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13/07/2022 | FRANCE | N°20NC01046

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre, 13 juillet 2022, 20NC01046


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... D... a demandé au tribunal administratif de Besançon de prononcer la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 2013, et des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1800570 du 17 mars 2020, le tribunal administratif de Besançon a constaté qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur les conclusions aux fins de décharge des suppléments d'impôt sur le revenu en litige, à concurrence que la somme dégrevée, a rédu

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... D... a demandé au tribunal administratif de Besançon de prononcer la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 2013, et des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1800570 du 17 mars 2020, le tribunal administratif de Besançon a constaté qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur les conclusions aux fins de décharge des suppléments d'impôt sur le revenu en litige, à concurrence que la somme dégrevée, a réduit les bases d'imposition du redressement procédant à la remise en cause de la valeur vénale de l'appartement situé à Orchamps-Vennes et a déchargé M. D... en conséquence, mais a cependant rejeté le surplus de la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 7 mai 2020, M. A... D..., représenté par Me Sirat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 17 mars 2020 en tant que le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à la décharge des impositions et pénalités restant en litige ;

2°) de prononcer la décharge de ces impositions et des pénalités correspondantes ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

Sur la régularité du jugement :

- le tribunal n'a pas répondu à ses moyens ;

- il a fait une inexacte appréciation des faits ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

- l'administration n'a pas respecté l'obligation d'information de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales ;

- le service n'a pas respecté l'obligation d'information de l'article L. 48 B du livre des procédures fiscales ;

- la réponse aux observations du contribuable n'est pas suffisamment motivée en méconnaissance de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales ;

Sur le bien-fondé de l'impôt :

- il est fondé à remettre en cause les termes de comparaison choisi par le service et, ainsi, la valeur vénale retenue par ce dernier en ce que le terrain vendu est inconstructible, non viabilisé, soumis au droit de préemption urbain et se situe dans un environnement différent de celui des terrains retenus comme termes de comparaison ;

- aucun acte anormal de gestion n'est démontré ;

- les pénalités pour manquement délibéré ne sont pas justifiées.

Par un mémoire en défense, enregistré le 30 novembre 2020, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. D... ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 6 mai 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 7 juin 2022 à 12h00.

Un mémoire présenté par le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique a été enregistré le 22 juin 2022, postérieurement à la clôture d'instruction.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme C...,

- et les conclusions de Mme Haudier, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. D..., qui a exercé une activité de marchand de biens jusqu'au 31 août 2013, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er septembre 2011 au 31 août 2013. A l'issue des opérations de contrôle, le vérificateur a notamment estimé qu'à la suite de la cessation de son activité en 2013, M. D... a retiré de l'actif de son activité professionnelle de marchand de biens, deux biens, à savoir un terrain et un appartement, qui ont été transférés dans son patrimoine personnel. Le vérificateur a considéré que les valeurs inscrites en comptabilité avaient été sous-estimées, les biens étant sous-évalués, et que cette opération constituait donc un acte anormal de gestion. Par proposition de rectification du 11 décembre 2015, l'administration lui a notifié dans le cadre de la procédure de rectification contradictoire des rehaussements de ses bénéfices industriels et commerciaux au titre de l'année 2013. Par proposition de rectification du 3 janvier 2016, l'administration a notifié dans le cadre de la procédure de rectification contradictoire à M. et Mme D... une cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu au titre de l'année 2013 et des pénalités correspondantes. M. D... relève appel du jugement du 17 mars 2020 en tant que le tribunal administratif de Besançon, après avoir déchargé la partie des impositions relative à la remise en cause de la valeur vénale de l'appartement, a rejeté le surplus de sa demande tendant à la décharge des impositions et pénalités relatives à la rectification concernant la valeur du terrain.

