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19/07/2018 | FRANCE | N°18NC00024-18NC00025

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 19 juillet 2018, 18NC00024-18NC00025


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... D...et Mme B...E...ont demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler les arrêtés du 22 février 2017 par lesquels le préfet de Meurthe-et-Moselle a refusé de leur délivrer un titre de séjour, leur a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elles pourraient être reconduites en cas d'exécution forcée de la mesure d'éloignement.

Par un jugement n° 1701528, 1701531 du 19 septembre 2017, le tribunal admin

istratif de Nancy a annulé ces arrêtés en ce qu'ils fixent l'Azerbaïdjan comme pays d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... D...et Mme B...E...ont demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler les arrêtés du 22 février 2017 par lesquels le préfet de Meurthe-et-Moselle a refusé de leur délivrer un titre de séjour, leur a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elles pourraient être reconduites en cas d'exécution forcée de la mesure d'éloignement.

Par un jugement n° 1701528, 1701531 du 19 septembre 2017, le tribunal administratif de Nancy a annulé ces arrêtés en ce qu'ils fixent l'Azerbaïdjan comme pays de renvoi et a rejeté le surplus de leurs demandes.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête enregistrée le 2 janvier 2018 sous le n° 18NC00024, Mme A... D..., représentée par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nancy du 19 septembre 2017 en ce qu'il rejette le surplus de sa demande ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 22 février 2017 par lequel le préfet de Meurthe-et-Moselle a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé la Russie ou l'Arménie comme pays de destination ;

3°) d'enjoindre au préfet de Meurthe-et-Moselle, à titre principal, de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation administrative dans le même délai et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour pendant cet examen ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 800 euros à verser à son conseil, sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- l'arrêté contesté a été signé par une autorité incompétente ;

- le préfet a entaché sa décision de refus de séjour d'une erreur de droit dès lors qu'il s'est estimé à tort en situation de compétence liée au regard de l'avis du médecin de l'agence régionale de santé ;

- qu'il a entaché cette décision d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'elle ne pourra être soignée en Russie, en Arménie ou en Azerbaïdjan ;

- il n'appartenait pas au préfet d'examiner sa situation médicale au regard des soins disponibles en Arménie et en Azerbaïdjan ;

- la décision de refus de séjour méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le 7° de l'article L. 313-11 précité ;

- l'annulation de la décision de refus de séjour a pour conséquence celle de l'obligation de quitter le territoire français ;

- le préfet s'est estimé à tort en situation de compétence liée pour décider son éloignement ;

- la décision l'obligeant à quitter le territoire français est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- elle méconnaît les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code précité ;

- l'annulation de l'obligation de quitter le territoire français a pour conséquence celle de la décision fixant le pays de renvoi ;

- la décision fixant le pays de renvoi est insuffisamment motivée en fait ;

- cette décision méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'elle n'est admissible ni en Russie, ni en Arménie et qu'elle encourt des risques pour sa sécurité dans ces deux pays.

Par un mémoire en défense enregistré le 2 mars 2018, le préfet de Meurthe-et-Moselle conclut au rejet de la requête au motif qu'aucun des moyens soulevés par la requérante n'est fondé.

II. Par une requête enregistrée le 2 janvier 2018 sous le n° 18NC00025, Mme B... E..., représentée par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nancy du 19 septembre 2017 en ce qu'il rejette le surplus de sa demande ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 22 février 2017 par lequel le préfet de Meurthe-et-Moselle a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé la Russie ou l'Arménie comme pays de destination ;

3°) d'enjoindre au préfet de Meurthe-et-Moselle, à titre principal, de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation administrative dans le même délai et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour pendant cet examen ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 800 euros à verser à son conseil, sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- l'arrêté contesté a été signé par une autorité incompétente ;

- la décision de refus de séjour méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le 7° de l'article L. 313-11 précité ;

- l'annulation de la décision de refus de séjour a pour conséquence celle de l'obligation de quitter le territoire français ;

- le préfet s'est estimé à tort en situation de compétence liée pour décider son éloignement ;

- la décision l'obligeant à quitter le territoire français est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- l'annulation de l'obligation de quitter le territoire français a pour conséquence celle de la décision fixant le pays de renvoi ;

- la décision fixant le pays de renvoi est insuffisamment motivée en fait ;

- cette décision méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'elle n'est admissible ni en Russie, ni en Arménie et qu'elle encourt des risques pour sa sécurité dans ces deux pays.

