La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

06/03/2018 | FRANCE | N°16NC01396

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 06 mars 2018, 16NC01396


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

MmeF... C... a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler la décision du 29 janvier 2015 par laquelle le directeur du centre hospitalier Ravenel de Mirecourt l'a placée en congé de maladie ordinaire à compter du 30 juin 2013 et d'ordonner une expertise aux fins de se prononcer sur sa situation médicale et sur l'imputabilité au service de ses arrêts de maladie.

Par un jugement n° 1500949 du 19 mai 2016, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande.

Procédure devant la cou

r :

Par une requête enregistrée le 5 juillet 2016, et deux mémoires en réplique enre...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

MmeF... C... a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler la décision du 29 janvier 2015 par laquelle le directeur du centre hospitalier Ravenel de Mirecourt l'a placée en congé de maladie ordinaire à compter du 30 juin 2013 et d'ordonner une expertise aux fins de se prononcer sur sa situation médicale et sur l'imputabilité au service de ses arrêts de maladie.

Par un jugement n° 1500949 du 19 mai 2016, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 5 juillet 2016, et deux mémoires en réplique enregistrés le 17 novembre 2016 et le 19 septembre 2017, Mme F... C..., représentée par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nancy du 19 mai 2016 ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision du 29 janvier 2015 ;

3°) d'ordonner une expertise aux fins de se prononcer sur sa situation médicale et sur l'imputabilité au service de ses arrêts de maladie ;

4°) de mettre à la charge du centre hospitalier Ravenel le versement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- sa requête est recevable dès lors qu'elle ne se borne pas à reproduire ses écritures présentées en première instance ;

- elle conserve un intérêt à demander l'annulation de la décision du 29 janvier 2015 ;

- le moyen tiré du défaut de motivation de la décision contestée est recevable ;

- cette décision est insuffisamment motivée ;

- la commission de réforme et l'administration n'ont pas pris en compte l'ensemble des éléments médicaux se rapportant à sa situation ;

- l'administration ne pouvait fixer la date de sa consolidation au 30 juin 2013 dès lors que l'ensemble de ses arrêts de travail postérieurs à cette date présente un lien avec l'accident de service subi le 18 février 2013 ;

- les troubles constatés le 23 septembre 2013 constituent une rechute de l'accident du travail subi le 4 février 2003.

Par deux mémoires en défense enregistrés le 21 septembre 2016 et le 23 juin 2017, le centre hospitalier Ravenel, représenté par MeD..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de la requérante en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Le centre hospitalier soutient que :

- la requête se borne à reprendre les écritures présentées en première instance sans comporter aucune critique du jugement attaqué et est, par suite, irrecevable ;

- le recours en annulation de Mme C...est privé d'objet dès lors que la décision contestée a été confirmée par une décision du 27 mai 2015 devenue définitive ;

- le moyen tiré de ce que la décision contestée est insuffisamment motivée a été soulevée pour la première fois devant le tribunal administratif dans un mémoire présenté le 25 septembre 2015 et était par suite irrecevable ;

- cette décision est suffisamment motivée ;

- les moyens tirés de ce que l'administration aurait adopté cette décision avant que la commission de réforme ne se prononce et l'aurait mise en oeuvre sans attendre le terme du délai de recours sont inopérants ;

- les autres moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés ;

- une mesure d'expertise présenterait un caractère frustratoire.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979, alors applicable ;

- la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ;

- le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 ;

- le décret n° 88-386 du 19 avril 1988 ;

- l'arrêté du 4 août 2004 relatif aux commissions de réforme des agents de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Guérin-Lebacq,

- les conclusions de M. Collier, rapporteur public,

- et les observations de Me B...pour Mme C...et de Me E...pour le centre hospitalier Ravenel.