Sur la régularité du jugement :

2. En premier lieu, M. D... soutient que son argument tiré de ce que les prix de vente des terrains retenus par le service comme termes de comparaison, pour évaluer le terrain lui appartenant, sont grevés d'une taxe sur la valeur ajoutée calculée au taux de 19,6 % sur la marge bénéficiaire, et qu'ainsi, il convient de l'exclure pour l'analyse comparative. Toutefois, le tribunal, qui n'était pas tenu de répondre à l'ensemble de l'argumentaire du requérant, a suffisamment répondu au moyen contestant la valeur vénale retenue par le service pour évaluer la valeur du terrain nu. Le requérant n'est, par suite, pas fondé à soutenir que le tribunal aurait omis de répondre à un des moyens qu'il avait invoqués.

3. En second lieu, si le requérant soutient que le jugement est erroné en ce qu'il est entaché d'une inexacte appréciation des faits, une telle critique tenant au bien-fondé du jugement est sans incidence sur sa régularité.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

4. En premier lieu, aux termes de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales : " L'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 ou de la notification prévue à l'article L. 76. Elle communique, avant la mise en recouvrement, une copie des documents susmentionnés au contribuable qui en fait la demande ".

5. Il résulte de ces dispositions qu'il incombe à l'administration, quelle que soit la procédure d'imposition mise en œuvre, et au plus tard avant la mise en recouvrement, d'informer le contribuable dont elle envisage soit de rehausser, soit d'arrêter d'office les bases d'imposition, de l'origine et de la teneur des documents et renseignements obtenus auprès de tiers, qu'elle a utilisés pour fonder les impositions, avec une précision suffisante pour mettre à même l'intéressé d'y avoir accès avant la mise en recouvrement des impositions qui en procèdent.

6. Il résulte de l'instruction que le 2 novembre 2015, le vérificateur a fait usage du droit de communication auprès de la mairie d'Orchamps-Vennes afin d'obtenir tous renseignements relatifs à la situation des parcelles situées au 2 rue des Chênes appartenant à M. D... au regard du plan local d'urbanisme et aux demandes de permis de construire et déclarations préalables se rapportant aux bâtiments situés au 13 rue du docteur B.... Des éléments ont été communiqués à l'administration le 2 novembre 2015. Les renseignements relatifs au classement du terrain non bâti dans le plan local d'urbanisme ont été indiqués aux contribuables dans la proposition de rectification du 11 décembre 2015. Cette proposition de rectification mentionnait, avec une précision suffisante, l'origine et la teneur des renseignements obtenus auprès de la commune d'Orchamps-Vennes. Par suite, il appartenait au requérant, en vertu des règles ci-dessus rappelées, de demander à l'administration la communication des documents les contenant avant la mise en recouvrement des impositions, ce qu'il n'a pas fait. Il s'ensuit que le requérant n'est pas fondé à soutenir qu'il aurait été privé de la garantie prévue à l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales.

7. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 48 du livre des procédures fiscales : " A l'issue d'un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle au regard de l'impôt sur le revenu ou d'une vérification de comptabilité, lorsque des rectifications sont envisagées, l'administration doit indiquer, avant que le contribuable présente ses observations ou accepte les rehaussements proposés, dans la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 ou dans la notification mentionnée à l'article L. 76, le montant des droits, taxes et pénalités résultant de ces rectifications ".

8. Il résulte de ces dispositions que l'indication du montant des conséquences financières des rectifications proposées constitue une garantie pour le contribuable. Par suite, dans le cas où elle procède à la vérification de la comptabilité d'une entreprise dont les bénéfices sont taxés au titre de l'impôt sur le revenu global du foyer auquel appartient le contribuable qui les réalise, l'administration doit indiquer à ce contribuable, par une notification faite à son adresse personnelle, les conséquences financières des rectifications envisagées.

