La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

09/06/2022 | FRANCE | N°20NC00829

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre, 09 juin 2022, 20NC00829


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... C... a demandé au tribunal administratif de Besançon de prononcer la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2017.

Par un jugement n° 1900129 du 28 janvier 2020, le tribunal administratif de Besançon a rejeté la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 26 mars 2020 et 24 mars 2021, Mme A... C..., représentée par Me Geslain, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 28 janvier 2020 par lequel le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... C... a demandé au tribunal administratif de Besançon de prononcer la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2017.

Par un jugement n° 1900129 du 28 janvier 2020, le tribunal administratif de Besançon a rejeté la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 26 mars 2020 et 24 mars 2021, Mme A... C..., représentée par Me Geslain, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 28 janvier 2020 par lequel le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande ;

2°) de prononcer la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2017 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- son installation dans la commune de Citers caractérise bien la création d'une activité éligible au bénéfice de l'exonération prévue à l'article 44 quindecies du code général des impôts ;

- sa situation ne relève pas d'une " reprise à soi-même " comme lui oppose l'administration ;

- elle peut bénéficier du rescrit publié le 4 septembre 2019.

Par un mémoire en défense, enregistré le 7 décembre 2020, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par Mme C... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme B...,

- les conclusions de Mme Haudier, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme C..., chirurgien-dentiste, a exercé jusqu'en 2017 dans la société d'exercice libéral à responsabilité limitée (SELARL) Cabinet Mercatoris à Luxeuil-les-Bains. L'intéressée a cédé ses parts détenues au sein de la SELARL en 2017 et s'est installée dans la commune de Citers sous la forme d'entreprise individuelle. Etant située en zone de revitalisation rurale, Mme C... a sollicité le bénéfice de l'exonération de l'impôt sur le revenu, en application des dispositions de l'article 44 quindecies du code général des impôts. L'administration a refusé de lui accorder le bénéfice de ce régime d'exonération. Mme C... relève appel du jugement du 28 janvier 2020 par lequel le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à la décharge de la cotisation d'impôt sur le revenu à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2017.

Sur le bien-fondé de l'imposition :

Aux termes de l'article 44 quindecies du code général des impôts : " I. - Dans les zones de revitalisation rurale mentionnées à l'article 1465 A, les entreprises qui sont créées ou reprises entre le 1er janvier 2011 et le 31 décembre 2020, soumises de plein droit ou sur option à un régime réel d'imposition de leurs résultats et qui exercent une activité industrielle, commerciale, artisanale au sens de l'article 34 ou professionnelle au sens du 1 de l'article 92, sont exonérées d'impôt sur le revenu ou d'impôt sur les sociétés à raison des bénéfices réalisés, à l'exclusion des plus-values constatées lors de la réévaluation des éléments d'actif, jusqu'au terme du cinquante-neuvième mois suivant celui de leur création ou de leur reprise et déclarés selon les modalités prévues à l'article 53 A. (...) / II. - Pour bénéficier de l'exonération mentionnée au I, l'entreprise doit répondre aux conditions suivantes : a) Le siège social de l'entreprise ainsi que l'ensemble de son activité et de ses moyens d'exploitation sont implantés dans les zones mentionnées au I. (...) / e) L'entreprise n'est pas créée dans le cadre d'une extension d'activités préexistantes. (...). Le III du même article dispose que " L'exonération ne s'applique pas aux créations et aux reprises d'activités dans les zones de revitalisation rurale mentionnées au I consécutives au transfert d'une activité précédemment exercée par un contribuable ayant bénéficié, au titre d'une ou plusieurs des cinq années précédant celle du transfert, des dispositions des articles 44 sexies, 44 sexies A, 44 septies, 44 octies, 44 octies A, 44 duodecies, 44 terdecies, 44 quaterdecies ou 44 sexdecies ou d'une prime d'aménagement du territoire. "

