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27/03/2018 | FRANCE | N°17NC01487-17NC01488

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 27 mars 2018, 17NC01487-17NC01488


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme E...A...et M. D...A...ont demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler les arrêtés en date du 5 janvier 2017, par lesquels le préfet du Territoire de Belfort a refusé de leur délivrer un titre de séjour, les a obligés à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays à destination duquel ils pourraient être éloignés à l'expiration de ce délai et a pris à leur encontre une décision portant interdiction de retour sur le territoire français d'une durée

de deux ans.

Par deux jugements n° 1700149 et 1700151 du 14 février 2017, le tribun...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme E...A...et M. D...A...ont demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler les arrêtés en date du 5 janvier 2017, par lesquels le préfet du Territoire de Belfort a refusé de leur délivrer un titre de séjour, les a obligés à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays à destination duquel ils pourraient être éloignés à l'expiration de ce délai et a pris à leur encontre une décision portant interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans.

Par deux jugements n° 1700149 et 1700151 du 14 février 2017, le tribunal administratif de Besançon a rejeté leurs demandes.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête enregistrée le 25 juin 2017, sous le n° 17NC01488, Mme E...C...épouse A...représentée par MeF..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Besançon du 14 février 2017 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet du Territoire de Belfort du 5 janvier 2017 pris à son encontre ;

3°) d'enjoindre au préfet du Territoire de Belfort de procéder sans délai à l'effacement du signalement aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen ;

4°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ou, à défaut, de réexaminer sa situation dans le même délai et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler pendant la durée de ce réexamen ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros à verser à son conseil, sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- c'est à tort que le tribunal administratif a considéré que ses conclusions dirigées contre une décision de titre de séjour étaient irrecevables ;

- le tribunal administratif a entaché son jugement d'une erreur manifeste d'appréciation en considérant que le préfet n'avait pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de l'obligation de quitter le territoire sur sa situation familiale et personnelle ainsi que d'une erreur d'appréciation en considérant que le préfet avait pu légalement prendre une interdiction de retour du territoire ;

- le préfet a entaché l'obligation de quitter le territoire d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- la durée de l'interdiction de retour sur le territoire est excessive ;

- le régime transitoire prévu par la loi du 29 juillet 2015 et le décret du 21 décembre 2015 méconnait les dispositions de l'article 52 de la directive 2013/32/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013, en ce qu'il reporte l'application du nouveau mécanisme de recours suspensif devant la Cour nationale du droit d'asile au 1er novembre 2015 ; elle est fondée à se prévaloir des objectifs clairs et inconditionnels de cette directive ;

Par un mémoire en défense enregistré le 4 octobre 2017, le préfet du Territoire de Belfort conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir qu'aucun des moyens invoqués par la requérante n'est fondé.

II. Par une requête enregistrée le 25 juin 2017 sous le n° 17NC01487, M. D...A...représenté par MeF..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Besançon du 14 février 2017 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet du Territoire de Belfort du 5 janvier 2017 pris à son encontre ;

3°) d'enjoindre au préfet du Territoire de Belfort de procéder sans délai à l'effacement du signalement aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen ;

4°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ou, à défaut, de réexaminer sa situation dans le même délai et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler pendant la durée de ce réexamen ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros à verser à son conseil, sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il invoque les mêmes moyens que ceux soutenus à l'appui de la requête n° 17NC01487.

Par un mémoire en défense enregistré le 4 octobre 2017, le préfet du Territoire de Belfort conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir qu'aucun des moyens invoqués par le requérant n'est fondé.

