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15/04/2021 | FRANCE | N°19NC01187-19NC01210

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre, 15 avril 2021, 19NC01187-19NC01210


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme B... G..., co-gérants de la SCI Veslecome, ont demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne, d'une part, d'annuler l'arrêté du 17 janvier 2018 par lequel le maire de Sept-Saulx a délivré à M. C... D... un permis de construire un pigeonnier de 21 m² sur la parcelle cadastrée AB 29 et, d'autre part, de rejeter les conclusions indemnitaires de M. D....

Par un jugement n° 1800771 du 28 mars 2019, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne n'a pas admis l'intervention de

la SCI Veslecome, a annulé l'arrêté du maire de Sept-Saulx du 17 janvier 2018 et...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme B... G..., co-gérants de la SCI Veslecome, ont demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne, d'une part, d'annuler l'arrêté du 17 janvier 2018 par lequel le maire de Sept-Saulx a délivré à M. C... D... un permis de construire un pigeonnier de 21 m² sur la parcelle cadastrée AB 29 et, d'autre part, de rejeter les conclusions indemnitaires de M. D....

Par un jugement n° 1800771 du 28 mars 2019, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne n'a pas admis l'intervention de la SCI Veslecome, a annulé l'arrêté du maire de Sept-Saulx du 17 janvier 2018 et a rejeté les conclusions présentées par M. D... et par la commune de Sept-Saulx.

Procédure devant la cour :

I- Par une requête enregistrée sous le n° 19NC01187 le 16 avril 2019, complétée par des mémoires enregistrés les 5 et 30 juillet 2019, et un mémoire récapitulatif, présenté le 1er décembre 2020 à la demande du président de la 1ère chambre sur le fondement de l'article R. 611-8-1 du code de justice administrative, M. C... D..., représenté par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 28 mars 2019 ;

2°) de mettre à la charge de M. et Mme B... G... une somme de 5 000 euros à lui verser à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et injustifiée ;

3°) de mettre à la charge de M. et Mme G... une somme de 5 000 euros à lui verser sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'intervention volontaire de la SCI Veslecome est irrecevable comme tardive à hauteur d'appel ; en outre, n'ayant pas respecté les règles de recevabilité en première instance, la SCI n'est pas recevable à intervenir devant la cour ;

- la demande de première instance des époux G... était irrecevable, à la fois pour tardiveté et pour défaut d'intérêt pour agir ;

- l'article 153.2 du règlement sanitaire départemental (RSD) n'a pas été méconnu, car il ne s'applique pas en l'espèce, dès lors que le pigeonnier projeté comporte moins de 50 pigeons et que la colombophilie s'apparente à un élevage familial, et non commercial ; seul l'article 26 du RSD est applicable, et il est respecté ;

- il n'est pas établi que le projet se situe en zone ND non constructible, et à supposer même que ce soit le cas, l'extension du pigeonnier pouvait être autorisée, en application de l'article L. 151-12 du Code de l'urbanisme ; en outre, c'est le Règlement national d'urbanisme qui s'applique, et non le POS de la commune ;

- son projet n'est pas de nature à créer des nuisances et les époux G... se sont installés à la campagne, près d'un colombier déjà existant ;

- la requête des époux G... est abusive.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 5 juin, 13 juin, 12 juillet et 26 juillet 2019, et un mémoire récapitulatif, présenté le 18 décembre 2020 à la demande du président de la 1ère chambre sur le fondement de l'article R. 611-8-1 du code de justice administrative, la commune de Sept-Saulx, représentée par la SCP Choffrut-Brener-Boia, conclut à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 28 mars 2019 et à ce qu'une somme de 1 800 euros soit mise à la charge de M. et de M. G... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- la demande de première instance des époux G... était irrecevable, tant pour tardivité que pour défaut d'intérêt à agir ;

- l'intervention volontaire de la SCI Veslecome est irrecevable ;

- les dispositions de l'article 153-2 du RSD s'appliquent uniquement aux bâtiments d'élevage et sont donc inapplicables en l'espèce ; à supposer même que l'article 153-2 serait applicable, le projet aurait pu être autorisé en application de l'article 153-5 de ce règlement ; et si l'illégalité retenue par le tribunal est confirmée, alors le tribunal administratif aurait dû constater que le permis de construire était régularisable, dès lors qu'il suffisait d'accoler les deux bâtiments, au besoin en créant une ouverture pour constituer un bâtiment unique ;

- seul le Règlement National d'Urbanisme était applicable, car le POS était caduc et ne pouvait pas s'appliquer.

