Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C...B...a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler l'arrêté du 8 décembre 2017 par lequel le préfet de la Marne a refusé de lui accorder un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de son éloignement.
Par un jugement no 1800055 du 29 mars 2018, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 26 avril 2018, M. C...B..., représenté par MeA..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement no 1800055 du 29 mars 2018 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 8 décembre 2017 par lequel le préfet de la Marne a refusé de lui accorder un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français avec un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de son éloignement ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à son conseil en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour :
- elle méconnaît les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
- elle méconnaît les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :
- elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
M. B...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 24 mai 2018.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Barteaux a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M.B..., de nationalité ukrainienne, né en 1974, est entré irrégulièrement en France, selon ses déclarations en 2014. Sa demande d'asile, présentée sous une fausse identité, a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et par la Cour nationale du droit d'asile. L'intéressé a alors sollicité un titre de séjour en se prévalant de son état de santé. Par un arrêté du 8 décembre 2017, le préfet de la Marne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit. Par un jugement du 29 mars 2018, dont il relève appel, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande.
Sur le bien-fondé du jugement :
En ce qui concerne la décision de refus de titre de séjour :
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...)11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. Les médecins de l'office accomplissent cette mission dans le respect des orientations générales fixées par le ministre chargé de la santé. Chaque année, un rapport présente au Parlement l'activité réalisée au titre du présent 11° par le service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ainsi que les données générales en matière de santé publique recueillies dans ce cadre ".
3. Il ressort des pièces du dossier que M.B..., qui souffre d'une cardiopathie, a subi une opération chirurgicale en Ukraine en 2003, qui a consisté dans la pose de valves. A la suite de son entrée en France, en 2016, il y a subi une seconde intervention qui a consisté dans l'implantation d'un défibrilateur automatique. Par un avis émis le 30 juin 2011, le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) a estimé que si l'état de santé de l'appelant nécessite une prise en charge médicale, dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, il peut toutefois bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine. Les pièces médicales produites par l'intéressé, notamment une attestation d'un médecin généraliste du 3 janvier 2018 et des courriers du médecin qui le suit, qui se bornent à rappeler les interventions qu'il a subies, le suivi régulier dont il fait l'objet et les médicaments qu'il prend, ne sont pas de nature à remettre en cause l'avis précité concernant la disponibilité des soins en Ukraine. Par ailleurs, les articles de presse généraux sur la situation sanitaire dans l'Est de l'Ukraine ne permettent pas d'établir que l'appelant ne pourra pas accéder effectivement au traitement nécessaire à son état de santé dès lors que les difficultés qu'ils relatent sont circonscrites à la zone de conflit. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée, du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.
4. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de cette convention : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
5. Il ressort des pièces du dossier que M. B...est célibataire et sans enfant. S'il fait valoir que sa mère réside en France et qu'il n'a plus aucune attache familiale dans son pays d'origine, il n'établit pas y être dépourvu de tout lien personnel alors qu'il y a vécu jusqu'à l'âge de quarante ans. En outre, il ne justifie pas de son intégration dans la société française. Dans ces conditions la décision contestée n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise. Elle n'a, par suite, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
6. En dernier lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'en refusant la délivrance d'un titre de séjour à M.B..., le préfet de la Marne aurait entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation.
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
7. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que M. B...n'a pas établi l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour. Il s'ensuit que le moyen, tiré par la voie de l'exception, de l'illégalité de cette décision doit être écarté.
8. En second lieu, pour les même motifs que ceux exposés au point 3, la décision portant obligation de quitter le territoire ne méconnaît pas les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée, du séjour des étrangers et du droit d'asile.
En ce qui concerne le moyen dirigé contre la décision fixant le pays de destination :
9. Aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".
10. Il ne ressort pas des pièces du dossier que le retour de M. B...en Ukraine l'exposera à un traitement inhumain ou dégradant dès lors que, selon l'avis du collège de médecins de l'OFII, un suivi et des soins adaptés à son état de santé peuvent y être assurés. Il s'ensuit que le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.
11. Il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande.
Sur les frais de l'instance :
12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que M. B...demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...B...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée pour information au préfet de la Marne.
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No 17NC01320