Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme G...F..., Mme D...A...et M. C...E...ont demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler l'arrêté du 11 octobre 2017 par lequel le préfet de la Marne a mis en demeure les occupants des résidences mobiles stationnées sur le parking Saint-Thiébaut, chemin de Saint-Thiébaut à Châlons-en-Champagne de quitter les lieux dans un délai de vingt-quatre heures à compter de sa notification.
Par un jugement n° 1701967 du 13 octobre 2017, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a annulé l'arrêté précité du 11 octobre 2017.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 18 octobre 2017 et un mémoire complémentaire du 14 novembre 2017, le préfet de la Marne demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 13 octobre 2017 ;
2°) de rejeter la demande de MmeF..., de Mme A...et de M. E...tendant à l'annulation de cet arrêté du 11 octobre 2017.
Il soutient que :
- c'est à tort que le tribunal a considéré que l'arrêté du président de la Communauté d'agglomération de Châlons-en-Champagne n'était pas exécutoire faute d'avoir été transmis à ses services et faute de publication, d'affichage ou de notification aux intéressés, conformément aux dispositions de l'article L. 2131-1 du code général des collectivités territoriales dès lors que l'article L. 2131-2 du même code exclut de ce formalisme les décisions réglementaires et individuelles relatives à la circulation et au stationnement ;
- en tout état de cause, l'arrêté en litige lui avait été transmis ;
- dès lors que la ville de Châlons-en-Champagne, à travers la communauté d'agglomération de Châlons-en-Champagne, remplit ses obligations légales en matière d'accueil des gens du voyage, que cette même communauté d'agglomération a édicté un arrêté portant interdiction du stationnement illicite en dehors des lieux connus et que l'installation des demandeurs portait atteinte à la salubrité, à la sécurité et à la tranquillité publique, il pouvait légalement prendre l'arrêté en litige.
Par un mémoire en défense enregistré le 18 décembre 2017, MmeF..., Mme A...et M.E..., représentés par MeB..., demandent à la cour :
1°) de rejeter la requête du préfet de la Marne et de confirmer le jugement attaqué ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- l'arrêté du président de la communauté d'agglomération de Châlons-en-Champagne du 17 octobre 2013 réglementant le stationnement des gens du voyage ne constituant pas une décision relative à la circulation et au stationnement au sens de l'article L. 2131-2 du code général des collectivités territoriales, il devait être publié, affiché ou notifié et être transmis au représentant de l'Etat ;
- la transmission de cet arrêté par le président de la communauté d'agglomération au préfet en annexe d'une demande de mise en demeure ne peut tenir lieu de transmission des actes administratifs au sens de l'article L. 2131-1 du code général des collectivités territoriales ;
- à supposer que la transmission par voie d'annexe soit admise, à la date à laquelle le président de la communauté d'agglomération a demandé au préfet de mettre les intéressés en demeure de quitter les lieux, l'arrêté du 17 octobre 2013 n'était pas exécutoire ;
- l'arrêté en litige méconnaît l'article 9 de la loi n° 2000-614 du 5 juillet 2000 dès lors que la communauté d'agglomération ne respecte pas toutes ses obligations d'accueil des gens du voyage et que leur installation sur le parking Saint-Thiébaut ne portait atteinte ni à la salubrité, ni à la sécurité, ni à la tranquillité publiques.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- la loi n° 2000-614 du 5 juillet 2000 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Di Candia, premier conseiller,
- et les conclusions de M. Louis, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Le 9 octobre 2017, les services de la police municipale de Châlons-en-Champagne ont constaté le stationnement sans autorisation de soixante-dix-sept caravanes, treize remorques et soixante-dix véhicules sur le parking Saint-Thiebault, chemin de Saint-Thiebault à Châlons-en-Champagne. Par un arrêté du 11 octobre 2017, pris en application de l'article 9 de la loi du 5 juillet 2000 relative à l'accueil et à l'habitat des gens du voyage, le préfet de la Marne, à la demande du président de la communauté d'agglomération de Châlons-en-Champagne, a mis en demeure les occupants sans autorisation de ce parking, appartenant à la communauté des gens du voyage, de quitter les lieux dans un délai de vingt-quatre heures. Le préfet de la Marne interjette appel du jugement du 13 octobre 2017 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a, à la demande de Mmes F...et A...et de M. E..., représentants de cette communauté, annulé cet arrêté.
2. D'une part, en vertu du I de l'article 9 de loi du 5 juillet 2000 relative à l'accueil et à l'habitat des gens du voyage : " I.-Dès lors qu'une commune remplit les obligations qui lui incombent en application de l'article 2, son maire (...) peut, par arrêté, interdire en dehors des aires d'accueil aménagées le stationnement sur le territoire de la commune des résidences mobiles mentionnées à l'article 1er. (...) / II.-En cas de stationnement effectué en violation de l'arrêté prévu au I, le maire, le propriétaire ou le titulaire du droit d'usage du terrain occupé peut demander au préfet de mettre en demeure les occupants de quitter les lieux. / La mise en demeure ne peut intervenir que si le stationnement est de nature à porter atteinte à la salubrité, la sécurité ou la tranquillité publiques. / La mise en demeure est assortie d'un délai d'exécution qui ne peut être inférieur à vingt-quatre heures (...) ".
