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30/06/2020 | FRANCE | N°18NC01850

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre, 30 juin 2020, 18NC01850


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... C... a demandé au tribunal de Strasbourg, d'une part, d'annuler la décision du 20 septembre 2016 par laquelle le maire d'Hagondange a décidé de ne pas renouveler son engagement pour l'année 2016-2017 ainsi que la décision implicite de rejet de son recours gracieux et, d'autre part, d'enjoindre au maire d'Hagondange de régulariser sa situation en procédant à sa réintégration ainsi qu'à la reconstitution de sa carrière en tant qu'agent contractuel sous contrat de travail à durée indéterminée

depuis le 10 octobre 2013, emportant régularisation de son traitement pour ser...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... C... a demandé au tribunal de Strasbourg, d'une part, d'annuler la décision du 20 septembre 2016 par laquelle le maire d'Hagondange a décidé de ne pas renouveler son engagement pour l'année 2016-2017 ainsi que la décision implicite de rejet de son recours gracieux et, d'autre part, d'enjoindre au maire d'Hagondange de régulariser sa situation en procédant à sa réintégration ainsi qu'à la reconstitution de sa carrière en tant qu'agent contractuel sous contrat de travail à durée indéterminée depuis le 10 octobre 2013, emportant régularisation de son traitement pour services faits.

Par un jugement n° 1700874 du 2 mai 2018, le tribunal administratif de Strasbourg a annulé la décision du maire d'Hagondange du 20 septembre 2016 ainsi que la décision rejetant le recours gracieux de Mme C... et a enjoint à la commune d'Hagondange de régulariser la situation de Mme C... en la faisant bénéficier rétroactivement d'un contrat à durée indéterminée et, par suite, de la réintégrer et de procéder à la reconstitution de sa carrière dans un délai de deux mois à compter de la notification de ce jugement.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 27 juin 2018 et 27 novembre 2019, la commune d'Hagondange, représentée par Me E..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 2 mai 2018 du tribunal administratif de Strasbourg ;

2°) de rejeter la demande de Mme C... ;

3°) de mettre à la charge de Mme C... la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le maire est habilité à représenter la commune d'Hagondange en justice par délibération du 10 avril 2014 du conseil municipal ;

- Mme C... n'a été recrutée en qualité d'agent non titulaire qu'à compter du 10 octobre 2013 et ne justifie pas d'une durée de service de six ans ;

- Mme C... n'a pas contesté les contrats de travail à durée déterminée conclus depuis 2013 ;

- le jugement attaqué est entaché d'erreur manifeste d'appréciation et de dénaturation des faits, dès lors que Mme C... a été employée en qualité d'assistante d'enseignement artistique, cadre d'emploi de catégorie B et non comme professeur d'enseignement artistique et qu'elle n'a pas les qualifications requises pour être recrutée en tant que professeur d'enseignement artistique ;

- il est également entaché d'une erreur manifeste d'appréciation pour avoir jugé que la décision de non-renouvellement du contrat de Mme C... devait être regardée comme une décision de licenciement ;

- la décision du 20 septembre 2016 n'est pas prise pour des motifs étrangers à l'intérêt du service.

Par un mémoire en défense, enregistré le 23 novembre 2018, Mme C..., représentée par Me D..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 500 euros soit mise à la charge de la commune d'Hagondange au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la requête est irrecevable en l'absence de production de la délibération du conseil municipal autorisant le maire à représenter la commune en justice ;

- Mme C... exerçait des fonctions de professeur de musique relevant de la catégorie A et doit être regardée comme titulaire d'un contrat de travail à durée indéterminée en application de l'article 3-3 de la loi du 26 janvier 1984, dès lors qu'elle justifie de plus de six années de services continus au sein de la commune d'Hagondange ;

- la décision de ne pas renouveler son contrat de travail, prise pour un motif étranger à l'intérêt du service, n'a pas été précédée d'une procédure contradictoire préalable ;

- les autres moyens soulevés par la commune d'Hagondange ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;

- la loi n° 2012-347 du 12 mars 2012 relative à l'accès à l'emploi titulaire et à l'amélioration des conditions d'emploi des agents contractuels dans la fonction publique, à la lutte contre les discriminations et portant diverses dispositions relatives à la fonction publique ;

- le décret n° 2012-437 du 29 mars 2012 portant statut particulier du cadre d'emplois des assistants territoriaux d'enseignement artistique ;

- le décret n° 91-857 du 2 septembre 1991 portant statut particulier du cadre d'emplois des professeurs territoriaux d'enseignement artistique (musique, danse, art dramatique, arts plastiques) ;

- le code de justice administrative et l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 modifiée.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme B..., présidente assesseur,

- les conclusions de M. Michel, rapporteur public,

- et les observations de Me D... pour Mme C....

