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02/10/2018 | FRANCE | N°17NC00939-17NC00949

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 02 octobre 2018, 17NC00939-17NC00949


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M.C... D... a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler la décision du 22 décembre 2014 par laquelle la société Orange a rejeté sa demande tendant à obtenir sa réintégration au sein du service.

M. D... a également demandé au tribunal administratif de Nancy de condamner la société Orange à lui verser la somme de 86 521,41 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis en raison de sa mise à la retraite à compter du 1er mars 2013.

Par deux jugements n° 1500604

et n° 1601310 du 21 février 2017, le tribunal administratif de Nancy a rejeté ses demandes.

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M.C... D... a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler la décision du 22 décembre 2014 par laquelle la société Orange a rejeté sa demande tendant à obtenir sa réintégration au sein du service.

M. D... a également demandé au tribunal administratif de Nancy de condamner la société Orange à lui verser la somme de 86 521,41 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis en raison de sa mise à la retraite à compter du 1er mars 2013.

Par deux jugements n° 1500604 et n° 1601310 du 21 février 2017, le tribunal administratif de Nancy a rejeté ses demandes.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête enregistrée le 19 avril 2017 sous le n° 17NC00939, M. C... D..., représenté par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1601310 du tribunal administratif de Nancy du 21 février 2017 ;

2°) de condamner la société Orange à lui verser la somme de 86 521,41 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis en raison de sa mise à la retraite à compter du 1er mars 2013 ;

3°) de mettre à la charge de la société Orange une somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la société Orange lui a imposé de partir à la retraite le 28 novembre 2012, date de son 60ème anniversaire, alors qu'il n'a pas exercé de service actif pendant 15 ans au moins et qu'il pouvait donc se maintenir dans son poste jusqu'à sa limite d'âge fixée à 65 ans ;

- le service actif doit être apprécié au regard des fonctions effectivement exercées et non au regard du grade dont il est titulaire ;

- la société Orange ne pouvait donc légalement refuser son maintien en activité jusqu'à l'âge de 65 ans ;

- il a demandé un départ à la retraite à compter du 1er mars 2013, avant d'avoir atteint ses 65 ans, en raison des pressions exercées par la société ;

- il s'est désisté de son recours contre le refus de le maintenir en activité jusqu'à l'âge de 65 ans au seul motif que la société Orange avait retiré sa décision de refus ;

- son éviction irrégulière est à l'origine de pertes de revenus entre mars 2013 et octobre 2017, pour un montant de 49 699,50 euros, ainsi que d'une perte de cotisations mutuelles pour un montant de 1 175 euros ;

- cette éviction est également à l'origine d'une minoration de sa pension évaluée à 22 301,25 euros, d'une réduction de l'allocation accordée par la caisse d'assurance retraite et de la santé au travail (CARSAT) au titre de la retraite, évaluée à 11 221,97 euros, et d'une réduction de la retraite additionnelle de la fonction publique évaluée à 2 123,69 euros.

Par un mémoire en défense enregistré le 13 juillet 2017, la société Orange, représentée par la SCP Baker et McKenzie, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de M. D...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- M. D...a atteint la limite d'âge applicable à son corps à la date anniversaire de ses 60 ans le 28 octobre 2012 en application des dispositions combinées de l'article 1-1 de la loi du 13 septembre 1984 et des décrets n° 81-401 et 81-402 du 22 avril 1981 ;

- il ne peut se prévaloir des dispositions de l'article L. 24 du code des pensions civiles et militaires de retraite qui permettent de prendre en compte les services accomplis dans des emplois de la catégorie active en cas de départ anticipé ;

- le requérant n'a subi aucun préjudice dès lors qu'il a été admis à faire valoir ses droits à la retraite le 1er mars 2013 sur sa demande ;

- il n'établit pas que l'administration lui aurait imposé de partir à la retraite à cette date alors qu'il aurait souhaité se maintenir jusqu'à l'âge de 65 ans ;

- les pertes de revenus doivent être diminuées du montant de la prime versée à l'agent lors de son départ à la retraite ;

- M. D...ne justifie pas de ce qu'un maintien en activité serait à l'origine d'un supplément d'allocation versée par la CARSAT et de retraite additionnelle de la fonction publique.