9. La proposition de rectification du 11 décembre 2015 rehaussant les revenus professionnels de M. D... ne précise pas le montant des droits et pénalités qui en résultent en matière d'impôt sur le revenu, mais indique que cette information sera notifiée de manière distincte. Le détail des conséquences du rehaussement du revenu imposable à l'impôt sur le revenu figure dans une seconde proposition de rectification adressée par lettre recommandée avec accusé de réception à " M. ou Mme A... D... ", à l'adresse du siège de l'activité professionnelle de ce dernier, qui était également l'adresse du domicile personnel du couple. Il ressort de cette seconde proposition de rectification du 3 janvier 2016 que l'administration n'a pas conduit, simultanément à la vérification de comptabilité de l'activité professionnelle, un examen de la situation fiscale personnelle du foyer fiscal, mais a seulement tiré les conséquences, pour le calcul de l'impôt sur le revenu du couple, du rehaussement des bénéfices industriels et commerciaux de M. D..., au vu notamment, du nombre de parts bénéficiant au foyer et des réductions d'impôts. Dans ces conditions, M. D... a disposé des éléments le mettant utilement à même, dans le délai qui lui était imparti, de présenter ses observations ou d'accepter les rehaussements de ses bénéfices industriels et commerciaux et n'a été privé d'aucune garantie procédurale au titre des dispositions de l'article L. 48 du livre des procédures fiscales citées ci-dessus. Il s'ensuit que l'administration fiscale n'était pas tenue de préciser dans la première proposition de rectification rehaussant les revenus professionnels de M. D... le montant des droits et pénalités qui en résultaient en matière d'impôt sur le revenu, qui au demeurant ne pouvait être calculés indépendamment de la situation du foyer fiscal du contribuable. Par suite, le moyen doit être écarté.

10. En dernier lieu, aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales, dans sa version applicable au litige : " L'administration adresse au contribuable une notification de redressement qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. (...) Lorsque l'administration rejette les observations du contribuable sa réponse doit également être motivée ".

11. L'exigence de motivation qui s'impose à l'administration dans ses relations avec le contribuable vérifié en application du dernier alinéa de cet article s'apprécie au regard de l'argumentation de celui-ci. En tout état de cause, l'administration n'est tenue de motiver sa réponse aux observations du contribuable que sur les éléments relatifs au bien-fondé des impositions qui lui ont été notifiées. Ainsi, lorsque le contribuable vérifié ne présente pas d'observations concernant un redressement ou que ses observations ne permettent pas d'en critiquer utilement le bien-fondé, dès lors qu'elles se bornent à contester la régularité de la procédure d'imposition, l'absence de réponse de l'administration sur ce point ne le prive pas de la garantie instaurée par l'article L. 57 du livre des procédures fiscales.

12. Il résulte de l'instruction que dans ses observations du 8 février 2016, en réponse à la proposition de rectification du 11 décembre 2015 que lui a adressée l'administration fiscale, M. D... a contesté la méthode d'évaluation de la valeur du terrain situé sur la commune d'Orchamps-Vennes pour lequel il a constaté un retrait d'actif en 2013. Le contribuable se prévalait notamment des inconvénients quant aux caractéristiques propres du terrain, du caractère inapproprié des termes de comparaison utilisés par le vérificateur, et enfin, de l'absence de viabilisation du terrain. M. D... demandait à ce que la valeur du terrain soit réduite du montant des frais de viabilisation du terrain établi à partir d'un devis. D'autre part, le contribuable évoquait la signature d'un compromis pour un prix de 22 500 euros et l'évaluation du bien dans le cadre de l'exercice du droit de préemption urbain. Dans sa réponse du 31 mars 2016, l'administration fiscale a répondu, contrairement à ce que soutient le requérant, de façon précise et circonstanciée à l'ensemble des observations présentées. Ainsi, le service s'est prononcé notamment sur la question de l'évaluation du terrain en cause en se référant aux éléments détaillés dans la proposition de rectification quant aux caractéristiques du terrain. L'administration a également exposé les raisons pour lesquelles elle considérait que le terme de comparaison proposé n'était pas pertinent et a indiqué que l'évaluation effectuée par la commune ne pouvait être retenue. Si le service n'évoque pas le devis relatif à la viabilisation du terrain dans sa réponse aux observations, l'administration, qui n'est pas tenue de se prononcer spécifiquement sur l'ensemble des pièces produites par le contribuable, a suffisamment motivé sa réponse quant aux éléments servant à évaluer le bien en cause. Il s'ensuit que le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales ne peut qu'être écarté.

