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02/10/2018 | FRANCE | N°16NC01794

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 02 octobre 2018, 16NC01794


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...B...a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de condamner les Hôpitaux universitaires de Strasbourg à lui verser la somme de 120 000 euros en réparation des conséquences dommageables résultant de sa prise en charge dans cet établissement le 17 septembre 2010 et de réserver son préjudice futur en cas d'aggravation de son état de santé.

Par un jugement no 1304819 du 16 juin 2016, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 12 août 2016, le 25 août 2017 et le 27 novemb...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...B...a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de condamner les Hôpitaux universitaires de Strasbourg à lui verser la somme de 120 000 euros en réparation des conséquences dommageables résultant de sa prise en charge dans cet établissement le 17 septembre 2010 et de réserver son préjudice futur en cas d'aggravation de son état de santé.

Par un jugement no 1304819 du 16 juin 2016, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 12 août 2016, le 25 août 2017 et le 27 novembre 2017, M. D...B..., représenté par MeA..., demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) avant dire droit de désigner un professeur de médecine spécialisé en cardiologie afin qu'il fournisse un avis sur le délai après lequel la prise en charge médicale en vue d'une désobstruction de l'artère bouchée n'apporte plus aucun bénéfice au patient ;

2°) d'annuler le jugement n° 1304819 du 16 juin 2016 ;

3°) de condamner les Hôpitaux universitaires de Strasbourg à lui verser la somme de 120 000 euros à parfaire ;

4°) de dire que cette somme portera intérêt au taux légal à compter du 23 août 2012 et que les intérêts seront capitalisés ;

5°) de réserver son préjudice futur en cas d'aggravation de celui-ci ;

6°) de condamner les Hôpitaux universitaires de Strasbourg à lui payer la somme de 1 800 euros TTC au titre des frais de l'expertise ordonnée par le président du tribunal administratif de Strasbourg le 6 décembre 2012 ;

7°) de mettre à la charge des Hôpitaux universitaires de Strasbourg la somme de 6 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement attaqué est entaché d'une irrégularité ;

- c'est à tort que les premiers juges ont estimé qu'il n'avait perdu aucune chance de subir le préjudice qui s'est réalisé ;

- il aurait dû faire l'objet d'un électrocardiogramme (ECG) dès sa présentation aux urgences compte tenu de son âge et de son état de santé ;

- la disparition des documents relatifs à sa présentation aux urgences constitue par elle-même une faute dans l'organisation du service de nature à engager la responsabilité des Hôpitaux universitaires de Strasbourg ;

- l'expert judiciaire a relevé que la prise en charge initiale n'était pas conforme en l'absence de tout examen clinique ;

- c'est à tort que les premiers juges, tout en relevant une faute dans sa prise en charge, ont estimé qu'un électrocardiogramme ne devait pas être impérativement réalisé ;

- c'est à tort que les premiers juges ont déduit de l'absence de mention d'un risque coronarien par son médecin traitant et le radiologue qu'il n'aurait pas davantage bénéficié d'un électrocardiogramme s'il avait été examiné aux urgences dès 8 heures 15 ;

- le tribunal a considéré à tort que même avec une prise en charge dès son arrivée à l'hôpital, il n'aurait pas échappé au syndrome coronarien, compte tenu du délai dans lequel elle doit intervenir à compter de l'apparition des douleurs ;

- l'expert a reconnu que le diagnostic aurait probablement pu être posé à 9 heures et que l'occlusion s'est réellement complétée en début d'après-midi ; ainsi, le tribunal a estimé à tort qu'il n'a pas perdu de chance d'échapper au préjudice qui s'est réalisé ;

- le retard de diagnostic a entraîné la réalisation d'un préjudice d'une ampleur qui aurait été moindre s'il avait été traité plus tôt ;

- le SAMU et le SMUR, qui relèvent des Hôpitaux universitaires de Strasbourg, ont commis une faute de service en ne diagnostiquant pas un syndrome coronarien et en ne réalisant pas un ECG ;

