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29/01/2019 | FRANCE | N°17NC03043-18NC00185

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre - formation à 3, 29 janvier 2019, 17NC03043-18NC00185


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Athanor a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler le titre de perception émis à son encontre le 30 septembre 2014 par la communauté urbaine de Strasbourg, devenue l'Eurométropole de Strasbourg, pour un montant de 12 300 euros.

Par un jugement n° 1405829 du 2 novembre 2017, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête et un mémoire, enregistrés les 19 décembre 2017 et 11 octobre 2018, sous le

n° 17NC03043, la société Qui Plus Est, venant aux droits de la société Athanor, représentée p...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Athanor a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler le titre de perception émis à son encontre le 30 septembre 2014 par la communauté urbaine de Strasbourg, devenue l'Eurométropole de Strasbourg, pour un montant de 12 300 euros.

Par un jugement n° 1405829 du 2 novembre 2017, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête et un mémoire, enregistrés les 19 décembre 2017 et 11 octobre 2018, sous le n° 17NC03043, la société Qui Plus Est, venant aux droits de la société Athanor, représentée par MeB..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 2 novembre 2017 ;

2°) d'annuler le titre de perception du 30 septembre 2014 ;

3°) de mettre à la charge de l'Eurométropole de Strasbourg le versement d'une somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement attaqué est entaché d'un défaut de motivation ;

- le tribunal a omis de répondre aux moyens tirés de ce que les délais d'exécution du marché indiqués dans l'acte d'engagement du marché ont une valeur supérieure à ceux figurant dans son mémoire technique, de ce que le décompte du marché n'est pas signé par la personne responsable du marché, de ce que ce décompte se réfère au cahier des clauses administratives générales relatif aux fournitures et services, non applicable au marché en litige, et de ce que le décompte comporte des dates ne correspondant à rien ;

- le jugement est irrégulier dès lors que, contrairement à ce qu'a estimé le tribunal, la contestation contentieuse d'un titre exécutoire en vue du recouvrement d'une créance née de l'exécution du marché n'est pas subordonnée au respect de la procédure prévue au second alinéa de l'article 37 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de prestations intellectuelles ;

- le tribunal a commis une erreur de droit constitutive d'une irrégularité, en rejetant sa demande sur le fondement de l'article 37 du même cahier alors que le décompte de résiliation qui ne comportait pas les mentions obligatoires prévues par l'article 34.3 de ce document n'était pas devenu définitif ;

- les délais de recours du titre de perception ne lui étaient pas opposables et sa demande était donc recevable ;

- le décompte n'est pas devenu définitif dès lors qu'il n'indique pas le montant concernant les avances et les acomptes, les règlements partiels définitifs et la valeur des prestations fournies, et qu'en méconnaissance des stipulations de l'article 34 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de prestations intellectuelles, il n'est pas signé par le président de l'Eurométropole ou le directeur général adjoint ou le chef du service juridique ;

- les retards n'étaient pas imputables à la société Athanor, qui a respecté les délais impartis par les pièces du marché en livrant le diagnostic prévu au contrat au mois de janvier 2013 ;

- les pénalités de retards sont d'un montant manifestement excessif ;

- la société n'a pu contester le décompte général dans un délai de deux mois en raison d'un cas de force majeure lié à l'état de santé de ses deux associés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 5 mars 2018, l'Eurométropole de Strasbourg, représentée par MeA..., conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de la société Qui Plus Est le versement d'une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement n'est pas irrégulier ;

- la société Qui Plus Est ne peut se prévaloir de moyens tendant à remettre en cause le décompte définitif à l'appui de ses conclusions tendant à l'annulation du titre de perception en litige ;

- la société Athanor n'a pas contesté dans un délai de deux mois le décompte général du marché qui lui a été notifié et, par suite, en application des stipulations de l'article 37 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de prestations intellectuelles, ce décompte a acquis un caractère définitif ;

- les moyens tendant à remettre en cause le caractère définitif du décompte en raison de la méconnaissance des stipulations de l'article 34 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de prestations intellectuelles sont inopérants et, subsidiairement, ils ne sont pas fondés ;

- les retards sont imputables à la société Athanor et les pénalités sont justifiées ;

- le montant des pénalités n'est pas manifestement excessif ;

- la société requérante ne justifie pas du cas de force majeure qu'elle invoque.