Mme A...et M. A...ont été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par deux décisions du 29 mai 2017.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- la directive 2013/32/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de Mme Haudier a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que les requêtes n° 17NC01487 et 17NC01488 de M. et Mme A...présentent à juger des questions semblables et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour y statuer par un seul arrêt ;

2. Considérant que Mme E...A...et M. D...A..., tous deux de nationalité albanaise, sont entrés une première fois en France au mois de décembre 2013 ; que leurs demandes d'asile ont été rejetées par des décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) du 6 mai 2014, confirmées par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) le 9 février 2015 ; que leurs demandes de réexamen ont été rejetées par des décisions de l'OFPRA du 31 mars 2015, confirmées par des ordonnances de la CNDA du 8 septembre 2015 ; qu'ils indiquent qu'ils ont dû retourner en Albanie au mois d'avril 2015 suite à l'exécution des obligations de quitter le territoire prises à leur encontre le 17 juin 2014 et qu'ils sont revenus en France au mois de juillet 2015 ; qu'ils ont sollicité, le 4 août 2015, le réexamen de leurs demandes d'asile auprès de l'OFPRA ; que, par des décisions du 19 août 2015, le préfet du Doubs a refusé de les admettre au séjour au motif qu'ils étaient originaires d'un pays sûr ; que, par des décisions du 23 septembre 2016, l'OFPRA a rejeté leurs demandes d'asile ; que, par deux arrêtés du 5 janvier 2017, le préfet du Territoire de Belfort a refusé de leur délivrer un titre de séjour, les a obligés à quitter le territoire français dans un délai de 30 jours, a fixé le pays à destination duquel ils pourront être éloignés à l'expiration de ce délai et a pris à leur encontre une interdiction de retour sur le territoire français de deux ans ; que M. et Mme A...relèvent appel des jugements du 14 février 2017, par lesquels le tribunal administratif de Besançon a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation de ces deux arrêtés ;

Sur la régularité du jugement :

3. Considérant, en premier lieu, que si M. et Mme A...soutiennent que les jugements doivent êtres annulés dès lors que le tribunal administratif a commis des erreurs d'appréciation en considérant que le préfet n'avait pas entaché les obligations de quitter le territoire prises à leur encontre d'une erreur manifeste d'appréciation et qu'il avait pu légalement prendre à leur encontre des interdictions de retour sur le territoire français, le fait, pour le juge de première instance, d'écarter à tort un moyen en entachant sa décision d'une erreur d'appréciation justifie uniquement, le cas échéant, la censure de ce motif par la cour et l'examen des moyens soulevés dans le cadre de l'effet dévolutif, mais non l'annulation du jugement pour irrégularité ;

4. Considérant, en deuxième lieu, que s'il résulte des dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que le prononcé par l'autorité administrative à l'encontre d'un ressortissant étranger d'une obligation de quitter le territoire français sur le fondement du 6° du I de cet article n'est pas subordonné à l'intervention préalable d'une décision statuant sur le droit au séjour de l'intéressé en France, ces dispositions ne font pas obstacle à ce que le préfet prenne concomitamment une décision relative au séjour ;

5. Considérant qu'en l'espèce, contrairement à ce qu'ont indiqué les premiers juges, le préfet doit, compte tenu des motifs et du dispositif de l'arrêté litigieux, être regardé comme ayant pris à l'encontre des requérants des décisions portant refus de séjour ; que, par suite, c'est à tort que le tribunal administratif de Besançon a considéré que ces décisions n'existaient pas et a rejeté comme irrecevables leurs conclusions comme dirigées contre celles-ci ; que ses jugements du 14 février 2017 doivent, dès lors, être annulés dans cette mesure ;

6. Considérant qu'il y a lieu de se prononcer immédiatement sur les conclusions présentées par M. et Mme A...devant le tribunal administratif de Besançon tendant à l'annulation des refus de titre de séjour pris par le préfet du Territoire de Belfort à leur encontre le 5 janvier 2017 par voie d'évocation et de statuer, par l'effet dévolutif de l'appel, sur le surplus des conclusions des requêtes ;

Sur les décisions portant refus de séjour :