Par un mémoire en défense enregistré le 2 mars 2018, le préfet de Meurthe-et-Moselle conclut au rejet de la requête au motif qu'aucun des moyens soulevés par la requérante n'est fondé.

Mmes D...et E...ont été admises au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par deux décisions du 28 novembre 2017.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Guérin-Lebacq a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que Mme D...et sa fille MmeE..., nées en Azerbaïdjan, respectivement, le 4 novembre 1959 et le 22 mars 1983, déclarent être entrées en France le 10 septembre 2013 afin de solliciter la qualité de réfugié ; que leurs demandes d'asile ont été rejetées par deux décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) du 11 août 2014, confirmées par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) le 12 février 2015 ; que, par un jugement n° 1603246, 1603247 du 31 juillet 2017 devenu définitif, le tribunal de Nancy a annulé la décision du 27 octobre 2016 par laquelle le préfet de Meurthe-et-Moselle avait refusé de délivrer un titre de séjour pour raison de santé à Mme D...au motif que l'administration n'avait examiné la demande de l'intéressée qu'au regard de la situation sanitaire en Azerbaïdjan ; qu'après avoir procédé au réexamen de la demande de MmeD..., le préfet de Meurthe-et-Moselle a pris à son encontre un arrêté du 22 février 2017 lui refusant un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant la Russie, l'Arménie et l'Azerbaïdjan comme pays à destination duquel elle pourrait être reconduite en cas d'exécution forcée de la mesure d'éloignement ; que, par un arrêté du même jour, le préfet de Meurthe-et-Moselle a refusé de délivrer un titre de séjour à Mme E... et a assorti cette décision d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jour à destination d'un des trois pays précités ; que, par un jugement du 19 septembre 2017, le tribunal administratif de Nancy a annulé ces deux arrêtés en ce qu'ils fixent l'Azerbaïdjan comme pays de renvoi et a rejeté le surplus des demandes présentées par Mmes D...etE... ; que, par deux requêtes qu'il y a lieu de joindre pour statuer par un seul arrêt, Mme D...et Mme E... font appel de ce jugement en tant qu'il a rejeté le surplus de leurs demandes d'annulation des arrêtés du 22 février 2017 ;

Sur le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur des arrêtés contestés :

2. Considérant que Mmes D...et E...reprennent en appel, sans apporter d'élément nouveau, le moyen tiré de ce que l'auteur des arrêtés contestés n'aurait pas reçu de délégation pour signer ces arrêtés ; qu'il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus par les premiers juges ;

Sur les autres moyens soulevés à l'encontre des décisions portant refus de séjour :

3. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable au litige : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. / La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence (...) " ;