Considérant ce qui suit :

1. Mme C... a été employée, à compter du 17 septembre 2007, comme vacataire puis comme agent non titulaire à temps non complet de la commune d'Hagondange en qualité d'assistante d'enseignement artistique. Elle a été affectée au sein du conservatoire de musique de la commune. Ses contrats de travail ont ensuite été renouvelés à huit reprises, en dernier lieu le 6 octobre 2015, date à laquelle un contrat de travail valable du 14 septembre 2015 au 5 juillet 2016 a été conclu. Par une décision du 20 septembre 2016, notifiée à Mme C... le 22 septembre suivant, le maire l'a informée de sa décision de ne pas renouveler son contrat de travail pour l'année 2016-2017. Le silence gardé par le maire sur le recours gracieux que lui a adressé Mme C..., le 17 octobre 2016, reçu le lendemain, a fait naître une décision implicite de rejet le 18 décembre 2016. Par un jugement du 2 mai 2018, dont la commune d'Hagondange relève appel, le tribunal administratif de Strasbourg a annulé la décision du 20 septembre 2016 et la décision implicite de rejet du recours gracieux de Mme C.... Le tribunal a également enjoint à la commune d'Hagondange de régulariser la situation de Mme C... en la faisant bénéficier rétroactivement d'un contrat de travail à durée indéterminée et, en conséquence, en la réintégrant et en procédant à la reconstitution de sa carrière dans un délai de deux mois à compter de la notification de ce jugement.

Sur la recevabilité de la requête de la commune d'Hagondange :

2. Par une délibération du 10 avril 2014, le conseil municipal de la commune d'Hagondange a autorisé son maire à représenter la commune en défense devant toutes les juridictions. Cette délibération doit être regardée comme autorisant le maire à défendre les intérêts de la commune en appel lorsque, comme en l'espèce, le tribunal a annulé une délibération de la collectivité. Par suite, la fin de non-recevoir opposée par Mme C... à la requête de la commune d'Hagondange doit être écartée.

Sur le moyen d'annulation retenu par le jugement attaqué :

3. En premier lieu, d'une part, aux termes de l'article 3 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires : " Sauf dérogation prévue par une disposition législative, les emplois civils permanents de l'Etat, des régions, des départements, des communes et de leurs établissements publics à caractère administratif sont, à l'exception de ceux réservés aux magistrats de l'ordre judiciaire et aux fonctionnaires des assemblées parlementaires, occupés soit par des fonctionnaires régis par le présent titre, soit par des fonctionnaires des assemblées parlementaires, des magistrats de l'ordre judiciaire ou des militaires dans les conditions prévues par leur statut. ".

4. D'autre part, aux termes de l'article 3-3 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, dans sa rédaction applicable à la date de la décision du 20 septembre 2016 : " Par dérogation au principe énoncé à l'article 3 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 précitée et sous réserve de l'article 34 de la présente loi, des emplois permanents peuvent être occupés de manière permanente par des agents contractuels dans les cas suivants : / 1° Lorsqu'il n'existe pas de cadre d'emplois de fonctionnaires susceptibles d'assurer les fonctions correspondantes ; / 2° Pour les emplois du niveau de la catégorie A lorsque les besoins des services ou la nature des fonctions le justifient et sous réserve qu'aucun fonctionnaire n'ait pu être recruté dans les conditions prévues par la présente loi (...) / Les agents ainsi recrutés sont engagés par contrat à durée déterminée d'une durée maximale de trois ans. Ces contrats sont renouvelables par reconduction expresse, dans la limite d'une durée maximale de six ans. / Si, à l'issue de cette durée, ces contrats sont reconduits, ils ne peuvent l'être que par décision expresse et pour une durée indéterminée. ". Selon le II de l'article 3-4 de la même loi, dans sa rédaction applicable à la date de la décision du 20 septembre 2016 : " II. - Tout contrat conclu ou renouvelé pour pourvoir un emploi permanent en application de l'article 3-3 avec un agent qui justifie d'une durée de services publics de six ans au moins sur des fonctions relevant de la même catégorie hiérarchique est conclu pour une durée indéterminée. / La durée de six ans mentionnée au premier alinéa du présent II est comptabilisée au titre de l'ensemble des services accomplis auprès de la même collectivité ou du même établissement dans des emplois occupés sur le fondement des articles 3 à 3-3. Elle inclut, en outre, les services effectués au titre du deuxième alinéa de l'article 25 s'ils l'ont été auprès de la collectivité ou de l'établissement l'ayant ensuite recruté par contrat. / Pour l'appréciation de cette durée, les services accomplis à temps non complet et à temps partiel sont assimilés à des services effectués à temps complet. / Les services accomplis de manière discontinue sont pris en compte, sous réserve que la durée des interruptions entre deux contrats n'excède pas quatre mois (...) ".

