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27/12/2018 | FRANCE | N°17NC01428

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre - formation à 3, 27 décembre 2018, 17NC01428


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée (SARL) Sogest a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés mises à sa charge au titre des années 2010 et 2011 et des pénalités mises à sa charge sur le fondement des articles 1737 et 1763 du code général des impôts au titre des années 2009 à 2011.

Par un jugement n° 1404403 du 19 avril 2017, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procé

dure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 19 juin 2017, la SARL Sogest, représentée p...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée (SARL) Sogest a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés mises à sa charge au titre des années 2010 et 2011 et des pénalités mises à sa charge sur le fondement des articles 1737 et 1763 du code général des impôts au titre des années 2009 à 2011.

Par un jugement n° 1404403 du 19 avril 2017, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 19 juin 2017, la SARL Sogest, représentée par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1404403 du tribunal administratif de Strasbourg du 19 avril 2017 ;

2°) de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés mises à sa charge au titre des années 2010 et 2011 et des pénalités mises à sa charge sur le fondement des articles 1737 et 1763 du code général des impôts au titre des années 2009 à 2011 ;

3°) subsidiairement, de ramener la pénalité mise à sa charge sur le fondement de l'article 1763 du code général des impôts à 10 748 euros ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- elle avait produit un mémoire en première instance le 19 mars 2017 ; ce mémoire visait à démontrer la consistance de l'apport réalisé par M. et Mme A...et il comportait en annexe deux pièces de nature à justifier la réduction d'assiette de la pénalité de l'article 1763 du code général des impôts ; ce mémoire n'a pas été communiqué en temps utile à l'administration ; ce mémoire et ces pièces n'ont pas été visés ; par suite, le jugement est entaché d'irrégularité ;

- l'administration s'est fondée sur des informations obtenues auprès de tiers qui n'étaient pas librement accessibles ; par conséquent, en refusant de les communiquer, elle a méconnu l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales ;

- la base de l'amende liquidée sur le fondement de l'article 1763 du code général des impôts est surévaluée de 128 057 euros ;

- les dispositions de l'article 1763 du code général des impôts sont contraires à l'article 8 de la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen de 1789 ;

- la pénalité de l'article 1737 du code général des impôts ne pouvait s'appliquer à des opérations privées du droit d'exonération de la taxe sur la valeur ajoutée.

Par un mémoire en défense, enregistré le 28 décembre 2017, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au non-lieu à statuer partiel et au rejet du surplus de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens soulevés n'est fondé.

Vu

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen de 1789 ;

- l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Dhers,

- et les conclusions de Mme Peton, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La société à responsabilité limitée (SARL) Sogest, qui exerce une activité de commerce de gros de fournitures et équipements divers destinés aux professionnels de la boucherie, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité du 12 octobre 2012 au 27 mai 2013. A l'issue de ce contrôle, dans le cadre de la procédure contradictoire, l'administration a notamment mis en recouvrement le 29 novembre 2013 des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés au titre des années 2010 et 2011 et des amendes sur le fondement du II de l'article 1737 du code général des impôts et sur celui du e du I de l'article 1763 de ce code. La SARL Sogest a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et des amendes mises à sa charge. Par un jugement rendu le 19 avril 2017, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté ses demandes. La société requérante relève appel de ce jugement.

Sur l'étendue du litige portant sur la pénalité de l'article 1763 du code général des impôts :

2. Aux termes de l'article 1763 du code général des impôts : " I. - Entraîne l'application d'une amende égale à 5 % des sommes omises le défaut de production ou le caractère inexact ou incomplet des documents suivants : (...) d. Registre mentionné au II de l'article 54 septies ; e. Etat prévu au IV de l'article 41, au I de l'article 54 septies (...) ".

3. La SARL Sogest sollicite la décharge de la pénalité qui lui a été infligée au titre de l'année 2009 sur le fondement de l'article 1763 du code général des impôts. Par une décision du 18 octobre 2018, postérieure à l'introduction de la requête, le ministre de l'action et des comptes publics a prononcé, au bénéfice de la SARL Sogest, un dégrèvement au titre de cette pénalité à concurrence de 6 403 euros. Les conclusions de la requête sont, dans cette mesure, devenues sans objet.

Sur la régularité du jugement attaqué :

4. Il ressort des mentions du jugement contesté que, contrairement à ce que la SARL Sogest soutient, le tribunal administratif a visé son mémoire enregistré le 19 mars 2017 et, en tout état de cause, il a été communiqué le lendemain au défendeur. Par suite, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que le jugement attaqué serait sur ce point irrégulier.

Sur les conclusions à fin de décharge des rappels d'impôt sur les sociétés :

5. Aux termes de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales : " L'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 ou de la notification prévue à l'article L. 76. Elle communique, avant la mise en recouvrement, une copie des documents susmentionnés au contribuable qui en fait la demande ". Il incombe à l'administration, quelle que soit la procédure d'imposition mise en oeuvre, et au plus tard avant la mise en recouvrement, d'informer le contribuable dont elle envisage soit de rehausser, soit d'arrêter d'office les bases d'imposition, de l'origine et de la teneur des renseignements obtenus auprès de tiers, qu'elle a utilisés pour fonder les impositions, avec une précision suffisante pour permettre à l'intéressé de demander que les documents qui contiennent ces renseignements soient mis à sa disposition avant la mise en recouvrement des impositions qui en procèdent. Lorsque le contribuable lui en fait la demande, l'administration est tenue, sauf dans le cas d'informations librement accessibles au public, de lui communiquer les documents ou copies de documents contenant les renseignements obtenus auprès de tiers qui lui sont opposés, afin de lui permettre d'en vérifier l'authenticité ou d'en discuter la teneur ou la portée.

