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21/03/2019 | FRANCE | N°17NC03020-17NC03021

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre - formation à 3, 21 mars 2019, 17NC03020-17NC03021


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...E...C...a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2009 et 2010, et des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1503594 du 7 novembre 2017, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

M. D... C...a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu

auxquelles il a été assujetti au titre des années 2009 et 2010, et des pénalités correspo...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...E...C...a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2009 et 2010, et des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1503594 du 7 novembre 2017, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

M. D... C...a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2009 et 2010, et des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1503734 du 7 novembre 2017, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

I.) Par une requête et un mémoire, enregistrés sous le n° 17NC03020, respectivement les 15 décembre 2017 et 20 juin 2018, M. D... E...C..., représenté par MeB..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 7 novembre 2017 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2009 et 2010, et des pénalités correspondantes ;

2°) de prononcer la décharge de ces impositions et des pénalités correspondantes ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- en refusant de communiquer à la SARL JAPM les justificatifs des tarifs de location recueillis, des années de référence et des fiches de location obtenues, l'administration a méconnu l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales ; l'irrégularité de la procédure d'imposition relative à la SARL JAPM entache d'irrégularité par voie de conséquence la procédure d'imposition concernant M.C... ;

- la proposition de rectification est entachée d'un défaut de motivation dès lors que le tarif de location fixé par l'administration ne correspond pas à la méthode de reconstitution annoncée par l'administration dans la proposition de rectification ; la proposition de rectification est insuffisamment motivée concernant les tarifs de location utilisés pour la reconstitution ;

- les termes de comparaison utilisés par l'administration ne sont pas pertinents ;

- les sociétés ayant servi de termes de comparaison supportent des frais qu'elle n'a pas à supporter, justifiant la fixation d'un tarif inférieur à ces sociétés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 2 mai 2018, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. C...ne sont pas fondés.

II.) Par une requête et un mémoire, enregistrés sous le n° 17NC03021, respectivement les 15 décembre 2017 et 20 juin 2018, M. D... C..., représenté par MeB..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 7 novembre 2017 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2009 et 2010, et des pénalités correspondantes ;

2°) de prononcer la décharge de ces impositions et des pénalités correspondantes ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soulève les mêmes moyens que ceux développés sous le n° 17NC03020.

Par un mémoire en défense, enregistré le 2 mai 2018, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête pour les mêmes motifs que ceux exposés sous le n° 17NC03020.

Vu :

- les autres pièces des dossiers.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Lambing,

- et les conclusions de Mme Peton, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Les requêtes n° 17NC03020 et 17NC03021 présentées respectivement par M. D... E...C...et M. D... C...présentent à juger des questions semblables. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un même arrêt.

2. La société à responsabilité limitée (SARL) JAPM, au sein de laquelle M. D...E...C...et M. D... C...sont associés, qui exerce une activité de promotion immobilière et de marchand de biens ainsi que depuis 2007 une activité de location de véhicules, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle, l'administration a notamment remis en cause le tarif auquel la société loue ses véhicules à ses deux associés et à l'épouse de M. D... E...C.... L'administration en a tiré les conséquences en regardant la renonciation à recettes résultant de ces tarifs comme un avantage occulte ayant généré des revenus distribués imposables entre les mains des associés et de Mme C...sur le fondement du c) de l'article 111 du code général des impôts. Par proposition de rectification du 16 octobre 2012, l'administration a notifié à MM. C...dans le cadre de la procédure de rectification contradictoire des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu au titre des années 2009 et 2010, et des pénalités correspondantes. MM. C...relèvent respectivement appel des jugements du 7 novembre 2017 par lesquels le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leurs demandes tendant à la décharge de ces impositions.

Sur l'étendue du litige :

3. Par une décision du 15 avril 2018, postérieure à l'introduction de la requête, le ministre de l'action et des comptes publics a prononcé, au bénéfice de M. D... E...C..., un dégrèvement au titre des années 2009 et 2010 à concurrence de la somme de 4 703 euros en droits et en pénalités. Par une décision du 18 avril 2018, postérieure à l'introduction de la requête, le ministre de l'action et des comptes publics a prononcé, au bénéfice de M. D...C..., un dégrèvement au titre des années 2009 et 2010 à concurrence de la somme de 3 234 euros en droits et en pénalités. Les conclusions des requêtes sont, dans cette mesure, devenues sans objet.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

4. En premier lieu, en vertu du principe d'indépendance des procédures d'imposition, les irrégularités qui auraient pu entacher la procédure d'imposition concernant la SARL JAPM sont sans influence sur l'imposition des revenus distribués à l'impôt sur le revenu de MM. C.... Ainsi, le moyen tiré de ce qu'en ne communiquant pas les documents sollicités par la SARL JAPM dans le cadre de la procédure contradictoire, l'administration fiscale aurait méconnu l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales doit être écarté.