Par un mémoire en défense, enregistré le 23 juillet 2019, et un mémoire récapitulatif, présenté le 26 décembre 2020 à la demande du président de la 1ère chambre sur le fondement de l'article R. 611-8-1 du code de justice administrative, M. et Mme B... G... et la SCI Veslecome, représentés par Me F..., concluent au rejet de la requête, au rejet des conclusions de la commune de Sept-Saulx tendant à l'annulation du jugement du 28 mars 2019, et à ce qu'une somme de 1 800 euros chacun soit mise à la charge, tant de M. D... que de la commune de Sept-Saulx, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils font valoir que :

- la demande de première instance n'était pas tardive ;

- ils ont un intérêt à agir ;

- l'intervention de la SCI Veslecome est recevable ;

- les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

Par une intervention enregistrée le 24 juillet 2019, la SCI Veslecome, représentée par Me F..., déclare s'associer aux conclusions aux fins d'annulation de M. et Mme B... G... et demande à la cour de mettre à la charge de M. D... et de la commune de Sept-Saulx une somme de 1 800 euros chacun à lui verser sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par ordonnance du 3 septembre 2020, la clôture d'instruction a été fixée au 17 septembre 2020.

II- Par une requête enregistrée sous le n° 19NC01210 le 18 avril 2019, complétée par des mémoires enregistrés les 3 juillet et 30 juillet 2019, et un mémoire récapitulatif, présenté le 1er décembre 2020 à la demande du président de la 1ère chambre sur le fondement de l'article R. 611-8-1 du code de justice administrative, M. C... D..., représenté par Me A..., demande à la cour de prononcer, sur le fondement des dispositions des articles R. 811-15 et R. 811-17 du code de justice administrative, le sursis à exécution du jugement du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 28 mars 2019.

Il présente les mêmes moyens que dans la requête n° 19NC01187 et soutient en outre que ses moyens sont sérieux et que les conditions par l'article R. 811-17 du code de justice administrative sont remplies.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 5 juin, 13 juin, 12 juillet et 26 juillet 2019, et un mémoire récapitulatif, présenté le 18 décembre 2020 à la demande du président de la 1ère chambre sur le fondement de l'article R. 611-8-1 du code de justice administrative, la commune de Sept-Saulx, représentée par la SCP Choffrut-Brener-Boia, conclut au sursis à exécution du jugement du 28 mars 2019 et à ce qu'une somme de 1 800 euros soit mise à la charge in solidum de M. et Mme B... G... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir les mêmes moyens que ceux qu'elle a présentés dans l'instance n° 19NC01187 et soutient, en outre, que les conditions posées par les articles R. 811-15 et R. 811-17 du code de justice administrative sont remplies.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 21 juin et 24 juillet 2019, et un mémoire récapitulatif, présenté le 26 décembre 2020 à la demande du président de la 1ère chambre sur le fondement de l'article R. 611-8-1 du code de justice administrative, M. et Mme B... G... et la SCI Veslecome, représentés par Me F..., concluent au rejet de la requête et à la condamnation, tant de M. D... que de la commune de Sept-Saulx in solidum, à verser aux époux G... la somme de 3 000 euros, et à la SCI Veslecome la somme de 1 800 euros chacun, sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code du justice administrative.

Ils font valoir les mêmes moyens que ceux qu'ils ont présentés dans l'instance n° 19NC01187 et soutiennent, en outre, que les conditions posées par les articles R. 811-15 et R. 811-17 du code de justice administrative ne sont pas remplies.

