Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. et Mme E...ont demandé au tribunal administratif de Nancy de prononcer la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2010 et des majorations correspondantes.
Par un jugement n° 1403276 du 28 avril 2016 le tribunal administratif de Nancy a rejeté leur demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 1er juillet 2016 et un mémoire complémentaire enregistré le 23 novembre 2016, M. et MmeE..., représentés par Me C..., demandent à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nancy ;
2°) de prononcer la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2010 et des majorations correspondantes ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- les premiers juges n'ont pas répondu au moyen tiré de ce qu'une centrale photovoltaïque entre dans la définition civile de l'immeuble ;
- l'administration a contrôlé les sociétés SEP SUNRA FLUIDE 1044 et 1045 afin de contourner la procédure de vérification de comptabilité ;
- l'administration ne leur a pas fait connaître la méthode de calcul utilisée afin de déterminer la valeur vénale des centrales photovoltaïques ;
- l'administration fonde sa substitution de base légale sur le décret du 5 mars 2011, postérieur au fait générateur du crédit d'impôt ;
- l'administration n'a pas tenu compte des effets du moratoire du 9 décembre 2010 ;
- ils peuvent se prévaloir de la réponse du sénateur D...portant sur les conséquences du moratoire gouvernemental ;
- la date du fait générateur de la réduction d'impôt est celle de la fixation définitive au sol de la centrale photovoltaïque.
Par un mémoire en défense, enregistré le 10 octobre 2016, le ministre de l'économie et des finances conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'aucun moyen de la requête n'est fondée.
Vu :
- les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts ;
- le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Martinez,
- et les conclusions de Mme Peton, rapporteur public.
1. Considérant que M. et MmeE..., associés des sociétés en participation SEP Sunra Fluide 1043 1044 et 1045, ont imputé sur le montant de leur impôt sur le revenu au titre de l'année 2010, sur le fondement des dispositions de l'article 199 undecies B du code général des impôts, une réduction d'impôt résultant d'investissements réalisés dans l'île de La Réunion par lesdites sociétés consistant en l'acquisition de centrales photovoltaïques installées sur les toits des habitations des particuliers et données en location à des sociétés en nom collectif en vue de leur exploitation pour la production et la vente d'énergie électrique ; que cette réduction d'impôt a été remise en cause par l'administration fiscale à l'issue d'un contrôle sur pièces ayant donné lieu à une proposition de rectification du 25 avril 2014, au motif qu'en l'absence de raccordement des installations au réseau électrique géré par la société Électricité de France (EDF) à la date du 31 décembre 2010, les investissements considérés n'étaient pas éligibles au bénéfice du régime de faveur et ne pouvaient en conséquence ouvrir droit à une réduction d'impôt au titre de cette année ; que, statuant sur la réclamation formée par les contribuables, l'administration a, par une décision d'admission partielle du 23 octobre 2014, admis le principe de la réduction d'impôt au titre de l'année 2010 pour les investissements de la SEP Sunra Fluide 1043 ; qu'en revanche, le service a réduit le montant des réductions d'impôt sollicitées au motif que l'acquisition du bien concerné par l'investissement avait donné lieu à une surfacturation ; que M. et Mme E... relèvent appel du jugement n° 1403276 du 28 avril 2016 par lequel le tribunal administratif de Nancy a rejeté leur demande tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujetti au titre de l'année 2010 ;
Sur les conclusions à fin de décharge :
En ce qui concerne la régularité de la procédure :
S'agissant des investissements réalisés pas les SEP Sunra Fluide 1044 et 1045 :
2. Considérant que l'imposition litigieuse ne procède pas du rehaussement du résultat imposable des sociétés à l'origine des investissements, qui est taxé entre les mains des associés au prorata de leur parts, mais résulte uniquement de la remise en cause de la réduction d'impôt à l'occasion du contrôle sur pièces des déclarations de revenus des associés, lesquels ont au demeurant bénéficié des garanties de la procédure contradictoire de rectification ; qu'ainsi, le moyen tiré du détournement de procédure doit être écarté ;
S'agissant des investissements réalisés par la SEP Sunra Fluide 1043 :
