Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A...C...a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler la décision implicite de rejet née du silence gardé par le préfet de Meurthe-et-Moselle sur sa demande tendant au renouvellement de sa carte de résident algérien valable dix ans et une décision retirant celle du 23 janvier 2013 par laquelle le préfet de Meurthe-et-Moselle avait décidé de lui renouveler son certificat de résidence.
Par un jugement n° 1601025 du 29 décembre 2017, le tribunal administratif de Nancy a annulé la décision de retrait précitée et rejeté le surplus des conclusions de la requête de M.C....
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 27 février 2018, le préfet de Meurthe-et-Moselle demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il a annulé une décision de retrait de celle du 23 janvier 2013 par laquelle il avait décidé de lui renouveler sa carte de résident algérien ;
2°) de rejeter la demande de M.C....
Il soutient que c'est à tort que le tribunal a jugé que le courrier qu'il a adressé à M. C... le 31 mai 2016 était une décision faisant grief ; que ce courrier avait uniquement pour objet d'indiquer à M. C...qu'il bénéficiait du droit d'être entendu par la commission du titre de séjour ; que le défendeur a d'ailleurs saisi cette commission ; sa décision définitive n'est intervenue que le 22 décembre 2016, après avis de la commission du titre de séjour ; que par cette décision, il lui a accordé un certificat de résidence portant la mention " vie privée et familiale ".
Par un mémoire en défense, enregistré le 24 août 2018, M.C..., représenté par Me B...conclut au rejet de la requête et demande en outre à la cour :
1°) par la voie d'un appel incident, d'annuler la décision retirant la décision du 23 janvier 2013 par laquelle le préfet de Meurthe-et-Moselle avait décidé de lui renouveler sa carte de résident algérien ;
2°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer un certificat de résidence valable dix ans dans le délai d'un mois à compter du présent arrêt ou, subsidiairement, de réexaminer sa situation et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler, dans le délai de trois mois à compter du présent arrêt ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 800 euros au bénéfice de son conseil en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- il a reçu un courrier daté du 23 janvier 2013 indiquant que le préfet de Meurthe-et-Moselle avait décidé de renouveler son certificat de résidence ; cependant, aucun titre de séjour ne lui a été délivré ; le retrait de la décision du préfet de Meurthe-et-Moselle du 23 janvier 2013 est révélé par le fait qu'il n'a jamais reçu son titre de séjour ; une telle décision fait grief ;
- le préfet ne pouvait pas retirer sa décision du 23 janvier 2013, sans le mettre en mesure, préalablement, de présenter ses observations ;
- il n'a pas eu communication des motifs de la décision de retrait ;
- la décision de retrait est contraire aux stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.
Par une décision du bureau d'aide juridictionnelle de Nancy en date du 17 avril 2018, M. C...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.
Vu :
- les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord du 27 décembre 1968 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République algérienne démocratique et populaire relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles, modifié ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience.
Par une lettre du 17 septembre 2018, la cour a informé les parties, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de l'irrecevabilité des conclusions à fins d'annulation présentées par M.C..., dès lors que le défendeur a obtenu satisfaction en première instance sur ce point.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Dhers a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que M.C..., ressortissant algérien né le 28 décembre 1997, est entré en France irrégulièrement le 17 novembre 1992 ; qu'un certificat de résidence de dix ans lui a été délivré, valable jusqu'au 9 juillet 2005 ; que M. C...a été condamné à deux mois d'emprisonnement avec sursis le 19 février 2003 pour délit de fuite après un accident ; que, par un arrêt de la cour d'assises de l'Ain du 4 avril 2006, il a été condamné à une peine de réclusion criminelle de vingt ans, assortie d'une période de sûreté de dix ans, pour homicide volontaire ; qu'il a sollicité le renouvellement de son titre de séjour le 18 mai 2012 ; que, par un courrier du 23 janvier 2013, le préfet de Meurthe-et-Moselle a informé M. C...qu'il avait décidé de renouveler son certificat de résidence ; que le préfet de Meurthe-et-Moselle a adressé un courrier à M. C...le 31 mai 2016, l'informant de son droit de saisir la commission du titre de séjour en application des articles L. 313-14 et L. 313-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que dans son jugement du 29 décembre 2017, le tribunal administratif de Nancy a notamment estimé que, par ce courrier du 31 mai 2016, le préfet de Meurthe-et-Moselle avait procédé au retrait de sa décision, révélée dans son courrier du 23 janvier 2013, par laquelle il avait renouvelé le certificat de résidence de M.C... ; que le tribunal a annulé cette décision de retrait ; que le préfet de Meurthe-et-Moselle relève appel dans cette seule mesure de ce jugement ;
