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02/10/2018 | FRANCE | N°16NC02042

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 02 octobre 2018, 16NC02042


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SA Assurances du Crédit mutuel IARD a demandé au tribunal administratif de Strasbourg, à titre principal, de condamner le centre de réadaptation fonctionnelle de Mulhouse à lui verser, d'une part, la somme de 68 610,78 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 20 décembre 2012, et, d'autre part, la somme de 4 642,81 euros au titre des frais d'expertise et, à titre subsidiaire, d'ordonner une expertise.

Par un jugement no 1301755 du 12 juillet 2016, le tribunal administratif de Str

asbourg a rejeté sa demande comme étant portée devant un ordre de juridiction i...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SA Assurances du Crédit mutuel IARD a demandé au tribunal administratif de Strasbourg, à titre principal, de condamner le centre de réadaptation fonctionnelle de Mulhouse à lui verser, d'une part, la somme de 68 610,78 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 20 décembre 2012, et, d'autre part, la somme de 4 642,81 euros au titre des frais d'expertise et, à titre subsidiaire, d'ordonner une expertise.

Par un jugement no 1301755 du 12 juillet 2016, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande comme étant portée devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître et mis à sa charge les frais d'expertise taxés et liquidés à la somme de 1 771,56 euros.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 12 septembre 2016, la SA Assurances du Crédit mutuel IARD, représentée par MeD..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement no 1301755 du 12 juillet 2016 ;

2°) de condamner le centre de réadaptation fonctionnelle de Mulhouse à lui verser la somme de 68 610,78 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 20 décembre 2012 ;

3°) de condamner le centre de réadaptation fonctionnelle de Mulhouse à lui verser la somme de 4 642,81 euros au titre des frais d'expertise ;

4°) de mettre à la charge du centre de réadaptation fonctionnelle de Mulhouse tous les frais et dépens ;

5°) de mettre à la charge du centre de réadaptation fonctionnelle de Mulhouse la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

6°) de déclarer l'arrêt à intervenir exécutoire par provision.

Elle soutient que :

- les premiers juges ont considéré à tort que le litige était porté devant un ordre de juridiction incompétent dès lors que le centre de réadaptation fonctionnelle a le statut d'établissement de santé privé d'intérêt collectif depuis la loi du 21 juillet 2009 et qu'il était auparavant un établissement participant au service public hospitalier ;

- le rapport d'expertise met en évidence que le centre de réadaptation fonctionnelle n'a pas pris en charge la victime conformément à la bonne pratique médicale ;

- elle a indemnisé amiablement les conséquences de la faute du centre de réadaptation fonctionnelle et est donc fondée à en demander le remboursement à ce dernier.

Par un mémoire enregistré le 21 septembre 2016, le centre de réadaptation fonctionnelle de Mulhouse, représenté par MeC..., demande à la cour :

1°) de confirmer le jugement no 1301755 du 12 juillet 2016 et de débouter la SA Assurances du Crédit mutuel IARD de toutes ses demandes ;

2°) de mettre à la charge de la société Assurances du Crédit mutuel IARD la somme de 2 000 euros, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- il a le statut d'association régie par le code civil local et inscrite au registre des associations du tribunal d'instance de Mulhouse ;

- l'association n'est investie d'aucune prérogative de puissance publique à laquelle l'action en responsabilité pourrait se rattacher ;

- la requérante ne justifie pas, dans le cadre de son action subrogatoire, du règlement des sommes versées aux victimes ;

- la subrogation ne peut porter que sur les droits des victimes pour les suites de l'accident de la circulation et non d'une éventuelle défaillance dans les soins qui lui ont été portés ;

- la requérante détermine la part du préjudice qui a été réglée aux victimes sur la base d'une étude sommaire du 22 octobre 2007 qui n'a pas été établie contradictoirement ;

- la requérante ne justifie pas de sa qualité pour agir.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Barteaux,

- les conclusions de Mme Kohler, rapporteur public,

- et les observations de Me B...pour le centre de réadaptation fonctionnelle de Mulhouse.