II. Par une requête enregistrée le 20 avril 2017 sous le n° 17NC00949, et un mémoire en réplique enregistré le 22 septembre 2017, M.C... D..., représenté par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1500604 du tribunal administratif de Nancy du 21 février 2017 ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision du 22 décembre 2014 ;

3°) d'enjoindre à la société Orange de procéder à sa réintégration et à la reconstitution de sa carrière au titre de la période pendant laquelle il a été irrégulièrement évincé ;

4°) de mettre à la charge de la société Orange le versement de la somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- sa demande présentée devant le tribunal administratif est recevable ;

- la société Orange lui a imposé de partir à la retraite le 28 novembre 2012, date de son 60ème anniversaire, alors qu'il n'a pas exercé de service actif pendant 15 ans au moins et qu'il pouvait donc se maintenir dans son poste jusqu'à sa limite d'âge fixée à 65 ans ;

- le service actif doit être apprécié au regard des fonctions effectivement exercées et non au regard du grade dont il est titulaire ;

- la société Orange ne pouvait donc légalement refuser son maintien en activité jusqu'à l'âge de 65 ans ;

- il a demandé un départ à la retraite à compter du 1er mars 2013, avant d'avoir atteint ses 65 ans, en raison des pressions exercées par la société ;

- il s'est désisté de son recours contre le refus de le maintenir en activité jusqu'à l'âge de 65 ans au seul motif que la société Orange avait retiré sa décision de refus ;

- son départ à la retraite devait être précédé d'un avis du comité d'entreprise et d'une saisine de l'inspecteur du travail dès lors qu'il était délégué du personnel ;

- l'administration a mis fin à ses fonctions en raison de ses activités syndicales.

Par deux mémoires en défense enregistrés le 13 juillet 2017 et le 14 novembre 2017, la société Orange, représentée par la SCP Baker et McKenzie, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de M. D...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la demandé présentée devant les premiers juges est irrecevable dès lors que M. D...a été admis à la retraite sur sa demande ;

- M. D...a atteint la limite d'âge applicable à son corps à la date anniversaire de ses 60 ans le 28 octobre 2012 en application des dispositions combinées de l'article 1-1 de la loi du 13 septembre 1984 et des décrets n° 81-401 et 81-402 du 22 avril 1981 ;

- il ne peut se prévaloir des dispositions de l'article L. 24 du code des pensions civiles et militaires de retraite qui permettent de prendre en compte les services accomplis dans des emplois de la catégorie active en cas de départ anticipé ;

- le maintien au-delà de la limite d'âge ne constitue pas un droit ;

- il n'établit pas que l'administration lui aurait imposé de partir à la retraite à cette date alors qu'il aurait souhaité se maintenir jusqu'à l'âge de 65 ans ;

- M. D...pouvait être admis à la retraite sans avis préalable du comité d'entreprise ni autorisation de l'inspecteur du travail, dès lors que les dispositions du code du travail relatives aux salariés protégés ne s'appliquent pas aux fonctionnaires de la société Orange.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- le code des pensions civiles et militaires de retraite ;

- la loi du 18 août 1936 ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- la loi n° 84-834 du 13 septembre 1984 ;

- la loi n° 2010-1330 du 9 novembre 2010 ;

- le décret n° 76-4 du 6 janvier 1976 ;

- le décret n° 81-401 du 22 avril 1981 ;

- le décret n° 81-402 du 22 avril 1981 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Guérin-Lebacq,

- les conclusions de Mme Kohler, rapporteur public,

- et les observations de MeB..., pour M.D..., et de MeA..., pour la société Orange.

Une note en délibéré, enregistrée le 17 septembre 2018, a été présentée dans les 2 instances par M.D....

Considérant ce qui suit :

