Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme E...C...née B...et M. D...C...ont demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler les arrêtés du 13 juillet 2016 par lesquels le préfet du Haut-Rhin a refusé de leur délivrer un titre de séjour, les a obligés à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel ils pourraient être éloignés.
Par un jugement n° 1605996, 1605997 du 9 mars 2017, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leurs demandes.
Procédure devant la cour :
I. Par une requête enregistrée le 4 avril 2017, sous le n° 17NC00787, Mme C...néeB..., représentée par MeA..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 9 mars 2017 ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 13 juillet 2016 par lequel le préfet du Haut-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être éloignée ;
3°) d'enjoindre au préfet du Haut-Rhin de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai de quinze jours à compter de la notification du présent arrêt, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) d'enjoindre au préfet du Haut-Rhin de réexaminer sa situation dans le délai de quinze jours à compter de la notification du présent arrêt, sous astreinte de 100 euros par jour de retard et, dans cette attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 800 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
Sur la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour :
- la décision est insuffisamment motivée ;
- la décision est entachée d'erreurs matérielles ;
- le préfet n'a pas procédé à un examen personnel de sa situation ;
- elle pouvait bénéficier d'une carte de séjour temporaire en application du 7° de l'article L. 313-11 ou de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;
Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :
- la décision ne fait pas l'objet d'une motivation spécifique ;
- la décision est illégale en raison de l'illégalité entachant la décision de refus de titre de séjour ;
- la décision a des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur sa situation personnelle ;
Sur la décision fixant le pays de destination :
- la décision est illégale en raison de l'illégalité entachant la décision de refus de titre de séjour et la décision portant obligation de quitter le territoire français.
Par un mémoire enregistré le 4 septembre 2017, le préfet du Haut-Rhin conclut au rejet de la requête au motif qu'aucun des moyens soulevés n'est fondé.
II. Par une requête enregistrée le 4 avril 2017, sous le n° 17NC00788, M.C..., représenté par MeA..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 9 mars 2017 ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 13 juillet 2016 par lequel le préfet du Haut-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être éloigné ;
3°) d'enjoindre au préfet du Haut-Rhin de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai de quinze jours à compter de la notification du présent arrêt, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) d'enjoindre au préfet du Haut-Rhin de réexaminer sa situation dans le délai de quinze jours à compter de la notification du présent arrêt, sous astreinte de 100 euros par jour de retard et, dans cette attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 800 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
Sur la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour :
- la décision est insuffisamment motivée ;
- la décision est entachée d'erreurs matérielles ;
- le préfet n'a pas procédé à un examen personnalisée de sa situation ;
- il pouvait bénéficier d'une carte de séjour temporaire en application du 7° de l'article L. 313-11 ou de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le préfet aurait dû examiner sa demande de titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, quand bien même il ne s'en est pas prévalu ;
- la décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;
Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :
- la décision ne fait pas l'objet d'une motivation spécifique ;
- la décision est illégale en raison de l'illégalité entachant la décision de refus de titre de séjour ;
- la décision a des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur sa situation personnelle ;
Sur la décision fixant le pays de destination :
- la décision est illégale en raison de l'illégalité entachant la décision de refus de titre de séjour et la décision portant obligation de quitter le territoire français.
Par un mémoire enregistré le 4 septembre 2017, le préfet du Haut-Rhin conclut au rejet de la requête au motif qu'aucun des moyens soulevés n'est fondé.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Tréand a été entendu au cours de l'audience publique.
Sur la jonction :
1. Considérant que les requêtes susvisées sont dirigées contre le même jugement et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ; (...) " ;
3. Considérant qu'il est constant que, de nationalité arménienne, M. et Mme C...sont entrés en France respectivement en décembre 2010 et janvier 2011 afin de solliciter le statut de réfugié ; que Mme C...était accompagnée de son fils Sharif et de sa fille Zina, alors âgés de 14 et 16 ans, ainsi que de son père ; qu'il n'est pas contesté qu'ils se sont intégrés en France ; que l'appelante soutient qu'elle maîtrise la langue française et s'investit bénévolement auprès de l'Armée du salut et de la paroisse Don Bosco de Mulhouse ; que l'appelant démontre que, le 24 février 2016, la société Etoile Automobiles SARL a formulé une demande d'autorisation de travail afin de l'employer comme agent polyvalent en contrat à durée indéterminée ; qu'il produit une promesse d'embauche datée du même jour ; que dès leur entrée en France, leurs enfants ont sérieusement poursuivi des études ; que Zina a obtenu un brevet d'études professionnelles spécialité " accompagnement, soins et services à la personne ", un baccalauréat professionnel spécialité " accompagnement soins et services à la personne en structure " ainsi que le diplôme d'Etat d'aide-soignante ; que Sharif a obtenu le diplôme national du brevet, un baccalauréat technologique et a conclu un contrat d'apprentissage avec la société DS Smith afin de réussir un BTS " industries plastiques europlastic à référentiel européen " ; que l'un et l'autre séjournent régulièrement en France, disposant de titres de séjour délivrés par le préfet du Haut-Rhin ; que Mme C...ne dispose plus d'attaches familiales en Arménie, sa mère étant décédée et son père l'accompagnant en France ; que le préfet du Haut-Rhin se borne à faire valoir qu'un frère de M. C...vit en Arménie ; qu'ainsi, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce et quand bien même les requérants n'ont pas exécuté de précédentes mesures d'éloignement prises à leur encontre, les arrêtés du préfet du Haut-Rhin du 13 juillet 2016 ont méconnu les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et encourent, dans leur ensemble, l'annulation ;
4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens des requêtes que M et Mme C...sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leurs demandes ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. " ;
6. Considérant qu'il y a lieu d'enjoindre au préfet du Haut-Rhin de délivrer à M. et Mme C... une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " prévue au 7° de de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt ; qu'il n'y a pas lieu, en l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte ;
Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
7. Considérant qu'il y a lieu de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. et Mme C...et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Strasbourg n° 1605996, 1605997 du 9 mars 2017, ensemble les arrêtés du préfet du Haut-Rhin du 13 juillet 2016, sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet du Haut-Rhin de délivrer à M. et Mme C...une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera à M. et Mme C...une somme de 1 500 (mille cinq cents) euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de M. et Mme C...est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E...C...néeB..., à M. D... C...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Haut-Rhin.
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N° 17NC00787, 17NC00788