1. Considérant que MmeC..., aide-soignante au centre hospitalier Ravenel de Mirecourt (Vosges), a été victime le 18 février 2013 d'une chute sur son lieu de travail, reconnue imputable au service ; que l'intéressée a été placée en congé de maladie depuis cet accident et a fait l'objet de nombreux soins médicaux en vue de traiter, au niveau du membre inférieur droit, une entorse à la cheville, une gonarthrose et une tendinopathie et, au niveau du membre supérieur gauche, un étirement brachial accompagné d'une paresthésie des doigts ; que, par une décision du 29 janvier 2015, le directeur du centre hospitalier, estimant que seule l'entorse était imputable à l'accident de service, a placé Mme C...en congé de maladie ordinaire pour la période postérieure au 30 juin 2013, date retenue pour sa consolidation ; que la requérante, qui estime que ses arrêts de travail après le 30 juin 2013 sont imputables au service, fait appel du jugement du 19 mai 2016 par lequel le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 29 janvier 2015 ;

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, par une décision du 27 mai 2015 intervenue en cours d'instance devant le tribunal administratif, le directeur du centre hospitalier Ravenel a confirmé sa décision précédente du 29 janvier 2015 plaçant Mme C...en congé de maladie ordinaire pour la période postérieure au 30 juin 2013 ; que cette décision du 27 mai 2015 s'est entièrement substituée à la décision initiale du 29 janvier 2015 qui a été rapportée ; que par suite, si les conclusions à fin d'annulation présentées par Mme C...sont formellement dirigées contre la décision du 29 janvier 2015, la requérante doit être regardée comme sollicitant l'annulation de la nouvelle décision du 27 mai 2015 ;

3. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public, dont les dispositions ont été codifiées depuis à l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : (...) - refusent un avantage dont l'attribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour l'obtenir (...) " ; qu'aux termes de l'article 3 de cette même loi, dont les dispositions ont été reprises à l'article L. 211-5 du code précité : " La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision " ;

4. Considérant que Mme C...ne saurait utilement se prévaloir d'un défaut de motivation de la décision du 29 janvier 2015, à laquelle s'est substituée la décision du 27 mai 2015 ; que cette dernière décision vise l'article 41 de la loi du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière et est, ainsi, suffisamment motivée en droit ; qu'elle a été notifiée sous couvert d'un courrier également daté du 27 mai 2015 et reprenant la teneur de l'avis de la commission de réforme du 30 avril 2015 ; que dans ces conditions, la décision contestée, qui se fonde sur des considérations tenant à l'état de santé de l'intéressée, est également suffisamment motivée en fait ; que, par suite, le moyen tiré du défaut de motivation doit être écarté ;

5. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 16 du décret du 19 avril 1988 relatif aux conditions d'aptitude physique et aux congés de maladie des agents de la fonction publique hospitalière : " La commission départementale de réforme des agents des collectivités locales est obligatoirement consultée si la maladie provient de l'une des causes prévues au deuxième alinéa du 2° de l'article 41 de la loi du 9 janvier 1986 susvisée. / Lorsque l'administration est amenée à se prononcer sur l'imputabilité au service d'une maladie ou d'un accident, elle peut, en tant que de besoin, consulter un médecin expert agréé (...) " ;

6. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la commission de réforme s'est prononcée sur la situation de Mme C...le 15 janvier 2015 au vu, notamment, des conclusions de l'expertise médicale réalisée le 22 septembre 2014 par le docteur Hummer, médecin agréé de l'administration ; que la requérante a contesté cet avis en se prévalant d'un certificat médical établi le 23 mars 2015 par le docteur Masson ; que, par un avis rendu le 30 avril 2015, la commission de réforme a confirmé son avis du 15 janvier précédent ; que la seule circonstance que, dans ce nouvel avis, la commission de réforme indique s'être prononcée sur la demande de réexamen de Mme C... après avoir " revu le rapport du docteur Hummer " ne suffit pas à établir qu'elle aurait omis de prendre en compte les éléments médicaux produits par l'intéressée à l'appui de sa contestation ; que, dans ces conditions, la requérante n'est pas fondée à soutenir que la décision contestée serait entachée d'un vice de procédure ;

7. Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article 41 de la loi du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. Le fonctionnaire conserve, en outre, ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. Le bénéfice de ces dispositions est subordonné à la transmission par le fonctionnaire, à son administration, de l'avis d'arrêt de travail justifiant du bien-fondé du congé de maladie, dans un délai et selon les sanctions prévus en application de l'article 42. / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à sa mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident (...) " ; que le droit, prévu par ces dispositions, de conserver l'intégralité du traitement est soumis à la condition que la maladie mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'accomplir son service soit en lien direct, mais non nécessairement exclusif, avec un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de ses fonctions ;

