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04/07/2017 | FRANCE | N°15NC02554

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 04 juillet 2017, 15NC02554


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... A...a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler la délibération du 6 juillet 2011 du jury académique de qualification professionnelle des professeurs des écoles décidant de ne pas l'inscrire sur la liste des candidats admis ainsi que l'arrêté du ministre de l'éducation nationale du 5 juin 2014 décidant son licenciement. Elle a aussi demandé au tribunal administratif de condamner l'Etat à lui verser la somme de 5 000 euros par mois du 1er septembre 2011 au 6 juin 2014 en réparat

ion des préjudices qu'elle estime avoir subis.

Par un jugement n°1502644 ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... A...a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler la délibération du 6 juillet 2011 du jury académique de qualification professionnelle des professeurs des écoles décidant de ne pas l'inscrire sur la liste des candidats admis ainsi que l'arrêté du ministre de l'éducation nationale du 5 juin 2014 décidant son licenciement. Elle a aussi demandé au tribunal administratif de condamner l'Etat à lui verser la somme de 5 000 euros par mois du 1er septembre 2011 au 6 juin 2014 en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis.

Par un jugement n°1502644 et 1502645 du 29 octobre 2015, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté ses demandes.

Procédure devant la cour :

I- / Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés les 29 décembre 2015 et 10 juin 2017 sous le n° 15NC02554, MmeA..., représentée par Me Kipffer, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 29 octobre 2015 ;

2°) d'annuler la délibération du 6 juillet 2011 du jury académique de qualification professionnelle des professeurs des écoles et l'arrêté du ministre de l'éducation nationale du 5 juin 2014 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 513 euros au titre de la procédure de première instance et de 3 513 euros au titre de la procédure d'appel, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le tribunal ne pouvait pas soulever d'office le moyen tiré de ce que l'arrêt de la cour administrative d'appel de Nancy du 20 mars 2014 était passé en force de chose jugée dès lors que ce moyen n'est pas d'ordre public et que le tribunal n'avait pas informé les parties avant de le retenir ;

- ses conclusions dirigées contre la délibération du 6 juillet 2011 sont recevables dès lors que cette délibération ne lui a pas été notifiée avec l'indication des voies et délais de recours ;

- elle a intérêt à agir contre cette délibération par laquelle le jury académique a porté une appréciation sur sa manière de servir en fin de stage ;

- elle n'a pas été entendue par le jury académique comme le prévoit le 2ème alinéa de l'article 5 de l'arrêté du 12 mai 2010 fixant les modalités d'évaluation et de titularisation des professeurs des écoles stagiaires ;

- elle n'a pas été informée qu'elle pouvait se faire assister d'un conseil lors de l'entretien du 1er juillet 2011 avec le jury académique ;

- le jury qui s'est réuni ce jour là était irrégulièrement composé ;

- le jury, qui avait décidé de son sort dès le 1er juillet 2011, a été partial ;

- pendant la durée de son stage, elle n'a pas été placée dans une situation normale, au regard notamment des prescriptions de la circulaire n° 2010-037 du 25 février 2010, de sorte que ses aptitudes professionnelles n'ont pas pu être appréciées ; elle a démontré, pendant son stage, ses qualités professionnelles et le jury académique, en décidant de ne pas l'inscrire sur la liste des candidats admis, a commis une erreur de droit et une erreur manifeste d'appréciation ;

- l'avis émis par le jury académique n'a pas lié l'administration qui devait se prononcer sur le renouvellement de son stage ;

- l'arrêté du 5 juin 2014 n'est pas motivé ;

- elle a été privée de la possibilité de présenter des observations écrites ou orales, avec l'assistance d'un conseil, en méconnaissance des dispositions de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 ;

- le ministre ne pouvait pas décider son licenciement sans s'être au préalable prononcé sur le renouvellement de son stage ;

- elle n'a pas été placée, pendant la durée de son stage, dans une situation normale permettant d'apprécier ses aptitudes professionnelles ; la décision de licenciement est entachée d'une erreur de droit et d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- l'arrêté du 5 juin 2014 est illégal du fait de l'illégalité de la délibération du jury du 6 juillet 2011, sur laquelle il se fonde.