4. Considérant que, pour refuser de délivrer un titre de séjour à MmeD..., le préfet de Meurthe-et-Moselle s'est fondé notamment sur l'avis rendu le 19 décembre 2016 par le médecin de l'agence régionale de santé de la région Grand Est, lequel a estimé que si l'état de santé de l'intéressée nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour elle des conséquences d'une exceptionnelle gravité, un traitement approprié existait en Russie, en Arménie et en Azerbaïdjan ; qu'il ressort des pièces du dossier et plus particulièrement de la décision de la CNDA du 12 février 2015 que MmeD..., qui déclare avoir vécu en Russie de 1991 à 2009, est en droit de se prévaloir de la nationalité russe sur le fondement de l'article 13, alinéa 2, de la loi sur la citoyenneté de la Fédération de Russie applicable à la date du 6 février 1992, ainsi que de la nationalité arménienne en application de l'article 1er de la loi relative à la citoyenneté de la République d'Arménie ; que, dans ces conditions, si l'intéressée soutient n'avoir aucune nationalité, le préfet de Meurthe-et-Moselle pouvait regarder la Russie et l'Arménie comme les pays dont elle est originaire au sens et pour l'application des dispositions précitées de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que les certificats médicaux produits à l'instance selon lesquels, notamment, un retour dans son pays d'origine serait pour Mme D... " responsable d'une perte de chance en terme de santé " alors que " sa maladie nécessite par ailleurs un environnement sanitaire approprié et confortable ", ne sont pas de nature à démontrer l'absence de traitement approprié en Russie ou en Arménie, ni que la pathologie dont elle est atteinte ne pourrait y faire l'objet d'une surveillance clinique et biologique ; que par ailleurs, la circonstance que le préfet ait également procédé à l'examen de la demande de Mme D... au regard de la situation sanitaire en Azerbaïdjan, Etat dont elle n'a pas la nationalité, est sans incidence sur la légalité de la décision contestée dès lors que sa demande a bien été examinée au regard des soins disponibles en Russie et en Arménie ; que, par suite, Mme D...n'est pas fondée à soutenir que le préfet aurait entaché sa décision d'une erreur de droit ou d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

5. Considérant, en deuxième lieu, que Mme D...reprend en appel, sans apporter d'élément nouveau, le moyen tiré de ce que le préfet de Meurthe-et-Moselle se serait estimé à tort en situation de compétence liée au regard de l'avis du médecin de l'agence régionale de santé ; qu'il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus par les premiers juges ;

6. Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° - Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) " ;

7. Considérant que si Mmes D...et E...font valoir leurs efforts d'insertion en France, il ressort des pièces des dossiers qu'elles sont arrivées sur le territoire français au cours de l'année 2013, aux âges respectifs de 53 et 30 ans ; qu'elles font toutes deux l'objet de décisions de refus de séjour ; que dans ces conditions, eu égard aux conditions et à la durée du séjour des requérantes, les décisions contestées refusant de leur délivrer un titre de séjour n'ont pas méconnu leur droit au respect de leur vie privée et familiale au regard des buts poursuivis par ces décisions ; que le moyen tiré d'une méconnaissance des dispositions et stipulations précitées ne peut qu'être écarté ;

Sur les autres moyens soulevés à l'encontre des décisions portant obligation de quitter le territoire français :

8. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ce qui précède que Mmes D...et E...ne sont pas fondées à soutenir que les décisions leur refusant le droit au séjour seraient illégales et devraient être annulées ; qu'il s'ensuit qu'elles ne sont pas plus fondées à soutenir que l'annulation de ces décisions aurait pour conséquence celle des décisions les obligeant à quitter le territoire français ;

9. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié (...) " ; que MmeD..., qui se borne à soutenir qu'elle ne serait admissible ni en Russie, ni en Arménie, ne fait état d'aucune circonstance susceptible de laisser supposer qu'elle ne pourrait bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans l'un ou l'autre de ces pays ; que, par suite, le moyen tiré d'une méconnaissance des dispositions précitées doit être écarté ;

10. Considérant, en dernier lieu, que les requérantes reprennent en appel, sans apporter d'élément nouveau, les moyens tirés de ce que le préfet de Meurthe-et-Moselle se serait estimé à tort en situation de compétence liée pour décider leur éloignement et qu'il aurait entaché ses décisions d'une erreur manifeste d'appréciation ; qu'il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus par les premiers juges ;

Sur les autres moyens soulevés à l'encontre des décisions fixant la Russie ou l'Arménie comme pays de renvoi :

11. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ce qui précède que Mmes D...et E...ne sont pas fondées à soutenir que les décisions les obligeant à quitter le territoire français seraient illégales et devraient être annulées ; qu'il s'ensuit qu'elles ne sont pas plus fondées à soutenir que l'annulation de ces décisions aurait pour conséquence celle des décisions fixant le pays de destination ;