5. En deuxième lieu, d'une part, l'article 1er du décret du 2 septembre 1991 portant statut particulier du cadre d'emplois des professeurs territoriaux d'enseignement artistique (musique, danse, art dramatique, arts plastiques), dans sa rédaction en vigueur à la date de la décision du 20 septembre 2016, énonce que : " Les professeurs territoriaux d'enseignement artistique constituent un cadre d'emplois culturel de catégorie A au sens de l'article 5 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 susvisée. / Ce cadre d'emplois comprend les grades de professeur d'enseignement artistique de classe normale et de professeur d'enseignement artistique hors classe. ". Aux termes de l'article 2 de ce décret : " Les professeurs d'enseignement artistique exercent leurs fonctions, selon les formations qu'ils ont reçues, dans les spécialités suivantes : / 1° Musique (...) / Pour les spécialités Musique (...), ils exercent leurs fonctions dans les conservatoires à rayonnement régional, départemental, communal ou intercommunal classés par l'Etat (...) / Les professeurs d'enseignement artistique assurent un enseignement hebdomadaire de seize heures. / Les professeurs d'enseignement artistique sont placés, pour l'exercice de leurs fonctions, sous l'autorité du directeur de l'établissement d'enseignement artistique. / Ils assurent la direction pédagogique et administrative des conservatoires à rayonnement communal ou intercommunal et, par dérogation aux dispositions du deuxième alinéa, des établissements d'enseignement de la musique, de la danse et de l'art dramatique non classés et des écoles d'arts plastiques qui ne sont pas habilitées à dispenser tout ou partie de l'enseignement conduisant à un diplôme d'Etat ou à un diplôme agréé par l'Etat. ". L'article 3 de ce décret énonce que : " Le recrutement en qualité de professeur d'enseignement artistique intervient après inscription sur les listes d'aptitude : / 1° En application des dispositions de l'article 36 de la loi du 26 janvier 1984 précitée (...) ". Selon l'article 4 du même décret : " Sont inscrits sur la liste d'aptitude prévue au 1° de l'article 3 ci-dessus les candidats déclarés admis : / 1° Pour les spécialités Musique et Danse, à l'un des concours externes sur titres avec épreuve ouverts dans l'une de ces spécialités et, le cas échéant, dans l'une des disciplines mentionnées à l'article 2, aux candidats titulaires du certificat d'aptitude aux fonctions de professeur des conservatoires classés (...) ".

6. D'autre part, aux termes de l'article 1er du décret du 29 mars 2012 portant statut particulier du cadre d'emplois des assistants territoriaux d'enseignement artistique : " Les assistants territoriaux d'enseignement artistique constituent un cadre d'emplois à caractère culturel de catégorie B au sens de l'article 5 de la loi du 26 janvier 1984 susvisée (...) ". En vertu de l'article 3 du même décret : " I - Les membres du cadre d'emplois des assistants territoriaux d'enseignement artistique exercent leurs fonctions, selon les formations qu'ils ont reçues, dans les spécialités suivantes : / 1° Musique (...) / Les spécialités musique et danse comprennent différentes disciplines. / Les membres du cadre d'emplois des assistants territoriaux d'enseignement artistique sont astreints à un régime d'obligation de service hebdomadaire de vingt heures. / Ils sont placés, pour l'exercice de leurs fonctions, sous l'autorité du fonctionnaire chargé de la direction de l'établissement dans lequel ils exercent leurs fonctions. / II. _ Les titulaires du grade d'assistant d'enseignement artistique sont chargés, dans leur spécialité, d'assister les enseignants des disciplines artistiques. Ils peuvent notamment être chargés de l'accompagnement instrumental des classes. / III. _ Les titulaires des grades d'assistant d'enseignement artistique principal de 2e classe et d'assistant d'enseignement artistique principal de 1ère classe sont chargés, dans leur spécialité, de tâches d'enseignement dans les conservatoires à rayonnement régional, départemental, communal ou intercommunal classés, les établissements d'enseignement de la musique, de la danse et de l'art dramatique non classés ainsi que dans les écoles d'arts plastiques non habilitées à dispenser un enseignement sanctionné par un diplôme national ou par un diplôme agréé par l'Etat. / Ils sont également chargés d'apporter une assistance technique ou pédagogique aux professeurs de musique, de danse, d'arts plastiques ou d'art dramatique (...) ".

