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14/05/2019 | FRANCE | N°18NC03448

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 14 mai 2019, 18NC03448


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Nancy de prononcer la décharge de la contribution sociale généralisée, de la contribution pour le remboursement de la dette sociale, du prélèvement social, de la contribution additionnelle au prélèvement social au taux de 0,3 % et de la contribution additionnelle au prélèvement social de 2 % auxquels il a été assujetti au titre de l'année 2013 à raison de la réalisation de plus-values immobilières.

Par un jugement n° 1401385, 1401387, 14013

88, 1401389 et 1401495 du 5 novembre 2015, le tribunal administratif de Nancy a déchar...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Nancy de prononcer la décharge de la contribution sociale généralisée, de la contribution pour le remboursement de la dette sociale, du prélèvement social, de la contribution additionnelle au prélèvement social au taux de 0,3 % et de la contribution additionnelle au prélèvement social de 2 % auxquels il a été assujetti au titre de l'année 2013 à raison de la réalisation de plus-values immobilières.

Par un jugement n° 1401385, 1401387, 1401388, 1401389 et 1401495 du 5 novembre 2015, le tribunal administratif de Nancy a déchargé M. B...des impositions litigieuses.

Par un arrêt n° 15NC02416 du 26 janvier 2017, la cour administrative d'appel de Nancy a rejeté l'appel formé par le ministre de l'économie et des finances contre ce jugement, à l'exception du prélèvement de solidarité au taux de 2 %, qu'elle a remis à la charge de M. B....

Par une décision n° 409153 du 19 décembre 2018, le Conseil d'Etat a annulé les articles 3 et 4 de cet arrêt et a renvoyé l'affaire devant la cour administrative d'appel de Nancy.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 7 décembre 2015, et un mémoire produit le 4 février 2019 après cassation de l'arrêt du 26 janvier 2017, le ministre de l'économie et des finances demande à la cour :

1°) d'annuler les articles 1er et 2 du jugement du tribunal administratif de Nancy du

5 novembre 2015 ;

2°) de remettre à la charge de M.B..., à titre principal, les impositions dont il a obtenu la décharge en première instance et, à titre subsidiaire, la contribution additionnelle au prélèvement social au taux de 2 %.

Il soutient que :

- M. B...perçoit des pensions versées par des caisses de retraite françaises et relève de ce fait du régime de sécurité sociale français en application du 11-3-a du règlement CE n° 883/2004 du 29 avril 2004 ;

- M. B...n'établit pas être affilié à un régime de sécurité sociale luxembourgeois ;

- le prélèvement de solidarité au taux de 2 % doit être remis à la charge du contribuable dès lors que ce prélèvement n'entre pas dans le champ d'application du règlement n° 883/2004 du 29 avril 2004 ;

- le document produit par M. D...établit uniquement sa prise en charge au titre de l'assurance maladie par la caisse de son Etat de résidence et non son affiliation au régime de sécurité luxembourgeois.

Par un mémoire en défense, enregistré le 3 mars 2016, et un mémoire produit le 29 janvier 2019 après cassation de l'arrêt du 26 janvier 2017, M. A...B..., représenté par MeE..., conclut au rejet de la requête et demande qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de l'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- les pensions de retraite sont exclues du champ d'application du règlement CE n° 883/2004 du 29 avril 2004 par son article 11 ;

- il est un non résident affilié au régime de sécurité luxembourgeois.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le règlement CE n° 883/2004 du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de l'action sociale et des familles ;

- le code de la sécurité sociale ;

- l'ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Barteaux,

- et les conclusions de Mme Kohler, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M.B..., résident du Luxembourg, est associé au sein de deux sociétés civiles immobilières, dont le siège se trouve en France et qui ont réalisé des plus-values immobilières au cours de l'année 2013. Au titre de ces plus-values, il a été assujetti, à due proportion de ses parts dans ces sociétés, à la contribution sociale généralisée prévue par l'article 1600-0 C du code général des impôts au taux de 8,2 %, à la contribution pour le remboursement de la dette sociale prévue par l'article 1600-0 G du même code au taux de 0,5 %, au prélèvement social prévu par l'article 1600-0 F bis du même code au taux de 4,5 %, à la contribution additionnelle à ce prélèvement prévue au 2° de l'article L. 14-10-4 du code de l'action sociale et des familles au taux de 0,3 % et au prélèvement de solidarité prévu par l'article 1600-0 S du code général des impôt au taux de 2 % pour un montant global de 65 728 euros. Par un jugement du 5 novembre 2015, le tribunal administratif de Nancy l'a déchargé de ces cinq impositions. Par un arrêt du 26 janvier 2017, la cour administrative d'appel de Nancy a rejeté l'appel formé contre ce jugement par le ministre de l'économie et des finances à l'exception du prélèvement de solidarité au taux de 2 % qu'elle a remis à la charge de M. D.... Par une décision du 19 décembre 2018, le Conseil d'Etat a annulé les articles 3 et 4 de cet arrêt et renvoyé, dans cette mesure, l'affaire devant la cour.

Sur le bien-fondé du jugement :

2. Aux termes des paragraphes 2 et 3 de l'article 11 du règlement du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 : " 2. Pour l'application du présent titre, les personnes auxquelles est servie une prestation en espèces du fait ou à la suite de l'exercice de son activité salariée ou non salariée sont considérées comme exerçant cette activité. Cela ne s'applique pas aux pensions d'invalidité, de vieillesse ou de survivant, ni aux rentes pour accident du travail ou maladie professionnelle, ni aux prestations de maladie en espèces couvrant des soins à durée illimitée. / 3. Sous réserve des articles 12 à 16:/ a) la personne qui exerce une activité salariée ou non salariée dans un Etat membre est soumise à la législation de cet Etat membre (...) / e) les personnes autres que celles visées aux points a) à d) sont soumises à la législation de l'Etat de résidence, sans préjudice d'autres dispositions du présent règlement qui leur garantissent des prestations en vertu de la législation d'un ou de plusieurs autres Etats membres (...) ".

