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23/07/2019 | FRANCE | N°17NC01126

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 23 juillet 2019, 17NC01126


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D...A...a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler la décision du 22 décembre 2014 par laquelle le président de la communauté urbaine du Grand Nancy a rejeté sa candidature à un poste de maître-nageur et de condamner la collectivité territoriale à lui verser la somme de 15 000 euros en réparation des préjudices subis du fait de l'illégalité de cette décision.

Par un jugement n° 1500234 du 18 octobre 2016, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande.

Procédu

re devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 15 mai 2017, Mme D...A..., représentée ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D...A...a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler la décision du 22 décembre 2014 par laquelle le président de la communauté urbaine du Grand Nancy a rejeté sa candidature à un poste de maître-nageur et de condamner la collectivité territoriale à lui verser la somme de 15 000 euros en réparation des préjudices subis du fait de l'illégalité de cette décision.

Par un jugement n° 1500234 du 18 octobre 2016, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 15 mai 2017, Mme D...A..., représentée par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nancy du 18 octobre 2016 ;

2°) d'annuler la décision du 22 décembre 2014 par laquelle le président de la communauté urbaine du Grand Nancy a rejeté sa candidature à un poste de maître-nageur ;

3°) de condamner la communauté urbaine du Grand Nancy à lui verser la somme de 15 000 euros en réparation des préjudices subis du fait de l'illégalité de la décision du 22 décembre 2014, avec intérêts au taux légal à compter du 3 mai 2016, ainsi que la capitalisation de ces intérêts ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 800 euros correspondant aux frais engagés en première instance et une somme de 1 800 euros correspondant aux frais engagés en appel, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, à verser à Me C...en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, ainsi que les droits de plaidoirie d'un montant de 26 euros.

Elle soutient que :

- la décision de non-renouvellement de son contrat de travail est fondée sur son état de grossesse et revêt un caractère discriminatoire ; elle a fait l'objet d'une discrimination en raison de son état de grossesse, en méconnaissance de l'article 6 de la loi du 13 juillet 1983, de l'article 2 de la loi du 27 mai 2008 mais également des articles L. 1132-1, L. 1142-1, L. 1225-1 et L. 1225-2 du code du travail. ;

- elle a subi un préjudice matériel en lien avec l'illégalité de cette décision qui peut être indemnisé à hauteur de 10 000 euros ;

- elle a subi un préjudice moral en lien avec l'illégalité de cette décision qui peut être indemnisé à hauteur de 5 000 euros.

Par un mémoire, enregistré le 11 juillet 2017, la communauté urbaine du Grand Nancy, représentée par MeB..., conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Par une décision du 13 mars 2017, Mme A...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 ;

- le code du travail ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Haudier,

- les conclusions de Mme Kohler, rapporteur public,

- et les observations de Me C...pour Mme A...et de Me B...pour la communauté urbaine du Grand Nancy.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A...a été employée par la communauté urbaine du Grand Nancy du 1er juin 2013 au 30 novembre 2014 en qualité d'éducateur territorial des activités physiques et sportives contractuel, afin d'exercer des fonctions de maître-nageur au sein de piscines de la communauté urbaine. Au mois de novembre 2014, la collectivité a organisé un recrutement afin de pourvoir quatre postes de maîtres-nageurs, par la voie statutaire, ou, à défaut, par contrats d'un an. Mme A..., dont le dernier contrat n'avait pas été renouvelé, s'est portée candidate sur ces quatre postes. Par une décision du 22 décembre 2014, le président de la communauté urbaine du Grand Nancy l'a informée que sa candidature n'avait pas été retenue. Estimant que cette décision était en lien avec son état de grossesse, Mme A...a demandé au tribunal administratif de Nancy de l'annuler et de condamner la communauté urbaine à réparer les préjudices qu'elle estime avoir subis du fait de l'illégalité de cette décision. Par un jugement du 18 octobre 2016, dont Mme A...relève appel, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande.

2. En premier lieu, aux termes de l'article 6 de la loi du 13 juillet 1983 : " Aucune distinction, directe ou indirecte, ne peut être faite entre les fonctionnaires en raison de leurs opinions politiques, syndicales, philosophiques ou religieuses, de leur origine, de leur orientation sexuelle ou identité de genre, de leur âge, de leur patronyme, de leur situation de famille, de leur état de santé, de leur apparence physique, de leur handicap ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie ou une race ". Aux termes de l'article 2 de la loi du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations : " (...) 3° Toute discrimination directe ou indirecte est interdite en raison de la grossesse ou de la maternité, y compris du congé de maternité. Ce principe ne fait pas obstacle aux mesures prises en faveur des femmes pour ces mêmes motifs (...) ". Aux termes de l'article 4 de cette même loi : " Toute personne qui s'estime victime d'une discrimination directe ou indirecte présente devant la juridiction compétente les faits qui permettent d'en présumer l'existence. Au vu de ces éléments, il appartient à la partie défenderesse de prouver que la mesure en cause est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination (...) ".

