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31/01/2019 | FRANCE | N°18NC02020

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre - formation à 3, 31 janvier 2019, 18NC02020


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B...a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler l'arrêté du 16 février 2018 par lequel le préfet de la Marne a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligé de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être renvoyé.

Par un jugement n° 1800910 du 21 juin 2018, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête

et un mémoire, enregistrés le 18 juillet et le 4 octobre 2018, M. C... B..., représenté par MeA..., ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B...a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler l'arrêté du 16 février 2018 par lequel le préfet de la Marne a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligé de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être renvoyé.

Par un jugement n° 1800910 du 21 juin 2018, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 18 juillet et le 4 octobre 2018, M. C... B..., représenté par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 21 juin 2018 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 16 février 2018 par lequel le préfet de la Marne a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligé de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être renvoyé ;

2°) d'annuler cet arrêté du 16 février 2018 ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Marne de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de quinze jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir, ou à défaut de réexaminer sa situation dans un délai de trente jours, sous astreinte de 100 euros par jours de retard, et lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à son conseil en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

Sur le refus de titre de séjour :

- l'avis émis par le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ne mentionnant pas la durée du traitement nécessité par son état de santé, il est irrégulier ;

- l'avis du collège de médecins ne mentionne pas le nom du médecin qui a établi le rapport médical ;

- la convocation médicale qui lui a été adressée est irrégulière puisqu'elle ne mentionne pas la possibilité d'être assisté d'un interprète ou d'un médecin de son choix ;

- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation de sa situation au regard des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire :

- cette décision est dépourvue de base légale en raison de l'illégalité de la décision de refus de titre ;

- elle méconnaît les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Sur la décision fixant le pays de renvoi :

- cette décision est dépourvue de base légale en raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 5 et 16 octobre 2018, le préfet de la Marne conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. B...ne sont pas fondés.

M. B...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 23 août 2018.

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'arrêté du 27 novembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'arrêté du 5 janvier 2017 fixant les orientations générales pour l'exercice par les médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, de leurs missions, prévues à l'article L. 313-11 (11°) du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Lambing a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., né en 1966 de nationalité nigériane, serait entré irrégulièrement en France en février 2015 selon ses déclarations. Le 3 mars 2016, M. B... a déposé une demande de titre de séjour en raison de son état de santé. Il a obtenu une autorisation provisoire de séjour pour une durée de six mois, qui a été renouvelée une fois. Le 17 juillet 2017, M. B... a demandé le renouvellement de son droit à séjour en raison de son état de santé. Par arrêté du 16 février 2018, le préfet de la Marne a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être renvoyé. M. B... relève appel du jugement du 21 juin 2018 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté du 16 février 2018.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne la légalité du refus de titre de séjour :

2. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. (...) La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. Les médecins de l'office accomplissent cette mission dans le respect des orientations générales fixées par le ministre chargé de la santé. (...) ". L'article R. 313-22 du même code prévoit que : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu (...) d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (...) ". Aux termes de l'article R. 313-23 du même code : " Le rapport médical visé à l'article R. 313-22 est établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration à partir d'un certificat médical établi par le médecin qui le suit habituellement ou par un médecin praticien hospitalier inscrits au tableau de l'ordre, dans les conditions prévues par l'arrêté mentionné au deuxième alinéa de l'article R. 313-22. Le médecin de l'office peut solliciter, le cas échéant, le médecin qui suit habituellement le demandeur ou le médecin praticien hospitalier. Il en informe le demandeur. Il peut également convoquer le demandeur pour l'examiner et faire procéder aux examens estimés nécessaires. Le demandeur présente au service médical de l'office les documents justifiant de son identité (...) Il transmet son rapport médical au collège de médecins. Sous couvert du directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration le service médical de l'office informe le préfet qu'il a transmis au collège de médecins le rapport médical. (...) Le collège à compétence nationale, composé de trois médecins, émet un avis dans les conditions de l'arrêté mentionné au premier alinéa du présent article. La composition du collège et, le cas échéant, de ses formations est fixée par décision du directeur général de l'office. Le médecin ayant établi le rapport médical ne siège pas au sein du collège (...) ". Aux termes de l'article 4 de l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Pour l'établissement de son rapport médical, le médecin de l'office peut demander, dans le respect du secret médical, tout complément d'information auprès du médecin ayant renseigné le certificat médical et faire procéder à des examens complémentaires. Le médecin de l'office, s'il décide, pour l'établissement du rapport médical, de solliciter un complément d'information auprès du médecin qui a renseigné le certificat médical, en informe le demandeur. Il peut convoquer, le cas échéant, le demandeur auprès du service médical de la délégation territoriale compétente (...) ". Aux termes de l'article 6 de cet arrêté : " Au vu du rapport médical mentionné à l'article 3, un collège de médecins désigné pour chaque dossier dans les conditions prévues à l'article 5 émet un avis, conformément au modèle figurant à l'annexe C du présent arrêté, précisant : a) si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; b) si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; c) si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont le ressortissant étranger est originaire, il pourrait ou non y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; d) la durée prévisible du traitement. Dans le cas où le ressortissant étranger pourrait bénéficier effectivement d'un traitement approprié, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, le collège indique, au vu des éléments du dossier du demandeur, si l'état de santé de ce dernier lui permet de voyager sans risque vers ce pays. Cet avis mentionne les éléments de procédure. Le collège peut délibérer au moyen d'une conférence téléphonique ou audiovisuelle. L'avis émis à l'issue de la délibération est signé par chacun des trois médecins membres du collège ".