1. M.D..., conducteur des travaux des lignes de la société Orange, qui devait atteindre l'âge de soixante ans le 28 octobre 2012, a sollicité son maintien en activité jusqu'à l'âge de soixante-cinq ans par un courrier du 21 juillet 2012. Cette demande a été rejetée par la société Orange le 29 août 2012. M. D...a saisi son employeur d'une nouvelle demande le 12 décembre 2012 visant à son maintien en activité jusqu'au 2 mars 2013. La société Orange a alors décidé, le 9 janvier 2013, de retirer son refus précédent et de prolonger l'activité de l'intéressé jusqu'au 1er mars 2013, date à laquelle il a été admis à la retraite. Estimant que sa mise à la retraite était intervenue dans des conditions irrégulières, M. D... a demandé, par un courrier du 17 novembre 2014, sa réintégration au sein de la société, ainsi que la reconstitution de sa carrière depuis le 1er mars 2013. Il a également sollicité, le 27 janvier 2016, le versement de la somme de 86 521,41 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis du fait de sa mise à la retraite le 1er mars 2013. Ces demandes ont été rejetées, respectivement, par deux décisions de la société Orange du 22 décembre 2014 et du 4 mars 2016. M. D... a saisi le tribunal administratif de Nancy de deux demandes tendant, d'une part, à l'annulation de la décision du 22 décembre 2014 refusant de procéder à sa réintégration et, d'autre part, à la condamnation de la société Orange à l'indemniser de ses préjudices. Par deux requêtes qu'il y a lieu de joindre pour statuer par un seul arrêt, il relève appel des jugements du 21 février 2017 par lesquels le tribunal administratif a rejeté ses demandes.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne la limite d'âge de M.D... :

2. Aux termes de l'article 68 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat : " Les fonctionnaires ne peuvent être maintenus en fonctions au-delà de la limite d'âge de leur emploi sous réserve des exceptions prévues par les textes en vigueur ". Si les dispositions de l'article 1er de la loi du 13 septembre 1984 relative à la limite d'âge dans la fonction publique et le secteur public prévoient à cet égard que " Sous réserve des reculs de limite d'âge pouvant résulter des textes applicables à l'ensemble des agents de l'Etat, la limite d'âge des fonctionnaires civils de l'Etat est fixée à soixante-sept ans lorsqu'elle était, avant l'intervention de la loi n° 2010-1330 du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites, fixée à soixante-cinq ans ", ces dispositions n'ont pas pour effet d'interdire des limites d'âge inférieures à soixante-sept ans dès lors qu'elles ne prennent pas en compte les limites d'âge qui étaient inférieures à soixante-cinq ans avant l'intervention de la loi du 9 novembre 2010. Il ressort à cet égard de l'article 1er de la loi du 18 août 1936 concernant les mises à la retraite par ancienneté que " La limite d'âge est abaissée, pour les fonctionnaires et employés civils des services de l'Etat de la catégorie A et de la catégorie B, dans les conditions ci-dessous : (...) Catégorie B (...) 4ème échelon, soixante ans (...) ". Le corps des conducteurs des travaux des lignes est classé au 4ème échelon de la catégorie B dite " active " en application de l'article 23 du décret du 6 janvier 1976 modifiant le décret n° 54-865 du 2 septembre 1954 portant statut particulier des corps du service des lignes des postes et télécommunications et des deux décrets susvisés du 22 avril 1981 modifiant le tableau documentaire des limites d'âge et le tableau des emplois classés dans la catégorie B.

3. Il ressort des pièces du dossier qu'avant d'être admis à la retraite, M. D...était titulaire du grade de conducteur des travaux des lignes depuis le 1er octobre 1994. Il résulte donc des dispositions citées au point précédent, qui classent cet emploi au 4ème échelon de la catégorie active, que la limite d'âge qui s'appliquait à lui était fixée à soixante ans, âge qu'il a atteint le 28 octobre 2012, et non à soixante-cinq ans comme il le fait valoir. Si M. D...soutient avoir occupé un emploi qui, eu égard à son caractère sédentaire, ne pouvait être regardé comme relevant de la catégorie active, le classement de son emploi dans cette catégorie résulte des seules dispositions précitées, quelles que soient les fonctions qu'il a réellement exercées par ailleurs.

4. M. D...invoque les dispositions de l'article L. 24 du code des pensions civiles et militaires de retraite en application desquelles " La liquidation de la pension intervient (...) Lorsque le fonctionnaire civil est radié des cadres (...) s'il a atteint, à la date de l'admission à la retraite, l'âge (...) de cinquante-sept ans s'il a accompli au moins dix-sept ans de services dans des emplois classés dans la catégorie active. " Toutefois, ces dispositions trouvent seulement à s'appliquer lorsque l'agent demande à partir à la retraite à l'âge de cinquante-sept ans, avant d'avoir atteint sa limite d'âge. M.D..., qui a toujours revendiqué de partir à la retraite au-delà de sa limite d'âge, ne peut donc s'en prévaloir utilement.

