La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

17/06/2021 | FRANCE | N°19NC02476

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2eme chambre - formation a 3, 17 juin 2021, 19NC02476


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SARL Sundgau Matériaux a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de prononcer la décharge de la cotisation foncière des entreprises à laquelle elle a été assujettie au titre des années 2013 à 2016.

Par un jugement n° 1703717 du 21 mai 2019, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 1er août 2019, la SARL Sundgau Matériaux, représentée par Me A..., demande à la cour :

1°) de prono

ncer la décharge de ces impositions ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au tit...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SARL Sundgau Matériaux a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de prononcer la décharge de la cotisation foncière des entreprises à laquelle elle a été assujettie au titre des années 2013 à 2016.

Par un jugement n° 1703717 du 21 mai 2019, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 1er août 2019, la SARL Sundgau Matériaux, représentée par Me A..., demande à la cour :

1°) de prononcer la décharge de ces impositions ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

Sur les locaux référencés 046918 7K (magasin de bricolage) :

- les locaux du magasin de bricolage ne présentent aucun caractère particulier ou exceptionnel au sens de l'article 1498 du code général des impôts justifiant une comparaison avec le local type n°4 du procès-verbal des maisons exceptionnelles de la commune de Hirsingue ;

- subsidiairement, eu égard à sa taille et à la nature de ses activités, c'est à tort que l'administration a comparé son magasin de bricolage d'une surface pondérée de 2 127 m² à un local type de 3 463 m² d'une nature différente sur le territoire d'une autre commune ;

- les villes de Bréchaumont et de Hirsingue ne sont pas comparables du point de vue démographique et économique et présentent une commercialité très différente.

Sur les locaux référencés 0322961T et 0318936 E (locaux de dépôt et zone de stockage) :

- ces locaux ne présentent aucun caractère particulier ou exceptionnel au sens des dispositions de l'article 1498 du code général des impôts justifiant que l'administration utilise un terme de comparaison situé sur le territoire de la commune d'Ottmarsheim ;

- subsidiairement, eu égard à sa taille et à la nature de ses activités, c'est à tort que l'administration a comparé ce local de dépôt d'une surface de 202 m² et d'une zone de stockage de 742 m² à un local type d'une surface pondérée de 4 588 m² ;

- au surplus, les premiers juges ont inversé la charge de la preuve en considérant qu'elle n'apporte pas la preuve que le taux d'abattement de vétusté de 20 % appliqué par l'administration aurait été insuffisant ;

- cet abattement est très insuffisant dès lors qu'en raison de leur état de vétusté, seule une faible partie des locaux est utilisable ;

- les villes de Bréchaumont et d'Ottmarsheim ne sont pas comparables du point de vue démographique, économique et géographique.

Sur le calcul de la valeur locative :

- les éléments figurant sur la fiche d'évaluation produite par l'administration ne justifient pas les montants de valeur locative qu'elle a retenus pour le calcul de la contribution foncière des entreprises.

Par un mémoire en défense, enregistré le 18 février 2020, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par la SARL Sundgau Matériaux ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme B...,

- et les conclusions de Mme Haudier, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. La société anonyme à responsabilité limitée (SARL) Sundgau Matériaux a pour activité l'exploitation d'une grande surface de bricolage dans des locaux situés sur le territoire de la commune de Bréchaumont (département du Haut-Rhin) qu'elle loue à la société civile immobilière (SCI) la Colline du Moulin. A la suite d'une mise à jour des informations cadastrales consécutive à une addition de construction, déclarée par le propriétaire, la société La Colline du Moulin le 26 octobre 2016, l'administration a procédé à la correction des valeurs locatives de la grande surface en litige et a assujetti en conséquence la SARL Sundgau Matériaux à des impositions supplémentaires à la contribution foncière des entreprises au titre des années 2013 à 2016. La réclamation préalable de la société requérante a été rejetée par une décision du 28 juin 2017. La SARL Sundgau Matériaux relève appel du jugement du 21 mai 2019 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces impositions.

