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01/06/2021 | FRANCE | N°19NC02981

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre, 01 juin 2021, 19NC02981


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 9 avril 2019 par lequel le préfet de la Moselle a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle sera éloignée.

Par un jugement n°1904561 du 17 septembre 2019, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un

mémoire, enregistrés les 16 octobre et 23 octobre 2019, Mme B..., représentée par Me D..., demand...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 9 avril 2019 par lequel le préfet de la Moselle a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle sera éloignée.

Par un jugement n°1904561 du 17 septembre 2019, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 16 octobre et 23 octobre 2019, Mme B..., représentée par Me D..., demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 17 septembre 2019 ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du préfet de la Moselle du 9 avril 2019 ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Moselle de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

4°) d'enjoindre au préfet de la Moselle de lui délivrer une carte de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

s'agissant de la décision portant refus de séjour :

- elle est entachée d'une erreur de droit dès lors que le préfet s'est estimé lié par la rupture de la communauté de vie avec son époux ;

- le préfet n'a pas procédé à un examen sérieux de sa demande dès lors qu'elle avait indiqué la rupture de la communauté de vie avec son époux et son concubinage avec un ressortissant français à l'appui de sa demande de titre présentée sur le fondement du 7° et non du 4° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- cette décision méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle aurait dû se voir délivrer un titre de séjour sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

s'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- elle est disproportionnée dès lors que l'administration n'est pas tenue de la prononcer.

Par un mémoire en défense, enregistré le 18 janvier 2021, le préfet de la Moselle conclut au non-lieu à statuer sur la requête.

Il soutient que Mme B... s'est vue délivrer une carte de séjour temporaire en qualité de parent d'un enfant français le 4 janvier 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme C..., première conseillère, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B..., ressortissante camerounaise née le 23 août 1986, est entrée régulièrement en France le 28 décembre 2015 sous couvert d'un visa de long séjour valant titre de séjour en qualité de conjointe d'un ressortissant français. Elle a ensuite obtenu des cartes de séjour temporaires en cette qualité jusqu'au 23 décembre 2018. Le 19 novembre 2018, elle a sollicité le renouvellement de son titre de séjour. Par un arrêté du 9 avril 2019, le préfet de la Moselle a rejeté cette demande, l'a obligée à quitter le territoire dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. Mme B... fait appel du jugement du 17 septembre 2019 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur l'exception de non-lieu à statuer :

2. Un recours pour excès de pouvoir dirigé contre un acte administratif n'a d'autre objet que d'en faire prononcer l'annulation avec effet rétroactif. Si, avant que le juge ait statué, l'acte attaqué est rapporté par l'autorité compétente et si le retrait ainsi opéré acquiert un caractère définitif faute d'être critiqué dans le délai du recours contentieux, il emporte alors disparition rétroactive de l'ordonnancement juridique de l'acte contesté, ce qui conduit à ce qu'il n'y ait plus lieu pour le juge de la légalité de statuer sur le mérite du recours dont il était saisi. Il en va ainsi, quand bien même l'acte rapporté aurait reçu exécution. Dans le cas où l'administration se borne à procéder à l'abrogation de l'acte attaqué, cette circonstance prive d'objet le recours formé à son encontre à la double condition que cet acte n'ait reçu aucune exécution pendant la période où il était en vigueur et que la décision procédant à son abrogation soit devenue définitive.

3. Il ressort des pièces du dossier que, le 4 janvier 2021, le préfet de la Moselle a délivré à Mme B... un titre de séjour sur le fondement du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Cette décision a implicitement mais nécessairement abrogé les décisions du 9 avril 2019 faisant obligation à la requérante de quitter le territoire français et fixant le pays de destination de son éventuelle reconduite d'office à la frontière. Ces décisions n'ayant pas été exécutées et l'abrogation des décisions du 9 avril 2019 étant devenue définitive, les conclusions de l'intéressée tendant à leur annulation ont perdu leur objet et il n'y a plus lieu d'y statuer. En revanche, les conclusions à fin d'annulation dirigées contre la décision du 9 avril 2019 portant refus de titre de séjour, qui, alors même qu'elle a été abrogée par la délivrance ultérieure d'un titre de séjour à la requérante, a reçu application, ont conservé leur objet et il y a lieu d'y statuer.

Sur la légalité de la décision portant refus de séjour :

4. En premier lieu, il ressort des énonciations mêmes de l'arrêté contesté que le préfet s'est interrogé sur la possibilité d'admettre au séjour la requérante à titre dérogatoire et qu'il ne s'est ainsi pas estimé lié par la rupture de la communauté de vie avec son époux pour rejeter sa demande. Par suite, le moyen tiré de l'erreur de droit doit être écarté.

5. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier que le préfet a procédé à un examen de la situation personnelle et familiale de la requérante, telle qu'elle avait été portée à sa connaissance lors de la demande présentée par cette dernière tendant au renouvellement de son titre de séjour, alors qu'elle n'établit pas avoir mentionné sa relation de couple débutée le 28 septembre 2018 avec un ressortissant français, ni présenté des pièces en attestant, à l'appui de sa demande. Par suite, le moyen tiré d'un défaut d'examen attentif de sa situation doit être écarté.

6. En troisième lieu, comme il a été dit au point précédent, il ne ressort pas des pièces du dossier que Mme B... a présenté sa demande de renouvellement de titre de séjour sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions est inopérant.

7. En dernier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

8. Mme B... se prévaut de sa résidence en France depuis le 28 décembre 2015, de son concubinage depuis septembre 2018 avec un ressortissant de nationalité française, dont elle attend un enfant et avec lequel elle projette de se marier lorsque son divorce sera prononcé ainsi que de sa bonne intégration, notamment par le travail, dès lors qu'elle a exercé la profession de vendeuse. Toutefois, il ressort des pièces du dossier qu'à la date à laquelle la décision litigieuse a été prise, Mme B... ne justifiait d'une vie commune avec son concubin que depuis six mois environ sans établir avoir noué une relation affective avec lui dès l'année 2017 au cours de laquelle ils se sont rencontrés. En outre, elle n'établit pas être dépourvue d'attaches familiales dans son pays d'origine où elle a vécu jusqu'à l'âge de vingt-neuf ans. Enfin, elle n'établit pas, en tout état de cause, qu'elle a été victime de violences de la part de son époux ayant justifié la rupture de leur communauté de vie. Dans ces conditions, eu égard à la durée et aux conditions de séjour en France de Mme B..., celle-ci n'est pas fondée à soutenir que la décision par laquelle le préfet de la Moselle a refusé de lui délivrer un titre de séjour a porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

9. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 9 avril 2019 du préfet de la Moselle portant refus de séjour. Ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte ainsi que celles qu'elle présente au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent, en conséquence, être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de Mme B... en tant qu'elles sont dirigées contre les décisions du préfet de la Moselle du 9 avril 2019 portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme B... est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Moselle.

2

N° 19NC02981


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 19NC02981
Date de la décision : 01/06/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. - Séjour des étrangers. - Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme GRENIER
Rapporteur ?: Mme Sandrine ANTONIAZZI
Rapporteur public ?: M. MICHEL
Avocat(s) : BOURCHENIN

Origine de la décision
Date de l'import : 10/07/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2021-06-01;19nc02981 ?
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