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04/07/2017 | FRANCE | N°17NC00649

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 04 juillet 2017, 17NC00649


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E...C...et Mme B...C..., agissant en son nom propre et au nom de son fils mineur M. D...C..., ont demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne de condamner l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) à leur verser les sommes respectives de 22 531,06 euros, 22 531,06 euros et 10 000 euros en réparation des préjudices qu'ils ont subis du fait de la pathologie développée par leur fils et frère à la suite de sa vac

cination contre la grippe A (H1N1).

Par une ordonnance n° 1501018, 15010...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E...C...et Mme B...C..., agissant en son nom propre et au nom de son fils mineur M. D...C..., ont demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne de condamner l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) à leur verser les sommes respectives de 22 531,06 euros, 22 531,06 euros et 10 000 euros en réparation des préjudices qu'ils ont subis du fait de la pathologie développée par leur fils et frère à la suite de sa vaccination contre la grippe A (H1N1).

Par une ordonnance n° 1501018, 1501019 et 1501020 du 12 janvier 2017, le vice-président du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté leurs demandes comme irrecevables.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 14 mars 2017 et un mémoire enregistré le 8 juin 2017, M. E... C...et Mme B...C..., agissant en son nom propre et au nom de son fils mineur M. D...C..., représentés par Me F..., demandent à la cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 1501018, 1501019 et 1501020 du 12 janvier 2017 du vice-président du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne ;

2°) de condamner l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) à leur verser une somme de 2 531,06 euros au titre de leur préjudice patrimonial et une somme de 40 000 euros chacun au titre de leurs préjudices d'affection et d'accompagnement ;

3°) de mettre à la charge de l'ONIAM la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le contentieux a été lié par la décision implicite de rejet de l'ONIAM, née du silence gardé sur leur demande préalable du 21 janvier 2015 ; d'une part, ils n'ont pas été destinataires du courrier de l'ONIAM du 5 juin 2015 ; d'autre part, les dispositions des articles R. 3131-1 et R. 3131-3 du code de la santé publique ne leur sont pas applicables dès lors qu'à la date de leurs demandes, l'ONIAM refusait par principe d'indemniser les victimes par ricochet sur le fondement de l'article L. 3131-4 du code ; enfin, leur demande d'indemnisation était complète ;

- ils ont qualité pour agir ;

- ils ont subi un préjudice patrimonial, résultant de frais de déplacement, d'hébergement et de consultation d'une diététicienne, qui s'élèvent à 2 531,06 euros ;

- ils subissent chacun un préjudice d'affection et des troubles dans leurs conditions d'existence, qui doit être évalué à 40 000 euros.

Par un mémoire en défense, enregistré le 18 mai 2017, l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM), représenté par MeA..., conclut au rejet de la requête.

Il soutient que le courrier du 5 juin 2015 par lequel il a demandé aux requérants de compléter leur dossier d'indemnisation a été envoyé à l'adresse indiquée par leur conseil et que, en l'absence de réponse et saisi d'une demande incomplète, il n'a pas pu prendre de décision implicite de rejet.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la santé publique ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Dhiver,

- et les conclusions de M. Collier, rapporteur public.

1. Considérant que l'enfant G...C..., alors âgé de 13 ans, a présenté une narcolepsie cataplexie après avoir reçu, le 24 novembre 2009, une injection du vaccin contre la grippe A (H1N1) dans le cadre de la campagne nationale de vaccination décidée par l'arrêté du ministre de la santé et des sports du 4 novembre 2009 ; que, dans un premier temps, M. et Mme C... ont saisi l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) au nom de leur fils G...en demandant la réparation des préjudices subis par ce dernier du fait de la pathologie développée à la suite de sa vaccination ; que, par un courrier du 21 janvier 2015, ils ont ensuite sollicité la réparation de leurs préjudices propres et de ceux de leur fils mineurD... ; que les requérants relèvent appel de l'ordonnance du 12 janvier 2017 par laquelle le vice président du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté comme irrecevables leurs demandes tendant à la condamnation de l'ONIAM à réparer les préjudices qu'ils ont subis ainsi que leur fils mineur D...en tant que victimes par ricochet ;