Sur le bien-fondé de l'imposition :

En ce qui concerne le local type retenu par l'administration pour les locaux référencés 0469187K :

2. Aux termes des dispositions de l'article 1388 du code général des impôts : " La taxe foncière sur les propriétés bâties est établie d'après la valeur locative cadastrale de ces propriétés déterminées conformément aux principes définis par les articles 1494 à 1508 et 1516 à 1518 B ". Aux termes de l'article 1467 du même code : " La cotisation foncière des entreprises a pour base la valeur locative des biens passibles d'une taxe foncière situés en France, à l'exclusion des biens exonérés de taxe foncière sur les propriétés bâties en vertu des 11° et 12° de l'article 1382, dont le redevable a disposé pour les besoins de son activité professionnelle pendant la période de référence définie aux articles 1467 A et 1478, à l'exception de ceux qui ont été détruits ou cédés au cours de la même période. / (...) ". Aux termes de l'article 1494 du code général des impôts : " La valeur locative des biens passibles de la taxe foncière sur les propriétés bâties (...) est déterminée, conformément aux règles définies par les articles 1495 à 1508, pour chaque propriété ou fraction de propriété normalement destinée à une utilisation distincte ". Aux termes de l'article 1495 du même code : " Chaque propriété ou fraction de propriété est appréciée d'après sa consistance, son affectation, sa situation et son état, à la date de l'évaluation. " Aux termes de l'article 1497 dudit code dans sa version applicable au litige: " Par dérogation à l'article 1496 I, les locaux d'habitation qui présentent un caractère exceptionnel et les locaux à usage professionnel spécialement aménagés pour l'exercice d'une activité particulière sont évalués dans les conditions prévues à l'article 1498. ". Aux termes de l'article 1498 du même code dans sa version applicable au litige : " La valeur locative de tous les biens autres que les locaux visés au I de l'article 1496 et que les établissements industriels visés à l'article 1499 est déterminée au moyen de l'une des méthodes indiquées ci-après : (...)/ 2° a. Pour les biens loués à des conditions de prix anormales ou occupés par leur propriétaire, occupés par un tiers à un autre titre que la location, vacants ou concédés à titre gratuit, la valeur locative est déterminée par comparaison. /Les termes de comparaison sont choisis dans la commune. Ils peuvent être choisis hors de la commune pour procéder à l'évaluation des immeubles d'un caractère particulier ou exceptionnel ; /b. La valeur locative des termes de comparaison est arrêtée : /Soit en partant du bail en cours à la date de référence de la révision lorsque l'immeuble type était loué normalement à cette date, Soit, dans le cas contraire, par comparaison avec des immeubles similaires situés dans la commune ou dans une localité présentant, du point de vue économique, une situation analogue à celle de la commune en cause et qui faisaient l'objet à cette date de locations consenties à des conditions de prix normales ; /3° A défaut de ces bases, la valeur locative est déterminée par voie d'appréciation directe ". Aux termes de l'article 324 Z de l'annexe III au code général des impôts : " I. L'évaluation par comparaison consiste à attribuer à un immeuble ou à un local donné une valeur locative proportionnelle à celle qui a été adoptée pour d'autres biens de même nature pris comme types. / II. Les types dont il s'agit doivent correspondre aux catégories dans lesquelles peuvent être rangés les biens de la commune (...) au regard de l'affectation, de la situation, de la nature de la construction, de son importance, de son état d'entretien et de son aménagement. / Ils sont inscrits au procès-verbal des opérations de la révision. " et aux termes de l'article 324 AA de la même annexe III au code général des impôts : " La valeur locative cadastrale des biens loués à des conditions anormales ou occupés par leur propriétaire, occupés par un tiers à un titre autre que celui de locataire, vacants ou concédés à titre gratuit est obtenue en appliquant aux données relatives à leur consistance - telles que superficie réelle, nombre d'éléments - les valeurs unitaires arrêtées pour le type de la catégorie correspondante. Cette valeur est ensuite ajustée pour tenir compte des différences qui peuvent exister entre le type considéré et l'immeuble à évaluer, notamment du point de vue de la situation, de la nature de la construction, de son état d'entretien, de son aménagement, ainsi que de l'importance plus ou moins grande de ses dépendances bâties et non bâties si ces éléments n'ont pas été pris en considération lors de l'appréciation de la consistance. ".