Par une intervention enregistrée le 24 juillet 2019, la SCI Veslecome, représentée par Me F... déclare s'associer aux conclusions de M. et Mme B... G... et demande à la cour de mettre à la charge de M. D... et de la commune de Sept-Saulx une somme de 1 800 euros chacun à lui verser sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par ordonnance du 3 septembre 2020, la clôture d'instruction a été fixée au 17 septembre 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le règlement sanitaire départemental de la Marne ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Favret, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Peton, rapporteur public,

- et les observations de Me A..., pour M. D..., ainsi que celles de Me F..., pour M. et Mme B... G... et la SCI Veslecome.

Une note en délibéré a été présentée pour la commune de Sept-Saulx le 25 mars 2021.

Considérant ce qui suit :

1. Le maire de la commune de Sept-Saulx (Marne) a, par un arrêté du 17 janvier 2018, accordé à M. C... D... un permis de construire un pigeonnier de 21 m² sur la parcelle cadastrée AB 29 lui appartenant. M. et Mme G..., co-gérants de la SCI Veslecome, propriétaire de l'immeuble situé à proximité immédiate du terrain d'assiette du projet, ont demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler cet arrêté. Par un jugement du 28 mars 2019, le tribunal a fait droit à leur demande, au motif que le permis attaqué avait été délivré en méconnaissance de l'article 153.2 du règlement sanitaire départemental (RSD) de la Marne, lequel interdit l'implantation, à moins de 35 mètres des berges des cours d'eau, des bâtiments renfermant des animaux. Par deux requêtes qu'il y a lieu de joindre, M. D..., d'une part, relève appel du jugement du 28 mars 2019 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a annulé l'arrêté du maire de Sept-Saulx du 17 janvier 2018 et, d'autre part, demande qu'il soit préalablement sursis à l'exécution de ce jugement.

Sur l'intervention de la SCI Veslecome :

2. Aux termes de l'article R. 632-1 du code de justice administrative, dans sa rédaction alors applicable : " L'intervention est formée par mémoire distinct. (...) ".

3. D'une part, il est constant que la SCI Veslecome a présenté une intervention volontaire au soutien des conclusions aux fins d'annulation de M. et Mme B... G..., dans un mémoire distinct, enregistré au greffe de la cour le 24 juillet 2019. Une intervention étant ouverte sans condition de délai, en première instance comme en appel, la circonstance que l'intervention de la SCI Veslecome ait été présentée postérieurement à l'expiration du délai d'appel est sans incidence sur sa recevabilité.

4. D'autre part, il ressort des pièces du dossier que la SCI Veslecome est propriétaire de la construction voisine de la parcelle d'assiette du projet de M. D..., et que cette construction constitue l'habitation principale des époux G..., co-gérants de la SCI, et accueille en même temps les chambres d'hôtes qu'ils y exploitent. Dès lors, la SCI Veslecome justifie, eu égard à la nature et à l'objet du litige, d'un intérêt suffisant pour contester la légalité de l'arrêté du 17 janvier 2018 par lequel le maire de Sept-Saulx a délivré à M. C... D... un permis de construire un pigeonnier de 21 m² sur la parcelle cadastrée AB 29.

5. Par suite, et sans qu'y fasse obstacle la circonstance qu'elle était irrecevable en première instance, l'intervention de la SCI Veslecome est recevable en appel.

Sur la recevabilité de la demande de première instance :

En ce qui concerne la fin de non-recevoir tirée de la tardiveté de la demande de première instance :

6. Aux termes de l'article R. 421-1 du code de justice administrative, dans sa rédaction alors applicable : " La juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée. (...) " Aux termes de l'article R. 421-5 du même code : " Les délais de recours contre une décision administrative ne sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision ".

