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16/02/2021 | FRANCE | N°19NC01207

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre, 16 février 2021, 19NC01207


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... D... a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne de condamner la commune d'Auxon à lui verser la somme de 307 500 euros en réparation des préjudices causés à ses terres agricoles du fait d'un glissement de terrain provoqué par la construction en surplomb d'une station d'épuration communale.

Par un jugement n° 1801042 du 21 février 2019, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un m

émoire, enregistrés les 18 avril et 12 septembre 2019, M. D..., représenté par Me Honnet, deman...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... D... a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne de condamner la commune d'Auxon à lui verser la somme de 307 500 euros en réparation des préjudices causés à ses terres agricoles du fait d'un glissement de terrain provoqué par la construction en surplomb d'une station d'épuration communale.

Par un jugement n° 1801042 du 21 février 2019, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 18 avril et 12 septembre 2019, M. D..., représenté par Me Honnet, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 21 février 2019 ;

2°) de condamner la commune d'Auxon à lui verser la somme de 307 500 euros en réparation de préjudices causés à ses terres agricoles du fait d'un glissement de terrain causé par la construction en amont d'une station d'épuration communale ;

3°) d'ordonner une nouvelle expertise.

Il soutient que :

- le lien direct de causalité entre les travaux réalisés par la commune, consistant en la création d'une tranchée de raccordement de la canalisation du réseau d'eaux usées de la station d'épuration communale et les glissements de terrain constatés sur les parcelles dont il est propriétaire est établi ;

- ces glissements de terrains ont eu lieu en décembre 2013 et ont été signalés à la commune le 20 décembre suivant ;

- dès lors que les désordres affectent la partie des terrains classée en zone urbaine, il est fondé à réclamer l'indemnisation du préjudice subi ;

- les contradictions de l'expertise et l'insuffisance des moyens d'investigations donnés initialement à l'expert justifient une nouvelle expertise avant dire-droit sur les questions techniques en suspens.

Par un mémoire en défense, enregistré le 4 juillet 2019, la commune d'Auxon, représentée par Me A..., conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de M. D... la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la cause des désordres affectant la propriété de M. D... n'est pas la réalisation des travaux qu'elle a effectués ;

- la commune figure sur la liste des communes du département de l'Aube exposées au risque naturel de mouvements de terrain ;

- aucune faute n'a été commise dans le projet d'installation de la station d'épuration, qui a suivi les prescriptions d'un hydrogéologue ;

- l'expert Eurexo a retenu une origine naturelle en raison de la nature du sol et du degré de pente de la parcelle de M. D..., qui présente dans sa partie haute un fort dénivelé ;

- les travaux préconisés par l'expert ne peuvent pas remédier aux glissements de terrains ;

- la demande d'indemnisation n'est pas justifiée dès lors que l'expert a conclu que la valeur vénale du terrain n'était pas modifiée ;

- un prix de 5 euros le mètre carré, applicable à la seule surface atteinte par les désordres qui ne concerne pas l'ensemble de la parcelle, correspondrait plus à la réalité géographique et aux conditions du marché.

Vu :

- l'ordonnance du 5 avril 2016 par laquelle le président du tribunal a liquidé et taxé les frais et honoraires d'expertise à la somme de 4 973,04 euros et décidé qu'ils seront mis à la charge de M. D....

- les autres pièces du dossier.