7. En troisième lieu, d'une part, il ressort des pièces du dossier que Mme C... a enseigné la musique et notamment la mandoline au sein du conservatoire de musique de la commune d'Hagondange et qu'elle est titulaire d'un diplôme d'Etat de professeur de musique de l'Ecole supérieure d'Etat des arts et musique de Perm en Russie.

8. D'autre part, les différents contrats de travail conclus entre la commune d'Hagondange et Mme C... depuis le 10 octobre 2007 mentionnent qu'elle a été recrutée d'abord comme vacataire puis comme agent non titulaire par contrat du 10 octobre 2013 renouvelé en 2014 et, en 2015, en qualité d'assistante d'enseignement artistique.

9. En outre, si les professeurs territoriaux d'enseignement artistique exerçant dans la spécialité musique peuvent, comme les assistants territoriaux d'enseignement artistique de la même discipline, être chargés de formation musicale, il ne ressort pas des pièces du dossier que Mme C... aurait exercé d'autres fonctions que celles d'accompagnement instrumental ou d'assistance à l'enseignement de la musique dévolues aux assistants territoriaux d'enseignement artistique. Par ailleurs, il ne ressort pas des pièces du dossier et n'est pas allégué que Mme C... serait titulaire du certificat d'aptitude aux fonctions de professeur des conservatoires classés lui permettant d'exercer en qualité de professeur territorial d'enseignement artistique en application de l'article 4 du décret du 2 septembre 1991 portant statut particulier du cadre d'emplois des professeurs territoriaux d'enseignement artistique (musique, danse, art dramatique, arts plastiques). La commune d'Hagondange fait également valoir que le conservatoire de musique de la commune n'est pas un conservatoire à rayonnement communal ou intercommunal classé par l'Etat. Par suite, il ne ressort pas des pièces du dossier que les termes des contrats de travail de Mme C... précisant qu'elle est recrutée en qualité d'assistante d'enseignement artistique seraient erronés et qu'elle devrait, en réalité, être regardée comme exerçant un emploi de professeur d'enseignement artistique.

10. Enfin, alors même que Mme C... n'aurait pu être recrutée sur le fondement de l'article 3-2 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale autorisant le recrutement d'agents contractuels pour " faire face à une vacance temporaire d'emploi dans l'attente du recrutement d'un fonctionnaire ", de tels contrats ne pouvant être conclus que pour une durée d'un an renouvelable deux fois dans la limite d'une durée totale de deux ans depuis l'entrée en vigueur de la loi n° 2012-347 du 12 mars 2012 visée ci-dessus, cette circonstance, si elle est de nature, le cas échéant, à ouvrir à Mme C... droit à l'indemnisation des préjudices subis en raison du renouvellement abusif de ses contrats de travail à durée déterminée, ne saurait conduire à estimer que son contrat de travail est nécessairement conclu en application du 1° ou du 2° de l'article 3-3 de la loi du 26 janvier 1984, dès lors qu'elle n'en remplit pas les conditions légales.

11. Il résulte de ce qui précède que c'est à tort que le tribunal administratif a jugé d'une part, que Mme C... devait être regardée comme ayant été recrutée en qualité de professeur d'enseignement artistique, cadre d'emploi de catégorie A en application du 2° de l'article 3-3 de la loi du 26 janvier 1984 dans sa rédaction alors en vigueur, et que son dernier contrat de travail devait, en conséquence, être requalifié en contrat de travail à durée indéterminée en application des articles 3-3 et 3-4 de la cette même loi, dès lors qu'elle justifiait de plus de six années de service continu au sein de la commune d'Hagondange et d'autre part, que la décision du 20 septembre 2016 portant non-renouvellement du contrat de travail de Mme C... devait être regardée comme une décision de licenciement.

12. Il appartient toutefois à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les conclusions à fin d'annulation présentées par Mme C... devant le tribunal administratif de Strasbourg.

