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29/03/2022 | FRANCE | N°22NC00458

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre, 29 mars 2022, 22NC00458


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler l'arrêté du 23 mars 2021 par lequel le préfet de Meurthe-et-Moselle a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office à l'expiration de ce délai.

Par un jugement no 2102289 du 23 novembre 2021, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande.

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Par une requête enregistrée le 21 février 2022 sous le n° 22NC00458, et un mémoire en produ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler l'arrêté du 23 mars 2021 par lequel le préfet de Meurthe-et-Moselle a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office à l'expiration de ce délai.

Par un jugement no 2102289 du 23 novembre 2021, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 21 février 2022 sous le n° 22NC00458, et un mémoire en production de pièces enregistré le 24 mars 2022, M. A..., représenté par Me Jeannot, demande au juge des référés de la cour :

1°) d'ordonner, sur le fondement des dispositions de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension de l'exécution de l'arrêté du préfet de Meurthe-et-Moselle du 23 mars 2021 en tant qu'il a refusé de lui délivrer un titre de séjour ;

2°) d'enjoindre au préfet de Meurthe-et-Moselle, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour d'un an portant la mention " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale " dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'ordonnance à intervenir et de lui délivrer immédiatement un récépissé de demande de titre de séjour avec autorisation de travail, sous une astreinte de 200 euros par jour de retard, et à titre subsidiaire, de lui délivrer immédiatement une autorisation provisoire de séjour avec autorisation de travail valable jusqu'à la décision au fond, sous la même astreinte ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 800 euros sur le fondement des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve de renonciation à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.

Il soutient que :

- la condition relative à l'urgence est remplie dès lors, d'une part, qu'il ne peut pas circuler librement sans être muni d'un titre de séjour, d'autre part, qu'il ne peut pas poursuivre son parcours d'insertion, notamment sa formation professionnelle, et enfin, que le conseil départemental peut interrompre sa prise en charge en tant que jeune majeur ;

- il existe un doute sérieux quant à la légalité de la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour ;

- en effet, cette décision est insuffisamment motivée ;

- le préfet de Meurthe-et-Moselle a entaché sa décision d'une erreur de droit et d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors applicable dès lors qu'il ne renverse pas la présomption de validité des actes d'état civil prévue par l'article 47 du code civil et que les articles 20 et 21 de la convention bilatérale franco-ivoirienne ne prévoient pas la légalisation de l'acte de naissance ivoirien sous forme d'extrait ou de copie intégrale ;

- le préfet a entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions des articles L. 313-14 et L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors applicables ;

- la décision contestée méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences qu'elle emporte sur sa situation personnelle.

Par un mémoire en défense enregistré le 18 mars 2022, le préfet de Meurthe-et-Moselle conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- la condition d'urgence n'est pas remplie dès lors, d'une part, que M. A... n'avait pas sollicité la suspension de la décision contestée en première instance, et d'autre part, que cette décision n'a pas fait obstacle à son inscription en classe de 1ère professionnelle " Aménagement finition bâtiment " au titre de l'année scolaire 2021-2022 ;

- aucun des moyens soulevés par M. A... n'est de nature à faire naître un doute sérieux quant à la légalité de la décision contestée.

Par une décision du 17 janvier 2022, M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.

Vu :

- la requête, enregistrée le 21 février 2022 sous le n° 22NC00457, par laquelle M. A... demande à la cour l'annulation du jugement du 23 novembre 2021 du tribunal administratif de Nancy et celle de l'arrêté du 23 mars 2021 ;

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.

Par une décision du 1er septembre 2021, la présidente de la cour a désigné M. B... comme juge des référés, en application des dispositions de l'article L. 511-2 du code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Après avoir présenté son rapport et entendu au cours de l'audience publique du 24 mars 2022 les observations de Me Jeannot, représentant M. A..., le préfet de Meurthe-et-Moselle n'étant ni présent, ni représenté.

La clôture de l'instruction a été prononcée à l'issue de l'audience.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant ivoirien, déclarant être né le 2 décembre 2002, est entré sur le territoire français en mai 2019. Il a été confié aux services de l'aide sociale à l'enfance par une ordonnance du juge des tutelles du 2 août 2019. L'intéressé a sollicité la délivrance d'un titre de séjour, le 7 décembre 2020, en se prévalant de son inscription au lycée des métiers du BTP Emmanuel Héré afin d'obtenir un baccalauréat professionnel de peintre en bâtiment. Par un arrêté du 23 mars 2021, le préfet de Meurthe-et-Moselle lui a opposé un refus, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office à l'expiration de ce délai. Par un jugement du 23 novembre 2021, le tribunal administratif de Nancy a rejeté la demande de M. A... tendant à l'annulation de cet arrêté. Par la requête analysée ci-dessus, M. A..., qui a fait appel de ce jugement, demande au juge des référés de la cour administrative d'appel de prononcer la suspension de l'exécution de l'arrêté du préfet de Meurthe-et-Moselle du 23 mars 2021 en tant qu'il a refusé de lui délivrer un titre de séjour.