- il a subi un déficit fonctionnel permanent de 40 % dont la moitié est imputable à la perte de chance, et connaît des troubles dans ses conditions d'existence et d'agrément qui peuvent être indemnisés à hauteur de la somme 120 000 euros à parfaire ;

- son état de santé se détériore, ce qui justifie de réserver son préjudice futur qui est d'ores et déjà certain ;

- une expertise pourrait être ordonnée pour déterminer sa perte de chance, dans l'hypothèse où le rapport qu'il a produit serait écarté ; un avis technique pourrait être sollicité en application de l'article R. 625-2 du code de justice administrative ou de l'article R. 625-3 du même code.

Par un mémoire enregistré le 20 septembre 2016, la caisse primaire d'assurance maladie du Bas-Rhin, représentée par MeE..., demande à la cour :

1°) d'infirmer le jugement n° 1304819 du 16 juin 2016 en toutes ses dispositions ;

2°) à titre principal de condamner les Hôpitaux universitaires de Strasbourg à lui rembourser, au titre des dépenses de santé qu'elle a engagées pour M.B..., la somme de 52 073,78 euros, avec intérêt au taux légal à compter du 23 janvier 2014 ;

3°) à titre subsidiaire d'appliquer un taux de perte de chance de 50 % à ses réclamations ;

4°) d'ordonner la capitalisation des intérêts dès lors qu'ils seront dus pour une année entière en application de l'article 1154 du code civil ;

5°) de condamner les Hôpitaux universitaires de Strasbourg à lui verser l'indemnité forfaitaire au titre de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale ;

6°) de mettre à la charge des Hôpitaux universitaires de Strasbourg la somme de 2 000 euros, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- elle bénéficie d'un recours subrogatoire contre le tiers responsable ;

- elle a supporté des frais hospitaliers et médicaux et des frais de transport dont l'imputabilité à la faute des Hôpitaux universitaires de Strasbourg a été établie par une attestation du médecin conseil, dont la valeur probante est incontestable, sur la base du rapport d'expertise.

Par des mémoires enregistrés le 5 janvier 2017 et le 25 septembre 2017, les Hôpitaux universitaires de Strasbourg et la société hospitalière d'assurances mutuelles, représentés par MeC..., concluent au rejet de la requête de M. B...et des conclusions de la caisse primaire d'assurance maladie du Bas-Rhin.

Ils soutiennent que :

- le jugement n'est pas entaché d'irrégularité dès lors que seule la minute doit être signée et non l'expédition ;

- l'erreur de diagnostic n'est pas fautive lorsqu'il est particulièrement difficile à poser et, en outre, une telle erreur, même fautive, n'engage la responsabilité de l'hôpital que si elle a causé un préjudice ;

- la symptomatologie présentée par M. B...était trompeuse et non évocatrice d'une pathologie coronarienne ; le fait de l'avoir laissé quitter les urgences sans voir le médecin de garde ne lui a pas fait perdre une chance de diagnostiquer plus tôt sa pathologie ;

- les séquelles de l'infarctus auraient été les mêmes si l'électrocardiogramme avait été pratiqué dès 9 heures du matin ;

- un ECG pratiqué entre 17 heures et 18 heures, avant l'arrivée de M. B...au service des urgences, n'aurait eu aucune incidence sur son état de santé ;

- le requérant n'apporte aucun élément de nature à établir qu'il aurait appelé le centre 15 avant 17 heures ;

- l'indemnisation du préjudice doit se faire sur la base d'un déficit fonctionnel permanent de 20 % compte tenu de l'état antérieur de M. B...et de la perte de chance ;

- l'indemnisation de la caisse primaire d'assurance maladie devra être effectuée, en tout état de cause, en fonction de la perte de chance retenue.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la santé publique ;

- le code de la sécurité sociale ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Barteaux,

- les conclusions de Mme Kohler, rapporteur public,

- et les observations de Me A...pour M.B....

Une note en délibéré présentée pour M. B...a été enregistrée le 14 septembre 2018.