7. Aux termes de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme, dans sa version applicable au litige : " En cas de déféré du préfet ou de recours contentieux à l'encontre (...) d'un permis de construire (...) l'auteur du recours est tenu, à peine d'irrecevabilité, de notifier son recours à l'auteur de la décision et au titulaire de l'autorisation. Cette notification doit également être effectuée dans les mêmes conditions en cas de demande tendant à l'annulation ou à la réformation d'une décision juridictionnelle concernant un certificat d'urbanisme, une décision de non-opposition à une déclaration préalable ou un permis de construire, d'aménager ou de démolir. L'auteur d'un recours administratif est également tenu de le notifier à peine d'irrecevabilité du recours contentieux qu'il pourrait intenter ultérieurement en cas de rejet du recours administratif. / La notification prévue au précédent alinéa doit intervenir par lettre recommandée avec accusé de réception, dans un délai de quinze jours francs à compter du dépôt du déféré ou du recours. (...) " Aux termes de l'article R. 600-2 du même code : " Le délai de recours contentieux à l'encontre (...) d'un permis de construire, d'aménager ou de démolir court à l'égard des tiers à compter du premier jour d'une période continue de deux mois d'affichage sur le terrain des pièces mentionnées à l'article R. 424-15. ".

8. Il résulte de ces dispositions que s'agissant d'un recours administratif, le défaut d'accomplissement dans le délai requis des formalités de notification prévues par les dispositions de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme rend en principe irrecevable le recours contentieux intenté ultérieurement. Toutefois, l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme n'a ni pour objet ni pour effet de frapper d'irrecevabilité un recours contentieux qui, même s'il a été précédé d'un recours administratif non assorti des formalités de notification, a été introduit dans le délai de recours contentieux de droit commun de deux mois.

9. D'une part, si M. D... et la commune de Sept-Saulx soutiennent que le permis de construire du 17 janvier 2018 a été affiché sur le terrain dès la délivrance de ce permis et jusqu'à la mi-avril, il ne ressort pas des pièces du dossier, notamment du procès-verbal de constat d'huissier en date des 31 mai et 2 juin 2018, effectué postérieurement à l'introduction du recours, et des témoignages produits par le requérant à hauteur d'appel, tous établis en avril 2019, soit un an après le terme de la période d'affichage alléguée, que le panneau était présent sur le terrain pendant une période continue de deux mois, et à un emplacement visible depuis la voie publique.

10. D'autre part, il ressort des pièces du dossier que les époux G... ont présenté un recours gracieux contre le permis de construire litigieux le 5 mars 2018, avant de saisir le tribunal administratif le 10 avril suivant. Il s'ensuit qu'ils doivent être regardés comme ayant eu connaissance de l'existence du permis de construire litigieux à compter du 5 mars 2018, et non, comme le soutient la commune de Sept-Saulx, dès le 2 février 2018, date à laquelle ils avaient adressé un courrier au maire à propos d'un permis accordé sur le terrain appartenant à Mme E..., et non à propos du permis accordé à M. D.... La requête des époux G... ayant été introduite dans le délai de deux mois suivant la formation de leur recours gracieux, la circonstance tirée de ce qu'ils n'ont pas notifié leur recours gracieux au pétitionnaire est sans incidence sur sa recevabilité.

11. Par suite, la fin de non-recevoir tirée de la tardiveté de la demande de première instance doit être écartée.

En ce qui concerne la fin de non-recevoir tirée du défaut d'intérêt à agir des époux G... :

12. Aux termes de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction alors applicable : " Une personne autre que l'Etat, les collectivités territoriales ou leurs groupements ou une association n'est recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager que si la construction, l'aménagement ou les travaux sont de nature à affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance du bien qu'elle détient ou occupe régulièrement ou pour lequel elle bénéficie d'une promesse de vente, de bail, ou d'un contrat préliminaire mentionné à l'article L. 261-15 du code de la construction et de l'habitation. ".

13. Eu égard à sa situation particulière, le voisin immédiat justifie, en principe, d'un intérêt à agir lorsqu'il fait état devant le juge, qui statue au vu de l'ensemble des pièces du dossier, d'éléments relatifs à la nature, à l'importance ou à la localisation du projet de construction.