5. Il résulte de ce qui précède que M. D...n'est pas fondé à soutenir que la société Orange aurait estimé à tort qu'il avait atteint la limite d'âge de son grade à la date du 28 octobre 2012.

En ce qui concerne les conditions dans lesquelles M. D...a été autorisé à prolonger son activité jusqu'au 1er mars 2013 :

6. Aux termes de l'article 1-1 de la loi du 13 septembre 1984 relative à la limite d'âge dans la fonction publique et le secteur public : " (...) les fonctionnaires dont la durée des services liquidables est inférieure à celle définie à l'article L. 13 du code des pensions civiles et militaires de retraite peuvent, lorsqu'ils atteignent les limites d'âge applicables aux corps auxquels ils appartiennent, sur leur demande, sous réserve de l'intérêt du service et de leur aptitude physique, être maintenus en activité (...) ". En application de l'article 1-3 de la même loi, les fonctionnaires appartenant à des corps dont la limite d'âge est inférieure à la limite d'âge prévue au premier alinéa de l'article 1er de cette loi, soit soixante-sept ans, sont, sur leur demande, lorsqu'ils atteignent la limite d'âge de leur corps, maintenus en activité jusqu'à soixante-sept ans, dans les conditions prévues par un décret en Conseil d'Etat et sous réserve de leur aptitude physique. Le décret du 30 décembre 2009 pris pour l'application de l'article 1-3 de la loi du 13 septembre 1984 prévoit notamment, au I de son article 4, que : " La demande de prolongation d'activité est présentée par le fonctionnaire à l'employeur public au plus tard 6 mois avant la survenance de la limite d'âge. Il en est accusé réception (...) ".

7. Il ressort des pièces du dossier que, dans son courrier du 21 juillet 2012, M. D...a demandé à prolonger son activité jusqu'à l'âge de soixante-cinq ans en se fondant tant sur les dispositions de l'article 1-1 que sur celles de l'article 1-3 de la loi du 13 septembre 1984. La société Orange a opposé le 29 août 2012 un refus à la demande présentée en application de l'article 1-1 au motif que le poste de l'intéressé avait vocation à être supprimé dans un contexte de baisse globale d'activité du service. Elle a rejeté le même jour la demande de prolongation présentée sur le fondement de l'article 1-3 au motif notamment qu'elle avait été présentée tardivement, moins de six mois avant la survenance de la limite d'âge. M. D... a présenté une nouvelle demande le 12 décembre 2012 afin d'être maintenu en activité jusqu'au 1er mars 2013 et bénéficier ainsi d'une durée de service de six mois au moins à l'indice terminal de son grade. La société Orange a alors, par deux décisions du 9 janvier 2013, retiré ses deux décisions de refus du 29 août 2012 et fait droit à la demande de prolongation jusqu'au 1er mars 2013. M. D...a été admis à la retraite à cette dernière date par une décision du 25 janvier 2013.

8. M. D...soutient avoir été contraint de demander à partir à la retraite le 1er mars 2013 alors que la société Orange avait cessé de le rémunérer à compter du 28 octobre 2012 et avait pris à son encontre des mesures tendant à l'évincer du service. Toutefois, il ne conteste pas, à l'appui de son présent recours, le motif tiré de l'intérêt du service que la société Orange a retenu pour justifier le rejet de sa première demande de prolongation du 21 juillet 2012 présentée sur le fondement de l'article 1-1 de la loi du 13 septembre 1984. Il est en outre constant que sa demande tendant à obtenir la prolongation prévue par l'article 1-3 de la même loi a été présentée à la date précitée, hors du délai prévu par l'article 4 du décret du 30 décembre 2009. La société Orange pouvait donc estimer que l'intéressé, atteint par la limite d'âge le 28 octobre 2012, avait rompu tout lien avec le service après cette date. Si M.D..., s'estimant alors victime d'une " mise à la retraite d'office ", est entré en conflit avec son employeur, conduisant celui-ci à revenir sur sa position en retirant ses décisions initiales de refus et en acceptant une prolongation d'activité jusqu'au 1er mars 2013, ces circonstances ne sont pas de nature à révéler que l'intéressé se serait trouvé contraint de partir à la retraite à cette date. Il n'est pas établi non plus, eu égard aux termes dans lesquels est rédigé le courrier du 12 décembre 2012, que M. D...aurait sollicité son maintien en activité jusqu'au 1er mars 2013 sous l'emprise d'une contrainte propre à vicier son consentement. Au demeurant, l'intéressé a demandé sa réintégration au sein du service le 17 novembre 2014, plus d'un an et demi après la décision du 25 janvier 2013 l'admettant à la retraite qu'il n'a pas contestée. Dans ces conditions, M. D...n'est pas fondé à soutenir que la société Orange l'aurait admis à la retraite dans des conditions irrégulières en lui imposant un départ à la date du 1er mars 2013.