3. Considérant que l'administration, qui ne peut renoncer au bénéfice de la loi fiscale, est en droit, lorsqu'elle statue sur la réclamation du contribuable, de substituer à cette fin une base légale nouvelle à celle initialement retenue pour la liquidation des impositions dès lors que le contribuable peut contester ce nouveau fondement, de manière contradictoire, dans le cadre de la procédure contentieuse devant la juridiction administrative saisie du litige et que, dans le cas où l'imposition primitive a fait l'objet d'une procédure de rectification, les garanties de la procédure d'imposition afférentes à la nouvelle base légale ont été respectées ; qu'en outre, dans le cas où l'administration a utilisé des documents ou des renseignements obtenus de tiers pour fonder une rectification au titre de la nouvelle base légale dont elle se prévaut au cours de la procédure contentieuse, il lui appartient, lors de l'instance devant le juge saisi pour la première fois de la demande de substitution de base légale ou, le cas échéant, lors de l'instance d'appel, et au cas où cette obligation n'aurait pas déjà été satisfaite au cours de la procédure d'imposition, d'informer le contribuable, avec une précision suffisante, de l'origine et de la teneur de ces documents ou de ces renseignements, dans des délais permettant à l'intéressé d'en demander, le cas échéant, la communication et le mettant à même, après celle-ci, de présenter utilement ses observations avant la clôture de l'instruction ;
4. Considérant, qu'il résulte de l'instruction que dans sa décision du 23 octobre 2014, laquelle se rattache à la procédure contentieuse et non à la procédure d'établissement de l'impôt, l'administration a statué sur la réclamation présentée par M. et Mme E... tendant à obtenir le bénéfice de la réduction d'impôt liée à l'investissement en litige au titre de l'année 2010 ; que, pour limiter le montant de la réduction d'impôt accordée aux contribuables, l'administration s'est fondée sur des factures obtenues auprès de fournisseurs grâce à l'exercice de son droit de communication dans le cadre de la procédure de vérification de comptabilité de la société SFER, gérante des sociétés en participation dont les contribuables sont associés ; qu'il est constant, ainsi qu'il ressort des termes mêmes de la décision d'acceptation partielle de la réclamation préalable, qui renvoie sur ce point à des documents joints en annexes et adressés aux contribuables, que l'administration a informé ceux-ci de ce que plusieurs factures de centrales photovoltaïques, obtenues au moyen du droit de communication exercé auprès de fournisseurs de centrales, lui avaient permis de déterminer un prix de vente moyen par Watt-crète (Wc) de 4,54 euros ; qu'ainsi, dès ce stade, les contribuables étaient suffisamment informés de l'origine et de la teneur des renseignements sur lesquels l'administration s'appuyait pour retenir le nouveau fondement légal justifiant la remise en cause partielle de la réduction d'impôt et ont été mis à même de présenter utilement leurs observations au cours de la procédure contentieuse ; que dès lors, le moyen selon lequel en violation du principe du contradictoire, l'administration n'a pas fait connaître aux contribuables la méthode de calcul utilisée afin de déterminer la valeur vénale des centrales photovoltaïques ne peut qu'être écarté ; qu'il est enfin constant que les requérants, qui avaient bénéficié des garanties de la procédure de rectification contradictoire, n'ont pas été privés des garanties inhérentes à la nouvelle base légale retenue par le service ;
En ce qui concerne le bien fondé de l'imposition :
S'agissant des investissements réalisés pas les SEP Sunra Fluide 1044 et 1045 :
5. Considérant qu'aux termes de l'article 199 undecies B du code général des impôts, dans sa version applicable au litige : " I. Les contribuables domiciliés en France au sens de l'article 4 B peuvent bénéficier d'une réduction d'impôt sur le revenu à raison des investissements productifs neufs qu'ils réalisent dans les départements d'outre-mer (...) dans le cadre d'une entreprise exerçant (...) une activité industrielle, commerciale ou artisanale relevant de l'article 34 / (...) La réduction d'impôt prévue au premier alinéa est pratiquée au titre de l'année au cours de laquelle l'investissement est réalisé (...) " ; qu'aux termes de l'article 95 Q de l'annexe II au même code, dans sa version applicable au litige: " La réduction d'impôt prévue au I de l'article 199 undecies B du code général des impôts est pratiquée, sous réserve des dispositions de la deuxième phrase du vingtième alinéa du I du même article, au titre de l'année au cours de laquelle l'immobilisation est créée par l'entreprise ou lui est livrée ou est mise à sa disposition dans le cadre d'un contrat de crédit-bail (...) " ; qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions que le fait générateur de la réduction d'impôt prévue à l'article 199 undecies B du code général des impôts est la date à laquelle, du fait de sa livraison effective ou de sa création dans le département ou le territoire d'outre-mer, l'immobilisation, au titre de laquelle l'investissement productif a été réalisé, peut être effectivement exploitée et par suite être productive de revenus ; que dans le cas d'une livraison effective, la date à retenir est celle à laquelle l'entreprise, disposant matériellement de l'investissement productif, peut commencer son exploitation effective et, dès lors, en retirer des revenus ; que le juge de l'impôt se prononce sur l'éligibilité des investissements qui lui sont soumis à la réduction d'impôt prévue par les dispositions précitées de l'article 199 undecies B du code général des impôts au regard des éléments apportés par l'une et l'autre partie ;