14. Il est constant que les époux G... sont co-gérants de la SCI Veslecome, laquelle détient l'immeuble situé à proximité immédiate du terrain d'assiette du projet, dont il n'est séparé que par un cours d'eau. En outre, il ressort des pièces du dossier qu'ils ont affecté cet immeuble à leur habitation principale et à une activité de chambres d'hôtes. Compte tenu des nuisances que l'exploitation d'un pigeonnier est susceptible d'engendrer pour ce type d'activité, ils ont un intérêt à contester la légalité du permis de construire litigieux, qui est susceptible d'affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation et de jouissance de leur bien, et ce nonobstant la circonstance que le pigeonnier projeté doit être implanté à une centaine de mètres de leur habitation et de leurs chambres d'hôtes.

15. Par suite, la fin de non-recevoir tirée du défaut d'intérêt pour agir des époux G... doit être écartée.

Sur le motif d'annulation retenu par le tribunal :

16. Selon l'article 26 du règlement sanitaire départemental (RSD) de la Marne : " Sans préjudice de l'application de la réglementation en vigueur, il est interdit d'élever et d'entretenir dans l'intérieur des habitations, leurs dépendances et leurs abords, et de laisser stationner dans les locaux communs des animaux de toutes espèces dont le nombre ou le comportement ou l'état de santé pourraient porter atteinte à la sécurité ou à la salubrité des habitations ou de leur voisinage. / (...) / Sans préjudice des dispositions réglementaires les concernant, les installations renfermant des animaux vivants, notamment les (...) pigeonniers (...) et autres élevages d'animaux, doivent être maintenus constamment en bon état de propreté et d'entretien. Ils sont désinfectés et désinsectisés aussi souvent qu'il est nécessaire ; les fumiers doivent être évacués en tant que de besoin pour ne pas incommoder le voisinage. " En application de l'article 153.1 du même règlement : " Présentation du dossier / Toute création, extension ou ré-affectation d'un bâtiment d'élevage (...) comprenant moins de cinquante animaux de plus de trente jours et des bâtiments consacrés à un élevage de type familial doit faire l'objet, de la part du maître d'ouvrage, de l'établissement d'un dossier de déclaration préalable, comportant les informations suivantes (...) ". L'article 153.2 de ce même règlement dispose : " Protection des eaux et zones de baignade / Les bâtiments renfermant des animaux à demeure ou en transit ne doivent pas être à l'origine d'une pollution des ressources en eau. / Leur implantation devra satisfaire aux prescriptions générales ou particulières relatives aux périmètres de protection des sources, puits, captages ou prises d'eau. / Elle est, en outre, interdite (...) à moins de 35 m (...) des berges des cours d'eau (...) ". Enfin, aux termes de l'article 153.5 du même règlement : " Dispositions applicables aux cas d'extension ou de ré-affectation de bâtiments d'élevage existants / Dans le cas d'une extension mesurée d'un bâtiment d'élevage existant ou d'une ré-affectation d'un bâtiment d'élevage existant au même type d'élevage ou non, il peut être admis des distances d'éloignement inférieures aux prescriptions générales des articles 153.2 et 153.4 sous réserve du respect des règles de construction, d'aménagement et d'exploitation prévues à l'article 154. (...) ".

17. Ainsi, si l'article 26 du RSD, applicable aux locaux d'habitation ainsi qu'à leurs dépendances et à leurs abords, n'interdit pas les installations renfermant des animaux vivants, tels que des pigeonniers, leur exploitation doit se faire " sans préjudice des dispositions réglementaires les concernant ". Il s'ensuit que les dispositions de l'article 153 du même règlement sont applicables à ce type d'installations, y compris lorsqu'elles sont exploitées dans un cadre familial. En outre, les dispositions du 2 de l'article 153 du RSD, qui portent sur la protection des eaux, interdisent l'implantation à moins de 35 mètres des berges des cours d'eau des bâtiments renfermant des animaux et ne prévoient aucune dérogation pour les élevages de volailles comprenant moins de cinquante animaux de plus de trente jours et les élevages de type familial mentionnés au 1 du même article, qui porte sur les conditions de présentation du dossier.

