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01/07/2021 | FRANCE | N°19NC01422

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre, 01 juillet 2021, 19NC01422


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme C... ont demandé au tribunal administratif de Besançon de prononcer la décharge des suppléments d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquels ils ont été assujettis au titre de l'année 2012 et des pénalités correspondantes ;

Par un jugement n° 1601817 du 12 mars 2019, le tribunal administratif de Besançon a rejeté la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 13 mai 2019, M. et Mme B..., représentés par Me A..., demandent à la

cour :

1°) d'annuler ce jugement du 12 mars 2019 ;

2°) de prononcer la décharge de ces impositions ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme C... ont demandé au tribunal administratif de Besançon de prononcer la décharge des suppléments d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquels ils ont été assujettis au titre de l'année 2012 et des pénalités correspondantes ;

Par un jugement n° 1601817 du 12 mars 2019, le tribunal administratif de Besançon a rejeté la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 13 mai 2019, M. et Mme B..., représentés par Me A..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 12 mars 2019 ;

2°) de prononcer la décharge de ces impositions et des pénalités correspondantes ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- les premiers juges ont commis une erreur sur le montant du dégrèvement prononcé par l'administration le 9 mai 2017 pour un montant 21 699 euros ;

- l'administration ne justifie pas la prorogation de quatre-vingt-sept jours du délai fixé à l'article L. 12 du Livre des procédures fiscales pour clôturer l'examen de leur situation fiscale personnelle ;

- l'administration ne justifie pas l'imposition des sommes en cause dans la catégorie des rémunérations et avantages occultes sur le fondement de l'article 111 c. du code général des impôts dès lors qu'elles n'entrent pas dans le champ d'application des revenus distribués tels que précisé par l'article 109 du même code ;

- c'est à tort que la somme de 2 794,22 €, figurant au crédit de leur compte bancaire en 2012 et correspondant à un chèque émis par la SARL APM en remboursement du solde de tout compte dû par la société à l'une de ses salariés, à savoir Mme D..., a également été réintégrée dans leur revenu imposable, sur le fondement de l'article 111 c. du code général des impôts, l'administration se bornant à leur reprocher l'absence de retrait d'espèces d'égal montant ;

- la pénalité pour manquement délibéré n'est pas suffisamment motivée dans la proposition de rectification du 13 avril 2015.

Par un mémoire en défense, enregistré le 22 novembre 2019, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. et Mme C... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- l'ordonnance n° 2020-1402 et le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme E...,

- et les conclusions de Mme Haudier, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme C..., respectivement gérant et salariée de la SARL APM, ont fait l'objet, au cours de l'année 2014, d'un examen de leur situation fiscale personnelle, portant sur la période du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2012. A l'issue des opérations de contrôle, par deux propositions de rectification des 16 décembre 2014 et 13 avril 2015, établies selon la procédure de rectification contradictoire, ils ont notamment été assujettis, au titre de l'année 2012, à une cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux pour un montant total, en droits et pénalités, de 76 548 euros. La réclamation présentée par les contribuables le 16 mars 2016 a été rejetée par le service le 9 septembre 2016. M. et Mme C... relèvent appel du jugement du 12 mars 2019 du tribunal administratif de Besançon en tant qu'il a rejeté le surplus de leur demande tendant à la décharge de ces impositions.

Sur la régularité du jugement :

2. Il résulte de l'instruction que, par une décision du 9 mai 2017, postérieure à l'introduction de la demande présentée devant le tribunal administratif de Besançon, l'administration fiscale a prononcé un dégrèvement, à concurrence de 21 699 euros des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales ainsi que des pénalités correspondantes mis à la charge de M. et Mme C... au titre des années 2011 et 2012. Le tribunal ayant prononcé un non-lieu à statuer sur les conclusions de M. et Mme C... à concurrence seulement de la somme 20 102 euros, il y a lieu, dans cette mesure, d'annuler l'article 1er du jugement attaqué et de statuer immédiatement par la voie de l'évocation sur lesdites conclusions. Il y a lieu en revanche de statuer sur les autres conclusions de la requête par l'effet dévolutif de l'appel.

