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27/09/2018 | FRANCE | N°17NC02846

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre - formation à 3, 27 septembre 2018, 17NC02846


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...C...a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler l'arrêté du 30 juin 2017 par lequel le préfet de la Marne lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1701382 du 31 août 2017, le président du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 23 novembre 2017, M.C..., représenté

par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 31 août 2017 du tribunal administr...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...C...a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler l'arrêté du 30 juin 2017 par lequel le préfet de la Marne lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1701382 du 31 août 2017, le président du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 23 novembre 2017, M.C..., représenté par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 31 août 2017 du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne ;

2°) d'annuler l'arrêté du 30 juin 2017 du préfet de la Marne ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Marne de lui délivrer le titre de séjour prévu par l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le cas échéant un titre de séjour salarié sous une astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la notification de la décision à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'État une somme de 2 500 euros, à verser à son conseil, en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- le jugement est irrégulier ; les dispositions de l'article R. 711-3 du code de justice administrative ont été méconnues dès lors qu'il n'a pas été informé avant l'audience du sens des conclusions du rapporteur public ; le tribunal a omis de statuer sur le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte ;

- l'arrêté attaqué est entaché d'incompétence ; il a été pris en méconnaissance de l'article R. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'il mentionne être intervenu sur proposition du secrétaire général de la préfecture et non du préfet ;

- il est insuffisamment motivé ; le préfet n'a pas procédé à un examen particulier de sa situation ;

- il méconnaît l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et le principe général du droit communautaire du droit d'être entendu avant l'édiction d'une décision défavorable ;

- il méconnaît les dispositions de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;

- il est entaché d'erreur de droit dès lors que le préfet s'est cru lié par les décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et de la Cour nationale du droit d'asile ;

- il méconnaît les dispositions des articles 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

M. C...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du bureau d'aide juridictionnelle de Nancy du 19 octobre 2017.

Vu :

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Didiot.

Une note en délibéré présentée par le préfet de la Marne a été enregistrée le 12 septembre 2018.

1. Considérant que M. A...C..., ressortissant kosovar né le 15 septembre 1977, est entré en France irrégulièrement le 28 octobre 2015 pour solliciter l'octroi du statut de réfugié ; que sa demande d'asile a été rejetée par décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 30 juin 2016, confirmée par décision de la Cour nationale du droit d'asile du 17 mars 2017 ; que par arrêté du 30 juin 2017, le préfet de la Marne lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ; que le requérant relève appel du jugement du 31 août 2017 par lequel le président du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande d'annulation de ces décisions ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I bis.-L'étranger qui fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français sur le fondement des 1°, 2°, 4° ou 6° du I de l'article L. 511-1 et qui dispose du délai de départ volontaire mentionné au premier alinéa du II du même article L. 511-1 peut, dans un délai de quinze jours à compter de sa notification, demander au président du tribunal administratif l'annulation de cette décision, ainsi que l'annulation de la décision mentionnant le pays de destination et de la décision d'interdiction de retour sur le territoire français qui l'accompagnent le cas échéant.(...) Le président du tribunal administratif ou le magistrat qu'il désigne à cette fin parmi les membres de sa juridiction ou parmi les magistrats honoraires inscrits sur la liste mentionnée à

l'article L. 222-2-1 du code de justice administrative statue dans un délai de six semaines à compter de sa saisine.(...) L'audience est publique. Elle se déroule sans conclusions du rapporteur public, en présence de l'intéressé, sauf si celui-ci, dûment convoqué, ne se présente pas. (...) " ;

3. Considérant que le jugement attaqué a été rendu selon la procédure précitée, qui prévoit expressément l'absence de conclusions du rapporteur public ; que la circonstance que M. C...n'a pas eu préalablement à l'audience devant le tribunal communication du sens de telles conclusions est, par conséquent, sans incidence sur la régularité du jugement attaqué ;

4. Considérant, en second lieu, que le tribunal a expressément répondu au moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte ; que le moyen tiré de l'irrégularité du jugement attaqué pour ce motif manque ainsi en fait et doit être écarté ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