18. Si la commune de Sept-Saulx affirme que l'article 153.5 du RSD autorise des distances d'éloignement inférieures à celles mentionnées à l'article 153.2 du même règlement, en cas d'extension mesurée d'un bâtiment d'élevage existant, il ressort des pièces du dossier que le projet contesté consiste en la construction d'un nouveau bâtiment séparé d'une distance de deux mètres du pigeonnier déjà implanté sur le terrain de M. D.... Dès lors, la construction projetée ne saurait être regardée comme une extension au sens de l'article 153.5 du RSD, lequel est ainsi inapplicable en l'espèce. En conséquence, il n'y avait pas lieu, pour le tribunal administratif, de faire application de l'article L. 600-5 ou de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, dès lors que contrairement à ce que soutient la commune de Sept-Saulx, les dispositions de l'article 153-5 du RSD ne trouvent pas à s'appliquer au projet contesté.

19. Il est constant que la construction autorisée par le permis litigieux est implantée à moins de 35 mètres des berges du ruisseau du Ventillon. Par suite, M. D... n'est pas fondé à soutenir que son projet de pigeonnier ne méconnaît pas les dispositions de l'article 153.2 du règlement sanitaire départemental.

20. Il résulte de tout ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a annulé l'arrêté du maire de Sept-Saulx du 17 janvier 2018 et a rejeté ses conclusions et celles de la commune de Sept-Saulx.

Sur les conclusions aux fins de condamnation des époux G... pour recours abusif :

21. En raison de la nature particulière du recours pour excès de pouvoir, des conclusions reconventionnelles tendant à ce que le demandeur soit condamné à payer à une personne mise en cause des dommages-intérêts pour procédure abusive ne peuvent être utilement présentées dans une instance en annulation pour excès de pouvoir. Par suite, les conclusions de M. D... aux fins de condamnation des époux G... à lui verser une somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et injustifiée ne peuvent qu'être rejetées.

Sur les conclusions aux fins de sursis à exécution du jugement :

22. Eu égard à l'annulation prononcée par le présent arrêt du jugement du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 28 mars 2019, les conclusions tendant à ce qu'il soit sursis à son exécution sont devenues sans objet. Il n'y a donc pas lieu d'y statuer.

Sur les frais liés à l'instance :

23. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens, ou à défaut la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ".

24. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de M. et Mme B... G..., qui ne sont pas, dans la présente instance, les parties perdantes, le versement des sommes que M. D... et la commune de Sept-Saulx demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens.

25. Par ailleurs, il a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. D... et de la commune de Sept-Saulx une somme de 1 000 euros chacun à verser à M. et Mme B... G..., sur le fondement des mêmes dispositions.

26. La SCI Veslecome n'étant pas partie à l'instance, sa demande présentée sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, doit être rejetée.

DÉCIDE :

Article 1er : L'intervention de la SCI Veslecome est admise.

Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête n° 19NC01210.

Article 3 : La requête n° 19NC01187 de M. C... D... est rejetée.

Article 4 : M. D... et la commune de Sept-Saulx verseront chacun à M. et Mme B... G... une somme de 1 000 euros, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Les conclusions de la commune de Sept-Saulx et de la SCI Veslecome tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... D..., à la commune de Sept-Saulx, à M. et Mme B... G... et à la SCI Veslecome.

Copie en sera adressée au préfet de la Marne.

2

N° 19NC01187-19NC01210


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 19NC01187-19NC01210
Date de la décision : 15/04/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03 Urbanisme et aménagement du territoire. Permis de construire.


Composition du Tribunal
Président : Mme GROSSRIEDER
Rapporteur ?: M. Jean-Marc FAVRET
Rapporteur public ?: Mme PETON
Avocat(s) : SCP CHOFFRUT-BRENER-BOIA

Origine de la décision
Date de l'import : 20/04/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2021-04-15;19nc01187.19nc01210 ?
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