Sur le bien-fondé de l'imposition :

13. Aux termes de l'article 34 du code général des impôts : " Sont considérés comme bénéfices industriels et commerciaux, pour l'application de l'impôt sur le revenu, les bénéfices réalisés par des personnes physiques et provenant de l'exercice d'une profession commerciale, industrielle ou artisanale. (...) ". Aux termes de l'article 35 du même code : " I. - Présentent également le caractère de bénéfices industriels et commerciaux, pour l'application de l'impôt sur le revenu, les bénéfices réalisés par les personnes physiques désignées ci-après : / 1° Personnes qui, habituellement, achètent en leur nom, en vue de les revendre, des immeubles, des fonds de commerce, des actions ou parts de sociétés immobilières ou qui, habituellement, souscrivent, en vue de les revendre, des actions ou parts créées ou émises par les mêmes sociétés. (...) ". Aux termes de l'article 38 du même code : " 2. Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt diminuée des suppléments d'apport et augmentée des prélèvements effectués au cours de cette période par l'exploitant ou par les associés. L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés. (...) 3. Pour l'application des 1 et 2, les stocks sont évalués au prix de revient ou au cours du jour de la clôture de l'exercice, si ce cours est inférieur au prix de revient. ". Aux termes de l'article 93 du même code : " 1. Le bénéfice à retenir dans les bases de l'impôt sur le revenu est constitué par l'excédent des recettes totales sur les dépenses nécessitées par l'exercice de la profession. "

14. Il résulte de ces dispositions que le montant des recettes à retenir pour la détermination du bénéfice imposable des contribuables titulaires de bénéfices industriels et commerciaux est le montant total des recettes que ceux-ci ont perçues du fait de leur activité professionnelle ou de l'occupation ou exploitation lucrative ou de la source de profits dont ils tirent parti. Si ces contribuables sont, en principe, seuls juges de l'opportunité des décisions qu'ils prennent, l'administration est cependant fondée à réintégrer dans leur résultat imposable le montant des recettes non déclarées qu'ils n'auraient normalement pas dû renoncer à percevoir. Tel est le cas lorsque la renonciation en cause est dépourvue de contrepartie équivalente pour ces contribuables, qu'elle ne peut être regardée comme relevant de l'exercice normal de leur profession ou d'une pratique normale dans le cadre de leur occupation ou exploitation lucrative ou de l'utilisation de la source de profit dont ils tirent parti ou qu'elle n'est justifiée par aucun autre motif légitime. Dans l'hypothèse où l'administration a mis en évidence la renonciation d'un contribuable titulaire de bénéfices industriels et commerciaux à percevoir des recettes, elle est réputée, lorsque la charge de la preuve du bien-fondé de la rectification lui incombe en raison de la procédure d'imposition suivie, d'apporter cette preuve si le contribuable n'est pas en mesure de justifier que la renonciation à percevoir des recettes comportait une contrepartie équivalente pour lui ou reposait sur l'un des motifs mentionnés ci-dessus.

15. La valeur vénale du bien cédé doit être estimée en se référant au prix qui pouvait être obtenu par le jeu de l'offre et de la demande à la date où la cession est intervenue. Lorsque l'administration fiscale procède, en vue d'imposer la renonciation d'un contribuable titulaire de bénéfices industriels et commerciaux à percevoir des recettes, constatée à l'occasion de la réintégration dans le patrimoine personnel de ce contribuable de la fraction d'un bien immobilier affectée antérieurement à son activité professionnelle, à l'évaluation de la valeur vénale de ce bien en se référant à des transactions qui ont porté sur des immeubles situés à proximité du lieu de situation de celui-ci, il lui appartient de retenir des termes de comparaison relatifs à des ventes qui ont porté sur des biens similaires, intervenues à une date peu éloignée dans le temps de celle du fait générateur de la plus-value. Aucune règle du code général des impôts n'impose dans ce cas à l'administration de se fonder exclusivement sur des termes de comparaison portant sur des transactions antérieures à la date de ce fait générateur.