5. Considérant, en premier lieu, que le requérant reprend en appel, sans apporter d'élément nouveau, les moyens tirés de l'incompétence de l'auteur de l'acte, de l'insuffisance de motivation, du défaut d'examen de sa situation personnelle et de la méconnaissance de l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et du principe général du doit communautaire d'être entendu avant l'édiction d'une décision défavorable ; qu'il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus, à bon droit, par le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne dans son jugement du 31 août 2017 ;

6. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

7. Considérant que le séjour en France de M. C...est récent ; qu'il est célibataire et sans enfants et ne démontre pas l'intensité de ses liens en France, alors qu'il n'établit pas être dépourvu d'attaches dans son pays d'origine où il a résidé la majeure partie de sa vie ; que la seule circonstance qu'il soit titulaire d'une promesse d'embauche en qualité de bûcheron ne suffit pas à lui ouvrir un droit au séjour ; qu'ainsi le requérant n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté attaqué aurait porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue duquel il a été pris ; qu'il s'ensuit que les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations précitées et de l'erreur manifeste d'appréciation doivent être écartés ;

8. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui fait l'objet d'une mesure d'éloignement est éloigné : 1° A destination du pays dont il a la nationalité, sauf si l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou la Cour nationale du droit d'asile lui a reconnu le statut de réfugié ou lui a accordé le bénéfice de la protection subsidiaire ou s'il n'a pas encore été statué sur sa demande d'asile ; 2° Ou, en application d'un accord ou arrangement de réadmission communautaire ou bilatéral, à destination du pays qui lui a délivré un document de voyage en cours de validité ; 3° Ou, avec son accord, à destination d'un autre pays dans lequel il est légalement admissible. (...) " ; qu'en indiquant que M. C... sera reconduit à destination du pays dont il a la nationalité, soit le Kosovo, ou tout autre pays dans lequel il serait légalement admissible, l'arrêté attaqué n'a pas méconnu les dispositions précitées ; que le moyen tiré de ce que le préfet n'aurait pas déterminé le pays de renvoi doit être écarté ;

9. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " ; qu'aux termes de l'article L.513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées où qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales " ; que M. C...se prévaut de menaces en raison de sa collaboration passée avec la police, de sa dénonciation d'actes de corruption et d'un conflit foncier avec un voisin ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de la Marne, qui s'est livré à sa propre appréciation de la réalité des risques encourus par l'intéressé en cas de retour au Kosovo, se soit cru à tort lié par les décisions de rejet des instances compétentes en matière d'asile ; qu'il a pu valablement s'approprier leurs avis alors que M. C...ne produit aucun élément probant de nature à corroborer ses allégations ; qu'ainsi le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées des articles L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés doit être écarté ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le président du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande en annulation ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

11. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté attaqué, n'implique aucune mesure particulière d'exécution ; que, par suite, les conclusions susvisées ne peuvent être accueillies ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

12. Considérant qu'il résulte des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative que l'avocat du bénéficiaire de l'aide juridictionnelle peut demander au juge de condamner la partie perdante à lui verser la somme correspondant à celle qu'il aurait réclamée à son client, si ce dernier n'avait pas eu l'aide juridictionnelle, à charge pour l'avocat qui poursuit, en cas de condamnation, le recouvrement de la somme qui lui a été allouée par le juge, de renoncer à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État à la mission d'aide juridictionnelle qui lui a été confiée ;

13. Considérant que l'État, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, ne saurait être condamné à verser à l'avocat de M. C...une somme en application de ces dispositions ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête susvisée présentée par M. C...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...C...et au ministre de l'intérieur.

Une copie du présent arrêt sera adressée au préfet de la Marne.

2

N° 17NC02846


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17NC02846
Date de la décision : 27/09/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. DHERS
Rapporteur ?: Mme Sandra DIDIOT
Rapporteur public ?: Mme PETON
Avocat(s) : GABON

Origine de la décision
Date de l'import : 02/10/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2018-09-27;17nc02846 ?
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