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08/06/2017 | FRANCE | N°16NC01315

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre - formation à 3, 08 juin 2017, 16NC01315


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. Lebeau a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler le règlement intérieur du conseil municipal de la ville de Metz ainsi que la délibération n°14-04-17-01 du 17 avril 2014 portant approbation de ce règlement.

Par un jugement n° 1402717 du 27 avril 2016, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté la demande de M. Lebeau.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 27 juin 2016 et un mémoire enregistré le 10 janvier 2017, M. Lebeau, représent

é par la SCP Becker-Szturemski-C... -Klein-Desserre, demande à la cour :

1°) d'annuler le juge...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. Lebeau a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler le règlement intérieur du conseil municipal de la ville de Metz ainsi que la délibération n°14-04-17-01 du 17 avril 2014 portant approbation de ce règlement.

Par un jugement n° 1402717 du 27 avril 2016, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté la demande de M. Lebeau.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 27 juin 2016 et un mémoire enregistré le 10 janvier 2017, M. Lebeau, représenté par la SCP Becker-Szturemski-C... -Klein-Desserre, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1402717 du 27 avril 2016 du tribunal administratif de Strasbourg ;

2°) d'annuler la délibération n° 14-04-17-01 et le règlement intérieur du 17 avril 2014 ;

3°) de mettre à la charge de la ville de Metz une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

M. Lebeau soutient que :

- l'article 21 du règlement intérieur qui conduit à limiter le temps de parole, rapproché des dispositions de l'article 14 B relatives à la préparation des séances du conseil municipal, est entaché d'illégalité dès lors que sa mise en oeuvre conduit à nier le droit d'expression individuel des conseillers municipaux prévu à l'article L. 2121-29 du code général des collectivités territoriales ;

- l'article 63 du règlement intérieur, qui limite l'expression des élus à un nombre maximal de caractères et qui ne permet que d'apposer la photographie du président du groupe ou du correspondant désigné du groupe dans la page du bulletin municipal dédié à l'opposition, porte atteinte à la liberté d'expression et notamment à celle des conseillers municipaux de l'opposition prévue par l'article L. 2121-27-1 du code général des collectivités territoriales.

Par un mémoire en défense enregistré le 28 novembre 2016, la ville de Metz conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de M. Lebeau au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La ville de Metz soutient que :

- le litige est circonscrit aux dispositions des articles 21 et 63 du règlement intérieur du conseil municipal ;

- les moyens invoqués par M. Lebeau ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Richard, premier conseiller,

- les conclusions de M. Favret, rapporteur public,

- et les observations de Me C...pour M. Lebeau, ainsi que celles de Me A...pour la ville de Metz.

Considérant ce qui suit :

1. M. Lebeau, conseiller municipal de Metz, a demandé l'annulation de la délibération du 17 avril 2014 par laquelle le règlement intérieur du conseil municipal a été adopté. Le requérant relève appel du jugement du 27 avril 2016 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la délibération litigieuse et du règlement intérieur concernant les articles 21 et 63 de ce règlement.

Sur la légalité de l'article 21 du règlement intérieur et de son approbation par le conseil municipal :

2. En premier lieu, M. Lebeau fait valoir que les dispositions combinées des articles 21 et 14 B du règlement intérieur conduisent à limiter le temps de parole individuel accordé à chaque élu et à méconnaître le droit d'expression individuel reconnu à chaque conseiller municipal par les dispositions de l'article L. 2121-19 du code général des collectivités territoriales.

3. D'une part, aux termes de l'article L. 2121-19 du code général des collectivités territoriales : " Les conseillers municipaux ont le droit d'exposer en séance du conseil des questions orales ayant trait aux affaires de la commune. Dans les communes de 3 500 habitants et plus, le règlement intérieur fixe la fréquence ainsi que les règles de présentation et d'examen de ces questions ". Aux termes de l'article L. 2121-16 dudit code : " Le maire a seul la police de l'assemblée (...) ".

