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04/07/2017 | FRANCE | N°16NC00484

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre - formation à 3, 04 juillet 2017, 16NC00484


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association les amis de la nature et de l'environnement de Metz et ses environs (ANEME) a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 3 juin 2014 par lequel le préfet de la Moselle a homologué le circuit de motocross dénommé " Les Buttes de Rozérieulles ".

Par un jugement n° 1405994 du 20 janvier 2016, le tribunal administratif de Strasbourg a annulé l'arrêté du 3 juin 2014 en tant qu'il autorise les entraînements les dimanches et jours fériés de 9h à 12h30.
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Par une requête et un mémoire enregistrés le 18 mars 2016 e...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association les amis de la nature et de l'environnement de Metz et ses environs (ANEME) a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 3 juin 2014 par lequel le préfet de la Moselle a homologué le circuit de motocross dénommé " Les Buttes de Rozérieulles ".

Par un jugement n° 1405994 du 20 janvier 2016, le tribunal administratif de Strasbourg a annulé l'arrêté du 3 juin 2014 en tant qu'il autorise les entraînements les dimanches et jours fériés de 9h à 12h30.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés le 18 mars 2016 et le 2 juin 2017, l'association Moselle moto-club, représentée par MeB..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 20 janvier 2016 en tant qu'il a annulé partiellement l'arrêté du 3 juin 2014 ;

2°) de mettre à la charge de l'association ANEME le versement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que l'utilisation du circuit ne crée pas des nuisances telles qu'elle devrait être interdite les dimanches et jours fériés de 9h à 12h30.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 8 décembre 2016 et le 9 juin 2017, l'association ANEME conclut au rejet de la requête et à ce que le versement d'une somme de 1 500 euros soit mis à la charge de l'association Moselle moto-club sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés et reprend les moyens qu'elle a invoqués en première instance.

Le ministre de l'intérieur a présenté des observations enregistrées le 15 juin 2017.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la santé publique ;

- le code du sport ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Kohler, premier conseiller,

- les conclusions de M. Laubriat, rapporteur public,

- les observations de MeC..., représentant l'association Moselle moto-club et celles de MeA..., représentant l'association ANEME.

Une note en délibéré présentée pour l'association ANEME a été enregistrée le 20 juin 2017.

1. Considérant que l'association Moselle moto-club, dont l'objet est d'encadrer et de faciliter la pratique des sports mécaniques, exploite dans la commune de Rozérieulles (Moselle) un circuit de motocross sous la dénomination " Les Buttes de Rozérieulles " ; que, par un arrêté du 3 juin 2014, le préfet de la Moselle a renouvelé l'homologation de ce circuit, en précisant que les entraînements seraient possibles les mercredis et samedis de 10h à 12h30 et de 14h à 18h et les dimanches et jours fériés de 9h à 12h30, réduisant ainsi les périodes d'entraînement par rapport aux périodes d'homologation précédentes ; que l'association Moselle moto-club fait appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Strasbourg, saisi par l'association ANEME, a annulé cet arrêté en son article 4, en tant qu'il autorise les entraînements les dimanches et jours fériés de 9h à 12h30 ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 331-35 du code du sport : " Tout circuit sur lequel se déroulent des compétitions, essais ou entraînements à la compétition et démonstrations doit faire l'objet d'une homologation préalable. (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 331-37 du même code : " L'homologation est accordée pour une durée de quatre ans : (...) 2° Par le préfet du département, après visite et avis de la commission départementale de sécurité routière, dans les autres cas. (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 331-39 : " La commission a notamment pour missions : (...) 3° De proposer, le cas échéant, la modification des dispositions qu'elle estime incompatibles avec les nécessités de la sécurité et de la tranquillité publiques " ; qu'enfin, aux termes de l'article A. 331-21 : " La personne physique ou morale qui demande l'homologation d'un circuit ou son renouvellement doit constituer un dossier, qui comprend : 1° Un plan masse du circuit ou un plan des voies utilisées conforme aux règles techniques mentionnées à l'article R. 331-19 ainsi qu'un dossier présentant notamment les dispositions prévues pour assurer la sécurité des personnes et la tranquillité publique ; (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions qu'il incombe au préfet, lorsqu'il homologue des circuits de vitesse, de déterminer les prescriptions nécessaires pour assurer non seulement la sécurité des participants et du public mais également la tranquillité publique, compte tenu notamment de l'emplacement du circuit, de la nature des manifestations et du nombre de véhicules susceptibles d'être accueillis sur celui-ci ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article R. 1334-31 du code de la santé publique : " Aucun bruit particulier ne doit, par sa durée, sa répétition ou son intensité, porter atteinte à la tranquillité du voisinage ou à la santé de l'homme, dans un lieu public ou privé, qu'une personne en soit elle-même à l'origine ou que ce soit par l'intermédiaire d'une personne, d'une chose dont elle a la garde ou d'un animal placé sous sa responsabilité " ; qu'aux termes de l'article R. 1334-32 du même code : " Lorsque le bruit mentionné à l'article R. 1334-31 a pour origine (...) une activité sportive, (...), organisée de façon habituelle ou soumise à autorisation, et dont les conditions d'exercice relatives au bruit n'ont pas été fixées par les autorités compétentes, l'atteinte à la tranquillité du voisinage ou à la santé de l'homme est caractérisée si l'émergence globale de ce bruit perçu par autrui, telle que définie à l'article R. 1334-33, est supérieure aux valeurs limites fixées au même article. (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 1334-33 du même code : " L'émergence globale dans un lieu donné est définie par la différence entre le niveau de bruit ambiant, comportant le bruit particulier en cause, et le niveau du bruit résiduel constitué par l'ensemble des bruits habituels, extérieurs et intérieurs, correspondant à l'occupation normale des locaux et au fonctionnement habituel des équipements, en l'absence du bruit particulier en cause. / Les valeurs limites de l'émergence sont de 5 décibels A en période diurne (de 7 heures à 22 heures) et de 3 dB (A) en période nocturne (de 22 heures à 7 heures), valeurs auxquelles s'ajoute un terme correctif en dB (A), fonction de la durée cumulée d'apparition du bruit particulier : (...) 6° Un pour une durée supérieure à 4 heures et inférieure ou égale à 8 heures ; (...) " ;