7. Considérant, en premier lieu, que l'arrêté attaqué comporte les considérations de fait qui en constituent le fondement ; que M. et Mme A...n'ont pas présenté de demandes de titre de séjour autres que leurs demandes d'asile ; que, si le préfet a indiqué que les intéressés n'entraient dans aucun cas d'attribution d'un titre de séjour de plein droit en application du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la circonstance qu'il n'ait pas mentionné les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatifs aux cas dans lesquels le titre de séjour est attribué de plein droit, ne suffit pas à regarder la décision comme étant insuffisamment motivée ; qu'enfin, le préfet n'avait pas à préciser expressément qu'il avait vérifié que son arrêté ne portait pas une atteinte excessive à l'intérêt supérieur de la fille de M. et MmeA... ; que, par suite, ces derniers ne sont pas fondés à soutenir que les refus de titre qui leur ont été opposés ne sont pas suffisamment motivés ;

8. Considérant, en second lieu, qu'il est constant que M. et MmeA... suivent des cours de français et que leur fille est née en France au mois de novembre 2015 ; que toutefois, compte tenu notamment du caractère récent de l'entrée des intéressés sur le territoire national et alors que ces derniers n'établissent pas être isolés en Albanie où ils ont vécu la majeure partie de leur vie, il ne ressort pas des pièces du dossier que les décisions portant refus de séjour ont porté au droit de M. et Mme A...au respect de leur vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elles ont été prises ; que le préfet n'a ainsi pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède M. et Mme A...ne sont pas fondés à demander l'annulation des décisions portant refus de séjour ;

Sur les décisions portant obligation de quitter le territoire :

10. Considérant, en premier lieu, que si les intéressés justifient de leur volonté d'insertion au sein de la société française et si les décisions litigieuses peuvent faire obstacle à ce qu'ils se rendent à une convocation de la CNDA saisie d'un recours contre les décisions de l'OFPRA du 23 septembre 2016, ces seules circonstances ne permettent pas de considérer qu'en édictant des obligations de quitter le territoire à l'encontre de M. et MmeA..., le préfet aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de ces décisions sur la situation familiale et personnelle des intéressés ;

11. Considérant, en second lieu, que M. et Mme A...soutiennent pour la première fois en appel qu'en statuant sur leur droit au séjour sans attendre l'issue de leurs recours formés devant la Cour nationale du droit d'asile, le préfet a méconnu les dispositions de l'article 46 paragraphe 6 de la directive 2013/32/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

12. Considérant que la transposition en droit interne des directives communautaires, qui est une obligation résultant du Traité instituant la Communauté européenne, revêt, en outre, en vertu de l'article 88-1 de la Constitution, le caractère d'une obligation constitutionnelle ; que, pour chacun de ces deux motifs, il appartient au juge national, juge de droit commun de l'application du droit communautaire, de garantir l'effectivité des droits que toute personne tient de cette obligation à l'égard des autorités publiques ; que tout justiciable peut en conséquence demander l'annulation des dispositions règlementaires qui seraient contraires aux objectifs définis par les directives et, pour contester une décision administrative, faire valoir, par voie d'action ou par voie d'exception, qu'après l'expiration des délais impartis, les autorités nationales ne peuvent ni laisser subsister des dispositions réglementaires, ni continuer de faire application des règles, écrites ou non écrites, de droit national qui ne seraient pas compatibles avec les objectifs définis par les directives ; qu'en outre, tout justiciable peut se prévaloir, à l'appui d'un recours dirigé contre un acte administratif non réglementaire, des dispositions précises et inconditionnelles d'une directive, lorsque l'Etat n'a pas pris, dans les délais impartis par celle-ci, les mesures de transposition nécessaires ;

13. Considérant que le paragraphe 5 de l'article 46 de la directive 2013/32/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 relative à des procédures communes pour l'octroi et le retrait de la protection internationale, prévoit que " les Etats membres autorisent les demandeurs à rester sur leur territoire jusqu'à l'expiration du délai prévu pour l'exercice de leur droit à un recours effectif et, si ce droit a été exercé dans le délai prévu, dans l'attente de l'issue du recours " ; qu'il résulte de ces dispositions que le droit à un recours effectif implique que le demandeur d'asile dont la demande de protection internationale a été rejetée comme infondée puisse, d'une part, contester cette décision devant une juridiction et, d'autre part, se maintenir sur le territoire de l'Etat membre jusqu'à l'expiration du délai prévu pour saisir cette juridiction et, le cas échéant, jusqu'à l'issue de la procédure formée devant elle ; qu'en vertu des dispositions de l'article 51 de cette même directive le délai de transposition de cette disposition expirait " au plus tard le 20 juillet 2015 " ; qu'il résulte, enfin, des dispositions de son article 52 que les Etats membres devaient appliquer les dispositions législatives, réglementaires et administratives procédant à la transposition de certains articles de la directive, et notamment de l'article 46, aux demandes de protection internationale introduites " après le 20 juillet 2015 ou à une date antérieure " ;