Sur le moyen d'irrecevabilité retenu par le tribunal :

2. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article R. 421-1 du code de justice administrative, dans sa rédaction applicable à l'espèce : " Sauf en matière de travaux publics, la juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision (...) " ;

3. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article R. 3131-1 du code de la santé publique : " Les demandes d'indemnisation par la voie de la procédure amiable prévue à l'article L. 3131-4 au titre des préjudices définis au même article sont adressées à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales mentionné à l'article L. 1142-22. / (...) / L'office accuse réception de la demande. / Le cas échéant, il demande les pièces manquantes. / Il informe le demandeur sans délai du caractère complet de son dossier, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception. (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 3131-3 du même code : " Le silence de l'office pendant un délai de six mois à compter de la date de réception du dossier complet fait naître une décision implicite de rejet. " ;

4. Considérant que le tribunal a accueilli la fin de non-recevoir opposée par l'ONIAM tirée de l'absence de liaison du contentieux ; que le premier juge a retenu que M. et MmeC..., auxquels l'ONIAM avait adressé un courrier le 5 juin 2015 en leur demandant de compléter leur demande du 21 janvier 2015, n'ont pas produit les pièces exigées par l'office ni justifié de l'impossibilité de les produire ; qu'il en a déduit que la demande d'indemnisation du 21 janvier 2015 devait être regardée comme incomplète de sorte que le silence gardé par l'ONIAM sur cette demande n'avait pu faire naître une décision implicite de rejet ;

5. Considérant que le courrier du 5 juin 2015 par lequel l'ONIAM a demandé à M. et Mme C...de justifier de leur identité et de leur filiation avec G...C...a été envoyé aux intéressés à une adresse qui n'était pas celle de leur conseil ; que l'ONIAM fait valoir que cette adresse lui avait été communiquée par le conseil lui-même, qui avait donné des consignes pour que les courriers lui soient expédiés à l'adresse à laquelle ses bureaux avaient été temporairement déplacés en raison de travaux ; qu'il résulte toutefois de l'instruction que la lettre du 21 janvier 2015, reçue par l'ONIAM le 23 janvier 2015, par laquelle M. et Mme C...ont demandé réparation de leurs préjudices propres et de ceux de leur fils mineur D...comportait pour seule adresse celle du siège du cabinet d'avocats et ne mentionnait aucune adresse temporaire à laquelle les correspondances auraient dû être transmises ; que, dans ces conditions, les requérants doivent être regardés comme n'ayant pas été destinataires du courrier de l'ONIAM du 5 juin 2015 ; que le silence gardé par l'ONIAM sur la demande de M. et Mme C...du 21 janvier 2015 a fait naître une décision implicite de rejet qui, en application des dispositions de l'article R. 3131-3 du code de la santé publique, est intervenue le 24 juillet 2015, au cours de l'instance devant le tribunal ; que, par suite, c'est à tort que le premier juge a opposé à M. et Mme C...une fin de non-recevoir tirée du défaut de décision préalable ;

Sur l'autre fin de non-recevoir opposée en première instance par l'ONIAM :