Sur l'étendue du litige :

3. Par une décision du 9 mai 2017, postérieure à l'introduction de la demande susmentionnée de M. et Mme C..., le ministre de l'action et des comptes publics a prononcé le dégrèvement visé au point 2 du présent arrêt. Les requérants ne contestent pas avoir obtenu sur ce point satisfaction au titre des années en litige. Par suite, il n'y a pas lieu de statuer, dans cette mesure, sur les conclusions à fin de décharge des requérants.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

4. Aux termes de l'article L. 12 du livre des procédures fiscales : " Dans les conditions prévues au présent livre, l'administration des impôts peut procéder à l'examen contradictoire de la situation fiscale des personnes physiques au regard de l'impôt sur le revenu, qu'elles aient ou non leur domicile fiscal en France, lorsqu'elles y ont des obligations au titre de cet impôt./ A l'occasion de cet examen, l'administration peut contrôler la cohérence entre, d'une part les revenus déclarés et, d'autre part, la situation patrimoniale, la situation de trésorerie et les éléments du train de vie des membres du foyer fiscal. /Sous peine de nullité de l'imposition, un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle ne peut s'étendre sur une période supérieure à un an à compter de la réception de l'avis de vérification. (...)/ Cette période est prorogée du délai accordé, le cas échéant, au contribuable et, à la demande de celui-ci, pour répondre aux demandes d'éclaircissements ou de justifications pour la partie qui excède les deux mois prévus à l'article L. 16 A. / Elle est également prorogée des trente jours prévus à l'article L. 16 A et des délais nécessaires à l'administration pour obtenir les relevés de compte lorsque le contribuable n'a pas usé de sa faculté de les produire dans un délai de soixante jours à compter de la demande de l'administration ou pour recevoir les renseignements demandés aux autorités étrangères, lorsque le contribuable a pu disposer de revenus à l'étranger ou en provenance directe de l'étranger ". Il résulte de ces dispositions qu'un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle ne peut normalement s'étendre sur une période supérieure à un an à compter de la réception de l'avis de vérification prévu par les dispositions de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales. Cependant, lorsque le contribuable n'a pas usé de sa faculté de produire ses relevés de compte dans un délai de soixante jours à compter de la demande de l'administration, ce délai peut être prorogé des délais nécessaires à l'administration pour les obtenir. Le point de départ des délais nécessaires à l'administration pour obtenir les relevés de compte court alors dès le 61ème jour suivant la demande faite au contribuable par l'administration, sauf lorsque le contribuable a produit avant cette date les coordonnées exactes de l'intégralité de ses comptes, auquel cas le point de départ des délais court à compter de la date à laquelle l'administration demande aux établissements teneurs de ces comptes que ces relevés lui soient remis. La prorogation des délais, que l'administration n'est pas tenue de notifier au contribuable, cesse à la date à laquelle l'administration reçoit l'intégralité des relevés demandés.

5. Il résulte de l'instruction que M. et Mme C... ont été informés qu'ils faisaient l'objet d'un examen contradictoire de leur situation fiscale personnelle par un avis dont ils ont été avisés par les services postaux le 14 février 2014. Il n'est pas contesté que, malgré la demande formulée dans cet avis de produire l'intégralité de leurs relevés bancaires sur la période contrôlée, les requérants n'ont pas adressé au service, dans le délai franc de soixante jours, qui expirait le 15 avril 2014, dont ils disposaient en application des dispositions précitées de l'article L. 12 du livre des procédures fiscales, l'ensemble des relevés bancaires des comptes qu'ils détenaient auprès de la Caisse d'Epargne et de la Banque populaire et n'ont pas non plus indiqué les coordonnées exactes de certains de ces comptes bancaires. Les contribuables n'ont pas davantage satisfait à la demande du service, renouvelée le 24 avril 2014, tendant à la communication de la totalité des relevés de comptes en se bornant à produire certains extraits de comptes de leurs enfants et en indiquant être dans l'attente des éléments de la part de leurs banques. L'administration établit que, dans le cadre de l'exercice du droit de communication qu'elle a exercé auprès de la Banque populaire Bourgogne par une lettre réceptionnée le 22 mai 2014, elle a obtenu les derniers relevés bancaires seulement le 11 juillet 2014, c'est-à-dire quatre-vingt-sept jours à compter du terme du délai d'un an prévu par les dispositions de l'article L. 12 du livre des procédures fiscales, soit le 13 février 2015. Dans ces conditions, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que l'administration ne justifie pas de la prorogation du délai d'un an prévu aux dispositions de l'article L. 12 du livre des procédures fiscales.

Sur le bien-fondé de l'imposition :

6. Aux termes de l'article 111 du code général des impôts : " Sont notamment considérés comme revenus distribués : (...) c. Les rémunérations et avantages occultes ".