16. M. D..., agissant en sa qualité de marchand de biens, a acquis par adjudication, le 30 octobre 2011, un ensemble immobilier situé sur la commune d'Orchamps-Vennes et composé de quatre appartements, quatre caves, quatre garages et plusieurs terrains, pour un prix de 416 000 euros. Il a ensuite revendu l'ensemble de ces biens, à l'exception d'un terrain d'une superficie de 750 m² situé au lieu-dit " Au Chêne " dans cette même commune. Lors de la cessation de son activité le 31 août 2013, M. D... a retiré ce terrain de l'actif de son activité de marchand de biens, à concurrence d'une somme de 7 000 euros, qui était inscrit en stock dans la comptabilité de son entreprise commerciale, et l'a transféré dans son patrimoine personnel. A la suite de la vérification de comptabilité concernant l'activité professionnelle de M. D..., le vérificateur a estimé que l'évaluation du terrain a été minorée au regard des éléments de comparaison retenus concernant des terrains à bâtir d'une surface comprise entre 650 et 800 m² et en a rehaussé le bénéfice imposable du contribuable, en utilisant improprement l'expression d'acte anormal de gestion. Pour déterminer la valeur vénale du terrain au jour du transfert dans le patrimoine privé du requérant, le vérificateur a retenu le plus faible prix de vente observé de 55 euros le m², soit une valeur rectifiée de 41 250 euros toutes taxes comprises. L'insuffisance de bénéfice a été établie après déduction de la taxe sur la valeur ajoutée calculée à 5 613 euros, soit à un montant de 35 637 euros hors taxes. En première instance, dans la mesure où le terrain en cause n'est pas viabilisé, contrairement aux termes de comparaison retenus, l'administration a admis que l'évaluation de la valeur vénale du terrain doit prendre en compte le coût estimé de la viabilisation fixé par le requérant à la somme de 8 126 euros. L'administration a alors fixé la valeur du terrain à 33 124 euros, soit 44 euros du m². Le rehaussement limité en conséquence à 26 124 euros a donné lieu à un dégrèvement prononcé le 12 juin 2018.

En ce qui concerne les éléments de comparaison :

17. S'agissant des termes de comparaison utilisés par l'administration, il résulte de l'instruction que l'environnement immédiat de la parcelle en litige, sa situation en légère pente et son caractère inconstructible ne font pas obstacle à ce que le prix auquel la propriété de ce bien lui a été transférée soit comparé avec les deux terrains appartenant à un lotissement dénommé " Les Fourches ", cédés au prix de 55 euros par m², dès lors que les parcelles de ce lotissement présentent une surface constructible similaire et sont dans une zone à forte densité. Par suite, ces terrains doivent être regardés comme comparables au regard de leur situation de fait, les différences invoquées par le requérant ne remettant pas en cause leurs caractéristiques physiques similaires. Par ailleurs, si le requérant conteste la période prise en compte par l'administration dans sa recherche de transactions similaires, il n'apporte aucun autre terme de comparaison comparable à une période plus proche de la date de la cession en cause. La date de cession des biens servant de termes de comparaison, le 22 juin 2012, doit être regardée comme une date peu éloignée dans le temps par rapport au retrait d'actif en litige intervenu le 31 août 2013. D'autre part, l'attestation du maire du 21 janvier 2016 qui évalue, sans plus de précision, " le prix moyen d'acquisition des terrains non viabilisés à aménager " ne suffit pas à remettre en cause la pertinence des termes de comparaison retenus par le vérificateur. Dans ces conditions, M. D... n'est pas fondé à soutenir que les termes de comparaison retenus par l'administration ne seraient pas appropriés.