En ce qui concerne la discrimination syndicale alléguée et l'application des règles de protection des salariés protégés :

9. Il appartient à l'autorité investie du pouvoir hiérarchique de prendre à l'égard des fonctionnaires placés sous sa responsabilité des décisions répondant à l'intérêt du service. Dans le cas où, comme dans la société Orange, un fonctionnaire se trouve investi d'un mandat représentatif qu'il exerce, en vertu de la loi, dans l'intérêt tant d'agents de droit public que de salariés de droit privé, les décisions prises à son égard ne doivent pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé. Ces décisions doivent tenir compte à la fois de l'intérêt du service et des exigences propres à l'exercice normal du mandat dont il est investi. Pour autant, il ne résulte d'aucun principe général ni d'aucune disposition du code du travail que la décision prononçant la mise à la retraite d'un fonctionnaire de la société Orange investi d'un mandat représentatif doive être soumise à une autorisation de l'inspecteur du travail ou précédée de l'avis du comité d'entreprise.

10. Si M. D...était en conflit avec la société Orange, il ne ressort pas des pièces du dossier que sa mise à la retraite le 1er mars 2013 serait intervenue en considération de son engagement syndical. Par ailleurs, il résulte de ce qui a été dit au point précédent que l'intéressé ne saurait utilement soutenir que son départ n'aurait été précédé ni d'une autorisation de l'inspecteur du travail ni de l'avis du comité d'entreprise, quand bien même il avait la qualité de délégué du personnel.

11. Il résulte de tout ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué n° 1500604 du 21 février 2017, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 22 décembre 2014 rejetant sa demande de réintégration.

Sur les conclusions à fin d'indemnisation :

12. Il résulte de ce qui a été dit précédemment, notamment aux points 2 à 8, que M. D... n'est pas fondé à soutenir que la société Orange aurait commis une faute en fixant sa limite d'âge à 60 ans ou dans les conditions dans lesquelles il a été autorisé à prolonger son activité jusqu'au 1er mars 2013. Dès lors, il n'est pas fondé à demander la condamnation de son ancien employeur à réparer ses préjudices.

13. Par suite, M. D... n'est pas plus fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué n° 1601310 du 21 février 2017, le tribunal administratif de Nancy a rejeté ses conclusions indemnitaires.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

14. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation de M.D..., n'implique aucune mesure d'exécution. Il s'ensuit que ses conclusions à fin d'injonction ne peuvent qu'être rejetées.

Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

15. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la société Orange, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme dont M. D...demande le versement au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. Par ailleurs, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. D...la somme dont la société Orange demande le versement sur le fondement des mêmes dispositions.

D E C I D E :

Article 1er : Les requêtes de M. D... sont rejetées.

Article 2 : Les conclusions de la société Orange présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M.C... D... et à la société Orange.

Délibéré après l'audience du 11 septembre 2018, à laquelle siégeaient :

- M. Marino, président de chambre,

- M. Guérin-Lebacq, premier conseiller,

- M. Barteaux, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 2 octobre 2018.

Le rapporteur,

Signé : J.-M. GUERIN-LEBACQLe président,

Signé : Y. MARINOLe greffier,

Signé : F. LORRAIN La République mande et ordonne au ministre de l'économie et des finances en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier :

F. LORRAIN

8

N° 17NC00939, 17NC00949


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17NC00939-17NC00949
Date de la décision : 02/10/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Fonctionnaires et agents publics - Cessation de fonctions - Mise à la retraite pour ancienneté - limites d'âge.

Fonctionnaires et agents publics - Contentieux de la fonction publique.


Composition du Tribunal
Président : M. MARINO
Rapporteur ?: M. Jean-Marc GUERIN-LEBACQ
Rapporteur public ?: Mme KOHLER
Avocat(s) : TASSIGNY

Origine de la décision
Date de l'import : 16/10/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2018-10-02;17nc00939.17nc00949 ?
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