Par un mémoire en défense, enregistré le 28 juillet 2016, la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que :

- les conclusions dirigées contre la délibération du 6 juillet 2011 sont tardives ;

- les moyens soulevés contre cette délibération ne sont pas fondés ;

- le moyen tiré de ce que l'arrêté du 5 juin 2014 a été pris en méconnaissance de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 est inopérant ;

- les autres moyens soulevés par Mme A...à l'encontre de cet arrêté ne sont pas fondés.

II- / Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés le 30 décembre 2015 et le 10 juin 2017 sous le n° 15NC02565, MmeA..., représentée par Me Kipffer, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 29 octobre 2015 ;

2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 5 000 euros par mois depuis le 1er septembre 2011 jusqu'au 6 juin 2014 en réparation de ses préjudices matériel et moral, cette somme étant augmentée des intérêts au taux légal à compter du 29 décembre 2014 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 013 euros au titre de la procédure de première instance et de 4 513 euros au titre de la procédure d'appel, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'illégalité de la décision du recteur du 2 septembre 2011 constitue une faute susceptible d'engager la responsabilité de l'Etat ;

- l'administration a commis une faute en délibérant selon une procédure irrégulière sur son aptitude à être titularisée ; l'avis du 1er juillet 2011 a été émis par un jury académique irrégulièrement composé et partial ; cet avis ne se prononce pas sur la possibilité d'une prolongation de stage ; le jury a commis une faute en portant une appréciation manifestement erronée sur ses qualités professionnelles ;

- l'administration a commis une faute en la plaçant durant son stage dans une situation anormale, en décidant de ne pas l'inscrire sur la liste des candidats admis au certificat d'aptitude au professorat des écoles, en décidant de ne pas renouveler son stage et en la licenciant en 2011 ;

- son éviction illégale du service lui ouvre droit à une réparation intégrale de son préjudice ;

- elle subit une perte de revenu et une perte de ses droits à la retraite ;

- elle subit un préjudice moral du fait de l'impossibilité d'exercer le métier de professeur des écoles et du regard de sa famille et ses proches sur sa situation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 28 juillet 2016, la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que les moyens soulevés par Mme A...ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- le décret n° 90-680 du 1er août 1990 ;

- l'arrêté du 12 mai 2010 fixant les modalités d'évaluation et de titularisation des professeurs des écoles stagiaires ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Dhiver,

- les conclusions de M. Collier, rapporteur public,

- et les observations de Me Kipffer, avocat de MmeA....

1. Considérant que les requêtes n° 15NC02554 et 15NC02565 présentées par Mme A...sont dirigées contre le même jugement et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour qu'il soit statué par un même arrêt ;

2. Considérant que MmeA..., admise au concours externe de recrutement de professeur des écoles à la session de juin 2010, a été nommée professeur des écoles stagiaire ; qu'à l'issue de son stage, le jury académique de qualification professionnelle des professeurs des écoles a décidé, par une délibération du 6 juillet 2011, de ne pas l'inscrire sur la liste des professeurs des écoles stagiaires aptes à être titularisés et a émis un avis défavorable au renouvellement de son stage ; que, par une décision du 13 juillet 2011, le recteur de l'académie de Nancy-Metz a informé Mme A...que son stage ne serait pas renouvelé puis a prononcé son licenciement par un arrêté du 2 septembre 2011 ; que, par un jugement n° 1201768 du 7 février 2013, le tribunal administratif de Strasbourg a, après avoir annulé l'arrêté du 2 septembre 2011 en tant qu'il fixe une date d'entrée en vigueur de ses dispositions antérieure à sa notification, rejeté le surplus de la demande dont il était saisi dirigée contre ce même arrêté, contre la décision du 13 juillet 2011 et contre la délibération du jury académique du 6 juillet 2011 ; que, par un arrêt n° 13NC00640 du 20 mars 2014, la cour a réformé ce jugement ; qu'elle a annulé les décisions du recteur des 13 juillet 2011 et 2 septembre 2011 et rejeté les conclusions de Mme A...dirigées contre la délibération du 6 juillet 2011 ; qu'à la suite de l'annulation décidée par la cour, le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche a, par un arrêté du 5 juin 2014, prononcé le licenciement de MmeA... ; que, cette dernière a saisi le tribunal administratif de Strasbourg en lui demandant l'annulation de cet arrêté ainsi que celle de la délibération du 6 juillet 2011 ; qu'elle a également demandé au tribunal de condamner l'Etat à réparer les préjudices qu'elle estime avoir subis du fait de son éviction du service ; que Mme A...relève appel du jugement du 29 octobre 2015 par lequel le tribunal a rejeté ses demandes ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