En ce qui concerne l'évaluation du prix du terrain :

18. S'agissant de l'évaluation du prix du terrain, celui-ci doit être fixé, comme il a été dit précédemment, en se référant au prix qui pouvait être obtenu par le jeu de l'offre et de la demande à la date de la cessation d'activité de marchand de biens de M. D.... Si M. D... se prévaut du caractère inconstructible du terrain du fait de sa situation enclavée, il résulte de l'application du règlement de la zone UB du plan local d'urbanisme de la commune d'Orchamps-Vennes, que le terrain est situé dans un secteur urbanisé, donc constructible. Par ailleurs, l'intéressé a trouvé un potentiel acquéreur en signant un compromis de vente le 17 octobre 2014 au prix de 22 500 euros, qui prévoyait comme clause suspensive l'obtention d'une servitude de passage afin d'accéder à la voie publique. Par suite, le terrain en cause, s'il nécessite la constitution d'une servitude afin d'être désenclavé, ne peut être regardé, en l'état du dossier, comme étant définitivement inconstructible. En outre, comme le soutient le ministre en défense, la situation du terrain en cause dans le périmètre du droit de préemption urbain ne saurait avoir de conséquences sur l'évaluation de son prix, dès lors que l'exercice d'un tel droit n'est qu'hypothétique et qu'en l'espèce, il n'est pas contesté qu'il n'a pas été exercé lors de la signature du compromis de vente le 17 octobre 2014. De même, le prix auquel ce compromis de vente a été signé ne permet pas, à lui-seul, de considérer que la valorisation fixée par l'administration serait surévaluée. Au demeurant, le prix sur lequel les parties à cet acte se sont accordées est bien supérieur à celui auquel M. D... a inscrit la valeur du bien dans la comptabilité de son activité professionnelle. Enfin, la circonstance, à la supposer établie, que le prix de 55 euros au m², retenu initialement par l'administration, correspond à un prix de cession incluant la taxe sur la valeur ajoutée, est sans incidence sur l'évaluation de la valeur d'un terrain. Au demeurant, le prix finalement retenu par l'administration au m² est de 44 euros.

19. Toutefois, il est établi que le terrain en litige, cadastré AH n° 97, ne bénéficie pas d'un accès à une voirie publique comme il vient d'être dit. L'article 4 du règlement de la zone UB du plan local d'urbanisme de la commune d'Orchamps-Vennes impose que " tout terrain enclavé est inconstructible à moins que son propriétaire ne dispose d'une servitude de passage ". Le compromis de vente signé le 17 octobre 2014 au prix de 22 500 euros prévoyait, comme il a été dit au point précédent, une clause suspensive conditionnée à l'obtention d'une servitude de passage sur la parcelle AH n°90 afin d'accéder à la voie publique. Il est constant que cette parcelle AH n°90, constituée d'une bande étroite de terrain, appartient à la commune. L'administration soutient que l'obtention d'une telle servitude de passage est envisageable en raison de l'identité du propriétaire. Cependant, le ministre n'apporte aucun élément permettant de justifier de la faisabilité de la constitution d'une servitude de passage sur un terrain communal, en bord de voie publique. En outre, comme le fait valoir le requérant, il n'a pas été tenu compte dans l'évaluation de la valeur du terrain en cause du coût de constitution de cette servitude et de l'indemnisation du propriétaire de la parcelle AH n°90 pour la dépréciation de la valeur de son bien. M. D... est ainsi seulement fondé à demander que la valeur vénale du terrain dont la propriété du terrain lui a été transférée soit arrêtée en prenant en considération les contraintes juridiques et financières liées à la situation d'enclave de la parcelle. Il sera fait une juste appréciation de ces éléments en retenant une décote de 30 % et en fixant la valeur vénale du terrain litigieux à la somme de 23 187 euros.

