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27/05/2021 | FRANCE | N°20NC03223

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre, 27 mai 2021, 20NC03223


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... C... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 6 mai 2020 par lequel le préfet du Haut-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays à destination duquel elle pourra être reconduite d'office à l'expiration de ce délai et a fixé des mesures de surveillance dans la préparation du départ.

Par un jugement n 2003358 du 24 septembre 2020, le tribunal administratif

de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregi...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... C... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 6 mai 2020 par lequel le préfet du Haut-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays à destination duquel elle pourra être reconduite d'office à l'expiration de ce délai et a fixé des mesures de surveillance dans la préparation du départ.

Par un jugement n 2003358 du 24 septembre 2020, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 4 novembre 2020, Mme C..., représentée par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 24 septembre 2020 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet du Bas-Rhin du 6 mai 2020 ;

3°) d'enjoindre au préfet du Bas-Rhin de lui délivrer un titre de séjour ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation administrative ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros à verser à Me A... sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Mme C... soutient que :

Sur la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour :

- le préfet était tenu de consulter la commission du titre de séjour dès lors qu'elle réside en France depuis plus de dix ans ;

- le préfet a méconnu les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le préfet a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur sa situation personnelle et familiale et violé l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le préfet a commis une erreur de droit.

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- l'illégalité de la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour emporte l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français.

Sur la décision fixant le pays de renvoi :

- cette décision porte une atteinte à son droit au respect de sa vie prive et familiale protégé par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

Sur la décision imposant des mesures de contrôle :

- elle est entachée d'une erreur de droit.

Par un mémoire en défense, enregistré le 26 novembre 2020, le préfet du Haut-Rhin conclut au rejet de la requête de Mme C....

Il soutient que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.

Mme C... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision en date du 15 décembre 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'ordonnance n° 2020-1402 et le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de Mme E... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B... C... née D..., née le 1er mars 1948, de nationalité serbe, est entrée en France selon ses dires le 27 avril 2009 et a sollicité l'asile qui lui a été refusé par l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFPRA) le 11 janvier 2010 puis par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) le 15 février 2011. Mme C... a fait l'objet d'une première obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, édictée par le préfet de la Marne le 16 mars 2011, décision confirmée par le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne le 1er juillet 2011. L'intéressée a ensuite demandé le réexamen de sa demande d'asile, refusé à nouveau par l'OFPRA le 13 mai 2011 et par la CNDA le 13 avril 2012. Elle a sollicité, le 8 janvier 2020, son admission au séjour sur le fondement des articles L. 313-11 7° et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, eu égard à sa vie privée et familiale. Par un arrêté du 6 mai 2020, le préfet du Haut-Rhin lui a refusé le séjour, et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant le pays de destination. Mme C... relève appel du jugement du 24 septembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté du 6 mai 2020.

Sur la décision portant refus de titre de séjour :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2. / L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans. (...) ". Aux termes de l'article L. 313-1 du même code : " Dans chaque département est instituée une commission du titre de séjour (...) ".

3. Comme l'avaient déjà retenu les premiers juges, la requérante ne justifie pas une présence habituelle et continue de plus de dix ans en France en produisant notamment une attestation d'hébergement du 29 mai 2020 de son petit-fils, deux certificats médicaux des 28 et 30 mai 2020, plusieurs ordonnances délivrées par des médecins généralistes en 2013, 2014, 2015, 2016, 2017, 2018, 2019 et 2020, des documents relatifs au renouvellement de ses droits l'aide médicale de l'Etat en février 2013 et au dépôt de sa demande d'admission à ce titre en 2015, des convocations à des rendez-vous médicaux le 5 novembre 2009 et le 22 octobre 2018 ainsi que sa déclaration fiscale annuelle au titre de l'année 2010. Dans ces conditions, le préfet du Haut-Rhin n'était pas tenu de saisir la commission du titre de séjour. Dès lors, le moyen tiré du vice de procédure doit être écarté.

4. En deuxième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'état de santé de Mme C... relève des considérations humanitaires ou des motifs exceptionnels d'admission au séjour au sens des dispositions précitées de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de cet article par préfet du Haut-Rhin doit être écarté.

5. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. /. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

6. Mme C... se prévaut de sa présence en France depuis plus de dix ans, mais pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 3 du présent arrêt, l'intéressée n'établit pas, par les pièces qu'elle produit, qu'elle réside effectivement en France depuis 2009. Si elle se prévaut également de la présence en France de deux de ses enfants en situation régulière, il ressort toutefois des pièces du dossier que, comme l'a relevé le tribunal administratif de Strasbourg, ses deux autres enfants sont en situation irrégulière sur le territoire français. Par ailleurs, si elle soutient que son état de santé aurait nécessité que le préfet vérifie la disponibilité d'un traitement adapté en Serbie, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'elle aurait sollicité un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. En tout état de cause, elle n'établit pas que le traitement nécessité par son état de santé serait indisponible en Serbie. Enfin, la requérante ne produit aucun document justifiant d'une particulière intégration en France. Dans ces conditions, l'intéressée n'est pas fondée à soutenir qu'en prenant la décision en litige, le préfet du Haut-Rhin a porté une atteinte disproportionnée à son droit à mener une vie privée et familiale normale au regard des objectifs poursuivis et a méconnu les dispositions de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes raisons, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation ne peut qu'être écarté.

7. En quatrième lieu, la requérante soutient qu'en indiquant, dans la décision contestée, qu'elle ne justifie d'aucune insertion dans la société française " compte tenu de la durée de son séjour " et qu'elle ne maîtrise pas la langue française, le préfet du Haut-Rhin a commis une erreur de droit. Toutefois, cette mention de la durée du séjour en France de l'intéressée dans l'arrêté contesté ne saurait être regardée comme valant reconnaissance de sa présence continue pendant une durée de dix ans sur le territoire français et n'est pas ainsi contradictoire avec les autres motifs de la décision attaquée. Par ailleurs, le fait que le préfet ait indiqué, dans la décision attaquée, qu'elle ne parlait ni ne comprenait la langue française n'est qu'un des éléments retenus pour démontrer l'absence d'intégration de la requérante dans la société française. Par suite, ce moyen doit être écarté.

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

8. Il résulte de ce qui précède que la requérante n'est pas fondée à exciper de l'illégalité du refus de titre de séjour à l'appui de sa contestation, par voie d'exception, de l'obligation de quitter le territoire français sans délai.

Sur la décision fixant le pays de destination :

9. Pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 6 du présent jugement, les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et d'une erreur manifeste d'appréciation ne peuvent qu'être écartés.

Sur la décision de remise du passeport original et de présentation à la direction départementale de la police aux frontières de Saint-Louis :

10. Aux termes de l'article L. 513-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger auquel un délai de départ volontaire a été accordé en application du II de l'article L. 511-1 peut, dès la notification de l'obligation de quitter le territoire français, être astreint à se présenter à l'autorité administrative ou aux services de police ou aux unités de gendarmerie pour y indiquer ses diligences dans la préparation de son départ. ". Aux termes de l'article R. 513-3 du même code : " L'autorité administrative désigne le service auprès duquel l'étranger doit effectuer les présentations prescrites et fixe leur fréquence qui ne peut excéder trois présentations par semaine. ". Aux termes de l'article R. 513-4 du même code : " L'étranger qui bénéficie d'un délai de départ volontaire en application du II de l'article L. 511-1 ou du sixième alinéa de l'article L. 511-3-1 peut être tenu de remettre à l'autorité administrative qui lui a accordé ce délai l'original de son passeport ou de tout autre document d'identité ou de voyage en sa possession en échange d'un récépissé valant justification d'identité sur lequel est portée la mention du délai accordé pour son départ ".

11. En application des dispositions précitées, le préfet du Haut-Rhin a pu, sans commettre d'erreur de droit, imposer à Mme C... de remettre son passeport aux autorités de police en échange d'un récépissé valant justificatif d'identité et à se rendre à la brigade mobile de recherche de Mulhouse une fois par semaine pour justifier des diligences accomplies dans la préparation de son départ. Par suite, le moyen tiré d'une erreur de droit doit être écarté.

12. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... C... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Haut-Rhin.

N° 20NC03223 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 20NC03223
Date de la décision : 27/05/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. MARTINEZ
Rapporteur ?: Mme Laurence STENGER
Rapporteur public ?: Mme HAUDIER
Avocat(s) : MEHL

Origine de la décision
Date de l'import : 08/06/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2021-05-27;20nc03223 ?
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