2. Il résulte de l'instruction que Mme C... a exercé l'activité de chirurgien-dentiste en tant qu'associée minoritaire, co-gérante et salariée de la SELARL Cabinet du Docteur D... du 1er avril 2014 au 10 avril 2017. Après avoir cédé l'unique part qu'elle détenait au sein de la SELARL, Mme C... s'est installée à compter du 10 avril 2017 dans des locaux loués à la commune de Citers et a exercé sa profession de chirurgien-dentiste à titre individuel. Par courrier du 13 juillet 2017, l'intéressée a demandé si elle pouvait bénéficier de l'exonération prévue par l'article 44 quindecies du code général des impôts. Par réponse du 22 août 2017 à cette demande de rescrit, adressée dans le cadre du 1° de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales, l'administration a estimé que l'opération réalisée par Mme C... correspondait à une " reprise par soi-même " d'une activité existante, avec reprise des moyens d'exploitation et de la patientèle. Par décision du 19 janvier 2018, à l'issue d'un second examen de la demande de Mme C... exercé en application de l'article L. 80 CB du livre des procédures fiscales, l'administration a confirmé sa position. A la suite de la réception de son avis d'impôt sur le revenu, Mme C... a demandé, par réclamation préalable du 12 novembre 2018, le dégrèvement d'impôt correspondant au bénéfice du régime d'exonération de l'article 44 quindecies du code général des impôts. Par décision du 27 novembre 2018, l'administration a rejeté sa réclamation au motif que l'opération devait s'analyser comme une " reprise par soi-même ", notamment eu égard au transfert partiel de patientèle. Le service se fonde à cet égard sur la réponse ministérielle Louwagie du 11 août 2015 dans laquelle il est considéré que le transfert d'une activité dans une zone éligible avec reprise des moyens d'exploitation, notamment de la patientèle, s'analyse comme " une reprise par soi-même d'une activité préexistante ".

3. Toutefois, il n'est pas contesté que Mme C... n'a bénéficié d'aucun des moyens d'exploitation du cabinet dentaire de la SELARL Cabinet du Docteur D... et a été contrainte d'acheter l'ensemble du matériel nécessaire à son activité. S'agissant de la patientèle, la circonstance que 30 % des patients de Mme C... étaient initialement suivis par la SELARL ne caractérise pas en soi une reprise partielle de patientèle dans la mesure où, lors de la cession de la part sociale, la patientèle était exclue de cette cession et n'a pas été valorisée pour l'évaluation de la part sociale. En outre, eu égard à cette clientèle spécifique à l'activité de chirurgien-dentiste, en raison d'un attachement particulier au praticien, qui était en l'espèce connue dans le secteur, il ne peut en être déduit, du seul fait que des patients ont souhaité poursuivre leur suivi dentaire auprès de Mme C..., l'existence d'un transfert partiel de clientèle. Ce transfert de patientèle ne résulte ainsi que du jeu de la concurrence. Par ailleurs, il est constant que Mme C... a embauché, pour les besoins de son activité, une salariée qui était certes employée auparavant par la SELARL, mais qui a démissionné de cette entreprise. Eu égard à l'ensemble de ces circonstances, en l'absence de transfert de patientèle et de matériel, l'activité de la requérante ne peut être regardée comme ayant bénéficié d'un transfert de moyens d'exploitation de la part de la SELARL, en dépit du fait que Mme C... ait employé une ancienne salariée de la SELAR. Dans ces conditions, son activité de chirurgien-dentiste exercée dans la commune de Citers constitue une entreprise nouvellement créée. Il s'ensuit que c'est à tort que l'administration fiscale a refusé à Mme C... le bénéfice des dispositions de l'article 44 quindecies du code général des impôts et a rejeté sa demande de dégrèvement de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2017.

4. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande.

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Mme C... d'une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par elle dans la présente instance.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Besançon du 28 janvier 2020 est annulé.

Article 2 : Mme C... est déchargée de la cotisation d'impôt sur le revenu à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2017.

Article 3 : L'Etat versera à Mme C... la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... C... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré après l'audience du 19 mai 2022, à laquelle siégeaient :

M. Martinez, président de chambre,

M. Agnel, président assesseur,

Mme Lambing, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 9 juin 2022.

La rapporteure,

Signé : S. B... Le président,

Signé : J. MARTINEZ

La greffière,

Signé : C. SCHRAMM

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

C. SCHRAMM

2

N° 20NC00829


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 20NC00829
Date de la décision : 09/06/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : M. MARTINEZ
Rapporteur ?: Mme Stéphanie LAMBING
Rapporteur public ?: Mme HAUDIER
Avocat(s) : DU PARC CURTIL ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 21/06/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2022-06-09;20nc00829 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award