urbanisme intercommunal du pays de Bitche - partie Est (" le PLUi du pays de Bitche - Partie Est "). Par un jugement n° 1906326 du 10 juin 2021 dont la commune d'Epping interjette appel, le tribunal administratif de Strasbourg a d'une part, annulé l'arrêté du 11 avril 2019 et, d'autre part, enjoint au maire de la commune d'Epping de délivrer le permis de construire sollicité dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement.

2. Par une lettre du 27 décembre 2021, le GAEC Suck, a saisi la cour administrative d'appel de Nancy de difficultés qu'il estime rencontrer pour obtenir l'exécution du jugement du 10 juin 2021. Par une ordonnance du 3 mai 2022, la présidente de la cour a décidé l'ouverture d'une procédure juridictionnelle.

Sur la légalité de l'arrêté du 11 avril 2019 :

3. Aux termes de l'article L. 153-11 du code de l'urbanisme : " [...] L'autorité compétente peut décider de surseoir à statuer, dans les conditions et délai prévus à l'article L. 424-1, sur les demandes d'autorisation concernant des constructions, installations ou opérations qui seraient de nature à compromettre ou à rendre plus onéreuse l'exécution du futur plan dès lors qu'a eu lieu le débat sur les orientations générales du projet d'aménagement et de développement durable. ". Aux termes de l'article L. 424-1 du même code dans sa rédaction alors en vigueur, il peut être sursis à statuer à une demande de permis de construire " [...] 3° Lorsque des travaux, constructions ou installations sont susceptibles de compromettre ou de rendre plus onéreuse la réalisation d'une opération d'aménagement, dès lors que le projet d'aménagement a été pris en considération par la commune ou l'établissement public de coopération intercommunale compétent et que les terrains affectés par ce projet ont été délimités, sauf pour les zones d'aménagement concerté pour lesquelles l'article L. 311-2 du présent code prévoit qu'il peut être sursis à statuer à compter de la publication de l'acte créant la zone d'aménagement concerté. / [...] ".

4. Un sursis à statuer ne peut être opposé à une demande de permis de construire que lorsque l'état d'avancement des travaux d'élaboration du nouveau plan local d'urbanisme permet de préciser la portée exacte des modifications projetées, sans qu'il soit cependant nécessaire que le projet ait déjà été rendu public. Il ne peut en outre être opposé qu'en vertu d'orientations ou de règles que le futur plan local d'urbanisme pourrait légalement prévoir, et à la condition que la construction, l'installation ou l'opération envisagée soit de nature à compromettre ou à rendre plus onéreuse son exécution.

5. En premier lieu, le projet objet de la demande consiste en la réalisation d'un bâtiment agricole d'une surface de plancher créée de 288 mètres carrés destiné à stocker du matériel et des machines situé rue des Lilas à Epping. Les premiers juges n'ont pas commis d'erreur en retenant, par des motifs qu'il convient d'adopter, le moyen tiré par le GAEC Suck la méconnaissance des dispositions citées au point 3 ci-dessus.

6. En second lieu, il est constant que par un jugement devenu définitif du 14 octobre 2021 n°s 2001288, 2001305, 2001309, 2001378, 2002476, 2005078, 2005079, 2005080, 2005081, 2005082, 2005083, 2005084, 2005085, 2005086, 2005087, 2005088, 2005089 et 2005090, le tribunal administratif de Strasbourg a annulé la délibération du 19 décembre 2019 portant approbation du PLUi du pays de Bitche - Partie Est. Par conséquent, le maire d'Epping ne pouvait légalement fonder sa décision sur le motif tiré de ce que la réalisation des travaux serait de nature à compromettre la réalisation dudit document d'urbanisme.

7. Il résulte de ce qui précède que la commune d'Epping n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont annulé l'arrêté attaqué. Dans le cadre du présent litige, aucun des autres moyens soulevés n'est susceptible d'entraîner, en l'état du dossier soumis à la cour, l'annulation de l'arrêté du 11 avril 2019 pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme.

Sur l'exécution du jugement du 10 juin 2021 :

8. Aux termes de l'article L. 911-4 du code de justice administrative : " En cas d'inexécution d'un jugement ou d'un arrêt, la partie intéressée peut demander à la juridiction, une fois la décision rendue, d'en assurer l'exécution. / Si le jugement ou l'arrêt dont l'exécution est demandée n'a pas défini les mesures d'exécution, la juridiction saisie procède à cette définition. Elle peut fixer un délai d'exécution et prononcer une astreinte. ". L'article R. 921-6 de ce même code dispose : " Dans le cas où le président estime nécessaire de prescrire des mesures d'exécution par voie juridictionnelle, et notamment de prononcer une astreinte, ou lorsque le demandeur le sollicite dans le mois qui suit la notification du classement décidé en vertu du dernier alinéa de l'article précédent et, en tout état de cause, à l'expiration d'un délai de six mois à compter de sa saisine, le président de la cour ou du tribunal ouvre par ordonnance une procédure juridictionnelle. Cette ordonnance n'est pas susceptible de recours. L'affaire est instruite et jugée d'urgence. Lorsqu'elle prononce une astreinte, la formation de jugement en fixe la date d'effet ".

9. Il résulte de l'instruction que par un arrêté du 5 mars 2022 notifié le 9 mars 2022, le maire d'Epping a délivré au GAEC Suck l'autorisation sollicitée. Par conséquent, il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions à fin d'exécution présentées par le pétitionnaire. Doivent également être rejetées, ses conclusions à fin d'injonction.

Sur les frais d'instance :

10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du GAEC Suck, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la commune d'Epping demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de la commune d'Epping une somme de 5 000 euros au titre des frais exposés par le GAEC Suck et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : Il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions relatives à l'exécution du jugement du 10 juin 2021.

Article 2 : La requête de la commune d'Epping est rejetée.

Article 3 : La commune d'Epping versera au GAEC Suck la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la commune d'Epping et au GAEC Suck.

Copie en sera adressée au préfet de la Moselle.

Délibéré après l'audience du 13 avril 2023, à laquelle siégeaient :

- M. Wallerich, président de chambre,

- M. Sibileau, premier conseiller,

- Mme Barrois, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 17 mai 2023.

Le rapporteur,

Signé : J.-B. SibileauLe président,

Signé : M. A...

La greffière,

Signé : S. Robinet

La République mande et ordonne au préfet de la Moselle en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

S. Robinet

2

N° 21NC02308-22NC01141


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21NC02308
Date de la décision : 17/05/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. WALLERICH
Rapporteur ?: M. Jean-Baptiste SIBILEAU
Rapporteur public ?: Mme ANTONIAZZI
Avocat(s) : SCP SCHNEIDER-KATZ

Origine de la décision
Date de l'import : 28/05/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2023-05-17;21nc02308 ?
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