3. De manière générale, il appartient au juge administratif, dans la conduite de la procédure inquisitoire, de demander aux parties de lui fournir tous les éléments d'appréciation de nature à établir sa conviction. Cette responsabilité doit, dès lors qu'il est soutenu qu'une mesure a pu être empreinte de discrimination, s'exercer en tenant compte des difficultés propres à l'administration de la preuve en ce domaine et des exigences qui s'attachent aux principes à valeur constitutionnelle des droits de la défense et de l'égalité de traitement des personnes. S'il appartient au requérant qui s'estime lésé par une telle mesure de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de faire présumer une atteinte à ce dernier principe, il incombe au défendeur de produire tous ceux permettant d'établir que la décision attaquée repose sur des éléments objectifs étrangers à toute discrimination. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si la décision contestée devant lui a été ou non prise pour des motifs entachés de discrimination, se détermine au vu de ces échanges contradictoires. En cas de doute, il lui appartient de compléter ces échanges en ordonnant toute mesure d'instruction utile.

4. Six personnes se sont portées candidates aux postes de maîtres-nageurs proposés par la communauté urbaine du Grand Nancy. Mme A...a été convoquée à un entretien avec le jury chargé d'examiner ces six candidatures le 17 novembre 2014 à 9 heures 40. Il est constant que ledit à jour à 9 heures 27, soit quelques minutes avant cet entretien, elle a reçu un appel téléphonique de son supérieur hiérarchique direct lui demandant de confirmer sa présence à ce rendez-vous et concluant en indiquant, ainsi que cela ressort d'un constat d'huissier, " c'est pas trop important, puisqu'il en résulte qu'il t'aurait pas pris sur un poste à temps complet puisque tu es enceinte ".

5. Il ressort des pièces du dossier que Mme A...n'avait pas confirmé sa présence à cet entretien et que le directeur du service des sports, par ailleurs membre du jury de recrutement, avait contacté le supérieur hiérarchique direct de l'intéressée pour savoir si elle serait bien présente. En revanche, il ne ressort nullement de la retranscription de l'appel litigieux ou d'une autre pièce du dossier que ce directeur, dont il n'est pas établi qu'il avait connaissance de l'état de grossesse de MmeA..., aurait tenu des propos similaires à ceux prononcés par le supérieur direct de MmeA.... Ce dernier n'était de plus pas membre du jury et a été sanctionné pour ses propos. Mme A...n'apporte aucun autre élément de nature à faire présumer qu'elle aurait été victime de discrimination en raison de son état de grossesse. En outre, si Mme A...avait déjà travaillé en qualité de contractuelle pour la communauté urbaine du Grand Nancy, elle ne bénéficiait pas, pour ce motif, d'un droit de priorité par rapport au cinq autres candidats. Il ressort au demeurant des pièces du dossier et notamment des fiches établies par la communauté urbaine du Grand Nancy lors du recrutement pour chaque candidat, que deux de ces candidats se trouvaient également dans cette situation. Enfin, il ressort des fiches des six candidats et notamment des quatre retenus que ces derniers remplissaient la condition de diplôme requise et justifiaient tant d'une expérience en la matière que de nombreux " points forts ". Aucun " point faible " n'est indiqué dans la rubrique " analyse " s'agissant de ces candidats, alors que le jury a relevé à propos de MmeA..., un manque de dynamisme et un manque d'aisance relationnelle. Dans ces conditions, il ne ressort pas des pièces du dossier que Mme A...aurait fait l'objet d'une discrimination en raison de son état de grossesse. Le moyen tiré de ce que la décision litigieuse aurait été prise en méconnaissance des dispositions législatives précitées doit ainsi être écarté.

6. En second lieu, Mme A...ne peut utilement invoquer la méconnaissance des dispositions des articles L. 1225-1 à L. 1225-5 du code du travail qui protègent les femmes enceintes ou des articles L. 1132-1 et L. 1142-1 de ce code, qui prohibent toute discrimination, notamment en raison de l'état de grossesse, ces dispositions n'étant pas applicables en l'espèce.

7. Mme A...n'est ainsi pas fondée à solliciter l'annulation de la décision litigieuse du 22 décembre 2014. L'illégalité de cette décision n'étant pas établie, les conclusions indemnitaires présentées par Mme A...ne peuvent pas davantage être accueillies.

8. Il résulte de ce qui précède que Mme A...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a rejeté ses demandes. Ses conclusions tendant au remboursement des dépens et celles présentées sur le fondement des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent, par voie de conséquence, être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme A...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D...A...et à la communauté urbaine du Grand Nancy.

2

N° 17NC01126


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17NC01126
Date de la décision : 23/07/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-12 Fonctionnaires et agents publics. Agents contractuels et temporaires.


Composition du Tribunal
Président : M. MARINO
Rapporteur ?: Mme Guénaëlle HAUDIER
Rapporteur public ?: Mme KOHLER
Avocat(s) : JEANNOT

Origine de la décision
Date de l'import : 30/07/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2019-07-23;17nc01126 ?
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