14. Considérant que si l'article L. 743-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile issues de la loi n° 2015-925 du 29 juillet 2015 relative à la réforme du droit d'asile prévoient que " Le demandeur d'asile dont l'examen de la demande relève de la compétence de la France et qui a introduit sa demande auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides bénéficie du droit de se maintenir sur le territoire français jusqu'à la notification de la décision de l'office ou, si un recours a été formé, jusqu'à la notification de la décision de la Cour nationale du droit d'asile. (...) ", ces dispositions ne s'appliquent, en vertu de l'article 30 du décret n° 2015-1166 du 21 septembre 2015 pris pour l'application de la loi n° 2015-925 du 29 juillet 2015, qu'aux demandeurs d'asile dont la demande a été enregistrée à compter du 1er novembre 2015 ;

15. Considérant qu'aux termes de l'article L. 742-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable aux demandes d'asile présentées entre le 1er juillet et le 1er novembre 2015 : " L'étranger présent sur le territoire français dont la demande d'asile entre dans un des cas visés aux 2° à 4° de l'article L. 741-4 bénéficie du droit de se maintenir en France jusqu'à la notification de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, lorsqu'il s'agit d'une décision de rejet. En conséquence, aucune mesure d'éloignement mentionnée au livre V du présent code ne peut être mise à exécution avant la décision de l'office. " ; qu'aux termes de l'article L. 741-4 du même code, dans sa rédaction applicable : " Sous réserve du respect des stipulations de l'article 33 de la Convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, l'admission en France d'un étranger qui demande à bénéficier de l'asile ne peut être refusée que si : (...) 2° L'étranger qui demande à bénéficier de l'asile a la nationalité d'un pays (...) considéré comme un pays d'origine sûr. Un pays est considéré comme tel s'il veille au respect des principes de la liberté, de la démocratie et de l'état de droit, ainsi que des droits de l'homme et des libertés fondamentales. La prise en compte du caractère sûr du pays d'origine ne peut faire obstacle à l'examen individuel de chaque demande (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que l'étranger qui s'est vu refuser l'admission au séjour au motif qu'il a la nationalité d'un pays d'origine sûr ne bénéficie du droit de se maintenir en France que jusqu'a la notification de la décision de l'OFPRA s'il s'agit d'une décision de rejet ; que la circonstance qu'il ait formé un recours contre cette décision auprès de la CNDA ne fait pas obstacle à son éloignement ;

16. Considérant que si ces dernières dispositions ne sont a priori pas compatibles avec celles précitées du paragraphe 5 de l'article 46 de la directive 2013/32/UE, celui-ci précise toutefois également qu'il s'applique " sans préjudice du paragraphe 6 " ; qu'en vertu de ces dernières dispositions, combinées avec celles du b) du paragraphe 8 de l'article 31, en cas de décision considérant une demande d'asile comme infondée du fait notamment de la provenance du demandeur d'un pays d'origine sûr, " une juridiction est compétente pour décider si le demandeur peut rester sur le territoire de l'État membre, soit à la demande du demandeur ou de sa propre initiative, si cette décision a pour conséquence de mettre un terme au droit du demandeur de rester dans l'État membre et lorsque, dans ces cas, le droit de rester dans l'État membre dans l'attente de l'issue du recours n'est pas prévu par le droit national. " ; qu'ainsi, dans une telle hypothèse, le droit à un recours effectif prévu par l'article 46 de la directive 2013/32/UE n'implique pas nécessairement que le demandeur ait le droit de se maintenir sur le territoire de l'Etat membre dans l'attente de l'issue du recours juridictionnel formé contre la décision rejetant sa demande de protection internationale mais implique seulement, lorsque cette décision a pour conséquence de mettre un terme à son droit au séjour dans l'Etat membre, qu'une juridiction décide s'il peut se maintenir sur le territoire de cet Etat ;