Sur le moyen d'annulation retenu par le tribunal administratif :

4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que les nuisances sonores générées par l'utilisation du circuit ont donné lieu à des plaintes et réclamations des riverains ; que les maires des communes de Rozérieulles, Châtel-Saint-Germain, Lessy, Sainte-Ruffine et Scy-Chazelles, situées à proximité du circuit, ont ainsi adressé, en juillet 2013, un courrier commun au préfet de la Moselle pour l'alerter sur le mécontentement grandissant de leurs habitants ; qu'une pétition d'opposants à la pratique du moto-cross les dimanches et jours fériés et pendant les pauses déjeuner a recueilli plus de deux cents signatures ; que la circonstance que cette pétition comporte la signature de certaines personnes dont l'habitation serait trop éloignée du circuit pour en subir les nuisances ne suffit pas à remettre en cause la réalité de la gêne ressentie par ceux des signataires qui en sont les riverains directs ;

5. Considérant que l'association Moselle moto-club a fait réaliser une étude sonométrique par un bureau d'études acoustique en 2012 ; que les mesures nécessaires à cette étude ont été effectuées un dimanche pendant deux heures alors que le circuit était fréquenté par neuf motos à moteur deux-temps et six motos à moteur huit-temps ; que cette étude conclut que la situation ne fait apparaître aucun dépassement de l'émergence limite définie par les dispositions précitées du code de la santé publique ; que le préfet de la Moselle a également sollicité l'agence régionale de santé dont l'avis du 13 février 2014 indique que les mesures réalisées les 14 juillet, 13 octobre et 15 décembre 2013 n'ont pas mis en évidence de dépassement sensible de cette émergence limite, bien qu'y soit également précisé que ces mesures ne sont pas significatives en raison de vents de travers qui ont pu limiter la propagation du bruit en direction des habitations ; que les éléments produits par l'association ANEME, notamment les enregistrements sonores, ne permettent pas davantage d'établir qu'à la date à laquelle l'homologation a été accordée, les troubles occasionnés par l'utilisation du circuit dépassaient l'émergence limite définie par le code de la santé publique ; que, dans ces conditions, le préfet de la Moselle, qui a suffisamment pris en compte les plaintes exprimées par les riverains en restreignant l'autorisation des entraînements le dimanche et les jours fériés par rapport à la période précédente et a également imposé à l'association Moselle moto-club, par l'arrêté en litige, de réaliser une étude sonométrique selon un cahier des charges défini conjointement par la préfecture et les services de l'agence régionale de santé, n'a pas, à la date de sa décision, commis d'erreur dans l'appréciation des troubles à la tranquillité publique générés par l'utilisation du circuit, contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges ; que l'association Moselle moto-club est ainsi fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Strasbourg s'est fondé sur ce motif pour annuler l'autorisation des entraînements sur le circuit " Les Buttes de Rozérieulles " les dimanches et jours fériés de 9h à 12h30 prévue à l'article 4 de l'arrêté du 3 juin 2014 ;