Considérant ce qui suit :

1. Le 4 décembre 1996, M. A...a été victime d'un accident de la circulation dont les conséquences dommageables ont été indemnisées pour lui-même et son employeur, la caisse primaire d'assurance maladie du Haut-Rhin, dans le cadre d'une transaction, par la société Assurances du Crédit mutuel IARD. Une expertise, ordonnée par le président du tribunal administratif de Strasbourg à la demande de l'assureur, ayant mis en évidence un manquement dans les soins que le centre de réadaptation fonctionnelle de Mulhouse a apportés à M.A..., la société Assurances du Crédit mutuel IARD a adressé à cet établissement, le 20 décembre 2012, une réclamation tendant au remboursement d'une partie des indemnités versées aux victimes, qui est restée sans suite. La société requérante, agissant par voie de subrogation dans les droits de la victime et de la caisse primaire d'assurance maladie de Mulhouse, a saisi le tribunal administratif de Strasbourg d'une action en responsabilité contre le centre de réadaptation fonctionnelle de Mulhouse. Par un jugement du 12 juillet 2016, dont la société Assurances du crédit mutuel IARD relève appel, le tribunal a rejeté cette demande comme portée devant un ordre de juridiction incompétent.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article L. 6111-1 du code de la santé publique : " Les établissements de santé publics, privés d'intérêt collectif et privés assurent, dans les conditions prévues au présent code, en tenant compte de la singularité et des aspects psychologiques des personnes, le diagnostic, la surveillance et le traitement des malades, des blessés et des femmes enceintes et mènent des actions de prévention et d'éducation à la santé. (...) ". Aux termes de l'article L. 6161-5 du même code, applicable jusqu'au 28 janvier 2016 : " Sont qualifiés d'établissements de santé privés d'intérêt collectif les centres de lutte contre le cancer définis à l'article L. 6162-1 et les établissements de santé privés gérés par les personnes morales de droit privé mentionnées au 1° du II de l'article 1er de la loi n° 2014-856 du 31 juillet 2014 relative à l'économie sociale et solidaire remplissant les conditions et ayant obtenu l'habilitation mentionnées à l'article L. 6112-3 du présent code et qui poursuivent un but non lucratif. (...) ".

3. Le juge administratif n'est compétent pour connaître de conclusions tendant à mettre en jeu la responsabilité pour faute d'une personne morale de droit privé que si le dommage se rattache à l'exercice par cette personne morale de droit privé de prérogatives de puissance publique qui lui ont été conférées pour l'exécution de la mission de service public dont elle a été investie.

4. Il est constant que le centre de réadaptation fonctionnelle de Mulhouse a le statut d'établissement de santé privé d'intérêt collectif, dont la gestion est assurée par l'association pour la réadaptation et la formation professionnelle, association régie par le code civil applicable aux départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle. Si cette personne morale de droit privé peut être regardée comme participant au service public hospitalier, il ne résulte pas de l'instruction qu'elle aurait été investie de prérogatives de puissance publique pour l'exercice de son activité de soins. Il s'ensuit que le litige qui oppose la société Assurances du Crédit mutuel IARD au centre de réadaptation fonctionnelle de Mulhouse à raison des soins qui ont été prodigués à M. A...ne ressortit pas à la compétence de la juridiction administrative.

5. Il résulte de ce qui précède que la société Assurances du Crédit mutuel IARD n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa requête comme portée devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître.

Sur les dépens :

6. Aux termes de l'article R. 761-1 du code de justice administrative : " Les dépens comprennent les frais d'expertise, d'enquête et de toute autre mesure d'instruction dont les frais ne sont pas à la charge de l'Etat. Sous réserve de dispositions particulières, ils sont mis à la charge de toute partie perdante sauf si les circonstances particulières de l'affaire justifient qu'ils soient mis à la charge d'une autre partie ou partagés entre les parties ".

7. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre les frais d'expertise exposés par la requérante à la charge du centre de réadaptation fonctionnelle de Mulhouse.

Sur les frais d'instance :

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du centre de réadaptation fonctionnelle de Mulhouse, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme demandée par la société Assurances du crédit mutuelle IARD au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de la société Assurances du crédit mutuelle IARD une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par le centre de réadaptation fonctionnelle de Mulhouse et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la société Assurances du Crédit mutuel IARD est rejetée.

Article 2 : La société Assurances du Crédit mutuel IARD versera la somme de 1 500 euros au centre de réadaptation fonctionnelle de Mulhouse sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Assurances du Crédit mutuel IARD, au centre de réadaptation fonctionnelle de Mulhouse et à la caisse primaire d'assurance maladie du Bas-Rhin.

2

N°16NC02042


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16NC02042
Date de la décision : 02/10/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Compétence - Répartition des compétences entre les deux ordres de juridiction.

Responsabilité de la puissance publique - Faits susceptibles ou non d'ouvrir une action en responsabilité.


Composition du Tribunal
Président : M. MARINO
Rapporteur ?: M. Stéphane BARTEAUX
Rapporteur public ?: Mme KOHLER
Avocat(s) : EHRESMANN-FASIOLO

Origine de la décision
Date de l'import : 16/10/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2018-10-02;16nc02042 ?
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