3. Considérant, en premier lieu, que Mme A...a contesté, par voie d'action, la légalité de la délibération du jury académique de qualification professionnelle des professeurs des écoles du 6 juillet 2011 ; que les premiers juges ont rejeté ces conclusions comme irrecevables au motif que la requérante était forclose ; que, dès lors, la circonstance que, par un motif surabondant, le tribunal ait ajouté que l'arrêt de la cour du 20 mars 2014 était passé en force de chose jugée, alors que le ministre n'avait pas opposé cette argumentation, est sans influence sur la régularité du jugement ; qu'ainsi, les moyens tirés de ce que le tribunal a soulevé d'office, à tort, un moyen qui n'est pas d'ordre public et de la violation de l'article R. 611-7 du code de justice administrative doivent être écartés ;

4. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article R. 421-5 du code de justice administrative : " Les délais de recours contre une décision administrative ne sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision. " ; que l'auteur d'un recours juridictionnel tendant à l'annulation d'une décision administrative doit être réputé avoir eu connaissance de la décision qu'il attaque au plus tard à la date à laquelle il a formé son recours ; que si un premier recours contre une décision notifiée sans mention des voies et délais de recours a été rejeté, son auteur ne peut introduire un second recours contre la même décision que dans un délai de deux mois à compter de la date d'enregistrement du premier au greffe de la juridiction saisie ; que le délai de recours de deux mois contre la délibération du 6 juillet 2011 doit être décompté à partir du 15 février 2012, date d'enregistrement de la première demande de Mme A...tendant à l'annulation de cette délibération dans l'instance n° 1201768 devant le tribunal administratif de Strasbourg ; que ce délai était expiré à la date du 4 août 2014 à laquelle la requérante a, dans l'instance enregistrée au greffe du tribunal sous le n° 1502644, renouvelé ses conclusions dirigées, par voie d'action, contre la même délibération ; que, par suite, Mme A...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal a rejeté ces conclusions comme irrecevables ;

5. Considérant toutefois que la délibération du jury académique du 6 juillet 2011 et l'arrêté du 5 juin 2014 par lequel le ministre chargé de l'éducation nationale a prononcé le licenciement de Mme A...constituent des éléments d'une opération complexe ; que, par suite, la requérante est recevable à invoquer, à l'appui de conclusions dirigées contre l'arrêté du 5 juin 2014, l'illégalité de la délibération du 6 juillet 2011, alors même que cette délibération est définitive ;

Sur les conclusions en annulation dirigées contre l'arrêté du 5 juin 2014 :

En ce qui concerne la compétence liée du ministre :

6. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 10 du décret du 1er août 1990 relatif au statut particulier des professeurs des écoles, dans sa rédaction applicable à l'espèce : " Les professeurs stagiaires accomplissent un stage d'un an. Au cours de leur stage, les professeurs stagiaires bénéficient d'une formation dispensée, dans le cadre des orientations définies par l'Etat, sous la forme d'actions organisées à l'université et d'un accompagnement. Les modalités du stage et les conditions de son évaluation par un jury sont arrêtées par le ministre chargé de l'éducation. (...) " ; qu'aux termes de l'article 12 du même décret : " A l'issue du stage, les professeurs des écoles stagiaires sont titularisés par le directeur académique des services de l'éducation nationale agissant sur délégation du recteur d'académie du département dans le ressort duquel le stage est accompli, sur proposition du jury prévu à l'article 10. (...) " ; qu'aux termes de l'article 13 de ce décret : " Les stagiaires qui n'ont pas été titularisés peuvent être autorisés à accomplir une nouvelle année de stage. Ceux qui ne sont pas autorisés à renouveler le stage ou qui, à l'issue de la seconde année de stage, n'ont pas été titularisés, sont soit licenciés, soit réintégrés dans leur corps ou cadre d'emplois d'origine s'ils avaient la qualité de fonctionnaire. (...) " ;

7. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 5 de l'arrêté du 12 mai 2010 fixant les modalités d'évaluation et de titularisation des professeurs des écoles stagiaires : " Après délibération, le jury établit la liste des fonctionnaires stagiaires qu'il estime aptes à être titularisés. En outre, lorsqu'il s'agit d'un stagiaire qui effectue une première année de stage, l'avis défavorable doit être complété par un avis sur l'intérêt, au regard de l'aptitude professionnelle, d'autoriser le stagiaire à effectuer une seconde et dernière année de stage. (...) " ; qu'aux termes de l'article 6 du même arrêté : " Le recteur arrête la liste des professeurs des écoles stagiaires déclarés aptes à être titularisés. Il arrête par ailleurs la liste des stagiaires autorisés à accomplir une seconde année de stage et la liste des professeurs stagiaires licenciés ou réintégrés dans leur corps, cadre d'emplois ou emploi d'origine " ;

8. Considérant qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions que l'administration est tenue de prononcer le licenciement d'un professeur des écoles stagiaire ne figurant pas sur la liste des stagiaires déclarés aptes à être titularisés, ni sur la liste des stagiaires autorisés à accomplir une seconde année de stage ; qu'il ressort des pièces du dossier que, par sa délibération du 6 juillet 2011, le jury académique a estimé que Mme A...n'était pas apte à être titularisée et qu'elle ne devait pas être autorisée à effectuer une deuxième et dernière année de stage ; que, par suite et ainsi que l'ont relevé les premiers juges, le ministre de l'éducation nationale avait compétence liée pour licencier la requérante ;

9. Considérant que du fait de cette situation de compétence liée, tous les moyens de Mme A... sont inopérants, à l'exception de celui portant sur l'existence de la compétence liée ; que, dès lors, les moyens tirés d'une insuffisance de motivation de l'arrêté du 5 juin 2014, de la méconnaissance de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000, de ce que la décision de licenciement devait être précédée d'une décision portant sur la prolongation de son stage et de ce que le ministre a commis une erreur manifeste dans l'appréciation de sa manière de servir sont inopérants ;

En ce qui concerne le moyen, soulevé par la voie d'exception, tiré de l'illégalité de la délibération du jury académique du 6 juillet 2011 :

S'agissant de la régularité de la procédure suivie devant le jury :

10. Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article 5 de l'arrêté du 12 mai 2010 citées au point 7 ci-dessus que le jury académique établit la liste des fonctionnaires stagiaires qu'il estime aptes à être titularisés et, lorsqu'il émet un avis défavorable à la titularisation, se prononce sur l'intérêt d'autoriser le stagiaire à effectuer une seconde et dernière année de stage ; que ce même article 5 dispose, à son deuxième alinéa : " Le jury entend au cours d'un entretien chaque fonctionnaire stagiaire pour lequel il envisage de ne pas proposer la titularisation. " ;

11. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que le jury académique, qui envisageait de ne pas proposer la titularisation de MmeA..., a convoqué cette dernière à un entretien en application des dispositions de l'article 5 de l'arrêté du 12 mai ; que lors de cet entretien, qui s'est tenu le 1er juillet 2011 à 10 heures, le jury a entendu Mme A...en vue de la décision qu'il a prise par sa délibération du 6 juillet 2011 ;

12. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 2 de l'arrêté du 12 mai 2010, dans sa rédaction applicable à l'espèce : " Il est constitué un jury académique de trois à six membres nommés par le recteur. Le président, le vice-président et les membres du jury sont choisis parmi les inspecteurs d'académie et les inspecteurs de l'éducation nationale chargés de circonscription. (...) " ; qu'il ressort des pièces du dossier que le jury qui a entendu Mme A...le 1er juillet 2011 était composé de MmeB..., inspectrice d'académie représentant le recteur de l'académie de Nancy-Metz désignée présidente du jury par un arrêté du 18 avril 2011, de Mme E...et de M.C..., inspecteurs de l'éducation nationale de Meurthe-et-Moselle et de Meuse désignés membres du jury par le même arrêté ; que ce jury était composé de trois personnes ainsi que le permettent les dispositions de l'article 2 de l'arrêté du 12 mai 2010 ; qu'ainsi, Mme A...n'est pas fondée à soutenir que le jury qui a conduit l'entretien prévu par le deuxième alinéa de l'article 5 de l'arrêté du 12 mai 2010 était irrégulièrement composé ;

