La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

26/02/2019 | FRANCE | N°18NC01683

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre - formation à 3, 26 février 2019, 18NC01683


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B...a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 16 avril 2018 par lequel le préfet du Bas-Rhin a décidé son transfert vers la Hongrie.

Par un jugement n° 1802810 du 11 mai 2018, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 7 juin 2018, M. B..., représenté par Me A... de la SELARL Berard - Jemoli - Santelli - A..., demande à la cour

:

1°) d'annuler ce jugement du 11 mai 2018 ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B...a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 16 avril 2018 par lequel le préfet du Bas-Rhin a décidé son transfert vers la Hongrie.

Par un jugement n° 1802810 du 11 mai 2018, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 7 juin 2018, M. B..., représenté par Me A... de la SELARL Berard - Jemoli - Santelli - A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 11 mai 2018 ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 16 avril 2018 pris à son encontre par le préfet du Bas-Rhin ;

3°) d'enjoindre au préfet du Bas-Rhin de lui délivrer les formulaires nécessaires à l'enregistrement de sa demande d'asile sous le régime de la procédure normale dans un délai de huit jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 2 000 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- le jugement est irrégulier en ce que la décision notifiée ainsi que la minute ne sont pas signées en méconnaissance des dispositions de l'article R. 741-7 du code de justice administrative ;

- la décision de transfert en litige a été signée par une autorité incompétente ;

- elle méconnaît le paragraphe 2 de l'article 3 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 du Parlement européen et du Conseil en raison de la défaillance systémique de la Hongrie en matière de procédure et de conditions d'accueil des demandeurs d'asile ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article 17 du même règlement ;

- le préfet a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision quant à sa situation personnelle.

La requête a été communiquée au préfet du Bas-Rhin, qui n'a pas présenté de mémoire en défense.

Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office tiré de ce qu'il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions à fins d'annulation de la décision de transfert compte tenu de l'expiration du délai de six mois à compter de l'acceptation du transfert par l'Etat requis, interrompu jusqu'à la date à laquelle le tribunal administratif a statué au principal, rendant la France responsable de l'examen de la demande de protection internationale (CE, 24 septembre 2018, n° 420708).

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 19 juin 2018.

Un mémoire en réponse au moyen relevé d'office a été présenté pour M. B... et enregistré le 19 novembre 2018.

Il soutient que :

- le préfet du Bas-Rhin a prolongé le délai de transfert ;

- en tout état de cause, il appartient à la cour d'apprécier la légalité de la décision en litige et non de porter une appréciation quant à la possibilité ou l'impossibilité de l'exécuter.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Michel, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B... fait appel du jugement du 11 mai 2018 par lequel le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 16 avril 2018 du préfet du Bas-Rhin prononçant son transfert vers la Hongrie.

2. Aux termes du paragraphe 1 de l'article 29 du règlement n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013, le transfert du demandeur vers l'Etat membre responsable de l'examen de sa demande d'asile doit s'effectuer " dès qu'il est matériellement possible et, au plus tard, dans un délai de six mois à compter de l'acceptation par un autre Etat membre de la requête aux fins de la prise en charge ou de reprise en charge de la personne concernée ou de la décision définitive sur le recours ou la révision lorsque l'effet suspensif est accordé conformément à l'article 27, paragraphe 3 ". Aux termes du paragraphe 2 du même article : " Si le transfert n'est pas exécuté dans le délai de six mois, l'Etat membre responsable est libéré de son obligation de prendre en charge ou de reprendre en charge la personne concernée et la responsabilité est alors transférée à l'Etat membre requérant. Ce délai peut être porté à un an au maximum s'il n'a pas pu être procédé au transfert en raison d'un emprisonnement de la personne concernée ou à dix-huit mois au maximum si la personne concernée prend la fuite ".

3. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sous réserve du second alinéa de l'article L. 742-1, l'étranger dont l'examen de la demande d'asile relève de la responsabilité d'un autre Etat peut faire l'objet d'un transfert vers l'Etat responsable de cet examen ". Aux termes du I de l'article L. 742-4 de ce code : " L'étranger qui a fait l'objet d'une décision de transfert mentionnée à l'article L. 742-3 peut, dans le délai de quinze jours à compter de la notification de cette décision, en demander l'annulation au président du tribunal administratif. / Le président ou le magistrat qu'il désigne à cette fin (...) statue dans un délai de quinze jours à compter de sa saisine (...) ". Aux termes du second alinéa de l'article L. 742-5 du même code : " La décision de transfert ne peut faire l'objet d'une exécution d'office ni avant l'expiration d'un délai de quinze jours ou, si une décision de placement en rétention prise en application de l'article L. 551-1 ou d'assignation à résidence prise en application de l'article L. 561-2 a été notifiée avec la décision de transfert, avant l'expiration d'un délai de quarante-huit heures, ni avant que le tribunal administratif ait statué, s'il a été saisi ". L'article L. 742-6 du même code prévoit enfin que : " Si la décision de transfert est annulée, il est immédiatement mis fin aux mesures de surveillance prévues au livre V. L'autorité administrative statue à nouveau sur le cas de l'intéressé ".

4. Il résulte de la combinaison de ces dispositions que l'introduction d'un recours devant le tribunal administratif contre la décision de transfert a pour effet d'interrompre le délai de six mois fixé à l'article 29 du règlement (UE) n° 604/2013, qui courait à compter de l'acceptation du transfert par l'Etat requis, délai qui recommence à courir intégralement à compter de la date à laquelle le tribunal administratif statue au principal sur cette demande, quel que soit le sens de sa décision. Ni un appel ni le sursis à exécution du jugement accordé par le juge d'appel sur une demande présentée en application de l'article R. 811-15 du code de justice administrative n'ont pour effet d'interrompre ce nouveau délai. Son expiration a pour conséquence qu'en application des dispositions du paragraphe 2 de l'article 29 du règlement précité, l'Etat requérant devient responsable de l'examen de la demande de protection internationale.

5. Il ressort des pièces du dossier que l'arrêté du 16 avril 2018 par lequel le préfet du Bas-Rhin a ordonné le transfert de M. B... vers la Hongrie est intervenu moins de six mois après la décision par laquelle la Hongrie a donné son accord pour sa prise en charge, dans le délai d'exécution du transfert fixé par l'article 29 du règlement du 26 juin 2013. Ce délai a toutefois été interrompu par l'introduction par M. B... de son recours présenté contre cette décision sur le fondement de l'article L. 742-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Un nouveau délai de six mois a commencé à courir à compter du jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 11 mai 2018 qui, statuant au principal sur le recours, l'a rejeté. Par ailleurs, il ne ressort d'aucune pièce du dossier d'une part, que ce délai aurait été prolongé en application des dispositions précitées du paragraphe 2 de l'article 29 du règlement du 26 juin 2013, soit en raison d'un emprisonnement de l'intéressé soit au motif que celui-ci aurait pris la fuite, d'autre part que la décision de transfert aurait été exécutée au cours de ce délai de six mois, qui expirait le 11 novembre 2018. A cette date, par conséquent et en application des dispositions du paragraphe 2 de l'article 29 du règlement précité, la France est devenue responsable de l'examen de la demande de protection internationale de M. B.... Il s'ensuit que la décision de transfert est devenue caduque et ne pouvait plus être légalement exécutée. Cette caducité étant intervenue postérieurement à l'introduction de l'appel, les conclusions de la requête de M. B... tendant à l'annulation du jugement du 11 mai 2018 et de l'arrêté du 16 avril 2018 ordonnant son transfert vers la Hongrie, ainsi que ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte sont devenues sans objet. Il n'y a, dès lors, pas lieu d'y statuer.

6. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées par M. B... sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

D E C I D E :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de M. B... tendant à l'annulation du jugement du 11 mai 2018 du magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Strasbourg ainsi qu'à l'annulation de l'arrêté du 16 avril 2018 du préfet du Bas-Rhin et ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte.

Article 2 : Les conclusions présentées par M. B... sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Bas-Rhin.

2

N° 18NC01683


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18NC01683
Date de la décision : 26/02/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. KOLBERT
Rapporteur ?: M. Alexis MICHEL
Rapporteur public ?: M. LOUIS
Avocat(s) : BURKATZKI

Origine de la décision
Date de l'import : 05/03/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2019-02-26;18nc01683 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award