6. Considérant toutefois qu'il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par l'association ANEME devant le tribunal administratif de Strasbourg ;

En ce qui concerne les autres moyens soulevés par l'association ANEME à l'encontre de l'article 4 de l'arrêté du 3 juin 2014 :

7. Considérant qu'aux termes de l'article 6 de l'arrêté susvisé du 7 août 2006 : " La personne physique ou morale qui demande l'homologation d'un circuit ou son renouvellement doit constituer un dossier, qui comprend : / 1° Un plan masse du circuit ou un plan des voies utilisées conforme aux règles techniques mentionnées à l'article 2 du décret du 16 mai 2006 susvisé ainsi qu'un dossier présentant notamment les dispositions prévues pour assurer la sécurité des personnes et la tranquillité publique (...) " ;

8. Considérant, d'une part, qu'il ressort des pièces du dossier que la note contenue dans le dossier de demande d'homologation présentait les dispositions prévues par l'association Moselle Moto-club pour assurer la tranquillité publique ; que ce dossier n'était donc pas incomplet ;

9. Considérant, d'autre part, que si la demande d'homologation déposée par l'association Moselle Moto-club indiquait que le circuit se trouvait à plus d'un kilomètre des villages de Rozérieulles et de Châtel-Saint-Germain, elle ne précisait pas la distance entre le circuit et les premières habitations qui est d'environ 580 mètres ; que, toutefois, et alors que la demande portait sur un renouvellement d'homologation d'un circuit existant depuis 1968, une telle omission n'a privé les intéressés d'aucune garantie et n'a pu exercer aucune influence sur le sens de l'arrêté ; que ce moyen doit donc être écarté ;

10. Considérant enfin que l'association ANEME n'a pas formé d'appel incident à l'encontre du jugement du 20 janvier 2016, qui n'a que partiellement fait droit à sa demande qui tendait à l'annulation de l'arrêté du 3 juin 2014 dans son ensemble et que la cour n'est donc saisie que de la légalité des dispositions de l'article 4 de cet arrêté qui ont pour seul objet la définition des horaires pendant lesquels les entraînements sont possibles sur le circuit " Les Buttes de Rozérieulles " ; que, dans ces conditions, les moyens soulevés par l'ANEME et tirés de la mauvaise implantation du circuit, de l'insuffisante prise en compte du classement du site comme zone Natura 2000, de la méconnaissance des dispositions de l'article R. 331-37 du code du sport du fait de la durée de l'homologation accordée, de la mauvaise appréciation de la sécurité du circuit et de l'exclusion de l'emprise militaire du circuit, sont dépourvus de toute incidence sur la définition de ces horaires et qu'ils doivent, par suite, être écartés ;

11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que l'association Moselle moto-club est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a annulé l'arrêté du 3 juin 2014 en tant qu'il autorise les entraînements les dimanches et jours fériés de 9h à 12h30 ;

12. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'association Moselle moto-club, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que l'association ANEME demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu en revanche, en application des mêmes dispositions, de mettre à la charge de cette association le versement à l'association Moselle moto-club d'une somme de 1 500 euros ;

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement n°1405994 du 20 janvier 2016 du tribunal administratif de Strasbourg est annulé en tant qu'il a annulé l'autorisation des entraînements sur le circuit " Les Buttes de Rozérieulles " les dimanches et jours fériés de 9h à 12h30 prévue par l'arrêté du 3 juin 2014.

Article 2 : La demande présentée par l'association ANEME devant le tribunal administratif de Strasbourg et tendant à l'annulation de l'article 4 de l'arrêté du 3 juin 2014 ainsi que les conclusions qu'elle a présentées en appel sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : L'association ANEME versera à l'association Moselle moto-club une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à l'association Moselle moto-club, à l'association les amis de la nature et de l'environnement de Metz et ses environs et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Moselle.

2

N° 16NC00484


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16NC00484
Date de la décision : 04/07/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

49-04-02 Police. Police générale. Tranquillité publique.


Composition du Tribunal
Président : M. KOLBERT
Rapporteur ?: Mme Julie KOHLER
Rapporteur public ?: M. LAUBRIAT
Avocat(s) : WALTER-GURY

Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2017-07-04;16nc00484 ?
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