3. Pour arrêter la valeur locative de l'immeuble à évaluer, l'administration, faisant application de la méthode par comparaison, peut procéder par comparaisons itératives, pourvu qu'il n'existe pas pour chacune de ces évaluations un terme de comparaison plus approprié, que le terme de comparaison ultime ne soit pas inadéquat et que l'analogie de la situation économique des communes en cause puisse être admise. Un local-type qui, depuis son inscription régulière au procès-verbal des opérations de révision foncière d'une commune, a été entièrement restructuré ou a été détruit ne peut plus servir de terme de comparaison, pour évaluer directement ou indirectement la valeur locative d'un bien soumis à la taxe foncière au 1er janvier d'une année postérieure à sa restructuration ou à sa disparition.

4. A la suite des déclarations déposées le 26 octobre 2016 par la SCI La Colline du Moulin, propriétaire des locaux en litige, faisant état, notamment, d'un nouveau bâtiment de vente achevé en 2008 mais non déclaré dans les délais, l'administration a réévalué la valeur locative desdits locaux par comparaison avec le local-type n°4 inscrit au procès-verbal des " maisons exceptionnelles " de la commune de Hirsingue et a assujetti en conséquence la SARL Sundgau Matériaux à la contribution foncière des entreprises au titre des années 2013 à 2016.

5. En premier lieu, il est constant que le local litigieux, exploité par la société requérante, qui dispose d'une surface réelle de 10 190 m² et d'une surface pondérée de 2 172 m², est une grande surface commerciale de bricolage qui présente un caractère particulier ou exceptionnel au sens des dispositions précitées de l'article 1498 du code général des impôts. Par suite, le moyen tiré de ce que les locaux en litige ne présentent aucun caractère particulier ou exceptionnel au sens de cet article ne peut qu'être écarté.

6. En deuxième lieu, si la société requérante soutient que les situations économiques des communes de Bréchaumont et Hirsingue ne sont pas équivalentes, au regard de leur population, de leur superficie et de leur situation géographique, il résulte toutefois de l'instruction que ces communes, distantes de 22,5 kilomètres, sont toutes les deux situées à une vingtaine de kilomètres de l'aire urbaine de Mulhouse, qu'elles participent à la même opération collective de modernisation du commerce et de l'artisanat instaurée le 6 octobre 2010 par le syndicat mixte du Sundgau en partenariat notamment avec l'Etat et les collectivités locales. Par ailleurs, l'administration fait valoir, sans être contestée sur ce point, d'une part, que la commune de Bréchaumont, bien qu'ayant moins d'habitants que la commune de Hirsingue, est cependant plus accessible en raison de sa proximité de l'autoroute A36 qui dessert notamment les villes de Mulhouse et de Belfort et d'autre part, que la surface pondérée du local litigieux est plus petite que celle du local type retenu. Aussi, la pertinence de l'évaluation menée par l'administration n'est pas en l'espèce remise en cause par les différences relevées par la société requérante relatives au nombre d'habitants et à la superficie des territoires communaux. En outre, si, après pondération, le local de la SARL Sundgau Matériaux présente une surface de 2 127 m² alors que le local-type n°4 retenu dispose d'une surface pondérée de 3 463 m², cette différence de superficie n'est pas suffisamment significative pour faire obstacle à la prise en compte de ce local à titre de comparaison, lequel présente, contrairement à ce qu'affirme la société requérante, une nature commerciale proche de celle des locaux qu'elle loue. Dans ces conditions, le local de référence choisi en dehors de la commune de Bréchaumont doit être regardé comme étant situé dans une commune d'implantation analogue d'un point de vue économique avec la commune d'implantation du local à évaluer.

En ce qui concerne les locaux référencés 0322961T et 0318936 E (locaux de dépôt et zone de stockage) :

7. Il résulte de l'instruction que, comme le fait valoir l'administration en défense, les locaux référencés 0322961T et 0318936 E correspondants à des locaux de dépôt et à une zone de stockage, qui ne sont pas exploités par la société requérante, n'ont pas été intégrés dans la base imposable des impositions en litige. Par conséquent, les moyens développés par la société requérante relatifs à ces locaux sont inopérants et doivent être écartés.