Sur l'appel principal du préfet de Meurthe-et-Moselle :
2. Considérant que le préfet de Meurthe-et-Moselle fait valoir que c'est à tort que le tribunal administratif de Nancy a jugé que le courrier qu'il avait adressé à M. C...le 31 mai 2016 contenait une décision faisant grief ; que, selon le préfet, ce courrier, qui ne contenait aucune décision de retrait d'un titre de séjour, avait uniquement pour objet d'indiquer à M. C...qu'il bénéficiait du droit d'être entendu par la commission du titre de séjour ;
3. Considérant, ainsi qu'il a été dit plus haut, que, par un courrier du 23 janvier 2013, le préfet de Meurthe-et-Moselle a informé M. C...qu'il avait décidé de renouveler son certificat de résidence ; qu'il ressort des pièces du dossier, et en particulier de son mémoire produit en première instance, que le préfet de Meurthe-et-Moselle a décidé le 4 août 2014 de " suspendre " la délivrance matérielle de ce titre après avoir reçu le casier judiciaire du défendeur ; que le préfet de Meurthe-et-Moselle a adressé à M. C...un courrier le 31 mai 2016 l'informant de ce qu' " une procédure de refus de séjour [était] engagée à son encontre " et qu' " en application des articles L. 313-14 et L. 313-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, [il avait] la possibilité d'être entendu par la commission du titre de séjour " ; qu'eu égard aux termes employés dans ce courrier et à la circonstance qu'il rappelait à M. C...qu'il avait la possibilité de saisir la commission du titre de séjour, le préfet de Meurthe-et-Moselle doit être regardé comme ayant décidé de retirer la décision de renouveler le titre de séjour de M. C...contenue dans sa lettre du 23 janvier 2013 ; que la circonstance que le préfet de Meurthe-et-Moselle a décidé le 22 décembre 2016, après avis de la commission du titre de séjour, de délivrer un certificat de résidence d'un an au défendeur, est sans incidence sur l'existence d'une telle décision de retrait qui est, au demeurant, antérieure ; que, par suite, le préfet de Meurthe-et-Moselle n'est pas fondé soutenir qu'une telle décision de retrait n'existait pas et qu'elle ne pouvait, par voie, de conséquence, faire l'objet d'une annulation par le tribunal administratif de Nancy ;
4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le préfet de Meurthe-et-Moselle, qui ne conteste pas le motif d'annulation retenu par les juges de première instance, n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a annulé sa décision de retrait de celle octroyant le renouvellement du titre de séjour de M.C... ; que dès lors, ses conclusions à fin d'annulation de ce jugement ne peuvent qu'être rejetées ;
Sur les conclusions présentées par M. C...par la voie de l'appel incident :
5. Considérant que, dans son jugement du 29 décembre 2017, le tribunal administratif de Nancy a fait droit aux conclusions de M. C...tendant à l'annulation d'une décision de retrait de celle du 23 janvier 2013 par laquelle le préfet de Meurthe-et-Moselle avait décidé de renouveler sa carte de résident algérien ; que, par suite, l'intéressé n'est pas recevable à demander en appel l'annulation de la décision de retrait précitée ; qu'il y a donc lieu de rejeter ses conclusions à fin d'annulation ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ;
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :
6. Considérant qu'il résulte des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative que l'avocat du bénéficiaire de l'aide juridictionnelle peut demander au juge de condamner la partie perdante à lui verser la somme correspondant à celle qu'il aurait réclamée à son client, si ce dernier n'avait pas eu l'aide juridictionnelle, à charge pour l'avocat qui poursuit, en cas de condamnation, le recouvrement de la somme qui lui a été allouée par le juge, de renoncer à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État à la mission d'aide juridictionnelle qui lui a été confiée ;
7. Considérant qu'il n'y a pas lieu dans les circonstances de l'espèce de faire droit aux conclusions présentées par M. C...sur le fondement des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête du préfet de Meurthe-et-Moselle et les conclusions de M. C... sont rejetées.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. A...C....
Copie en sera adressée au préfet de Meurthe-et-Moselle.
2
N° 18NC00521