Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme C...A...a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 2 mai 2016 par lequel le préfet du Bas-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.
Par un jugement n° 1603138 du 3 novembre 2016, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 22 novembre 2016, MmeA..., représentée par Me D..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 3 novembre 2016 du tribunal administratif de Strasbourg ;
2°) d'annuler l'arrêté susvisé du préfet du Bas-Rhin du 2 mai 2016 ;
3°) d'enjoindre au préfet du Bas-Rhin de lui délivrer un titre de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'État une somme de 1 200 euros, à verser à son conseil, en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
Sur la décision de refus de titre de séjour :
- la décision attaquée est entachée d'incompétence ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; elle ne peut retourner dans son pays d'origine, ses parents l'ayant rejetée pour avoir eu un enfant hors mariage ; sa fille a été reconnue par un ressortissant français dont elle est aujourd'hui séparée ; elle a été relaxée des poursuites pénales dont elle a fait l'objet pour obtention frauduleuse d'un certificat de nationalité française pour sa fille et d'un titre de séjour en qualité de parent d'enfant français ;
- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 313-11 6° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; elle remplit strictement les conditions prévues par ces dispositions.
Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :
- cette décision doit être annulée en conséquence de l'illégalité du refus de titre de séjour.
Sur la décision fixant le pays de renvoi :
- cette décision doit être annulée en conséquence de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français.
Par un mémoire en défense, enregistré le 9 juin 2017, le préfet du Bas-Rhin conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir qu'aucun des moyens soulevés n'est fondé.
Mme A...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du bureau d'aide juridictionnelle de Nancy du 6 février 2017.
Vu :
- les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code civil ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Didiot.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
En ce qui concerne la décision de refus de titre de séjour :
1. Considérant, en premier lieu, que la requérante, ressortissante tchadienne, reprend en appel, sans apporter d'élément nouveau, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de la décision attaquée ; qu'il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus, à bon droit, par le tribunal administratif de Strasbourg dans son jugement du 3 novembre 2016 ;
2. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 6° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à la condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée (...) " ; qu'aux termes de l'article 371-2 du code civil : " Chacun des parents contribue à l'entretien et à l'éducation des enfants à proportion de ses ressources, de celles de l'autre parent, ainsi que des besoins de l'enfant (...) " ;
3. Considérant que si une reconnaissance de paternité demeure en principe un acte opposable aux tiers ainsi qu'à l'administration tant qu'il n'a pas été déclaré nul par l'autorité judiciaire, le préfet peut néanmoins refuser un titre de séjour à celui qui s'en prévaut dès lors que le caractère frauduleux de l'acte est établi de façon certaine par des déclarations aux autorités de police ;
4. Considérant que si Mme A...se prévaut de la reconnaissance de paternité effectuée par M.B..., ressortissant français, par acte du 3 octobre 2013, pour justifier de la nationalité française par filiation de sa fille Grace Hélène, il ressort de l'enquête menée par la police aux frontières sur instruction du parquet de Strasbourg, relatée dans un procès-verbal du 4 février 2016, que ce dernier a reconnu ne pas être le père biologique de l'enfant et ne pas subvenir à ses besoins ; que dans ces conditions, le caractère frauduleux de la reconnaissance de paternité de cet enfant doit être regardé comme établi alors même que, par jugement du 19 mai 2016, le tribunal correctionnel de Strasbourg a relaxé Mme A...des chefs d'obtention frauduleuse d'un certificat de nationalité française pour sa fille dans le but de se faire délivrer un titre de séjour en qualité de parent d'enfant français ; que, par suite, le préfet n'a pas méconnu en prenant la décision attaquée les dispositions précitées du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
5. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : la carte de séjour temporaire vie privée et familiale est délivrée de plein droit à " l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République " ;
6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A...n'est pas fondée à se prévaloir de la nationalité française de sa fille pour justifier son droit au séjour en France ; qu'elle n'y résidait que depuis un an à la date de la décision attaquée et n'y justifie d'aucune attache privée ou familiale ; qu'elle n'établit pas, comme elle le soutient, avoir été rejetée par sa famille dans son pays d'origine ; qu'ainsi, la requérante n'est pas fondée à soutenir que la décision attaquée porte à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels elle a été prise ; qu'il s'ensuit que les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations précitées des articles 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions de L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doivent être écartés ;
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
7. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de l'exception d'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour doit être écarté ;
8. Considérant, en second lieu, qu'il résulte de ce qui précède que les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions des alinéas 6° et 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doivent être écartés pour les mêmes motifs que ceux précédemment exposés ;
En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :
9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de l'exception d'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire doit être écarté ;
10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme A...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande en annulation ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
11. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté attaqué, n'implique aucune mesure particulière d'exécution ; que, par suite, les conclusions susvisées ne peuvent être accueillies ;
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :
12. Considérant qu'il résulte des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative que l'avocat du bénéficiaire de l'aide juridictionnelle peut demander au juge de condamner la partie perdante à lui verser la somme correspondant à celle qu'il aurait réclamée à son client, si ce dernier n'avait pas eu l'aide juridictionnelle, à charge pour l'avocat qui poursuit, en cas de condamnation, le recouvrement de la somme qui lui a été allouée par le juge, de renoncer à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État à la mission d'aide juridictionnelle qui lui a été confiée ;
13. Considérant que l'État, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, ne saurait être condamné à verser à l'avocat de Mme A...une somme en application de ces dispositions ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête susvisée présentée par Mme A...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...A...et au ministre de l'intérieur.
Une copie du présent arrêt sera adressée au préfet du Bas-Rhin.
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N° 16NC02599