5. En second lieu, aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation (...) ". D'une part, il résulte de ces dispositions que, pour être régulière, une proposition de rectification doit comporter la désignation de l'impôt concerné, de l'année d'imposition et de la base d'imposition, et énoncer les motifs sur lesquels l'administration entend se fonder pour justifier les redressements envisagés, de façon à permettre au contribuable de formuler ses observations de façon entièrement utile. En revanche, la régularité d'une proposition de rectification ne dépend pas du bien-fondé de ses motifs. D'autre part, lorsque l'administration entend fonder au moins en partie un redressement sur des éléments de comparaison issus de données chiffrées provenant d'autres entreprises, elle doit, pour assurer le caractère contradictoire de la procédure sans méconnaître le secret professionnel protégé par l'article L. 103 du livre des procédures fiscales, désigner nommément ces entreprises mais ne fournir au contribuable que des moyennes ne lui permettant pas de connaître, fût-ce indirectement, les données propres à chacune d'elles.

6. Il résulte de l'instruction que les propositions de rectification du 16 octobre 2012 notifiées à MM. C...indiquent les noms des entreprises retenues par l'administration comme termes de comparaison, en précisant les tarifs pratiqués et les conditions de location de ces sociétés. Ces éléments sont suffisants pour permettre aux requérants de présenter utilement leurs observations. La circonstance que les calculs réalisés par l'administration ne seraient pas cohérents avec la méthodologie indiquée dans la proposition de rectification n'a pas d'incidence sur la régularité de la procédure d'imposition dès lors qu'elle relève du bien-fondé des impositions. Il s'ensuit que les propositions de rectification du 16 octobre 2012 sont, contrairement à ce que soutiennent les requérants, suffisamment motivées.

Sur le bien fondé de l'imposition :

7. Aux termes de l'article 111 du code général des impôts : " Sont notamment considérés comme revenus distribués : (...) / c. Les rémunérations et avantages occultes (...) ". La preuve d'une telle distribution occulte doit être regardée comme apportée par l'administration lorsqu'est établie l'existence, d'une part, d'un écart significatif entre le prix convenu et la valeur vénale du bien cédé ou loué, d'autre part, d'une intention, pour la société, d'octroyer, et, pour le cocontractant, de recevoir, une libéralité du fait des conditions de la cession ou de la location.

8. Depuis 2007, la SARL JAPM exerce, parallèlement à son activité de marchands de biens, une activité de location de véhicules de tourisme. Dans le cadre de la vérification de comptabilité de la SARL JAPM, l'administration a constaté que la SARL JAPM a loué à MM. C... et à l'épouse de M. D...E...C...au cours des années 2009, 2010 et 2011 quatre véhicules. La société a pratiqué un tarif de location journalier hors taxes compris entre 58,15 et 59,45 euros pour un véhicule BMW X3, de 73,40 euros pour une BMW X6 et un tarif compris entre 35,21 et 39,07 euros pour une BMW série 1. En vue de déterminer si le prix de location pratiqué par la SARL JAPM avait un caractère normal, l'administration a fait usage de son droit de communication prévu aux articles L. 81 à L. 85 du livre des procédures fiscales auprès de sociétés de location de véhicules de tourisme. Deux entreprises ont répondu à l'administration. En complément, l'administration a consulté le site internet d'une troisième entreprise de location. A partir de ces éléments obtenus, l'administration a fixé le tarif de location journalier hors taxes à 451,50 euros pour la BMW X3, 626 euros pour la BMW X6 et à 127,92 euros pour la série 1. Dans son avis du 3 octobre 2014, la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires a évalué le prix unique journalier hors taxes de location du véhicule BMW X3 à 200 euros, du véhicule BMW X6 à 260 euros et du véhicule BMW série 1 à 100 euros. L'administration s'est conformée à cet avis et a reconstitué les recettes qui auraient dû être normalement perçues par la société. L'administration a ensuite considéré que MM. et A...C...ont été les bénéficiaires de la libéralité ainsi consentie correspondant à la minoration du prix de location des véhicules de tourisme fixé par la société et a rehaussé en conséquence leur revenu imposable au titre des années 2009 et 2010. MM. C... contestent la méthode de reconstitution utilisée par l'administration en soutenant que les termes de comparaison servant de base au rehaussement ne sont pas pertinents dès lors que deux sociétés ont une activité dans le domaine du luxe et que la troisième a un rayonnement mondial. Ils soutiennent également qu'un seul terme de comparaison a été utilisé par l'administration pour évaluer le tarif de location de la BMW série 1.

