La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

26/06/2018 | FRANCE | N°16NC00840

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 26 juin 2018, 16NC00840


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SAS Gérard Loisirs a demandé au tribunal administratif de Nancy de prononcer la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et de la taxe additionnelle à la cotisation sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre de l'année 2011.

Par un jugement n° 1402999 du 10 mars 2016, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 4 mai 2

016, la SAS Gérard Loisirs, représentée par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugemen...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SAS Gérard Loisirs a demandé au tribunal administratif de Nancy de prononcer la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et de la taxe additionnelle à la cotisation sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre de l'année 2011.

Par un jugement n° 1402999 du 10 mars 2016, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 4 mai 2016, la SAS Gérard Loisirs, représentée par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nancy du 10 mars 2016 ;

2°) de prononcer la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et de la taxe additionnelle à la cotisation sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre de l'année 2011.

Elle soutient que :

- s'agissant des rappels de taxe sur la valeur ajoutée afférents aux contrats de location de mobil-homes, c'est à tort que l'administration a considéré qu'elle était intervenue en qualité de mandataire opaque, dès lors qu'elle n'est jamais devenue propriétaire des biens en cause ; le principe de neutralité de la taxe sur la valeur ajoutée a été méconnu ;

- s'agissant des rehaussements en matière d'impôt sur les sociétés relatifs à la remise en cause de la déductibilité d'avoirs émis au profit de propriétaires de mobil-homes, les contrats de gestion conclus avec les propriétaires de ces mobil-homes justifient du montant des produits imposables qu'elle a déclarés ;

- le rachat d'un mobil-home le 29 juillet 2011 n'a pas constitué un acte anormal de gestion ;

- les rappels de CVAE ne peuvent être maintenus pour les mêmes motifs que ceux invoqués pour les autres impositions ;

- s'agissant des pénalités qui lui ont été infligées, l'administration, qui se borne à justifier les majorations en cause par l'existence des rappels, ne démontre pas l'existence de manquements délibérés.

Par un mémoire, enregistré le 5 septembre 2016, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir qu'aucun des moyens invoqués par la société requérante n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Haudier,

- et les conclusions de M. Collier, rapporteur public.

1. Considérant que la société Gérard Loisirs, qui exerce une activité de location de terrains de camping et d'achat-revente de mobil-homes, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle elle a été assujettie à une cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés et à un rappel de taxe additionnelle à la cotisation sur la valeur ajoutée au titre de l'exercice du 1er janvier au 31 décembre 2011, ainsi qu'à des rappels de taxe sur la valeur ajoutée pour la période de janvier 2009 à décembre 2011 ; que la société Gérard Loisirs relève appel du jugement du 10 mars 2016, par lequel le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à décharge d'une partie de ces impositions ;

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 256 du code général des impôts : " (...) V. L'assujetti, agissant en son nom propre mais pour le compte d'autrui, qui s'entremet dans une livraison de bien ou une prestation de services, est réputé avoir personnellement acquis et livré le bien, ou reçu et fourni les services considérés " ; qu'aux termes de l'article 266 du même code : " 1. La base d'imposition est constituée : (...) b. Pour les opérations ci-après, par le montant total de la transaction : Opérations réalisées par un intermédiaire mentionné au V de l'article 256 et au III de l'article 256 bis " ;

3. Considérant que la société Gérard Loisirs met en location des mobil-homes de tiers situés sur des terrains lui appartenant ; que la société fait valoir que les propriétaires mettent leurs mobil-homes à sa disposition une partie de l'année en contrepartie de la restitution à leur profit de la moitié des recettes perçues, soit, selon la formule dite " investisseur ", par reversement direct, soit, selon la formule dite " économique ", par compensation avec les loyers dus au titre de la location des terrains sur lesquels se trouvent les mobil-homes ; que la société, après avoir collecté la taxe sur la valeur ajoutée afférente aux opérations de location, a déduit de l'assiette de cette taxe la proportion des commissions versées aux propriétaires ; que l'administration fiscale a toutefois considéré que, dès lors notamment qu'elle avait loué les biens en son nom propre, la société avait agi en qualité d'intermédiaire opaque et qu'elle ne pouvait pas déduire du montant de la taxe sur la valeur ajoutée collectée la taxe correspondant à la fraction du prix de la location qu'elle indique avoir rétrocédée aux propriétaires des mobil-homes ; que pour solliciter la décharge de l'imposition litigieuse, la société, qui ne conteste pas qu'elle a loué les biens en son nom propre, se borne à faire valoir qu'elle ne devient jamais propriétaire des mobil-homes en cause ; que, toutefois, cette seule circonstance ne permet pas, en l'espèce, de considérer qu'elle n'a pas agi en tant qu'intermédiaire opaque ; que, par ailleurs, la société ne démontre pas en quoi le principe de neutralité de la taxe sur la valeur ajoutée aurait été méconnu ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 38 du code général des impôts dans sa rédaction applicable : " 1. Sous réserve des dispositions des articles 33 ter, 40 à 43 bis et 151 sexies, le bénéfice imposable est le bénéfice net, déterminé d'après les résultats d'ensemble des opérations de toute nature effectuées par les entreprises, y compris notamment les cessions d'éléments quelconques de l'actif, soit en cours, soit en fin d'exploitation. / 2. Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt diminuée des suppléments d'apport et augmentée des prélèvements effectués au cours de cette période par l'exploitant ou par les associés. L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifié " ; qu'aux termes de l'article 39 du même code : " 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant, sous réserve des dispositions du 5, notamment : 1° Les frais généraux de toute nature, les dépenses de personnel et de main-d'oeuvre, le loyer des immeubles dont l'entreprise est locataire " ;