4. D'autre part, aux termes de l'article 21 du règlement intérieur du conseil municipal de la commune de Metz : " En fonction de l'importance de l'ordre du jour, de la nature du point débattu, le maire peut soit limiter le temps de parole des intervenants, soit impartir à chaque groupe un temps de parole global. (...) / En fonction de l'ordre du jour, de la nature du point débattu, le maire peut, soit limiter le temps de parole des intervenants, soit impartir à chaque groupe un temps de parole global. Les modalités pratiques d'organisation des débats et la répartition du temps de parole qui en découle sont définies en conférence des présidents de groupes conformément à l'article 14 B qui précède. / En tout état de cause, la première limite à la durée des interventions réside dans la sagesse de chacun. Il est cependant établi que le temps de parole est limité à 10 min par intervention. / La clôture du débat est prononcée par le maire. Il met alors aux voix le point concerné après avoir, le cas échéant, donné la parole à un orateur souhaitant apporter des explications sur le sens de son vote personnel, si celui-ci diffère de celui de son groupe, ou de celui de son groupe d'élus. Ces explications sont limitées à 3min et ne sont octroyées qu'à raison d'une par point et par groupe ou conseiller isolé. Elles sont limitées au strict vote à venir ". L'article 14 B du même règlement indique que la conférence des présidents de groupes est " saisie de l'organisation des débats " et que, " chargée d'arrêter les modalités pratiques d'organisation desdits débats, elle s'attache plus particulièrement à définir la durée du débat de chaque point à l'ordre du jour, et par conséquent des temps de parole accordés à chaque groupe ".

5. Il résulte de ces dispositions, ainsi que l'a rappelé le tribunal dans le jugement litigieux, qu'un temps de parole maximal de 10 minutes est accordé, dans tous les cas de figure, pour l'intervention d'un conseiller municipal sur un point débattu dans le cadre de l'ordre du jour. La circonstance que la détermination des modalités pratiques d'organisation des débats et la répartition du temps de parole qui en découle doive être effectuée selon les termes de l'article 21, lors la conférence des présidents de groupes conformément à l'article 14 B qui précède la séance du conseil, n'a ni pour objet, ni pour effet de priver ou de limiter, en soi, le droit à l'expression d'un conseiller municipal souhaitant s'exprimer sur l'un des points à aborder dans le cadre de l'ordre du jour du conseil municipal alors même qu'il n'appartiendrait à aucun groupe. Il ne résulte notamment pas du renvoi à l'article 14 B du règlement que l'article 21 conduise à limiter, par principe, les interventions à une seule intervention de 10 minutes par groupe ou à priver un conseiller municipal de son droit d'exposer, en séance, les questions orales ayant trait aux affaires de la commune de nature à lui permettre d'exercer utilement son mandat. Enfin, il résulte des termes mêmes de l'article 21 que préalablement au vote et avant la clôture des débats, le maire peut donner, pendant trois minutes supplémentaires, la parole à un conseiller municipal souhaitant apporter des explications sur le sens de son vote personnel dès lors qu'il diffèrerait de celui de son groupe, ou de celui de son groupe d'élus, dans la mesure ou l'organisation des débats n'aurait pas permis l'expression de ses idées sur le point à trancher. Dans ces conditions, M. Lebeau n'est pas fondé à soutenir qu'en édictant l'article 21 du règlement intérieur, le conseil municipal a méconnu le droit à l'expression des conseillers municipaux prévu par les dispositions de l'article L. 2121-19 du code général des collectivités territoriales.

Sur la légalité de l'article 63 du règlement intérieur :

6. M. Lebeau soutient que l'article 63 du règlement intérieur restreint et méconnaît le droit et la liberté d'expression ainsi que les dispositions de l'article L. 2121-27-1 du code général des collectivités territoriales.

7. Aux termes de l'article L. 2121-27-1 du code général des collectivités territoriales : " Dans les communes de 3 500 habitants et plus, lorsque la commune diffuse, sous quelque forme que ce soit, un bulletin d'information générale sur les réalisations et la gestion du conseil municipal, un espace est réservé à l'expression des conseillers n'appartenant pas à la majorité municipale. Les modalités d'application de cette disposition sont définies par le règlement intérieur ".

8. Il résulte de ces dispositions qu'il appartient au conseil municipal de déterminer les conditions de mise en oeuvre du droit d'expression des conseillers municipaux d'opposition dans les bulletins d'information générale portant sur les réalisations et la gestion du conseil municipal et que l'espace réservé aux conseillers n'appartenant pas à la majorité municipale doit, sous le contrôle du juge, présenter un caractère suffisant et être équitablement réparti.

