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18/04/2017 | FRANCE | N°16NC00207

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre - formation à 3, 18 avril 2017, 16NC00207


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le centre hospitalier Ravenel a demandé au tribunal administratif de Nancy de condamner conjointement et solidairement la SARL Coulon architectes, M.F..., la SARL Batiserf, M.A..., la société Wig France, la société Laugel et Renouard, la société Novabase Venturini Menuiserie, la société Abio JB Revêtements, la société Lagarde et Meregnani, la société Cunin, la société Sodel, la société Techniplafond et la société Wucher à lui payer la somme globale de 385 763,78 euros HT en réparation des dés

ordres affectant la maison d'accueil spécialisée " La petite Praye ".

Par un jugeme...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le centre hospitalier Ravenel a demandé au tribunal administratif de Nancy de condamner conjointement et solidairement la SARL Coulon architectes, M.F..., la SARL Batiserf, M.A..., la société Wig France, la société Laugel et Renouard, la société Novabase Venturini Menuiserie, la société Abio JB Revêtements, la société Lagarde et Meregnani, la société Cunin, la société Sodel, la société Techniplafond et la société Wucher à lui payer la somme globale de 385 763,78 euros HT en réparation des désordres affectant la maison d'accueil spécialisée " La petite Praye ".

Par un jugement n° 1300824 du 8 décembre 2015, le tribunal administratif de Nancy a notamment condamné la société Lagarde et Meregnani, d'une part, à verser au centre hospitalier la somme de 75 106,48 euros TTC en réparation des fissures en façade et de leurs conséquences et, d'autre part, à verser conjointement et solidairement avec la société Wig France, M.F..., la société Batiserf et la société A...la somme de 12 278,64 euros en réparation des désordres affectant les joints extérieurs.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés le 5 février 2016 et les 2, 3 et 28 novembre 2016, la société Lagarde et Meregnani, représentée par la SCPE..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nancy du 8 décembre 2015 en tant qu'il a prononcé des condamnations à son encontre ;

2°) de rejeter la demande présentée par le centre hospitalier Ravenel devant le tribunal administratif en tant qu'elle était dirigée contre elle ;

3°) à titre subsidiaire, de condamner la société Wig France, la société Coulon architectes et M. F...à la garantir de toute condamnation prononcée à son encontre ;

4°) de rejeter l'appel en garantie formé à son encontre par la société Wig France.

Elle soutient que :

- les fissures en façade ne relèvent pas de la garantie décennale ;

- les coulures sur la lasure n'ont pas été constatées dans le délai de parfait achèvement ;

- la réception a été prononcée sans réserve ;

- la fissuration du béton étant inhérente à la nature du matériau, la société n'a commis aucune faute en appliquant la lasure sur un support présentant des fissures ;

- la lasure qui a été appliquée incorpore un hydrofuge comme cela était demandé dans le cahier des clauses techniques particulières (CCTP) du lot n°12 ;

- les prestations relatives aux joints ne lui ont pas été transférées et sont restées dans le lot " gros oeuvre " ;

- les désordres sont imputables aux choix de la maîtrise d'oeuvre et à l'exécution de ses prestations par le titulaire du lot " gros oeuvre ".

Par des mémoires en défense, enregistrés le 4 août et le 25 novembre 2016, la société Coulon architectes et M.F..., représentés par la SCP C...CarnelC..., demandent à la cour :

1°) de rejeter l'appel en garantie formé à leur encontre par la société Lagarde et Meregnani ;

2°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nancy du 8 décembre 2015 en tant qu'ils ont été condamnés à garantir la société Lagarde et Meregnani au titre des fissures et coulures et en tant qu'ils ont été condamnés à réparer les désordres affectant les joints extérieurs.

Ils soutiennent que :

- le maître d'ouvrage a décidé de lever toutes les réserves le 13 juillet 2010 alors que la maîtrise d'oeuvre avait évoqué des points relatifs aux désordres et notamment aux fissures ;

- aucune faute ne leur est imputable dès lors que la lasure n'est pas contre-indiquée, que le désordre n'est qu'esthétique et que tous les murs sont protégés par l'étanchéité de la toiture ou par le traitement de la tête de mur ;

- la société Lagarde et Meregnani était en charge du couvre-joint et le titulaire du lot gros oeuvre du joint d'étanchéité, aucune faute ne peut donc leur être imputée.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 19 août et le 24 novembre 2016, la société Wig France entreprises, représentée par MeD..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nancy du 8 décembre 2015 en tant qu'il a prononcé des condamnations à son encontre ;

2°) de rejeter la demande présentée par le centre hospitalier Ravenel devant le tribunal administratif en tant qu'elle était dirigée contre elle ;

3°) de rejeter l'appel en garantie formé à son encontre par la société Lagarde et Meregnani ;

4°) à titre subsidiaire, de condamner la société Lagarde et Meregnani, la société Coulon architectes et M. F...à la garantir de toute condamnation prononcée à son encontre ;

5°) de mettre à la charge du centre hospitalier Ravenel, de la société Lagarde et Meregnani, de la société Coulon architectes et de M. F...le versement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le maître d'ouvrage a décidé de lever toutes les réserves le 13 juillet 2010 alors que la maîtrise d'oeuvre avait évoqué des points relatifs aux désordres et notamment aux fissures qui étaient donc apparentes à la date de la levée des réserves ;

- les fissures n'étaient pas de nature décennale mais se sont aggravées ;

- la société Lagarde et Meregnani a accepté le support en l'état alors que les fissures et micro-fissures auraient dû être traitées avant l'application de la lasure ;

- la maîtrise d'oeuvre a fait le choix architectural de laisser le béton brut simplement recouvert de lasure ;

- s'il devait être considéré que les désordres n'ont pas été mentionnés à la société Lagarde et Meregnani dans le délai de parfait achèvement, la société Wig devrait également en bénéficier ;

- elle n'était pas chargée de la réalisation des joints extérieurs.

