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23/07/2019 | FRANCE | N°19NC00460

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre - formation à 3, 23 juillet 2019, 19NC00460


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler l'arrêté du 4 octobre 2018 par lequel le préfet de Meurthe-et-Moselle l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il serait renvoyé.

Par un jugement n° 1802996 du 6 décembre 2018, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 15 février

2019, M. A..., représenté par la SCP A. Levi et L. Cyferman, demande à la cour :

1°) d'annuler ce j...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler l'arrêté du 4 octobre 2018 par lequel le préfet de Meurthe-et-Moselle l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il serait renvoyé.

Par un jugement n° 1802996 du 6 décembre 2018, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 15 février 2019, M. A..., représenté par la SCP A. Levi et L. Cyferman, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 6 décembre 2018 ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 4 octobre 2018 pris à son encontre par le préfet de Meurthe-et-Moselle ;

3°) d'enjoindre au préfet de Meurthe-et-Moselle, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour l'autorisant à travailler, et, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation administrative et de lui délivrer pendant cet examen une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 500 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

S'agissant de la régularité du jugement attaqué :

- il est insuffisamment motivé en réponse à son moyen tiré du défaut de motivation de l'obligation de quitter le territoire français ;

- il est insuffisamment motivé en réponse à son moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- elle est insuffisamment motivée ;

- le préfet saisi d'une demande de titre de séjour en qualité d'étranger malade ne pouvait légalement édicter cette décision sur le fondement des dispositions du 6° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- cette décision méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le préfet a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de cette décision quant à sa situation personnelle.

Par un mémoire en défense, enregistré le 21 mai 2019, le préfet de Meurthe-et-Moselle conclut au rejet de la requête.

Il s'en remet à ses écritures de première instance.

M. A...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 15 janvier 2019.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Michel, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M.A..., ressortissant algérien né le 30 avril 1973, a déclaré être entré en France le 20 septembre 2017. Sa demande tendant à la reconnaissance de la qualité de réfugié ou au bénéfice de la protection subsidiaire a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides par une décision du 26 janvier 2018, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 3 septembre 2018. Par un arrêté du 4 octobre 2018, le préfet de Meurthe-et-Moselle l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il serait renvoyé. M. A...fait appel du jugement du 6 décembre 2018 par lequel le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Nancy, statuant dans le cadre des dispositions du I bis de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur l'arrêté du 4 octobre 2018 :

2. Aux termes du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étranger et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) 6° Si la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé à l'étranger ou si l'étranger ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application de l'article L. 743-2, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité (...) ".

3. A la suite du rejet de sa demande tendant à la reconnaissance de la qualité de réfugié ou au bénéfice de la protection subsidiaire par la Cour nationale du droit d'asile, M. A... a sollicité le 13 juin 2018, préalablement à l'édiction de la mesure d'éloignement en litige, son admission au séjour en qualité d'étranger malade. Si le préfet se prévaut d'une lettre du 30 juillet 2018 selon laquelle le dossier remis par l'intéressé ne pouvait pas être instruit en raison de son caractère incomplet au motif que M. A...n'avait pas joint les indications relatives à sa nationalité et à son état civil exigées par les dispositions de l'article R. 311-2-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni produit de justificatif de domicile permettant de déterminer le préfet territorialement compétent, le préfet n'a établi ni en première instance ni en appel que cette lettre aurait été effectivement réceptionnée par M. A...ou qu'il devrait être regardé comme en ayant effectivement eu connaissance, ce qu'il conteste formellement. En outre, alors que le requérant soutient que sa demande de titre de séjour comportait les éléments recensés comme manquants dans cette lettre, le préfet ne produit aucune pièce de nature à corroborer le caractère incomplet du dossier de l'intéressé. Dans ces conditions, le préfet ne pouvait légalement fonder sa décision obligeant M. A... à quitter le territoire sur le motif tiré de ce que la demande de titre de séjour en qualité d'étranger malade qu'il avait présentée après le rejet de sa demande d'asile, était irrecevable en raison de son caractère incomplet et ne pouvait être examinée au fond. M. A... est, par suite, fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision.

4. Les décisions du 4 octobre 2018 n'accordant à M. A...qu'un délai de départ volontaire de trente jours et fixant le pays de destination doivent être annulées par voie de conséquence de l'annulation de la décision l'obligeant à quitter le territoire français.

5. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. A...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 4 octobre 2018 du préfet de Meurthe-et-Moselle.

Sur l'injonction :

6. En application des dispositions de l'article L. 512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français n'implique pas la délivrance d'un titre de séjour, contrairement à ce que demande M. A..., mais seulement que le préfet de Meurthe-et-Moselle procède au réexamen de sa situation. Il y a lieu d'enjoindre au préfet d'y procéder dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt. Durant cette période d'instruction, M. A... sera muni, dans un délai de huit jours à compter de la même date, d'une autorisation provisoire de séjour.

Sur les frais liés à l'instance :

7. M. A... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle. Par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Levi-Cyferman, conseil de M.A..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle, de mettre à la charge de l'Etat le versement à cet avocat d'une somme de 1 500 euros.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 1802996 du 6 décembre 2018 du magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Nancy et l'arrêté du 4 octobre 2018 du préfet de Meurthe-et-Moselle sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de Meurthe-et-Moselle de réexaminer la situation de M. A...dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt et, dans cette attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai de huit jours à compter de la même date.

Article 3 : L'Etat versera à Me Levi-Cyferman, avocat de M.A..., une somme de 1 500 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que Me Levi-Cyferman, renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A...est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de Meurthe-et-Moselle.

2

N° 19NC00460


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. KOLBERT
Rapporteur ?: M. Alexis MICHEL
Rapporteur public ?: M. LOUIS
Avocat(s) : ANNIE LEVI-CYFERMAN - LAURENT CYFERMAN

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Date de la décision : 23/07/2019
Date de l'import : 30/07/2019

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 19NC00460
Numéro NOR : CETATEXT000038815740 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2019-07-23;19nc00460 ?
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