Considérant ce qui suit :

1. Le 17 septembre 2010, souffrant de douleurs abdominales qu'il avait ressenties dès 4 heures du matin, M. B...s'est présenté au service des urgences de l'établissement hospitalier de Hautepierre, qui relève des Hôpitaux universitaires de Strasbourg. Eu égard à la nature de ses douleurs, l'infirmier, qui l'a accueilli, s'est borné à le renvoyer vers son médecin traitant qui, lors d'un rendez-vous en fin de matinée, lui a prescrit une radiographie de l'abdomen et une échographie abdomino-pelvienne. Face à la persistance et à l'accroissement des douleurs, la fille de l'intéressé a appelé le centre 15. Une ambulance du SAMU est intervenue vers 17 heures 10. Constatant la gravité de la situation, l'ambulancier a sollicité un véhicule médicalisé qui est arrivé vers 18 heures 10. M. B...a été transporté aux urgences de l'hôpital de Hautepierre vers 18 heures 20. Un électrocardiogramme réalisé vers 19 heures 40 a mis en évidence un infarctus du myocarde récent. Une intervention en urgence a été pratiquée consistant en une angioplastie par stent. Estimant que sa prise en charge avait été fautive, M. B... a saisi d'un recours indemnitaire le tribunal administratif de Strasbourg. Sa demande a été rejetée par un jugement du 16 juin 2016 dont il fait appel.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article R. 741-7 du code de justice administrative : " Dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience".

3. Il ressort des pièces du dossier que le jugement attaqué a été signé conformément aux prescriptions de l'article R. 741-7 du code de justice administrative. La circonstance que l'ampliation du jugement qui a été notifié à M. B...ne comporte pas ces signatures est sans incidence sur la régularité de ce jugement.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne les fautes :

S'agissant de la faute dans la prise en charge de M. B...par le service des urgences le 17 septembre 2010 à 8 heures 15 :

4. Il résulte de l'instruction et n'est d'ailleurs pas contesté qu'en renvoyant, le 17 septembre 2010 à 8 heures 15, M. B...vers son médecin traitement, sans le faire examiner par un médecin urgentiste, ainsi qu'il a été indiqué au point 1, le centre hospitalier de Hautepierre n'a pas assuré une prise en charge du patient conforme aux règles de l'art et a, par suite, ainsi que l'ont relevé à bon droit les premiers juges, commis une faute de nature à engager la responsabilité des Hôpitaux universitaires de Strasbourg.

S'agissant de la prise en charge de M. B...par le service d'aide médicale d'urgence :

5. Dans son rapport, l'expert a regretté que le médecin présent dans le véhicule médicalisé du SMUR, qui relève des Hôpitaux universitaires de Strasbourg, n'ait pas réalisé entre 17 heures et 18 heures un électrocardiogramme qui aurait permis de poser immédiatement le diagnostic de l'infarctus et ainsi d'orienter plus rapidement M. B...vers un service de cardiologie. Si l'expert estime, en conclusion, que ce service a commis une négligence fautive, il a cependant souligné que l'absence d'état antérieur ainsi que de tout signe coronarien classique ou atypique rendait improbable le diagnostic de syndrome coronarien aigu. Dans ces conditions, compte tenu des circonstances dans lesquelles ce service est intervenu et des symptômes que présentait M.B..., qui se plaignait de douleurs abdominales sans rapport évident avec un infarctus, les services d'urgence n'ont pas commis de faute de nature à engager la responsabilité des Hôpitaux universitaires de Strasbourg en ne procédant pas à un électrocardiogramme immédiatement dans l'ambulance.

S'agissant de la prise en charge de M. B...lors de son hospitalisation à 18 heures 20 :

6. Si un électrocardiogramme a été réalisé plus d'une heure après l'arrivée de M. B... à l'hôpital de Hautepierre, il résulte de l'instruction que les conditions de sa prise en charge ne révèlent pas, eu égard aux symptômes que présentait l'intéressé et à l'absence de tout antécédent, une faute de nature à engager la responsabilité de l'établissement hospitalier.