17. Considérant, par suite, que M. et Mme A...dont la demande d'asile a été examinée par l'OFPRA dans le cadre de la procédure prioritaire, qui se sont vu refuser l'admission au séjour sur le fondement du 2° de l'article L. 741-2 du code de l'entrée et du séjour et qui ont pu contester devant une juridiction l'obligation de quitter le territoire prise par le préfet suite à la décision de l'OFPRA par un recours revêtu d'un caractère suspensif, ne sont pas fondés à se prévaloir des dispositions de l'article 46 de la directive 2013/32/UE en tant qu'elles prévoient un droit pour le demandeur d'asile de se maintenir sur le territoire de l'Etat membre jusqu'à l'expiration du délai prévu pour saisir une juridiction contre la décision de rejet de sa demande de protection internationale, et le cas échéant jusqu'à l'issue de la procédure formée devant cette juridiction ;

Sur les décisions portant interdiction de retour :

18. Considérant qu'aux termes du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de sa notification, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger ou lorsque l'étranger n'a pas satisfait à cette obligation dans le délai imparti. / Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative ne prononce pas d'interdiction de retour. / (...) Lorsqu'elle ne se trouve pas en présence des cas prévus au premier alinéa du présent III, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, assortir l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée maximale de deux ans. / (...) La durée de l'interdiction de retour mentionnée au premier alinéa du présent III ainsi que le prononcé et la durée de l'interdiction de retour mentionnée au quatrième alinéa sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. (...) " ;

19. Considérant qu'il est constant que les intéressés avaient fait l'objet le 14 juin 2014 d'obligations de quitter le territoire auxquelles ils n'ont pas déféré et qui ont été exécutées d'office le 28 avril 2015 ; qu'ils indiquent eux-mêmes être revenus sur le territoire français le 28 juillet 2015 ; que, compte tenu en outre du caractère récent de l'entrée en France des intéressés, le préfet a pu légalement prendre à leur encontre des décisions portant interdiction de retour du territoire français d'une durée de deux ans, alors même qu'ils justifient d'une volonté d'insertion au sein de la société française et qu'ils ne constituent pas une menace pour l'ordre public ;

20. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. et Mme A...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Besançon a rejeté leurs conclusions à fin d'annulation dirigées contre les décisions portant obligation de quitter le territoire et interdiction de retour sur le territoire français ;

21. Considérant qu'il y a lieu, par voie de conséquence, de rejeter leurs conclusions à fin d'injonction sous astreinte ainsi que leurs conclusions présentées sur le fondement des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

D E C I D E :

Article 1er : Les jugements du tribunal administratif de Besançon du 14 février 2017 sont annulés en tant qu'ils rejettent les conclusions à fin d'annulation dirigées contre les décisions du préfet du Territoire de Belfort du 5 janvier 2017 portant refus de séjour.

Article 2 : Les demandes présentées par M. et Mme A...devant tribunal administratif de Besançon tendant à l'annulation des décisions du préfet du Territoire de Belfort du 5 janvier 2017 portant refus de séjour et le surplus des conclusions de la requête sont rejetés.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E...C...épouseA..., à M. D...A...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Territoire de Belfort.

2

N° 17NC01487-17NC01488


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17NC01487-17NC01488
Date de la décision : 27/03/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. MARINO
Rapporteur ?: Mme Guénaëlle HAUDIER
Rapporteur public ?: M. COLLIER
Avocat(s) : DRAVIGNY AMANDINE

Origine de la décision
Date de l'import : 03/04/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2018-03-27;17nc01487.17nc01488 ?
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