12. Considérant, en deuxième lieu, que si les décisions contestées, qui fixent l'Arménie et la Russie comme pays de renvoi, omettent de reprendre l'ensemble des circonstances alléguées par les requérantes à l'appui de leurs demandes d'asile, cette circonstance n'est pas de nature à révéler une insuffisance de motivation de ces décisions ;

13. Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne (...). L'obligation de quitter le territoire français fixe le pays à destination duquel l'étranger est renvoyé en cas d'exécution d'office " ; qu'aux termes de l'article L. 513-2 du même code : " L'étranger qui fait l'objet d'une mesure d'éloignement est éloigné : / 1° A destination du pays dont il a la nationalité, sauf si l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou la Cour nationale du droit d'asile lui a reconnu le statut de réfugié ou lui a accordé le bénéfice de la protection subsidiaire ou s'il n'a pas encore été statué sur sa demande d'asile ; / 2° Ou, en application d'un accord ou arrangement de réadmission communautaire ou bilatéral, à destination du pays qui lui a délivré un document de voyage en cours de validité ; / 3° Ou, avec son accord, à destination d'un autre pays dans lequel il est légalement admissible. / Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 " ; qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " ;

14. Considérant qu'il résulte des dispositions précitées du code de l'entrée et du séjour des étranges et du droit d'asile que si l'autorité préfectorale, qui a pris une obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois à l'encontre d'un étranger, peut décider qu'à l'expiration de ce délai l'intéressé pourra être reconduit d'office à la frontière, il lui incombe de fixer le pays à destination duquel il sera reconduit à défaut de déférer à ladite obligation ; que ce pays peut être celui dont il a la nationalité ou tout autre pays dans lequel il est légalement admissible ;

15. Considérant qu'ainsi qu'il a déjà été dit pour MmeD..., il ressort des pièces des dossiers et plus particulièrement des décisions de la CNDA du 12 février 2015 que les requérantes, qui déclarent avoir vécu en Russie de 1991 à 2009, sont en droit de se prévaloir de la nationalité russe ou, compte tenu de leurs origines arméniennes, de la citoyenneté de la République d'Arménie ; que si les requérantes indiquent être de " nationalité indéterminée ", il n'est pas contesté qu'elles n'ont pas saisi l'OFPRA aux fins de se voir reconnaître la qualité d'apatride ; que, dans ces conditions, il n'est pas établi qu'elles ne seraient pas admissibles en Russie ou en Arménie ; que si elles soutiennent encore être exposées à des menaces pour leur sécurité en cas de renvoi vers l'un ou l'autre de ces deux pays, elles ne produisent aucun élément de nature à justifier d'un risque personnel, direct et sérieux pour leur vie ou leur liberté dans l'hypothèse d'un tel renvoi, en méconnaissance des stipulations précitées de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'au demeurant, les demandes de reconnaissance du statut de réfugié formées par Mme D...et Mme E...ont été rejetées par l'OFPRA puis par la CNDA ; que, par suite, les moyens tirés d'une violation de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doivent être écartés ;

16. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mmes D... et E...ne sont pas fondées à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a rejeté leurs demandes ; que, par voie de conséquence, leurs conclusions présentées à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ne peuvent qu'être rejetées ;

D E C I D E :

Article 1er : Les requêtes de Mmes D... et E...sont rejetées.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à MmeA... D..., à Mme B...E...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de Meurthe-et-Moselle.

5

N° 18NC00024, 18NC00025


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18NC00024-18NC00025
Date de la décision : 19/07/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. MARINO
Rapporteur ?: M. Jean-Marc GUERIN-LEBACQ
Rapporteur public ?: M. COLLIER
Avocat(s) : JEANNOT

Origine de la décision
Date de l'import : 14/08/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2018-07-19;18nc00024.18nc00025 ?
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