20. Compte tenu d'une valeur de retrait d'actif inscrite en comptabilité de 7 000 euros et d'une valeur vénale de 23 187 euros, telle que fixée au point précédent, l'administration doit être regardée comme établissant, eu égard à l'écart significatif de prix par rapport au prix du marché, que M. D..., dans le cadre de son activité professionnelle de marchand de biens, a volontairement minoré son actif à la clôture de l'exercice 2013. Il s'ensuit qu'en l'absence de preuve par le requérant d'un intérêt pour son activité professionnelle, retiré de l'avantage qu'il s'est personnellement consenti, l'administration établit l'existence d'une minoration de la valeur d'un élément d'actif constatée à l'occasion de la réintégration dans le patrimoine personnel de M. D... du bien immobilier en litige, affecté antérieurement à son activité professionnelle, dans la limite indiquée au point précédent.

Sur les pénalités pour manquement délibéré :

21. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré ". Aux termes de l'article L. 195 A du livre des procédures fiscales : " En cas de contestation des pénalités fiscales appliquées à un contribuable au titre des impôts directs (...), la preuve de la mauvaise foi et des manœuvres frauduleuses incombe à l'administration ". Il résulte de ces dispositions que la majoration pour manquement délibéré a pour seul objet de sanctionner la méconnaissance par le contribuable de ses obligations déclaratives. Pour établir le caractère délibéré du manquement reproché au contribuable, l'administration doit apporter la preuve, d'une part, de l'insuffisance, de l'inexactitude ou du caractère incomplet des déclarations et, d'autre part, de l'intention de l'intéressé d'éluder l'impôt.

22. Pour justifier l'application des pénalités prévues au a de l'article 1729 du code général des impôts, l'administration fiscale soutient que M. D... exerçait une activité de marchand de biens et qu'il connaissait le prix de l'immobilier sur la commune d'Orchamps-Vennes ayant réalisé plusieurs opérations immobilières dans cette commune. L'administration en a déduit que le contribuable ne pouvait ignorer la minoration de la valeur du terrain situé dans cette commune ayant pour conséquence de réduire son actif à la cessation de son activité professionnelle, lors de la réintégration du bien dans son patrimoine personnel. Par ces éléments, l'administration fiscale établit le caractère délibéré du manquement et par suite le bien-fondé de la pénalité infligée à M. D....

23. Il résulte de tout ce qui précède que les bases d'imposition à l'impôt sur le revenu de M. D... doivent être réduites de la somme de 9 937 euros correspondant à la différence entre la somme de 33 124 euros, valeur du bien estimée à la suite du dégrèvement prononcé en première instance, et la somme de 23 187 euros, résultant de ce qui a été dit au point 20. Par suite, M. D... est seulement fondé à soutenir que le jugement attaqué doit être réformé dans cette mesure.

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

24. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante pour l'essentiel, une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : Les bases d'impositions assignées à M. D... au titre de l'impôt sur le revenu dû pour l'année 2013 sont réduites de la somme de 9 937 euros.

Article 2 : M. D... est déchargé de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 2013 ainsi que des pénalités correspondant à la réduction de la base d'imposition définie à l'article 1er ci-dessus.

Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Besançon du 17 mars 2020 est réformé en ce qu'il a de contraire aux articles 1er et 2 du présent arrêt.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. D... est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... D... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré après l'audience du 30 juin 2022, à laquelle siégeaient :

M. Martinez, président de chambre,

M. Agnel, président assesseur,

Mme Lambing, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 13 juillet 2022.

La rapporteure,

Signé : S. C... Le président,

Signé : J. Martinez

La greffière,

Signé : C. Schramm

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

C. Schramm

2

N° 20NC01046


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 20NC01046
Date de la décision : 13/07/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : M. MARTINEZ
Rapporteur ?: Mme Stéphanie LAMBING
Rapporteur public ?: Mme HAUDIER
Avocat(s) : SCHAUFELBERGER - MONNIN - SIRAT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/08/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2022-07-13;20nc01046 ?
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