3. Aux termes du 1er paragraphe de l'article 24 du même règlement : " La personne qui perçoit une pension ou des pensions en vertu de la législation d'un ou plusieurs Etats membres, et qui ne bénéficie pas des prestations en nature selon la législation de l'Etat membre de résidence, a toutefois droit, pour elle-même et pour les membres de sa famille, à de telles prestations, pour autant qu'elle y aurait droit selon la législation de l'Etat membre ou d'au moins un des Etats membres auxquels il incombe de servir une pension, si elle résidait dans l'Etat membre concerné. Les prestations en nature sont servies pour le compte de l'institution visée au paragraphe 2 par l'institution du lieu de résidence, comme si l'intéressé bénéficiait de la pension et des prestations en nature selon la législation de cet Etat membre ". Aux termes, par ailleurs, du paragraphe 1 de l'article 30 du même règlement : " L'institution d'un État membre qui applique une législation prévoyant des retenues de cotisations pour la couverture des prestations de maladie, de maternité et de paternité assimilées, ne peut procéder à l'appel et au recouvrement de ces cotisations, calculées selon la législation qu'elle applique, que dans la mesure où les dépenses liées aux prestations servies en vertu des articles 23 à 26 sont à la charge d'une institution dudit État membre ". Il en résulte que les personnes qui perçoivent une pension de retraite en vertu de la législation française et résident dans un autre Etat membre selon la législation duquel elles ne bénéficient pas de prestations en nature peuvent bénéficier des prestations en nature auxquelles elles auraient droit si elles résidaient en France, ces prestations étant servies par l'institution de l'Etat membre où elles résident, selon la législation qui y est applicable, pour le compte et à la charge des caisses de sécurité sociale françaises. Ces personnes peuvent, par ailleurs, être soumises en France aux retenues de cotisations instituées pour la couverture des prestations de maladie, de maternité et de paternité assimilées en cause. Les personnes qui perçoivent une pension de retraite en vertu de la législation française et résident dans un autre Etat membre doivent, lorsqu'elles contestent le principe de leur assujettissement à de tels prélèvements, justifier non seulement de ce qu'elles sont affiliées au régime de sécurité sociale de leur Etat de résidence mais aussi que c'est en vertu de la législation de cet Etat qu'elles bénéficient de leurs prestations et non pour le compte des caisses de sécurité sociale françaises.

4. D'une part, M.B..., qui réside au Luxembourg et perçoit des pensions de retraite de source française, a été assujetti aux prélèvements indiqués au point 1. Si l'intéressé justifie, notamment par la production d'une copie de carte de sécurité sociale et de remboursements de soins intervenus en 2011 et 2015, de son affiliation au régime de sécurité sociale luxembourgeois, ces seuls éléments sont insuffisants pour établir que les prestations en nature qui lui ont été remboursées par la caisse nationale de santé luxembourgeoise l'ont été en vertu de la législation luxembourgeoise et non pour le compte d'un organisme de sécurité sociale français, alors qu'il résulte de l'instruction qu'il a sollicité le formulaire " S1 " qui certifie, avec effet à compter du 1er janvier 2012, de ses droits aux prestations de maladie en vertu de la législation française débitrice de ses pensions et permet une inscription auprès de l'institution compétente de l'Etat de résidence.

5. D'autre part, le prélèvement au titre de la contribution sociale généralisée et le prélèvement social ont notamment pour objet d'assurer le financement des prestations de maladie, de maternité et paternité assimilées. Ainsi, M. B... a pu être assujetti à ces contributions à concurrence de sa quote-part des plus-values immobilières réalisées par les deux SCI dont il était associé.

6. En revanche, il résulte des dispositions de l'ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996, de l'article L. 245-16 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable au litige, et de l'article L. 14-10-4 du code de l'action sociale et des familles que ni la contribution pour le remboursement de la dette sociale, ni la contribution additionnelle au prélèvement social n'ont pour objet d'assurer la couverture des prestations de maladie, de maternité et de paternité ou assimilées pour lesquelles l'article 30 précité du règlement du 29 avril 2004 prévoit une dérogation au principe d'unicité de la législation en matière de sécurité sociale. Par suite, l'administration ne peut pas soutenir que M. B...devait être assujetti à ces deux prélèvements.

7. Il résulte de ce qui précède que le ministre de l'économie et des finances est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal a déchargé M. D...du paiement de la contribution sociale généralisée et du prélèvement social mis à sa charge à raison des revenus du patrimoine au titre de l'année 2013.

Sur les frais liés à l'instance :

8. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de l'Etat, qui est la partie perdante pour l'essentiel, le versement à M. B...de la somme de 1 500 euros qu'il demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : La contribution sociale généralisée et le prélèvement social sont remis à la charge de M. D...au titre de l'année 2013 pour un montant de 53 856 euros.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 3 : Le jugement n° 1401385, 1401387, 1401388, 1401389 et 1401495 du 5 novembre 2015 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : L'Etat versera à M. B...une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B...et au ministre de l'action et des comptes publics.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18NC03448
Date de la décision : 14/05/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices.


Composition du Tribunal
Président : M. MARINO
Rapporteur ?: M. Stéphane BARTEAUX
Rapporteur public ?: Mme KOHLER
Avocat(s) : SOCIETE D'AVOCATS FIDAL DE VILLERS-LES-NANCY

Origine de la décision
Date de l'import : 21/05/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2019-05-14;18nc03448 ?
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