3. D'autre part, aux termes des dispositions de l'article L. 2131-1 du code général des collectivités territoriales : " Les actes pris par les autorités communales sont exécutoires de plein droit dès qu'il a été procédé à leur publication ou affichage ou à leur notification aux intéressés ainsi qu'à leur transmission au représentant de l'Etat dans le département ou à son délégué dans l'arrondissement. (...) Cette transmission peut s'effectuer par voie électronique, selon des modalités fixées par décret en Conseil d'Etat. Le maire certifie, sous sa responsabilité, le caractère exécutoire de ces actes (...) La preuve de la réception des actes par le représentant de l'Etat dans le département ou son délégué dans l'arrondissement peut être apportée par tout moyen (...) ". L'article L. 2131-2 du même code exclut du champ d'application de ces dispositions les décisions réglementaires et individuelles prises par le maire, dans l'exercice de son pouvoir de police, relatives à la circulation et au stationnement. Aux termes de l'article L. 5211-3 du même code : " Les dispositions du chapitre premier du titre III du livre premier de la deuxième partie relatives au contrôle de légalité et au caractère exécutoire des actes des communes sont applicables aux établissements publics de coopération intercommunale ".
4. En premier lieu, l'arrêté par lequel le maire ou, s'il est compétent, le président de l'établissement public de coopération intercommunale, interdit sur le territoire de la commune ou de tout ou partie du territoire de l'intercommunalité le stationnement en dehors des aires d'accueil aménagées, dans le cadre des pouvoirs qu'il tient de la loi du 5 juillet 2000 relative à l'accueil et à l'habitat des gens du voyage, a trait aux pouvoirs de police spéciale des gens du voyage. Le préfet de la Marne n'est en conséquence pas fondé à soutenir qu'un tel arrêté entrerait dans le champ des dispositions de l'article L. 2132-2 du code général des collectivités territoriales, lesquelles ne concernent que les décisions réglementaires et individuelles relatives à la circulation et au stationnement prises par le maire dans l'exercice de son pouvoir de police. Dès lors, contrairement à ce que soutient le préfet de la Marne, l'arrêté du 17 octobre 2013 par lequel le président de la communauté d'agglomération de Châlons-en-Champagne a interdit l'installation en réunion des attelages, véhicules, caravanes, résidences mobiles en vue d'y établir une habitation même temporaire sur tout le territoire de la communauté d'agglomération demeurait soumis aux dispositions de l'article L. 2131-1 du code général des collectivités territoriales.
5. En deuxième lieu, dans le cas où le maire ou, s'il est compétent, le président de l'établissement public de coopération intercommunale, décide, sur le fondement du I de cet article, de solliciter du représentant de l'Etat, en cas de stationnement effectué en violation de l'arrêté portant interdiction de stationner en dehors des aires d'accueil aménagées, qu'il mette en oeuvre les pouvoirs de mise en demeure que ce dernier tient du II du même article, la combinaison de ces dispositions impose que l'arrêté interdisant le stationnement soit exécutoire à la date à laquelle le maire ou le président de l'établissement public de coopération intercommunale sollicite la mise en demeure du préfet.
6. Il ressort des termes mêmes du jugement que l'arrêté du 17 octobre 2013, dont les requérants soutenaient en première instance qu'il n'avait été ni transmis au préfet, ni affiché, ni publié au recueil des actes administratifs, a été regardé par les premiers juges comme n'étant pas exécutoire faute pour le préfet d'apporter des éléments justificatifs à ce titre. La circonstance que le président de la communauté d'agglomération de Châlons-en-Champagne ait joint cet arrêté du 17 octobre 2013 au courrier par lequel il sollicitait du préfet de la Marne que ce dernier mette en oeuvre les pouvoirs de mise en demeure que ce dernier tient du II de l'article 9 de loi du 5 juillet 2000 n'est pas de nature à établir le caractère exécutoire de celui-ci. En tout état de cause, le préfet de la Marne n'établit pas davantage que l'arrêté du 17 octobre 2013 aurait fait l'objet d'une publicité et d'un affichage. Ainsi, le préfet n'est pas fondé à soutenir qu'à la date à laquelle le président de la communauté d'agglomération de Châlons-en-Champagne l'a saisi de sa demande de mise en demeure, l'arrêté portant interdiction de stationnement du 17 octobre 2013 était exécutoire.
7. Il résulte de ce qui précède que le préfet de la Marne n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a annulé l'arrêté du 11 octobre 2017.
8. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à MmesF..., A...et M. E...de la somme de 1 500 euros.
D E C I D E :
Article 1er : La requête du préfet de la Marne est rejetée.
Article 2 : L'Etat versera à MmeF..., à Mme A...et à M. E...la somme de 1 500 euros au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur, Mme G...F..., Mme D... A...et M. C...E....
Copie en sera transmise, pour information, au préfet de la Marne.
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N° 17NC02477