13. Considérant, en troisième lieu, que si Mme A...soutient qu'elle n'aurait pas eu la possibilité de s'exprimer devant le jury le 1er juillet 2011, elle n'apporte aucun commencement de preuve à l'appui de cette allégation ;

14. Considérant, en quatrième lieu, qu'alors même que l'avis émis par le jury académique chargé de se prononcer sur l'aptitude des professeurs des écoles stagiaires à être titularisés est fondé sur l'appréciation de leur manière de servir et se trouve ainsi pris en considération de leur personne, il ne présente pas un caractère disciplinaire et n'est pas au nombre des mesures qui ne peuvent légalement intervenir sans que les intéressés aient été informés de la possibilité de se faire assister par un ou plusieurs conseils de leur choix ; qu'un tel avis n'est soumis qu'aux formes et procédures expressément prévues par les lois et les règlements ; qu'il ne résulte d'aucune disposition législative ou réglementaire que le professeur des écoles stagiaire entendu par le jury académique doit être informé de la possibilité de se faire assister par un conseil de son choix lors de son entretien ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que Mme A...n'aurait pas reçu une telle information doit être écarté ;

15. Considérant, en cinquième lieu, que Mme A...ne fait état d'aucun élément susceptible de caractériser une méconnaissance, par le jury académique, du principe d'impartialité auquel il est tenu ; qu'à cet égard, les circonstances que l'entretien du 1er juillet 2011 a porté sur les difficultés rencontrées par l'intéressée durant son stage et que cet entretien s'est tenu quelques jours avant la délibération du 6 juillet 2011 ne sauraient être regardées comme manifestant une quelconque partialité du jury ;

16. Considérant, en dernier lieu, qu'il ressort de l'appréciation littérale figurant dans le compte rendu de l'entretien du 1er juillet 2011, que, contrairement à ce que soutient la requérante, le jury académique s'est prononcé sur l'absence d'intérêt à lui permettre d'effectuer une nouvelle année de stage ;

S'agissant de l'appréciation portée par le jury :

17. Considérant qu'aux termes de l'article 3 de l'arrêté du 12 mai 2010 : " Le jury se prononce sur le fondement du référentiel de compétences prévu par l'arrêté du 12 mai 2010 susvisé, après avoir pris connaissance de l'avis de l'IEN désigné à cet effet, établi après consultation du rapport du tuteur auprès duquel le fonctionnaire stagiaire a effectué son stage. L'avis peut également résulter, notamment à la demande du tuteur, d'une inspection " ;

18. Considérant qu'il résulte de la combinaison des dispositions des articles 10 et 12 du décret du 1er août 1990 citées au point 6 du présent arrêt avec celles des articles 3, 5 et 6 de l'arrêté du 12 mai 2010 citées aux points 7 et 13 ci-dessus que le jury académique se prononce à l'issue d'une période de formation et de stage ; que, s'agissant non d'un concours ou d'un examen mais d'une procédure tendant à l'appréciation de la manière de servir qui doit être faite en fin de stage, cette appréciation peut être censurée par le juge de l'excès de pouvoir en cas d'erreur manifeste ;

19. Considérant que Mme A...fait valoir qu'elle a eu la responsabilité, durant son stage, de deux classes, une classe de moyenne section-grande section de maternelle et une classe de CM2 en zone d'éducation prioritaire, et qu'elle n'a pas bénéficié d'un suivi hebdomadaire ; qu'elle soutient qu'elle a été placée dans des conditions ne lui permettant pas de faire la preuve de ses capacités professionnelles ;

20. Considérant, d'une part, que Mme A...ne peut utilement se prévaloir des énonciations de la circulaire ministérielle n° 2010-037 du 25 février 2010 qui est dénuée de portée réglementaire ; qu'il ne résulte d'aucune disposition réglementaire que le professeur des écoles stagiaire doit effectuer son stage dans une seule école et ne peut être placé ni en zone d'éducation prioritaire, ni en classe de CM2 ; qu'aucune disposition réglementaire n'impose au tuteur de procéder à un échange hebdomadaire par courriel avec le stagiaire ;