Sur les conclusions à fin de suspension :

2. Aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision (...) ". Aux termes de l'article L. 511-2 du même code : " Sont juges des référés les présidents des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ainsi que les magistrats qu'ils désignent à cet effet et qui, sauf absence ou empêchement, ont une ancienneté minimale de deux ans et ont atteint au moins le grade de premier conseiller (...) ".

3. En premier lieu, la condition d'urgence à laquelle est subordonné le prononcé d'une mesure de suspension doit être regardée comme remplie lorsque la décision contestée préjudicie de manière suffisamment grave et immédiate à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu'il entend défendre. Il appartient au juge des référés, saisi d'une demande tendant à la suspension d'une telle décision, d'apprécier concrètement, compte tenu des justifications fournies par le requérant, si les effets de cette décision sur sa situation ou, le cas échéant, des autres personnes concernées, sont de nature à caractériser, à la date à laquelle il statue, une urgence justifiant que, sans attendre le jugement du recours au fond, l'exécution de la décision soit suspendue.

4. Il ressort des pièces du dossier que le contrat de jeune majeur dont bénéficie M. A... arrivera à échéance le 30 juin 2022 et que celui-ci ne disposera alors plus de la possibilité de subvenir à ses besoins ni de poursuivre son projet professionnel, alors que le processus de formation a été engagé par le requérant avec sérieux et assiduité. Dans ces conditions, M. A... justifie que les effets de la décision portant refus de titre de séjour qu'il conteste sont de nature à caractériser une urgence permettant que, sans attendre le jugement de la requête au fond, l'exécution de cette décision soit suspendue. La condition d'urgence est dès lors, en l'espèce, remplie.

5. En second lieu, à l'appui du moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors applicable, M. A... fait valoir que le préfet ne renverse pas la présomption de validité des actes d'état civil prévue par l'article 47 du code civil et que les articles 20 et 21 de la convention bilatérale franco-ivoirienne ne prévoient pas la légalisation de l'acte de naissance ivoirien sous forme d'extrait ou de copie intégrale. En l'état de l'instruction, ce moyen est de nature à créer un doute sérieux quant à la légalité de la décision contestée.

6. Il résulte de ce qui précède que M. A... est fondé à demander la suspension de l'arrêté du 23 mars 2021 par lequel le préfet de Meurthe-et-Moselle a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

7. L'exécution de la présente ordonnance de référé, laquelle ne saurait appeler que des mesures provisoires, implique seulement que M. A... soit mis en possession d'une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler, valable jusqu'à ce qu'il ait été définitivement statué, par la cour, sur la légalité de l'arrêté du 23 mars 2021. Il y a lieu, par suite, d'enjoindre au préfet de Meurthe-et-Moselle de délivrer cette autorisation dans un délai de dix jours à compter de la notification de la présente ordonnance, sans qu'il soit besoin d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Sur les frais exposés et non compris dans les dépens :

8. L'Etat étant partie perdante à la présente instance, il y a lieu, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, de mettre à sa charge le versement à Me Jeannot d'une somme de 1 200 euros, sous réserve de renonciation à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle.

ORDONNE :

Article 1er : L'exécution de l'arrêté du préfet de Meurthe-et-Moselle du 23 mars 2021 est suspendue.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de Meurthe-et-Moselle de délivrer à M. A... une autorisation provisoire de séjour lui permettant l'exercice d'une activité rémunérée, dans un délai de dix jours à compter de la notification de la présente ordonnance.

Article 3 : L'Etat versera à Me Jeannot une somme de 1 200 euros au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve qu'elle renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A... est rejeté.

Article 5 : La présente ordonnance sera notifiée à M. C... A... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera transmise au préfet de Meurthe-et-Moselle.

Fait à Nancy, le 29 mars 2022

Le premier vice-président de la cour,

juge des référés

Signé : J. B...

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente ordonnance.

Pour expédition conforme,

La greffière,

C. SCHRAMM

2

N° 22NC00458


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 22NC00458
Date de la décision : 29/03/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. José MARTINEZ
Avocat(s) : JEANNOT

Origine de la décision
Date de l'import : 12/04/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2022-03-29;22nc00458 ?
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