9. Aux termes de l'article 63 du règlement intérieur, dans sa rédaction résultant de son adoption le 17 avril 2014 : " Conformément aux dispositions de l'article L. 2121-27-1 du code général des collectivités territoriales, obligation est faite à la collectivité, lorsqu'elle diffuse le journal municipal " Metz mag " ou toute autre publication généraliste faisant le bilan et la promotion de l'activité municipale, sous quelque forme que ce soit, de réserver un espace dédié à l'expression des conseillers municipaux n'appartenant pas à la majorité municipale. / Afin de favoriser l'exercice de ce droit, un espace correspondant à une page (3 750 caractères espaces compris) est ainsi réservé aux conseillers isolés ou groupes constitués qui n'appartiennent pas à la majorité municipale et qui se sont déclarés comme tel. / Chaque groupe ou conseiller isolé souhaitant ainsi s'y exprimer bénéficiera d'un nombre de caractères proportionnel à sa représentativité. (...) chaque élu se verra donc attribuer, au prorata, une fraction de cet espace exprimé en nombre de caractères, charge pour lui de l'utiliser individuellement, au travers de son groupe d'appartenance, ou en faire bénéficier un éventuel " inter groupe ". (...) Dans tous les cas, seule la photographie du président de groupe ou du correspondant désigné par les groupes, voire du conseiller isolé auteur de l'article pourra apparaître. En cas de texte commun à plusieurs groupes ou conseillers isolés, seule la photographie du président de groupe, du correspondant ou du conseiller isolé désigné pourra être publiée ".

10. La circonstance que pour mettre en oeuvre le droit d'expression des conseillers n'appartenant pas à la majorité municipale dans le bulletin municipal, le conseil municipal ait décidé, dans le cadre de son règlement intérieur, de réserver une page aux élus de l'opposition et de limiter la longueur des articles à publier par un groupe ou un conseiller isolé à un nombre maximal de caractères d'imprimerie, la longueur totale de l'article étant proportionnée à la représentativité de ce groupe ou de cet élu, n'est pas de nature à caractériser la méconnaissance de la liberté d'expression des élus ou les dispositions de l'article L. 2121-27 qui organisent leur droit de s'exprimer dans le cadre d'un bulletin d'information générale portant sur les réalisations et la gestion du conseil municipal.

11. Par ailleurs et ainsi que l'a énoncé le tribunal, la seule circonstance que l'article 63 précité limite le nombre et le sujet des photographies représentant les auteurs de la tribune, en ne laissant pas la possibilité d'intégrer, dans l'article à publier, l'ensemble des photographies des membres d'un groupe d'élus, ne suffit pas à établir, contrairement à ce que soutient le requérant, que la liberté d'expression et notamment celle des élus de l'opposition au sein du bulletin municipal ou publication équivalente, telle que précisée dans le cadre des dispositions de l'article L. 2121-27-1 précité, aurait été méconnue.

12. Il résulte de ce qui précède que les moyens, que le requérant réitère dans des termes identiques à ceux de la première instance, tirés de la méconnaissance des articles 10, 11 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789, de l'article 19 de la Déclaration universelle des droits de l'homme de 1948 et des dispositions de l'article L. 2121-27-1 du code général des collectivités territoriales ne peuvent qu'être écartés.

13. En conclusion de tout ce qui précède, M. Lebeau n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement contesté, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la délibération du 17 avril 2014 approuvant les articles 21 et 63 du règlement intérieur du conseil municipal.

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

14. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la ville de Metz qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que M. Lebeau demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.

15. En revanche, il y a lieu, sur le fondement de ces dernières dispositions, de mettre à la charge de M. Lebeau, le paiement de la somme de 1 500 euros à la ville de Metz au titre des frais que celle-ci a exposés pour sa défense.

Par ces motifs,

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. Lebeau est rejetée.

Article 2 : M. Lebeau versera à la ville de Metz une somme de 1 500 (mille cinq cents) euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...Lebeau et à la ville de Metz.

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No 16NC01315


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16NC01315
Date de la décision : 08/06/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

135-02-01-02-01-01 Collectivités territoriales. Commune. Organisation de la commune. Organes de la commune. Conseil municipal. Fonctionnement.


Composition du Tribunal
Président : M. MESLAY
Rapporteur ?: M. Michel RICHARD
Rapporteur public ?: M. FAVRET
Avocat(s) : SCP BECKER SZTUREMSKI VAUTHIER KLEIN-DESSERRE

Origine de la décision
Date de l'import : 20/06/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2017-06-08;16nc01315 ?
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