II. Par une requête et un mémoire, enregistrés les 22 janvier 2018 et 11 octobre 2018, sous le n° 18NC00185, la société Qui Plus Est, venant aux droits de la société Athanor, représentée par MeB..., demande à la cour :

1°) de prononcer, sur le fondement de l'article R. 811-17 du code de justice administrative, le sursis à exécution de ce jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 2 novembre 2017 ;

2°) de mettre à la charge de l'Eurométropole de Strasbourg le versement d'une somme de 1 200 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle présente les mêmes moyens que dans sa requête n°17NC03043.

Par un mémoire en défense, enregistré le 6 mars 2018, l'Eurométropole de Strasbourg, représentée par MeA..., conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de la société Qui Plus Est le versement d'une somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir les mêmes moyens que ceux qu'elle a présentés dans l'instance n° 17NC03043.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code des marchés publics ;

- l'arrêté du 16 septembre 2009 portant approbation du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de prestations intellectuelles ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Michel, premier conseiller,

- les conclusions de M. Louis, rapporteur public,

- et les observations de Me A...pour l'Eurométropole de Strasbourg.

Considérant ce qui suit :

1. Les requêtes n° 17NC03043 et n° 18NC00185 de la société Qui Plus Est sont dirigées contre un même jugement. Il y a lieu de les joindre pour qu'elles fassent l'objet d'un même arrêt.

2. Par un acte d'engagement du 8 octobre 2012, la communauté urbaine de Strasbourg, devenue l'Eurométropole de Strasbourg, a conclu avec la société Athanor un marché relatif à l'élaboration du règlement local de publicité applicable sur le territoire de l'intercommunalité. Par un courrier du 27 février 2014, l'Eurométropole de Strasbourg a résilié ce marché pour faute, en invoquant des retards dans son exécution. Par un courrier du même jour, elle a notifié à la société Athanor le décompte de résiliation du marché, mettant à sa charge un montant de 12 300 euros au titre des pénalités de retard. Le 30 septembre 2014, l'Eurométropole de Strasbourg a émis à l'encontre de la société Athanor un titre de perception d'un montant de 12 300 euros en vue du recouvrement de cette somme. La société Qui Plus Est, venant aux droits de la société Athanor, fait appel du jugement du 7 novembre 2017 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ce titre de perception.

3. Aux termes de l'article 34.1 du cahier des clauses administratives générales relatif aux prestations intellectuelles, applicable au marché en vertu de l'article 2 de l'acte d'engagement : " La résiliation fait l'objet d'un décompte de résiliation, qui est arrêté par le pouvoir adjudicateur et notifié au titulaire (...) ". Et aux termes de l'article 37 du même cahier : " Le pouvoir adjudicateur et le titulaire s'efforceront de régler à l'amiable tout différend éventuel relatif à l'interprétation des stipulations du marché ou à l'exécution des prestations objet du marché. / Tout différend entre le titulaire et le pouvoir adjudicateur doit faire l'objet, de la part du titulaire, d'une lettre de réclamation exposant les motifs de son désaccord et indiquant, le cas échéant, le montant des sommes réclamées. Cette lettre doit être communiquée au pouvoir adjudicateur dans le délai de deux mois, courant à compter du jour où le différend est apparu, sous peine de forclusion. / Le pouvoir adjudicateur dispose d'un délai de deux mois, courant à compter de la réception de la lettre de réclamation, pour notifier sa décision. L'absence de décision dans ce délai vaut rejet de la réclamation ".