3. En premier lieu, il ne résulte d'aucune de ces dispositions, non plus que d'aucun principe, que l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration devrait porter mention du nom du médecin qui a établi le rapport médical, prévu par l'article R. 313-22, qui est transmis au collège de médecins de l'Office. Si l'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016 indique que l'avis mentionne " les éléments de procédure ", cette mention renvoie, ainsi qu'il résulte du modèle d'avis figurant à l'annexe C de l'arrêté, rendu obligatoire par cet article 6, à l'indication que l'étranger a été, ou non, convoqué par le médecin ou par le collège, à celle que des examens complémentaires ont été, ou non, demandés et à celle que l'étranger a été conduit, ou non, à justifier de son identité. Il s'ensuit que la circonstance que l'avis du collège de médecins du 5 février 2018, sur lequel le préfet s'est fondé en l'espèce pour prendre l'arrêté contesté, ne mentionne pas le nom du médecin qui a établi le rapport médical au vu duquel il a été émis ne rend pas irrégulière la procédure suivie par l'administration.

4. En deuxième lieu, M. B...soutient que la convocation médicale qui lui a été adressée le 30 octobre 2017, pour un rendez-vous fixé le 16 novembre 2017 auprès du service médical de la délégation territoriale de Reims, est irrégulière au motif qu'elle ne mentionne pas la possibilité d'être assisté d'un interprète ou d'un médecin de son choix. Il ressort des pièces du dossier que cette convocation émane du médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. Il ne résulte d'aucune des dispositions, et en particulier de celles de l'article R. 313-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de celles de l'article 4 de l'arrêté du 27 décembre 2016, non plus que d'aucun principe que cette convocation devait comporter de telles mentions. Par suite, le moyen exposé doit être écarté comme inopérant.

5. En troisième lieu, il ressort de l'avis émis le 5 février 2018 que le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a considéré que l'état de santé de M. B...nécessitait une prise en charge médicale, dont le défaut aurait des conséquences d'une exceptionnelle gravité, mais qu'il pouvait avoir accès à un traitement approprié dans son pays d'origine et que son état de santé lui permettait de voyager sans risque vers son pays d'origine. Dès lors que le collège avait estimé que la condition tenant à la disponibilité des soins dans le pays d'origine du requérant était remplie, il ne lui était pas nécessaire de mentionner la durée des soins nécessités par l'état de santé. Par suite, l'avis du 5 février 2018 n'est pas irrégulier.

6. En quatrième lieu, pour refuser la délivrance du titre de séjour sollicité par M. B... sur le fondement des articles cités au point 2, le préfet a estimé, conformément à l'avis émis le 5 février 2018 par le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, que, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut aurait pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, il a néanmoins accès à un traitement médical dans son pays d'origine. Il ressort des pièces du dossier, et notamment des pièces médicales produites par M.B..., que l'intéressé souffre d'apnée du sommeil et bénéficie d'une assistance respiratoire à domicile. Il effectue régulièrement des bilans sanguins et est régulièrement suivi par un cardiologue. Il s'est vu prescrire par ailleurs un traitement médicamenteux dont il n'est pas établi qu'il ne serait pas disponible au Nigéria. Le certificat médical d'un cardiologue du 25 avril 2018, postérieur à la décision attaquée, précise que l'état de santé du requérant requiert un traitement médicamenteux et non médicamenteux par pression positive continue, nécessitant une alimentation électrique, dont la continuité ne pourrait être pas assurée au Nigéria, selon le médecin, en raison de l'absence permanente d'électricité. Ainsi selon le cardiologue, le système d'assistance respiratoire dont bénéfice M. B...est disponible au Nigéria. Son appréciation concernant l'état du réseau électrique de ce pays est portée à titre personnel et ne traduit pas un point de vue médical. Dès lors, M. B...ne justifie pas de l'indisponibilité des soins dans son pays d'origine contrairement à ce qu'a estimé le collège de médecins. Il s'ensuit que le préfet n'a pas méconnu les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

En ce qui concerne la légalité de l'obligation de quitter le territoire français et de la décision fixant le pays de renvoi :

7. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à se prévaloir, à l'encontre des décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi de l'illégalité de la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour.

8. En second lieu, aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...)10° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié (...) ".

9. Il résulte de ce qui a été dit au point 6 et pour les mêmes motifs, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.

10. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement contesté, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande. Il y a lieu de rejeter, par voie de conséquence, les conclusions aux fins d'injonction et celles tendant à l'application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B...et au ministre de l'intérieur.

Une copie du présent arrêt sera adressée au préfet de la Marne.

2

N° 18NC02020


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18NC02020
Date de la décision : 31/01/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. DHERS
Rapporteur ?: Mme Stéphanie LAMBING
Rapporteur public ?: Mme PETON
Avocat(s) : SCP MARIN-COUVREUR

Origine de la décision
Date de l'import : 19/02/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2019-01-31;18nc02020 ?
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