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12/12/2017 | FRANCE | N°17NC01299

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 12 décembre 2017, 17NC01299


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D...A...B...a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler la décision du 18 avril 2016 par laquelle le préfet du Doubs a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être reconduite.

Par un jugement n° 1601646 du 13 décembre 2016, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enr

egistrée le 30 mai 2017, Mme A...B..., représentée par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler l...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D...A...B...a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler la décision du 18 avril 2016 par laquelle le préfet du Doubs a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être reconduite.

Par un jugement n° 1601646 du 13 décembre 2016, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 30 mai 2017, Mme A...B..., représentée par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Besançon du 13 décembre 2016 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet du Doubs du 18 avril 2016 ;

3°) d'enjoindre au préfet du Doubs de procéder au réexamen de sa situation et de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à son conseil, sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- la décision portant refus de séjour méconnaît les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision portant refus de séjour méconnaît les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision portant refus de séjour méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire méconnaît les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ainsi que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision fixant le pays de renvoi méconnaît les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 9 août 2017, le préfet du Doubs conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir qu'aucun des moyens invoqués par la requérante n'est fondé.

Mme A...B...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 24 avril 2017.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention relative aux droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de Mme Haudier a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que Mme D...A...B..., ressortissante de la République démocratique du Congo, est entrée irrégulièrement en France le 2 avril 2012 ; que sa demande d'asile a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) du 30 novembre 2012, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) le 16 juillet 2013 ; qu'elle s'est vu délivrer un titre de séjour en raison de son état de santé ; que, par un arrêté du 18 avril 2016, le préfet du Doubs a refusé renouveler son titre de séjour, a assorti cette décision d'une obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel elle est pourrait être éloignée ; que, par la présente requête, Mme A...B...relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne la décision portant refus de séjour :

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors applicable : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence (...) " ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, par un avis du 18 mars 2016, le médecin de l'agence régionale de santé a estimé que si l'état de santé de Mme A...B...nécessitait un traitement qui n'était pas disponible dans son pays d'origine, le défaut d'un tel traitement ne devrait pas entraîner pour l'intéressée des conséquences d'une exceptionnelle gravité ; que, compte tenu des termes dans lesquels ils sont rédigés, les certificats médicaux peu circonstanciés produits par la requérante en première instance datés des 26 septembre, 7 octobre et 7 novembre 2016 ne permettent pas de remettre en cause l'appréciation portée par le préfet sur l'absence de conséquences d'une exceptionnelle gravité que pourrait avoir pour Mme A...B...un défaut de traitement médical ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la carte de séjour temporaire " vie privée et familiale est également délivrée de plein droit : " A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. (...) " ; qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : "1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

5. Considérant que Mme A...B...se prévaut de sa relation avec un ressortissant angolais titulaire d'une carte de résident, qui est le père de ses deux enfants nés le 25 juin 2014 mais également de quatre autres enfants dont la mère est décédée en 2011 ; que, toutefois, il ressort des pièces du dossier que son concubin a lui-même indiqué dans l'attestation d'hébergement qu'il a rédigée que cette vie commune n'a débuté qu'en avril 2015 ; que, par ailleurs, la requérante a vécu la majeure partie de sa vie dans son pays d'origine où vit sa fille née en 2003 ; que, par suite et compte tenu notamment du caractère récent de la vie commune entre la requérante et son concubin et en l'absence d'autres éléments apportés par l'intéressée, il ne ressort pas des pièces du dossier que la décision attaquée a porté au droit de Mme A...B...au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise ; que le préfet n'a ainsi méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

6. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ; qu'il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ;

7. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet n'aurait pas recherché, avant de prendre sa décision, si l'intérêt supérieur des deux enfants de la requérante nés en 2014 justifiait la régularisation de la situation de l'intéressée ; qu'en outre, cette dernière, qui se borne à invoquer la nationalité angolaise de son compagnon, n'apporte aucun élément de nature à établir que la cellule familiale ne peut pas se reconstituer en République démocratique du Congo ; que, par suite, il ne ressort pas des pièces du dossier que les stipulations précitées ont été méconnues ;

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire :

8. Considérant, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le défaut de prise en charge médicale pourrait entraîner pour la requérante des conséquences d'une exceptionnelle gravité ; que, par suite, Mme A...B...n'est pas fondée à soutenir que les dispositions précitées de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ont été méconnues ;

9. Considérant que, compte tenu notamment des circonstances susmentionnées, il ne ressort pas des pièces du dossier que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et celles de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ont été méconnues ; qu'il n'est pas davantage établi que le préfet a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de cette décision sur la situation personnelle et familiale de Mme A...B...;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :

10. Considérant qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (...) " ; que ce dernier texte énonce que : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants " ;

11. Considérant que la requérante n'apporte aucun élément permettant de regarder comme établi qu'elle encourt personnellement des risques en cas de retour dans son pays d'origine alors qu'au demeurant sa demande d'asile a été rejetée par une décision de l'OFPRA du 30 novembre 2012, confirmée par la CNDA le 16 juillet 2013 ; qu'en outre, si la requérante se prévaut de ce que le traitement médical qu'elle suit n'est pas disponible en République démocratique du Congo, il n'est pas établi, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, que son absence pourrait avoir pour elle des conséquences d'une exceptionnelle gravité ; que, par suite, il ne ressort pas des pièces du dossier que la décision fixant le pays à destination est intervenue en violation des stipulations et dispositions précitées ;

12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme A...B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées sur le fondement des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme A...B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D...A...B...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Doubs.

2

N° 17NC01299


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17NC01299
Date de la décision : 12/12/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. MARINO
Rapporteur ?: Mme Guénaëlle HAUDIER
Rapporteur public ?: M. COLLIER
Avocat(s) : COLIN-ELPHEGE

Origine de la décision
Date de l'import : 19/12/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2017-12-12;17nc01299 ?
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