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02/07/2019 | FRANCE | N°19NC00204

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre - formation à 3, 02 juillet 2019, 19NC00204


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C...a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler la décision du 15 novembre 2017 par laquelle le préfet de l'Aube a rejeté sa demande de regroupement familial au bénéfice de son épouse.

Par un jugement n° 1800368 du 16 octobre 2018, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 18 janvier 2019, M. C..., représenté par Me Honnet, demande à la cour :

1°) d'a

nnuler ce jugement du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 16 octobre 2018 ;

2°) d'annuler...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C...a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler la décision du 15 novembre 2017 par laquelle le préfet de l'Aube a rejeté sa demande de regroupement familial au bénéfice de son épouse.

Par un jugement n° 1800368 du 16 octobre 2018, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 18 janvier 2019, M. C..., représenté par Me Honnet, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 16 octobre 2018 ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision du 15 novembre 2017 du préfet de l'Aube ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Aube, de réexaminer sa demande de regroupement familial au bénéfice de son épouse à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de prendre sa décision dans un délai de quinze jours sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 500 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- le préfet n'a pas procédé à un examen particulier de sa demande de regroupement familial ;

- la décision en litige méconnaît les dispositions du 3° de l'article L. 411-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense, enregistré 30 avril 2019, le préfet de l'Aube conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

M. C...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle partielle par une décision du 22 novembre 2018.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Michel, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M.C..., ressortissant marocain résidant régulièrement sur le territoire français, a demandé le 3 avril 2017 à bénéficier de son droit à être rejoint, au titre du regroupement familial, par son épouse. Par une décision du 15 novembre 2017, le préfet de l'Aube a rejeté cette demande. M. C... fait appel du jugement du 16 octobre 2018 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision.

Sur la légalité de la décision du 15 novembre 2017 :

2. Aux termes de l'article L. 411-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dont les dispositions sont applicables aux ressortissants marocains en vertu de l'article 9 de l'accord du 9 octobre 1987 : " Le ressortissant étranger qui séjourne régulièrement en France depuis au moins dix-huit mois, sous couvert d'un des titres d'une durée de validité d'au moins un an prévus par le présent code ou par des conventions internationales, peut demander à bénéficier de son droit à être rejoint, au titre du regroupement familial, par son conjoint, si ce dernier est âgé d'au moins dix-huit ans, et les enfants du couple mineurs de dix-huit ans ". Aux termes de l'article L. 411-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Le regroupement familial ne peut être refusé que pour l'un des motifs suivants : / 1° Le demandeur ne justifie pas de ressources stables et suffisantes pour subvenir aux besoins de sa famille. Sont prises en compte toutes les ressources du demandeur et de son conjoint indépendamment des prestations familiales, de l'allocation équivalent retraite et des allocations prévues à l'article L. 262-1 du code de l'action sociale et des familles, à l'article L. 815-1 du code de la sécurité sociale et aux articles L. 5423-1 et L. 5423-2 du code du travail . Les ressources doivent atteindre un montant qui tient compte de la taille de la famille du demandeur. Le décret en Conseil d'Etat prévu à l'article L. 441-1 fixe ce montant qui doit être au moins égal au salaire minimum de croissance mensuel et au plus égal à ce salaire majoré d'un cinquième. Ces dispositions ne sont pas applicables lorsque la personne qui demande le regroupement familial est titulaire de l'allocation aux adultes handicapés mentionnée aux articles L. 821-1 ou L. 821-2 du code de la sécurité sociale ou de l'allocation supplémentaire mentionnée à l'article L. 815-24 du même code ou lorsqu'une personne âgée de plus de soixante-cinq ans et résidant régulièrement en France depuis au moins vingt-cinq ans demande le regroupement familial pour son conjoint et justifie d'une durée de mariage d'au moins dix ans ; / 2° Le demandeur ne dispose pas ou ne disposera pas à la date d'arrivée de sa famille en France d'un logement considéré comme normal pour une famille comparable vivant dans la même région géographique ; / 3° Le demandeur ne se conforme pas aux principes essentiels qui, conformément aux lois de la République, régissent la vie familiale en France, pays d'accueil ".

3. Il ressort des pièces du dossier qu'après le décès de sa première épouse en 2010, M. C... s'est de nouveau marié au Maroc au mois de juillet 2011 avec MmeB..., ressortissante marocaine, alors âgée de quarante-six ans. Pour refuser de faire droit à la demande de regroupement familial formée par M. C...en faveur de cette dernière, le préfet s'est fondé sur le rapport administratif établi le 4 mai 2012 par un agent de police judiciaire, dans le cadre de l'instruction d'une demande antérieure selon lequel il avait, lors de son audition, indiqué avoir, sur la suggestion de sa fille, épousé Mme B..., afin qu'elle puisse s'établir en France et s'occuper de lui tout en précisant qu'il ne s'agissait pas d'un mariage blanc mais d'un " arrangement ". Ces déclarations qui ne sauraient être isolées du contexte dans lesquelles elles ont été recueillies, et en particulier de l'âge du requérant, ne suffisent toutefois pas à établir que M. C...ne se conforme pas aux principes essentiels qui, conformément aux lois de la République, régissent la vie familiale en France, alors qu'en particulier nest allégué l'existence, ni d'une situation de polygamie ou d'un mariage forcé, ni d'un comportement violent ou incompatible avec les exigences d'une vie familiale normale, M. C...justifiant à l'inverse, avoir rendu régulièrement visite à son épouse au Maroc où celle-ci réside dans un logement qu'il met à sa disposition et lui avoir régulièrement fait des versements d'argent pour subvenir à ses besoins. Dans ces conditions, et contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, le préfet ne pouvait légalement refuser de faire droit à la demande de regroupement familial présentée par M. C...en se fondant sur les dispositions précitées du 3°de l'article L. 411-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

4. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. C... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande.

Sur l'injonction et l'astreinte :

5. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administration : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. / La juridiction peut également prescrire d'office cette mesure ".

6. Alors que l'arrêté du préfet de l'Aube indique que M. C...remplit les conditions de ressources et de logement énoncées aux 1° et 2° de l'article L. 411-5 précité du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il y a lieu de lui enjoindre de faire droit à la demande de regroupement familial de l'intéressé dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt. Il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Sur les frais liés à l'instance :

7. M. C... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle. Par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Honnet, conseil de M. C..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle, de mettre à la charge de l'Etat le versement à cet avocat d'une somme de 1 500 euros.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 1800368 du 16 octobre 2018 du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne et la décision du 15 novembre 2017 par laquelle le préfet de l'Aube a rejeté la demande de regroupement familial présentée par M. C...sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de l'Aube de faire droit à la demande de regroupement familial de M. C...dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à Me Honnet, avocat de M.C..., une somme de 1 500 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que Me Honnet renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...C...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de l'Aube.

2

N° 19NC00204


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 19NC00204
Date de la décision : 02/07/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-02-02 Étrangers. Séjour des étrangers. Autorisation de séjour. Octroi du titre de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. KOLBERT
Rapporteur ?: M. Alexis MICHEL
Rapporteur public ?: M. LOUIS
Avocat(s) : HONNET

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2019-07-02;19nc00204 ?
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