8. Considérant, d'une part, que, pour contester le refus de l'administration de lui octroyer le bénéfice des dispositions précitées du 2ème alinéa du 2° de l'article 41 de la loi du 9 janvier 1986 pour la période postérieure au 30 juin 2013, Mme C... soutient que l'accident de service dont elle a été victime le 18 février 2013 est à l'origine non seulement d'une entorse à la cheville droite mais également d'une gonarthrose au genou droit, pour laquelle elle a été opérée le 1er juillet 2013, et de la tendinopathie qui a justifié une seconde intervention le 26 août 2013 ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier que les certificats médicaux ne font état d'une lésion au genou droit qu'à compter du mois de mars 2013, plus d'un mois après l'accident de service précité ; que le compte-rendu opératoire établi à la suite de l'opération du 1er juillet 2013 fait état d'une gonarthrose en lien avec l'état antérieur de MmeC..., qui souffre d'une pathologie poly-arthrosique et d'une spondylarthrite ankylosante évolutive diagnostiquée en 1998, sans évoquer une éventuelle origine traumatique de cette gonarthrose, ni même une lésion que l'intéressée aurait pu subir au genou droit lors de l'accident de service précité ; que si les certificats médicaux établis à la suite de cet accident, les 18 et 19 février 2013, évoquent un traumatisme du tendon d'Achille droit, il ressort du rapport du médecin agréé que la tendinopathie présentée par la requérante trois mois après l'accident de service résulte également de sa maladie rhumatismale et de ses antécédents locomoteurs, aggravés par une surcharge pondérale importante ; que le certificat médical du 23 mars 2015, établi par le docteur Masson à la demande de la requérante, impute à l'accident du 18 février 2013 l'ensemble des lésions présentées par l'intéressée sans comporter d'argumentaire propre à démontrer que la gonarthrose et la tendinopathie présenteraient un lien direct avec ledit accident : que si le docteur Masson conclut que la date de consolidation du 30 juin 2013 " ne correspond pas à une réalité médicale ", cette appréciation qui tient compte de l'état général de Mme C... n'est pas de nature à infirmer la date retenue par l'administration pour sa consolidation en ce qui concerne l'entorse à la cheville droite, seule lésion reconnue comme imputable au service ;

9. Considérant, d'autre part, que MmeC..., qui a été victime le 4 février 2003 d'un précédent accident imputable au service, à l'issue duquel a été diagnostiqué un étirement du plexus brachial gauche dont ont résulté des paresthésies persistantes au niveau des doigts de la main gauche, se prévaut encore d'un certificat de son médecin traitant du 23 septembre 2013 indiquant une réapparition de cet étirement et des paresthésies, aggravés par les cannes anglaises utilisées par l'intéressée à la suite de son accident du 18 février 2013 ; que toutefois, il n'est pas établi que l'incapacité présentée par la requérante postérieurement au 30 juin 2013 résulterait de la réapparition de cet étirement, et non pas de la gonarthrose et de la tendinopathie, non imputables au service, dont elle souffre par ailleurs, ainsi que de la fracture subie au niveau de la jambe droite, à l'extérieur du service, au cours du mois de novembre 2014 ;

10. Considérant qu'il suit de ce qui précède que Mme C...n'est pas fondée à soutenir que, par sa décision du 27 mai 2015 lui refusant le bénéfice du régime des accidents de service postérieurement au 30 juin 2013, le directeur du centre hospitalier Ravenel aurait fait une inexacte application des dispositions du deuxième alinéa du 2° de l'article 41 de la loi du 9 janvier 1986 ;

11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'ordonner une expertise, ni de se prononcer sur la recevabilité de la requête, que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

12. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du centre hospitalier Ravenel, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme dont Mme C...demande le versement au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de MmeC... la somme demandée par le centre hospitalier Ravenel sur le fondement des mêmes dispositions ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme C...est rejetée.

Article 2 : Les conclusions du centre hospitalier Ravenel présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme F... C...et au centre hospitalier Ravenel de Mirecourt.

2

N° 16NC01396


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16NC01396
Date de la décision : 06/03/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-05-04-01-03 Fonctionnaires et agents publics. Positions. Congés. Congés de maladie. Accidents de service.


Composition du Tribunal
Président : M. MARINO
Rapporteur ?: M. Jean-Marc GUERIN-LEBACQ
Rapporteur public ?: M. COLLIER
Avocat(s) : EPITOGES

Origine de la décision
Date de l'import : 13/03/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2018-03-06;16nc01396 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award