4. En premier lieu, il résulte de l'instruction que, par un courrier du 27 février 2014, régulièrement notifié le 5 mars 2014, l'Eurométropole de Strasbourg, maître d'ouvrage, a informé la société Athanor de sa décision de résilier le marché, et qu'elle a joint à ce courrier le décompte de résiliation. Il est constant que la société Athanor n'a pas présenté de mémoire de réclamation pour contester ce décompte. Si la société s'est prévalue, pour la première fois devant le tribunal, des nombreuses irrégularités dont aurait été entaché le décompte de résiliation du 27 février 2014, il lui appartenait toutefois, à peine de forclusion, de faire valoir ces objections dans un délai de deux mois à compter du 5 mars 2014, conformément aux stipulations précitées de l'article 37 du cahier des clauses administratives générales relatif aux prestations intellectuelles. En outre, la société requérante n'établit pas que la société Athanor se serait trouvée dans l'impossibilité de présenter un mémoire en réclamation dans ce délai en raison d'un cas de force majeure, auquel, au demeurant, ne saurait être assimilé l'état de santé de ses deux associés dont il n'est, en outre, pas justifié. Le décompte du marché étant, dans ces conditions, déjà devenu définitif, la société Qui Plus Est ne peut pas, contrairement à ce qu'elle soutient, contester pour la première fois le bien fondé des créances dont le titre de perception du 30 septembre 2014 a pour objet d'assurer le recouvrement, à l'occasion du recours qu'elle a introduit contre ce titre de perception. Par suite, les moyens tirés du caractère infondé ou excessif des pénalités de retard doivent, ainsi que l'a décidé le tribunal administratif dont le jugement, sur ce point, n'est ni insuffisamment motivé ni, en tout état de cause, irrégulier, être écartés.

5. De même et en second lieu, le caractère définitif du décompte de résiliation du marché fait obstacle à ce que la société Qui Plus Est puisse invoquer à l'occasion de la contestation du titre de perception visant à assurer le recouvrement du solde dont elle est débitrice, constitué par les pénalités de retard, les moyens visant à remettre en cause tant, ainsi qu'il a été dit, le bien fondé de ces pénalités que la régularité du décompte. Il en est ainsi de ses moyens tirés de ce que les délais d'exécution du marché indiqués dans l'acte d'engagement du marché auraient une valeur supérieure à ceux figurant dans son mémoire technique, de ce que le décompte du marché ne serait pas signé par la personne responsable du marché, de ce qu'il se réfèrerait au cahier des clauses administratives générales relatif aux fournitures et services qui ne serait pas applicable au marché et enfin de ce qu'il comporterait des dates ne correspondant à aucune réalité. Ces moyens doivent donc être écartés comme inopérants. Le tribunal administratif n'a, pour ce même motif, commis aucune irrégularité en s'abstenant de répondre explicitement à de tels moyens, alors même qu'il les a visés dans son jugement.

6. Il résulte de ce qui précède, et en l'absence d'autres moyens venant au soutien de la contestation du titre de perception du 30 septembre 2014, que la société Qui Plus Est n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ce titre de perception.

7. Le présent arrêt statue sur les conclusions tendant à l'annulation du jugement n° 1405829 du tribunal administratif de Strasbourg du 2 novembre 2017. Il n'y a, par suite, plus lieu de statuer sur les conclusions de la société Qui Plus Est tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement.

8. Enfin, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Eurométropole de Strabourg, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que la société Qui Plus Est demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu en revanche de mettre à la charge de la société Qui Plus Est le versement d'une somme de 1 500 euros à l'Eurométropole de Strasbourg sur le fondement des mêmes dispositions.

D E C I D E :

Article 1er : La requête n° 17NC03043 de la société Qui Plus Est est rejetée.

Article 2 : Il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions de la requête n° 18NC00185 de la société Qui Plus Est à fin de sursis à exécution du jugement du 2 novembre 2017.

Article 3 : Les conclusions de la requête n° 18NC00185 de la société Qui Plus Est présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La société Qui Plus Est versera à l'Eurométropole de Strasbourg une somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la société Qui Plus Est et à l'Eurométropole de Strasbourg.

2

Nos 17NC03043 - 18NC00185


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17NC03043-18NC00185
Date de la décision : 29/01/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-05-02-01 Marchés et contrats administratifs. Exécution financière du contrat. Règlement des marchés. Décompte général et définitif.


Composition du Tribunal
Président : M. KOLBERT
Rapporteur ?: M. Alexis MICHEL
Rapporteur public ?: M. LOUIS
Avocat(s) : Cabinet Aldo SEVINO

Origine de la décision
Date de l'import : 05/02/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2019-01-29;17nc03043.18nc00185 ?
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