Sur les préjudices :

7. Dans le cas où la faute commise lors de la prise en charge ou du traitement d'un patient dans un établissement public hospitalier a compromis ses chances d'obtenir une amélioration de son état de santé ou d'échapper à son aggravation, le préjudice résultant directement de la faute commise par l'établissement et qui doit être intégralement réparé n'est pas le dommage corporel constaté, mais la perte de chance d'éviter que ce dommage soit advenu. La réparation qui incombe à l'hôpital doit alors être évaluée à une fraction du dommage corporel déterminée en fonction de l'ampleur de la chance perdue.

8. S'il résulte du rapport d'expertise judiciaire que la symptomatologie douloureuse que présentait M. B...à 4 heures du matin était particulièrement trompeuse et n'évoquait pas une pathologie coronarienne qui aurait pu impliquer la réalisation immédiate d'un électrocardiogramme lorsqu'il s'est présenté au service des urgences à 8 heures 15, l'expert précise que cet examen aurait dû être pratiqué, compte tenu notamment de l'âge du patientet de la persistance des douleurs, dans un délai d'une à deux heures à compter de son admission. Certes, l'expert relève qu'il n'est pas certain que l'électrocardiogramme aurait mis en évidence des anomalies évoquant un syndrome coronarien aigu dès lors que l'électrocardiogramme réalisé à 19 heures 15, soit plus de 15 heures après le début des douleurs, montrait des modifications électriques de la repolarisation de type onde de Pardee qui s'observent dans les toutes premières heures de l'infarctus. Cependant, selon l'expert, l'obstruction de l'artère avait dû commencer dans la nuit et il n'exclut pas que le diagnostic aurait pu être posé dans la matinée si les Hôpitaux universitaires de Strasbourg n'avaient pas commis de faute dans la prise en charge du requérant lorsque celui-ci s'est présenté à l'accueil des urgences.

9. Le centre hospitalier soutient qu'en admettant même que M. B...ait été examiné par un médecin de garde et qu'un ECG ait été réalisé vers 9 heures du matin, les séquelles de l'infarctus du myocarde auraient été les mêmes. Il indique à cet effet que, dès lors que l'expert a reconnu que M. B...ayant ressenti une douleur vers 4 heures du matin, l'établissement du diagnostic et sa prise en charge dans la matinée n'auraient pas permis d'éviter les séquelles dans la mesure où la prise en charge doit intervenir dans les trois premières heures de l'apparition des douleurs pour permettre une protection satisfaisante de la fonction cardiaque. Toutefois, l'expert n'a pas exclu toute amélioration dans l'hypothèse d'une intervention plus tardive, même si les chances de préserver la fonction ventriculaire s'amenuisent après la sixième heure. En outre, le rapport produit par le requérant, établi par un cardiologue expert près la Cour d'appel de Dijon, indique que, selon les recommandations de la Haute Autorité de santé et de la Société européenne de cardiologie, la désobstruction de l'artère peut apporter un bénéfice au patient jusqu'à la douzième heure après l'apparition de la douleur. Compte tenu de ces éléments, la faute commise par les Hôpitaux universitaires de Strasbourg a fait perdre à M. B...une chance de subir des séquelles moins importantes que celles dont il a été victime. Il s'ensuit, sans qu'il soit besoin d'ordonner une nouvelle expertise, que c'est à tort que le tribunal a jugé que la faute des Hôpitaux universitaires de Strasbourg ne lui avait pas fait perdre de chance d'échapper au préjudice qui s'est finalement réalisé.

10. L'expert a estimé que les deux manquements commis par les Hôpitaux universitaires de Strasbourg dans la prise en charge de M. B... le matin et lors de l'intervention du SAMU lui ont fait perdre une chance de 50 %. Toutefois, eu égard au laps de temps qui s'est écoulé entre le moment où l'intéressé a ressenti les premières manifestations de l'infarctus et sa présentation au service des urgences de l'hôpital de Hautepierre, à la faute retenue limitée à la prise en charge défectueuse par les Hôpitaux universitaires de Strasbourg, à l'incertitude concernant l'établissement du diagnostic d'infarctus dès le matin et à la moindre efficacité d'une revascularisation du myocarde 6 heures après l'apparition des douleurs, l'ampleur de la chance perdue peut être estimée, dans les circonstances de l'espèce, à 25 %.