13. Un agent public qui a été recruté par un contrat à durée déterminée ne bénéficie ni d'un droit au renouvellement de son contrat ni, à plus forte raison, d'un droit au maintien de ses clauses si l'administration envisage de procéder à son renouvellement. Toutefois, l'administration ne peut légalement décider, au terme de son contrat, de ne pas le renouveler ou de proposer à l'agent, sans son accord, un nouveau contrat substantiellement différent du précédent, que pour un motif tiré de l'intérêt du service. Un tel motif s'apprécie au regard des besoins du service ou de considérations tenant à la personne de l'agent. Dès lors qu'elles sont de nature à caractériser un intérêt du service justifiant le non-renouvellement du contrat, la circonstance que des considérations relatives à la personne de l'agent soient par ailleurs susceptibles de justifier une sanction disciplinaire ne fait pas obstacle, par elle-même, à ce qu'une décision de non-renouvellement du contrat soit légalement prise, pourvu que l'intéressé ait alors été mis à même de faire valoir ses observations.

14. Par sa décision du 20 septembre 2016, le maire de la commune d'Hagondange énonce que : " J'ai été informé que vous remettez en cause le fonctionnement du conservatoire et les consignes du Directeur à compter de la rentrée 2016/2017. De plus, vous avez diffusé un document concernant l'organisation interne de cet établissement aux élèves et parents d'élèves en les invitant à contacter le Directeur en cas de désaccord. / Ces comportements sont incompatibles avec le devoir d'obéissance et celui de discrétion professionnelle qui vous incombent. / C'est pourquoi, je vous informe que votre engagement pour l'année scolaire 2016/2017 ne sera pas renouvelé. ".

15. Il ressort des termes mêmes de cette décision que le maire de la commune d'Hagondange a décidé ne pas renouveler le contrat de travail de Mme C... en prenant en compte des considérations tenant à sa personne susceptibles de justifier une sanction disciplinaire. Alors même que ces considérations sont de nature à justifier que le contrat de Mme C... ne soit pas renouvelé dans l'intérêt du service, eu égard à ses différends, rendus publics, avec le maire de la commune d'Hagondange quant à l'organisation du conservatoire de musique et alors même que la qualité de la formation musicale qu'elle dispense n'est pas contestée, la décision du 20 septembre 2016 ne pouvait toutefois intervenir sans que Mme C... ait été mise à même de présenter préalablement ses observations, ainsi qu'elle le fait valoir. Or, il ne ressort pas des pièces du dossier que Mme C... ait été mise à même de faire valoir ses observations préalablement à cette décision.

16. Il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, la commune d'Hagondange n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a annulé la décision du 20 septembre 2016 ainsi que la décision implicite rejetant le recours gracieux de Mme C....

Sur les conclusions à fin d'injonction présentées par Mme C... devant le tribunal administratif de Strasbourg :

17. Le motif d'annulation retenu par le point 15 du présent arrêt n'implique pas nécessairement de régulariser la situation Mme C... en la faisant bénéficier rétroactivement d'un contrat à durée indéterminée et, en conséquence, de la réintégrer et de reconstituer sa carrière.

18. Il en résulte seulement qu'il y a lieu d'enjoindre à la commune d'Hagondange de procéder au réexamen de la situation de Mme C... dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt. Il suit de là que l'article 2 du jugement du 2 mai 2018 du tribunal administratif de Strasbourg doit être réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Sur les frais liés à l'instance :

19. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : Il est enjoint à la commune d'Hagondange de réexaminer la situation de Mme C... dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 2 : L'article 2 du jugement du 2 mai 2018 du tribunal administratif de Strasbourg est réformé en ce qu'il a de contraire à l'article 1er du présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de la commune d'Hagondange et les conclusions de Mme C... tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetés.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune d'Hagondange et à Mme C....

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N° 18NC01850


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 18NC01850
Date de la décision : 30/06/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Fonctionnaires et agents publics - Cessation de fonctions.

Fonctionnaires et agents publics - Cessation de fonctions - Licenciement - Auxiliaires - agents contractuels et temporaires.


Composition du Tribunal
Président : M. DEVILLERS
Rapporteur ?: Mme Christine GRENIER
Rapporteur public ?: M. MICHEL
Avocat(s) : SCP BECKER SZTUREMSKI VAUTHIER KLEIN-DESSERRE

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2020-06-30;18nc01850 ?
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