5. Considérant que si, en vertu des règles gouvernant l'attribution de la charge de la preuve devant le juge administratif, applicables sauf loi contraire, il incombe, en principe, à chaque partie d'établir les faits qu'elle invoque au soutien de ses prétentions, les éléments de preuve qu'une partie est seule en mesure de détenir ne sauraient être réclamés qu'à celle-ci ; qu'il appartient, dès lors, au contribuable, pour l'application des dispositions précitées du code général des impôts, de justifier tant du montant des charges qu'il entend déduire du bénéfice net défini à l'article 38 du code général des impôts que de la correction de leur inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de leur déductibilité ; que le contribuable apporte cette justification par la production de tous éléments suffisamment précis portant sur la nature de la charge en cause, ainsi que sur l'existence et la valeur de la contrepartie qu'il en a retirée ; que, dans l'hypothèse où le contribuable s'acquitte de cette obligation, il incombe ensuite au service, s'il s'y croit fondé, d'apporter la preuve de ce que la charge en cause n'est pas déductible par nature, qu'elle est dépourvue de contrepartie, qu'elle a une contrepartie dépourvue d'intérêt pour le contribuable ou que la rémunération de cette contrepartie est excessive ;

6. Considérant que la société conteste la remise en cause par l'administration fiscale de la déduction de son bénéfice imposable des " avoirs " effectués au profit de propriétaires de mobil-homes dans le cadre de la " formule économique " et correspondant au montant de l'emplacement du mobil-home dû pour l'année suivante ; que, toutefois, contrairement à ce qu'elle soutient, la seule circonstance que des mandats de gestion, au demeurant non produits, ont été signés avec les propriétaires des mobil-homes ne permet pas de justifier de la réalité et du montant des charges qu'elle entend déduire ; que la société requérante n'établit pas que les sommes en cause constituent, ainsi qu'elle le soutient, des charges déductibles au sens des dispositions précitées de l'article 39 du code général des impôts ;

7. Considérant, en troisième lieu, que le 29 juillet 2011, la société requérante a vendu un mobil-home pour la somme de 54 900 euros et a racheté aux acquéreurs de ce bien leur ancien mobil-home ; que l'administration fiscale a considéré que le rachat de ce dernier bien au prix de 34 900 euros a constitué un acte anormal de gestion, dès lors que ce prix correspondait à la valeur d'achat du bien qui avait été acquis le 11 octobre 2008, que le bien avait été immédiatement remis en vente au prix de 25 000 euros et que les vendeurs l'avaient racheté le 4 octobre 2011, soit moins de trois mois plus tard, au prix de 25 000 euros ; que la société avait initialement justifié le montant payé en faisant valoir que le mobil-home des clients se trouvait sur un terrain qu'elle souhaitait récupérer dans le cadre d'un projet immobilier de construction de chalets ; que, toutefois, l'administration fiscale a relevé que la société pouvait récupérer ledit terrain sans frais dès le 31 décembre 2011 et que le permis de construire relatif à la construction de ces chalets n'a été déposé que le 22 décembre 2011 ; que, par ailleurs, en l'absence de tout élément sur les conditions de la vente du mobil-home neuf au prix de 54 900 euros, le prix de vente litigieux ne peut être regardé comme ayant constitué un rabais accordé par la société pour l'acquisition de ce nouveau mobil-home ; que, dans ces conditions, l'administration fiscale établit que la somme de 9 900 euros a constitué une libéralité consentie aux vendeurs du mobil-home ;

8. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré (...) " ;

9. Considérant, d'une part, que, compte tenu de ce qui a été dit ci-dessus, la société requérante n'est pas fondée à solliciter la décharge des pénalités qui lui ont été appliquées sur le fondement de l'article 1729 du code général des impôts en se prévalant de l'absence de bien-fondé des rehaussements dont elle a fait l'objet ;

10. Considérant, d'autre part, que l'administration ne s'est pas bornée, pour justifier de l'application de ces majorations, à se prévaloir des rappels mis à la charge de la société ; qu'elle a indiqué dans la proposition de rectification du 6 août 2013, pour chaque rappel, les motifs justifiant de l'application d'une pénalité ; qu'elle s'est fondée sur la nature, l'importance et le caractère répété des manquements retenus et a notamment relevé, pour la plupart des manquements en cause, que la société avait déjà fait l'objet de rehaussements similaires pour des années antérieures et qu'elle ne pouvait ignorer les faits ayant motivé les rectifications opérées ; que l'administration doit être regardée comme apportant la preuve de la volonté de la société d'éluder l'impôt de nature à justifier le bien-fondé des pénalités mises à sa charge ;

11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société Gérard Loisirs n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête présentée par la société Gérard Loisirs est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société Gérard Loisirs et au ministre de l'action et des comptes publics.

2

N° 16NC00840


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16NC00840
Date de la décision : 26/06/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-01-04 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Règles générales. Impôt sur les bénéfices des sociétés et autres personnes morales.


Composition du Tribunal
Président : M. MARINO
Rapporteur ?: Mme Guénaëlle HAUDIER
Rapporteur public ?: M. COLLIER
Avocat(s) : SCP CONTENTIEUX REDACTION CONSEIL

Origine de la décision
Date de l'import : 10/07/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2018-06-26;16nc00840 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award