En ce qui concerne les frais médicaux et divers supportés par la caisse primaire d'assurance maladie du Bas-Rhin :

11. La caisse primaire d'assurance maladie du Bas-Rhin demande le remboursement des frais d'hospitalisation qu'elle a supportés pour le compte de M. B...pour la période du 17 septembre 2010 au 16 juin 2011, ainsi que des frais médicaux pour la période du 16 novembre 2010 au 11 juin 2013 et des frais de transport pour la période du 17 septembre 2010 au 22 octobre 2010. Pour justifier de ses débours d'un montant total de 52 073,78 euros, la caisse primaire d'assurance maladie produit un état des dépenses et une attestation d'imputabilité de son médecin conseil selon laquelle l'ensemble des frais portés sur cet état est en lien avec la faute commise par les Hôpitaux universitaires de Strasbourg. Ces éléments établissent que ces frais constituent des dépenses de santé en lien direct et certain avec la faute imputable aux Hôpitaux universitaires de Strasbourg. M. B...ne conteste pas que les dépenses de santé dont se prévaut la caisse primaire d'assurance maladie ont été intégralement prises en charge par elle. Par suite, il y a lieu d'allouer à la caisse primaire d'assurance maladie du Bas-Rhin, compte tenu de l'ampleur de la chance perdue, une somme de 13 018,45 euros.

En ce qui concerne les préjudices personnels de M.B... :

12. M.B..., âgé de 67 ans à la date de consolidation de son état au 16 juin 2011, a subi un déficit fonctionnel permanent en lien avec la seule faute retenue des Hôpitaux universitaires de Strasbourg estimé par l'expert, compte tenu de son état antérieur, à 20 %, ainsi qu'un préjudice d'agrément. Il sera fait une juste appréciation des préjudices liés au trouble dans ses conditions d'existence en lui accordant, après application du taux de perte de chance, la somme de 6 250 euros, sans qu'y fasse obstacle la possibilité, s'il s'y croit fondé et en cas d'aggravation de sa situation, de solliciter l'indemnisation des nouveaux préjudices en lien avec la faute constatée.

Sur l'indemnité forfaitaire de gestion :

13. Aux termes de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale : " (...) En contrepartie des frais qu'elle engage pour obtenir le remboursement mentionné au troisième alinéa ci-dessus, la caisse d'assurance maladie à laquelle est affilié l'assuré social victime de l'accident recouvre une indemnité forfaitaire à la charge du tiers responsable et au profit de l'organisme national d'assurance maladie. Le montant de cette indemnité est égal au tiers des sommes dont le remboursement a été obtenu, dans les limites d'un montant maximum de 910 euros et d'un montant minimum de 91 euros. A compter du 1er janvier 2007, les montants mentionnés au présent alinéa sont révisés chaque année, par arrêté des ministres chargés de la sécurité sociale et du budget, en fonction du taux de progression de l'indice des prix à la consommation hors tabac prévu dans le rapport économique, social et financier annexé au projet de loi de finances pour l'année considérée (...)". Aux termes de l'article 1er de l'arrêté du 20 décembre 2017 relatif aux montants de l'indemnité forfaitaire de gestion prévue aux articles L. 376-1 et L. 454-1 du code de la sécurité sociale : " Les montants maximum et minimum de l'indemnité forfaitaire de gestion visés aux articles L. 376-1 et L. 454-1 du code de la sécurité sociale sont fixés respectivement à 1 066 € et à 106 € à compter du 1er janvier 2018 ".

14. En application des dispositions précitées, en vigueur à la date du présent arrêt, la caisse primaire d'assurance maladie du Bas-Rhin a droit à une indemnité forfaitaire de 1 066 euros mise à la charge des Hôpitaux universitaires de Strasbourg.