6. Il résulte de l'instruction que, pour remettre en cause la déduction des sommes mentionnées dans les factures adressées par la société luxembourgeoise à la SARL Sogest au cours des exercices 2010 et 2011, l'administration s'est fondée sur des renseignements qu'elle a obtenus sur la société SG Mat par la consultation du registre du commerce et des sociétés luxembourgeois. Ces informations ont été communiquées à la société requérante sous la forme de pièces jointes à la réponse aux observations du contribuable qui lui a été adressée le 27 septembre 2013. Il est constant que cette réponse est parvenue à la SARL Sogest avant le 29 novembre 2013, date de mise en recouvrement des rappels d'impôt sur les sociétés contestés. En tout état de cause, ces informations sont accessibles au public, peu important la circonstance que leur accès soit payant. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales ne peut qu'être écarté.

Sur les conclusions à fin de décharge des pénalités infligées à la SARL Sogest sur le fondement du II de l'article 1737 du code général des impôts :

7. Aux termes de l'article 262 ter du code général des impôts : " I. - Sont exonérés de la taxe sur la valeur ajoutée : 1° Les livraisons de biens expédiés ou transportés sur le territoire d'un autre Etat membre de la Communauté européenne à destination d'un autre assujetti ou d'une personne morale non assujettie (...) ". Aux termes de l'article 289 de ce code dans sa rédaction applicable au litige : " I.-1. Tout assujetti est tenu de s'assurer qu'une facture est émise, par lui-même, ou en son nom et pour son compte, par son client ou par un tiers (...) II. Un décret en Conseil d'Etat fixe les mentions obligatoires qui doivent figurer sur la facture. Ce décret détermine notamment les éléments d'identification des parties, les données concernant les biens livrés ou les services rendus et celles relatives à la détermination de la taxe sur la valeur ajoutée (...) ". Aux termes de l'article 242 nonies A de l'annexe II à ce code, dans sa rédaction en vigueur à la période concernée : " Les mentions obligatoires qui doivent figurer sur les factures en application du II de l'article 289 du code général des impôts sont les suivantes : (...) 11° Le montant de la taxe à payer et, par taux d'imposition, le total hors taxe et la taxe correspondante mentionnés distinctement ; 12° En cas d'exonération (...), la référence à la disposition pertinente du code général des impôts ou à la disposition correspondante de la directive 77/388/CEE du 17 mai 1977 ou à toute autre mention indiquant que l'opération bénéficie d'une mesure d'exonération (...) ". Aux termes de l'article 1737 du même code : " (...) II. Toute omission ou inexactitude constatée dans les factures ou documents en tenant lieu mentionnés aux articles 289 et 290 quinquies donne lieu à l'application d'une amende de 15 €. Toutefois, le montant total des amendes dues au titre de chaque facture ou document ne peut excéder le quart du montant qui y est ou aurait dû y être mentionné ".

8. Dans sa proposition de rectification du 21 décembre 2012, l'administration a envisagé l'application de l'amende prévue par les dispositions précitées du II de l'article 1737 du code général des impôts pour des factures placées par la SARL Sogest sous le régime des livraisons intracommunautaires sur lesquelles la mention " exonérations de TVA, art 262 ter I du CGI " était omise, le vérificateur ayant par ailleurs estimé que la preuve de l'existence de telles livraisons n'était pas établie. L'administration fait valoir, sans être contestée, que l'amende envisagée au titre de l'année 2009 a été abandonnée au stade du recours hiérarchique et qu'aucune amende n'a été mise en recouvrement au titre des années ultérieures. Par suite, les conclusions de la société requérante tendant à la décharge de telles amendes ne peuvent qu'être rejetées.

Sur le surplus des conclusions de la SARL Sogest tendant à la décharge de la pénalité qui lui a été infligée sur le fondement de l'article 1763 du code général des impôts :

9. La SARL Sogest fait valoir que la pénalité litigieuse est contraire aux dispositions de l'article 8 de la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen de 1789. Un tel moyen doit être écarté dès lors qu'il n'appartient pas au juge administratif, en dehors des cas et conditions prévus par le chapitre II bis du titre II de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, relatif à la question prioritaire de constitutionnalité, d'apprécier la constitutionnalité de dispositions législatives.

Sur les conclusions présentées par la SARL Sogest au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ".

11. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme au titre des frais exposés par la SARL Sogest et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions aux fins de décharge de la requête de la SARL Sogest à concurrence du dégrèvement susmentionné de 6 403 euros prononcé au titre de la pénalité infligée sur le fondement de l'article 1763 du code général des impôts pour l'année 2009.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de la SARL Sogest est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Sogest et au ministre de l'action et des comptes publics.

5

N° 17NC01428


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17NC01428
Date de la décision : 27/12/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Analyses

19-01-04-015 Contributions et taxes. Généralités. Amendes, pénalités, majorations.


Composition du Tribunal
Président : M. MARTINEZ
Rapporteur ?: M. Stéphane DHERS
Rapporteur public ?: Mme PETON
Avocat(s) : FREULET

Origine de la décision
Date de l'import : 15/01/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2018-12-27;17nc01428 ?
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