9. S'agissant du terme de comparaison utilisé par l'administration pour évaluer le tarif de location du véhicule BMW série 1, la circonstance que la société Sixt dispose internationalement d'agences de location ne suffit pas à considérer que cette société ne puisse pas être comparée à la SARL JAPM dès lors qu'il n'est pas justifié que cette présence dans plusieurs pays aurait une influence sur le tarif de location. Les conditions dans lesquelles la société Sixt loue ses véhicules peuvent être regardées comme étant comparables à celles de la SARL JAPM qui met également ses véhicules en location à destination de particuliers. Les frais de fonctionnement supportés par la société Sixt, qui justifieraient selon les requérants une réduction des tarifs de location retenus par l'administration, sont compensés par les conditions de location avantageuses proposées à MM. et A...C...par la SARL JAMP. Dès lors, ce seul terme de comparaison suffit à évaluer le tarif de location du véhicule série 1, MM. C...ne produisant au demeurant pas d'autres éléments de comparaison qui seraient plus appropriés. S'agissant des deux termes de comparaison utilisés par l'administration pour évaluer le tarif de location des véhicules BMW X3 et X6, l'administration n'a pu, dans le cadre de l'exercice de son droit de communication auprès de plusieurs sociétés de location, obtenir des éléments issus que des deux seules sociétés de location de véhicules Luxury Club et Just4 VIP. Cette circonstance démontre par conséquent que la location des véhicules BMW X3 et X6 constitue une prestation haut de gamme proposée à une clientèle limitée. En louant ces véhicules uniquement à ses associés et à leurs proches, la SARL JAPM propose ainsi une prestation comparable à celle des sociétés Luxury Club et Just4 VIP, qui peuvent dès lors servir de termes de comparaison. En outre, les conditions de location des quatre véhicules série 1, X3 et X6 accordées aux associés et à l'épouse de l'un deux étaient très avantageuses au regard des conditions normales appliquées par les entreprises de location, ces derniers bénéficiant d'un kilométrage illimité, d'une assurance tous risques et du paiement du prix au retour du véhicule. Il suit de là que l'administration apporte la preuve d'un écart significatif entre le prix de location convenu par la SARL JAPM pour les trois types de véhicules et le tarif devant être normalement pratiqué.

10. Compte tenu de l'importance de la minoration du prix de location des quatre véhicules en cause au bénéfice de MM. et A...C..., des fonctions d'associés de MM. C... et de gérant de M. D...E...C...au sein de la SARL JAPM au cours des années en litige, et de ce que MM. C...ne pouvaient légitimement ignorer, eu égard aux éléments qui précèdent, la valeur réelle des prestations de location, l'administration établit l'intention pour la SARL JAPM d'octroyer et pour MM. C...de recevoir une libéralité.

11. Il résulte de ce qui précède que l'administration était fondée à imposer, sur le fondement du c de l'article 111 du code général des impôts, l'avantage ainsi octroyé à MM. C... au titre des années 2009 et 2010.

12. Il résulte de tout ce qui précède que MM. C...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par les jugements attaqués, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leurs demandes.

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions aux fins de décharge de la requête de M. D... E...C...à concurrence du dégrèvement susmentionné prononcé au titre des années 2009 et 2010 pour un montant total de 4 703 euros, et de celle de M. D...C...à concurrence du dégrèvement susmentionné prononcé au titre des années 2009 et 2010 pour un montant total de 3 234 euros.

Article 2 : Le surplus des requêtes de MM. C...est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. D...E...C..., à M. D...C...et au ministre de l'action et des comptes publics.

2

N° 17NC03020,17NC03021


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17NC03020-17NC03021
Date de la décision : 21/03/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Analyses

19-04-01-02-03 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Règles générales. Impôt sur le revenu. Détermination du revenu imposable.


Composition du Tribunal
Président : M. MARTINEZ
Rapporteur ?: Mme Stéphanie LAMBING
Rapporteur public ?: Mme PETON
Avocat(s) : MARCE ANDRIEU MAQUENNE CARAMEL CREPIN

Origine de la décision
Date de l'import : 03/04/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2019-03-21;17nc03020.17nc03021 ?
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