Sur les intérêts et leur capitalisation :

15. M.B..., qui n'établit ni la date à laquelle sa réclamation a été réceptionnée par les Hôpitaux universitaires de Strasbourg, ni celle à laquelle elle a été rejetée, a droit aux intérêts de retard sur la somme de 6 250 euros qui lui est due à compter du 25 octobre 2013, date d'enregistrement de sa demande au greffe du tribunal administratif de Strasbourg et à la capitalisation de ces intérêts à compter du 25 octobre 2014, date à laquelle était due au moins une année d'intérêts, puis à chaque échéance annuelle ultérieure à compter de cette date.

16. La caisse primaire d'assurance maladie du Bas-Rhin a droit aux intérêts au taux légal sur la somme de 13 018,45 à compter du 20 septembre 2016, date d'enregistrement de son mémoire à la cour demandant pour la première fois le versement des intérêts. Elle a, en outre, demandé la capitalisation des intérêts dans ce même mémoire. Il y a lieu, par suite, de faire droit à sa demande de capitalisation des intérêts à compter du 20 septembre 2017, date à laquelle était due au moins une année d'intérêts, puis à chaque échéance annuelle ultérieure.

Sur les frais d'expertise :

17. Les frais de l'expertise, taxés et liquidés à la somme de 1 800 euros par une ordonnance du 18 octobre 2013 du président du tribunal administratif de Strasbourg, sont mis à la charge définitive des Hôpitaux universitaires de Strasbourg.

Sur les frais non compris dans les dépens :

18. Il y a lieu de mettre à la charge des Hôpitaux universitaires de Strasbourg une somme de 1 500 euros à verser à M. B...sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. En revanche, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge des Hôpitaux universitaires de Strasbourg le versement de la somme que la caisse primaire d'assurance maladie du Bas-Rhin demande sur le fondement des mêmes dispositions.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 1304819 du 16 juin 2016 est annulé.

Article 2 : Les hôpitaux universitaires de Strasbourg sont condamnés à verser à M. B... la somme de 6 250 euros. Cette somme portera intérêt au taux légal à compter du 25 octobre 2013. Ces intérêts seront capitalisés à compter du 25 octobre 2014, puis à chaque échéance annuelle de cette date.

Article 3 : Les hôpitaux universitaires de Strasbourg sont condamnés à verser à la caisse primaire d'assurance maladie du Bas-Rhin la somme de 13 018,45 euros. Cette somme portera intérêt au taux légal à compter du 20 septembre 2016. Ces intérêts seront capitalisés à compter du 20 septembre 2017, puis à chaque échéance annuelle de cette date.

Article 4 : Les hôpitaux universitaires de Strasbourg sont condamnés à verser à la caisse primaire d'assurance maladie du Bas-Rhin la somme de 1 066 euros au titre des frais de gestion.

Article 5 : Les frais de l'expertise, taxés et liquidés à la somme de 1 800 euros par une ordonnance du 18 octobre 2013 du président du tribunal administratif de Strasbourg, sont mis à la charge définitive des Hôpitaux universitaires de Strasbourg.

Article 6 : Les Hôpitaux universitaires de Strasbourg verseront à M. B...la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 7 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 8 : Le présent arrêt sera notifié à M. D...B..., à la caisse primaire d'assurance maladie du Bas-Rhin, aux Hôpitaux universitaires de Strasbourg et à la société hospitalière d'assurances mutuelles.

9

N°16NC01794


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16NC01794
Date de la décision : 02/10/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

60-01 Responsabilité de la puissance publique. Faits susceptibles ou non d'ouvrir une action en responsabilité.


Composition du Tribunal
Président : M. MARINO
Rapporteur ?: M. Stéphane BARTEAUX
Rapporteur public ?: Mme KOHLER
Avocat(s) : SCP ALEXANDRE LEVY KAHN

Origine de la décision
Date de l'import : 16/10/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2018-10-02;16nc01794 ?
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