Vu le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Antoniazzi, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Michel, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La commune d'Auxon (10) a engagé sous sa maîtrise d'ouvrage, à partir de l'année 2012, la construction d'une station d'épuration sur son territoire, à proximité immédiate et en surplomb de terrains situés route de Vert, dont M. E... D... est propriétaire. Le 20 décembre 2013, M. D... a appelé l'attention de la commune d'Auxon sur les glissements de terrains observés sur ses terres en contrebas de la station d'épuration communale, qu'il impute aux travaux de réalisation de la station d'épuration communale. Après avoir relancé sans succès la commune le 11 février 2014, il a sollicité auprès du président tribunal administratif de Châlons-en-Champagne une expertise juridictionnelle. Un rapport a été déposé par l'expert en février 2016. M. D... a adressé un courrier à la commune d'Auxon en vue d'obtenir l'indemnisation de son préjudice, dont celle-ci a accusé réception le 14 février 2018. Le silence gardé sur sa demande indemnitaire par la commune d'Auxon ayant fait naître une décision implicite de rejet, M. D... a saisi le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'une demande tendant à la condamnation de la commune d'Auxon à lui verser la somme de 307 500 euros en réparation de la perte de valeur vénale de sa propriété. M. D... relève appel du jugement du 21 février 2019 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. Le maître de l'ouvrage est responsable, même en l'absence de faute, des dommages que les ouvrages publics dont il a la garde peuvent causer aux tiers tant en raison de leur existence que de leur fonctionnement. Il ne peut dégager sa responsabilité que s'il établit que ces dommages résultent de la faute de la victime ou d'un cas de force majeure. Ces tiers ne sont pas tenus de démontrer le caractère grave et spécial du préjudice qu'ils subissent lorsque le dommage présente un caractère accidentel. Il leur appartient toutefois d'apporter la preuve de la réalité des préjudices allégués et du lien de causalité entre la présence ou le fonctionnement de l'ouvrage et lesdits préjudices.

3. En premier lieu, il résulte du rapport d'expertise qu'aucun glissement de terrain n'a été constaté sur la partie basse constructible des terrains appartenant à M. D..., située le long de la route. En outre, si ces terrains présentent une forte humidité, ainsi que le signalent les documents d'urbanisme joints au dossier, il ne résulte pas de l'instruction que ces résurgences d'eau trouvent leur origine dans la réalisation de la tranchée destinée à accueillir la canalisation de refoulement des eaux usées de la station d'épuration.

4. En deuxième lieu, il résulte du rapport d'expertise qu'aucun glissement de terrain n'a été constaté sur la partie médiane constructible des terrains appartenant au requérant. En outre, s'il a été constaté une humidité accrue sur les pentes avec de nombreuses mouillères correspondant à la résurgence d'eaux souterraines, il résulte du rapport d'expertise que cette configuration résulte d'un aléa naturel géologique et que la réalisation d'une tranchée drainante resterait sans effet en raison du risque naturel géologique de glissement de terrain affectant cette partie du terrain. Ainsi, le lien entre les travaux de la commune et les désordres affectant la partie médiane de la parcelle de M. D... n'est pas établi.

5. En troisième lieu, il ne résulte pas de l'instruction que les taillis et bois situés à l'ouest ont été affectés par des glissements de terrain.

6. En dernier lieu, il résulte du rapport d'expertise que seule la partie haute des terrains de M. D... a été affectée par des glissements de terrain, qui trouvent leur origine dans les travaux réalisés par la commune. Cependant, il ne résulte pas de l'instruction que la valeur vénale de cette partie de terrain, de nature agricole, a diminué du fait des glissements de terrain en cause. Par suite, la réalité du préjudice allégué par M. D... à raison de la perte de valeur vénale de cette partie de terrain n'est pas établie.

7. Il résulte de ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à demander la condamnation de la commune d'Auxon à lui verser la somme de 307 500 euros en réparation des désordres dont il fait état.

8. Il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'ordonner l'expertise sollicitée, M. D... n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune d'Auxon.

Sur les dépens :

9. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de laisser à la charge définitive de M. D... les frais d'expertise, taxés et liquidés à la somme de 4 973,04 euros toutes taxes comprise par une ordonnance du 5 avril 2016 du président du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne.

Sur les frais liés à l'instance :

10. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. D... le versement à la commune d'Auxon d'une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.

Article 2 : Les frais d'expertise liquidés et taxés à la somme de 4 973,04 euros TTC sont mis définitivement à la charge de M. D....

Article 3 : M. D... versera une somme de 1 500 euros à la commune d'Auxon sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... D... et à la commune d'Auxon.

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N° 19NC01207


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 19NC01207
Date de la décision : 16/02/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

67-02-03-02 Travaux publics. Règles communes à l'ensemble des dommages de travaux publics. Lien de causalité. Absence.


Composition du Tribunal
Président : Mme GRENIER
Rapporteur ?: Mme Sandrine ANTONIAZZI
Rapporteur public ?: M. MICHEL
Avocat(s) : HONNET

Origine de la décision
Date de l'import : 26/02/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2021-02-16;19nc01207 ?
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