6. Considérant, en premier lieu, que des centrales photovoltaïques ne peuvent être effectivement exploitées sans être intégrées dans une installation et raccordées au réseau électrique ; que par suite, en relevant l'absence au 31 décembre 2010 d'attestation de conformité et d'une demande de raccordement au réseau électrique, l'administration n'ajoute pas aux conditions fixées par la loi fiscale mais se borne à mettre en oeuvre les conditions légales auxquelles les investissements réalisés par les sociétés en participation dont M. et Mme E...sont associés sont soumis pour pouvoir être regardés comme étant réalisés au sens des dispositions du I de l'article 199 undecies B du code général des impôts ;
7. Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de l'instruction, et notamment des renseignements obtenus auprès de la société EDF, qu'aucune des centrales photovoltaïques au titre de laquelle a été pratiquée la réduction d'impôt pour les installations acquises par l'intermédiaire des sociétés en participation au titre de l'année 2010 n'avait fait l'objet d'un raccordement au réseau électrique ; que pour leur part, M. et Mme E...n'apportent aucun élément de nature à infirmer le constat sur lequel s'est fondée l'administration, pas plus qu'ils ne justifient d'une date de réception des travaux d'installation des centrales photovoltaïques en cause antérieurement au 31 décembre de l'année d'imposition en litige ; que, la circonstance, à la supposer même établie, que la société EDF ait suspendu toutes les demandes de raccordement en raison du moratoire suspendant l'obligation d'achat de l'électricité produite par certaines installations utilisant l'énergie radiative du soleil, prévu par le décret du 9 décembre 2010, est, par elle-même, sans incidence sur le bien-fondé de la reprise litigieuse de la réduction d'impôt pour les motifs énoncés précédemment ; que, dans ces conditions, les installations photovoltaïques en cause ne pouvant, ni être effectivement exploitées, ni être productives de revenus à la date du 31 décembre 2010, l'administration a pu à bon droit estimer que les investissements déclarés par les requérants ne pouvaient être regardés comme ayant été effectivement réalisés au cours de l'année 2010 et remettre en cause la réduction d'impôt au titre de cette année ;
8. Considérant en troisième lieu qu'aux termes de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales : " (...) Lorsque le redevable a appliqué un texte fiscal selon l'interprétation que l'administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu'elle n'avait pas rapportée à la date des opérations en cause, elle ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente " ;
9. Considérant que M. et Mme E...ne sauraient se prévaloir, sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, des termes de la réponse ministérielle faite à M. B...D...le 31 mars 2011, qui, en tout état de cause, est postérieure à l'année d'imposition en litige et ne comporte aucune interprétation relative au fait générateur de la réduction d'impôt contestée ;
S'agissant des investissements réalisés pas la SEP Sunra Fluide 1043 :
10. Considérant que si les requérants soutiennent que l'administration se serait fondée à tort sur le décret publié le 5 mars 2011 relatif au prix de rachat de l'électricité par EDF afin de justifier le motif de la surfacturation, il résulte de l'instruction, et notamment de la décision d'admission partielle du 23 octobre 2014 que tel n'est pas le cas ; que dès lors il y a lieu d'écarter ce moyen ;
11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, que M. et Mme E...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, qui a répondu à l'ensemble des moyens soulevés par les intéressés en première instance, le tribunal administratif de Nancy a rejeté leur demande ;
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
12. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui, dans la présente instance, n'est pas la partie perdante, la somme que M. et Mme E... demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. et Mme E...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme A...E...et au ministre de l'action et des comptes publics.
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N° 16NC01353