En ce qui concerne le calcul de la valeur locative :

8. Aux termes de l'article 1518 du code général des impôts : " Dans l'intervalle de deux révisions générales, les valeurs locatives définies aux I et II de l'article 1496 et à l'article 1497, ainsi que celles des locaux commerciaux mentionnés à l'article 1501 et celles des propriétés non bâties et des terrains et sols à usage industriel ou commercial, sont actualisées tous les trois ans au moyen de coefficients correspondant à l'évolution de ces valeurs, entre la date de référence de la dernière révision générale (1) et celle retenue pour l'actualisation. Toutefois, en ce qui concerne les propriétés non bâties, il sera, jusqu'à la première révision sexennale, tenu compte de l'évolution des valeurs locatives depuis le 1er janvier 1961 ". Aux termes de l'article 1518 bis du même code : " Dans l'intervalle de deux actualisations prévues par l'article 1518, les valeurs locatives foncières sont majorées par application de coefficients forfaitaires fixés par la loi de finances en tenant compte des variations des loyers. ". Enfin, aux termes de l'article 324 AK de l'annexe III au code général des impôts : "La date de référence de la première révision quinquennale des évaluations foncières des propriétés bâties est fixée au 1er janvier 1970".

9. Il résulte de ces dispositions que la valeur locative des locaux commerciaux, comme d'ailleurs celle des locaux d'habitation et des locaux à usage professionnel, est déterminée à la date de référence de la précédente révision générale, laquelle a été fixée au 1er janvier 1970 par l'article 324 AK de l'annexe III au code général des impôts susvisé, pour être ensuite actualisée selon les modalités prévues par les articles 1516 et suivants du code général des impôts. En vertu de ces dernières dispositions, en l'absence d'actualisation des évaluations résultant de la dernière révision générale, les valeurs locatives foncières doivent être multipliées par le produit des coefficients forfaitaires successifs mentionnés à l'article 1518 bis précité et relatifs aux années postérieures à la dernière actualisation.

10. En l'espèce, la société requérante soutient que les valeurs locatives arrêtées par l'administration respectivement à 53 613 euros, 54 097 euros, 54 580 euros, et 55 135 euros pour les années 2013 à 2016 sont excessives et ne sont pas justifiés par les éléments figurant dans la fiche d'évaluation foncière éditée le 26 octobre 2016 par le service et dans lequel il est indiqué une valeur locative retenue de 17 901 euros. Toutefois, il n'est pas contesté que, comme le fait valoir l'administration, ce montant de 17 901 euros correspond uniquement à la valeur locative fixée au 1er janvier 1970 et que les valeurs locatives retenues par l'administration pour l'établissement de la contribution foncière des entreprises au titre des années en litige correspondent à la valeur locative de 1970 majorée par application du produit des coefficients forfaitaires de revalorisation successifs fixés par l'article 1518 bis précité, en tenant compte des variations de loyers, soit 2,995 pour l'année 2013, 3,022 pour l'année 2014, 3,049 pour l'année 2015 et 3,08 pour l'année 2016. Ce faisant, c'est en conformité avec la méthode de revalorisation définie par les dispositions susmentionnées des articles 1518 et 1518 bis du code général des impôts que l'administration a défini la valeur locative des locaux en cause au titre des années 2013 à 2016.

11. Il résulte de tout ce qui précède que la SARL Sundgau Matériaux n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'État, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la SARL Sundgau Matériaux est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Sundgau Matériaux et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

2

N° 19NC02476


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2eme chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 19NC02476
Date de la décision : 17/06/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Analyses

19-03-04 Contributions et taxes. Impositions locales ainsi que taxes assimilées et redevances. Taxe professionnelle.


Composition du Tribunal
Président : M. MARTINEZ
Rapporteur ?: Mme Laurence STENGER
Rapporteur public ?: Mme HAUDIER
Avocat(s) : ACTEMIS AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 29/06/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2021-06-17;19nc02476 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award