7. En premier lieu, si les requérants soutiennent que les chèques encaissés sur leurs comptes personnels au cours de l'année 2012, pour un montant total de 67 322 euros, constituent des remboursements de la part de la SARL APM qui correspondent au montant des factures émises par certains fournisseurs de cette société, à savoir les sociétés Poli Est, Baticlass et Poli star, que M. C... aurait acquittées sur ses deniers personnels, ils n'apportent toutefois aucune pièce probante au soutien de cette allégation alors que M. C..., en sa qualité de maître de l'affaire est présumé avoir appréhendé les sommes en litige. Par suite, c'est à bon droit que l'administration a considéré que les intéressés, qui ne contestent pas avoir appréhendé les sommes litigieuses, ont bénéficié de rémunérations occultes constituant des revenus distribués, imposables dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, sur le fondement des dispositions du c) de l'article 111 du code général des impôts.

8. En second lieu, les requérants soutiennent que la somme de 2 794,22 euros, encaissée sur leurs comptes bancaires, correspond en réalité au salaire versé par la société APM, qu'ils ont perçu pour le compte de l'une de leurs salariés, Mme D..., laquelle ne détiendrait aucun compte bancaire et qu'ils auraient ensuite remboursé en espèces à cette dernière. Toutefois, il résulte de l'examen des bulletins de salaire de Mme D..., versés par les requérants en première instance, qu'à la rubrique " règlement " il est indiqué " virement ", ce qui vient contredire les allégations des requérants qui ne produisent aucun autre document de nature à établir que les mentions portées sur ces bulletins de paie sont erronées. Par ailleurs, les époux C... ne démontrent pas que, contrairement à ce qu'ils affirment, ils auraient, concomitamment à l'encaissement du chèque litigieux, remboursé en espèces leur salariée, dès lors que l'analyse des comptes bancaires des époux C... n'a révélé aucune sortie d'argent de ce même montant. Dans ces conditions, c'est à bon droit que l'administration a imposé entre les mains des requérants cette somme de 2 794,22 euros sur le fondement du c) de l'article 111 du code de général des impôts, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers.

Sur les pénalités :

9. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré (...) ". Aux termes de l'article L. 80 D du livre des procédures fiscales : " Les décisions mettant à la charge des contribuables des sanctions fiscales sont motivées au sens des articles L. 211-2 à L. 211-7 du code des relations entre le public et l'administration, quand un document ou une décision adressés au plus tard lors de la notification du titre exécutoire ou de son extrait en a porté la motivation à la connaissance du contribuable./ Les sanctions fiscales ne peuvent être prononcées avant l'expiration d'un délai de trente jours à compter de la notification du document par lequel l'administration a fait connaître au contribuable ou redevable concerné la sanction qu'elle se propose d'appliquer, les motifs de celle-ci et la possibilité dont dispose l'intéressé de présenter dans ce délai ses observations. ".

10. La proposition de rectification du 13 avril 2015 mentionne les dispositions de l'article 1729 du code général des impôts. Elle indique également que M. C... était le gérant et l'associé majoritaire de la société APM et qu'en tant que maître de l'affaire, ne disposant que d'une source de revenus, il ne pouvait ignorer que l'omission déclarative représentait 66% des revenus déclarés. Le service relevait ainsi qu'eu égard à la proportion de cette minoration et au mode de perception des sommes non déclarées, à savoir des chèques tirés sur les comptes de la SARL APM, les requérants avaient délibérément éludé l'impôt. Dans ces conditions, la proposition de rectification en litige comporte, de manière suffisamment précise, l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement des majorations pour manquement délibéré.

11. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme C... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Besançon a rejeté leur demande.

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'État, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : L'article 1er du jugement du tribunal administratif de Besançon du 12 mars 2019 est annulé.

Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête présentée par M. et Mme C... dans la mesure du dégrèvement susmentionné prononcé par le ministre de l'économie, des finances et de la relance le 9 mai 2017 à concurrence de 21 699 euros.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. et Mme C... est rejeté.

Article 4: Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme F... C... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

2

N° 19NC01422


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 19NC01422
Date de la décision : 01/07/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Analyses

19-04-02-01 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Bénéfices industriels et commerciaux.


Composition du Tribunal
Président : M. MARTINEZ
Rapporteur ?: Mme Laurence STENGER
Rapporteur public ?: Mme HAUDIER
Avocat(s) : SCHAUFELBERGER - MONNIN - SIRAT

Origine de la décision
Date de l'import : 09/07/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2021-07-01;19nc01422 ?
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