21. Considérant, d'autre part, que les capacités professionnelles de Mme A...ont été évaluées au regard du seul stage qu'elle a effectué dans la classe de CM2 en zone d'éducation prioritaire, dans laquelle elle a été affectée à mi temps durant toute l'année scolaire et qui a été sa classe de référence, ainsi qu'elle en avait été informée lors d'une réunion d'accueil du 30 août 2010 ; que Mme A...a fait l'objet de six visites pédagogiques au cours de son stage et a eu la possibilité d'échanger sur les éventuelles difficultés rencontrées dans la classe lors de journées hebdomadaires de formation ; qu'elle a aussi communiqué par courriel avec sa tutrice et ne fait état d'aucune situation dans laquelle elle se serait trouvée sans réponse de sa tutrice en dépit d'une demande ou d'une sollicitation de sa part ; que si la classe dans laquelle Mme A...a été affectée avait un niveau très hétérogène, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'elle a été placée dans des conditions particulièrement difficiles faisant obstacle à ce qu'elle effectue son stage dans des conditions normales ; que, notamment, l'élève en très grande difficulté dont elle avait la charge a quitté l'établissement en tout début d'année scolaire et il n'est pas démontré qu'elle a été confrontée à un élève faisant preuve de violence verbale et physique ; que si l'attestation du directeur de l'école fait état du comportement perturbateur de certains élèves, cette circonstance ne suffit pas, à elle-seule, à établir que Mme A...n'était pas en mesure de conduire une action pédagogique ; qu'au contraire, il ressort des rapports pédagogiques que l'ambiance de la classe, calme et disciplinée, permettait de mettre en place des apprentissages dans des conditions satisfaisantes ; qu'ainsi, Mme A... n'est pas fondée à soutenir qu'elle n'aurait pas été mise à même de faire la preuve de ses compétences professionnelles ;

22. Considérant, enfin, qu'il ressort des pièces du dossier, notamment du rapport d'inspection du 24 mai 2010 et du rapport de synthèse établi par la tutrice de MmeA..., que cette dernière, en dépit de son investissement et de ses qualités d'écoute, a rencontré des difficultés récurrentes liées à la préparation des séquences et à l'adaptation des actions pédagogiques aux besoins des élèves ; que, dans ces conditions, eu égard à l'insuffisance de ses aptitudes pédagogiques, le jury académique n'a pas fait une appréciation manifestement erronée des compétences professionnelles de Mme A...en estimant qu'elle n'était pas apte à être titularisée et en ne proposant pas qu'elle effectue une seconde année de stage ;

23. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme A...n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté ses demandes tendant à l'annulation de la décision du ministre de l'éducation nationale du 5 juin 2014 ;

Sur les conclusions indemnitaires :

24. Considérant, en premier lieu, qu'en l'absence d'illégalité fautive de l'arrêté du ministre de l'éducation nationale du 5 juin 2014, Mme A...ne peut prétendre à la réparation du préjudice que lui aurait causé cette décision ;

25. Considérant, en second lieu, que les décisions du recteur des 13 juillet 2011 et 2 septembre 2011, ainsi que la décision du 15 décembre 2011 rejetant le recours gracieux formé par MmeA..., ont été annulées en raison d'un vice de compétence entachant la première décision du 13 juillet 2011 ; qu'il résulte de l'instruction que, compte tenu de la nature de cette irrégularité, les mêmes décisions auraient pu être légalement prises dans le cadre d'une procédure régulière ; que, par suite, le préjudice financier et le préjudice moral dont Mme A...demande réparation ne peuvent être regardés comme la conséquence du vice d'incompétence dont était entachée la décision du 13 juillet 2011 ;

26. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande indemnitaire ;

27. Considérant que l'Etat n'étant pas partie perdante, les conclusions de Mme A...présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;

D E C I D E :

Article 1er : Les requêtes de Mme A...sont rejetées.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... A...et au ministre de l'éducation nationale.

2

N° 15NC02554 et 15NC02565


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15NC02554
Date de la décision : 04/07/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Enseignement et recherche - Questions générales - Questions générales relatives au personnel - Questions générales relatives au personnel enseignant.

Fonctionnaires et agents publics - Cessation de fonctions - Licenciement - Stagiaires.


Composition du Tribunal
Président : M. MARINO
Rapporteur ?: Mme Martine DHIVER
Rapporteur public ?: M. COLLIER
Avocat(s) : KIPFFER

Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2017-07-04;15nc02554 ?
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