6. Considérant qu'aux termes de l'article L. 3131-1 du code de la santé publique : " En cas de menace sanitaire grave appelant des mesures d'urgence, notamment en cas de menace d'épidémie, le ministre chargé de la santé peut, par arrêté motivé, prescrire dans l'intérêt de la santé publique toute mesure proportionnée aux risques courus et appropriée aux circonstances de temps et de lieu afin de prévenir et de limiter les conséquences des menaces possibles sur la santé de la population (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 3131-3 de ce code : " Nonobstant les dispositions de l'article L. 1142-1, les professionnels de santé ne peuvent être tenus pour responsables des dommages résultant de la prescription ou de l'administration d'un médicament en dehors des indications thérapeutiques ou des conditions normales d'utilisation prévues par son autorisation de mise sur le marché ou son autorisation temporaire d'utilisation, ou bien d'un médicament ne faisant l'objet d'aucune de ces autorisations, lorsque leur intervention était rendue nécessaire par l'existence d'une menace sanitaire grave et que la prescription ou l'administration du médicament a été recommandée ou exigée par le ministre chargé de la santé en application des dispositions de l'article L. 3131-1. / (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 3131-4 : " Sans préjudice des actions qui pourraient être exercées conformément au droit commun, la réparation intégrale des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales imputables à des activités de prévention, de diagnostic ou de soins réalisées en application de mesures prises conformément aux articles L. 3131-1 ou L. 3134-1 est assurée par l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales mentionné à l'article L. 1142-22. / L'offre d'indemnisation adressée par l'office à la victime ou, en cas de décès, à ses ayants droit indique l'évaluation retenue pour chaque chef de préjudice, nonobstant l'absence de consolidation, ainsi que le montant des indemnités qui reviennent à la victime ou à ses ayants droit, déduction faite des prestations énumérées à l'article 29 de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 tendant à l'amélioration de la situation des victimes d'accidents de la circulation et à l'accélération des procédures d'indemnisation, et, plus généralement, des prestations et indemnités de toute nature reçues ou à recevoir d'autres débiteurs du même chef de préjudice. / L'acceptation de l'offre d'indemnisation de l'office par la victime vaut transaction au sens de l'article 2044 du code civil. / L'office est subrogé, s'il y a lieu et à due concurrence des sommes qu'il a versées, dans les droits que possède le demandeur contre la personne responsable du dommage ou, le cas échéant, son assureur. / Les conditions d'application du présent article sont fixées par décret en Conseil d'Etat " ;

7. Considérant que les dispositions de l'article L. 3131-4 du code de la santé publique prévoient la réparation intégrale par l'ONIAM, en lieu et place de l'Etat, des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales imputables à des activités de prévention ou de soins réalisées en application de mesures prises conformément aux articles L. 3131-1 ou L. 3134-1, sans qu'il soit besoin d'établir l'existence d'une faute ni la gravité particulière des préjudices subis ; qu'il résulte des termes mêmes de ces dispositions que la réparation incombant à l'ONIAM bénéficie à toute victime, c'est-à-dire tant à la personne qui a subi un dommage corporel du fait de l'une de ces mesures qu'à ceux de ses proches qui en subissent directement les conséquences ;

8. Considérant que l'ONIAM a fait valoir en première instance que M. et Mme C...et leur filsD..., qui ne sont pas des victimes " directes " de la vaccination pratiquée sur le jeune G...C..., n'avaient pas qualité pour agir ; qu'il résulte de ce qui a été dit au point précédent que cette fin de non-recevoir doit être écartée ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que l'ordonnance du vice président du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 12 janvier 2017 doit être annulée ; qu'il y a lieu de renvoyer M. et Mme C...devant le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne pour qu'il soit à nouveau statué sur leurs demandes et sur celle présentée au nom de leur fils mineur D... ;

10. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'ONIAM le versement de la somme totale de 1 500 euros au titre des frais exposés par les requérants et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : L'ordonnance n° 1501018, 1501019 et 1501020 du vice président du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 12 janvier 2017 est annulée.

Article 2 : M. et Mme C...sont renvoyés devant le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne pour qu'il soit statué sur les demandes présentées en leur nom propre et sur celle présentée au nom de leur fils mineur D...C....

Article 3 : L'ONIAM versera à M. et Mme C...une somme de 1 500 (mille cinq cents) euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. E...C..., à Mme B...C..., agissant en son nom propre et au nom de son fils mineur M. D...C...et à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales.

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N° 17NC00649


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17NC00649
Date de la décision : 04/07/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

54-01-02-007 Procédure. Introduction de l'instance. Liaison de l'instance. Liaison du contentieux postérieure à l'introduction de l'instance.


Composition du Tribunal
Président : M. MARINO
Rapporteur ?: Mme Martine DHIVER
Rapporteur public ?: M. COLLIER
Avocat(s) : DANTE

Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2017-07-04;17nc00649 ?
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