Par un mémoire en défense, enregistré le 2 novembre 2016, le centre hospitalier Ravenel, représenté par MeB..., demande à la cour :

1°) de rejeter la requête ;

2°) de rejeter les conclusions à fin d'appel incident présentées par la société Wig France entreprise, la société Coulon architectes et M.F... ;

3°) à titre subsidiaire de mettre à la charge de la société Coulon, de M. F...et de la société Wig France les condamnations mises à la charge de la société Lagarde et Meregnani ;

4°) à titre très subsidiaire, de mettre à la charge de la société Coulon architectes, de M. F... et de la société Lagarde et Meregnani les condamnations mises à la charge de la société Wig France, et à la charge des sociétés Wig France et Lagarde et Meregnani les condamnations mises à la charge de la société Coulon architectes et de M.F... ;

5°) de mettre à la charge de la société Lagarde et Meregnani le versement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- les conclusions d'appel incident sont irrecevables ;

- les fissures sont dues à une mauvaise exécution des prestations prévues au lot " gros oeuvre " ;

- les coulures sont également imputables à la société Lagarde et Meregnani qui a accepté le béton qui présentait pourtant des fissures ;

- le revêtement mis en place par la société Lagarde et Meregnani n'est pas un revêtement imperméabilisant et souple susceptible d'encaisser les déformations inévitables du support en béton ;

- cette société aurait dû avertir le maître d'ouvrage et le maître d'oeuvre en cas de choix inapproprié ;

- les choix de la maîtrise d'oeuvre étaient inadaptés ;

- les désordres ont été signalés dans le délai de parfait achèvement ;

- à titre subsidiaire, la responsabilité décennale des entreprises et la responsabilité contractuelle du maître d'oeuvre devront être engagées ;

- ni les couvre-joints, ni les joints ne répondent aux exigences d'étanchéité.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le cahier des clauses administratives générales applicable aux marchés publics de travaux approuvé par décret du 21 janvier 1976 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Kohler, premier conseiller,

- les conclusions de M. Laubriat, rapporteur public,

- les observations de MeE..., représentant la société Lagarde et Meregnani,

- les observations de MeB..., représentant le centre hospitalier Ravenel,

- les observations de MeC..., représentant la société Coulon architectes et M.F...,

- et les observations de MeD..., représentant la société Wig France.

Une note en délibéré présentée pour le centre hospitalier Ravenel a été enregistrée le 30 mars 2017.

1. Considérant que le centre hospitalier Ravenel a fait construire une maison d'accueil spécialisée à Mattaincourt ; que la maîtrise d'oeuvre de l'opération a été confiée à un groupement d'entreprises constitué de la société Coulon architectes, de M.F..., de la société Batiserf (BET Structure) et de la société A...(BET Fluides et électricité) ; que le lot n°2 " gros oeuvre " a été confié à la société Carpentier construction et le lot n°12 " peinture intérieure - extérieure - nettoyage de finition " à la société Lagarde et Meregnani ; que des désordres étant apparus, le centre hospitalier a demandé au tribunal administratif de Nancy de condamner les constructeurs à l'indemniser des conséquences de ces désordres ; que la société Lagarde et Meregnani relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Nancy l'a condamnée, en son article 2, au titre des fissures en façades et, en son article 3, solidairement avec la société Wig France, venant aux droits de la société Carpentier construction, et avec la société Coulon architectes et M.F..., au titre des désordres affectant les joints extérieurs ;

Sur les fissures et coulures :

2. Considérant que le tribunal administratif a, par le jugement attaqué, condamné, d'une part, la société Wig France et, d'autre part, la société Lagarde et Meregnani à réparer, sur le fondement de la garantie de parfait achèvement, les conséquences des fissures et coulures verdâtres présentes sur l'ensemble des façades du bâtiment ; que le centre hospitalier Ravenel invoquait également, en première instance, le fondement de la garantie décennale et le manquement du maître d'oeuvre à son obligation de conseil lors des opérations de réception ;

En ce qui concerne les conclusions d'appel provoqué présentées par la société Wig France :

3. Considérant que les conclusions de la société Wig France tendant à être déchargée de toute condamnation prononcée à son encontre au titre des fissures au profit du centre hospitalier Ravenel par le jugement attaqué ont été présentées après l'expiration du délai de recours contentieux ; que s'agissant des fissures, le tribunal n'a pas prononcé de condamnation solidaire mais a condamné, d'une part, la société Wig France et, d'autre part, la société Lagarde et Meregnani à indemniser le centre hospitalier des conséquences de ces désordres, chacune à hauteur de sa responsabilité dans la survenance du dommage ; que, dans ces conditions, la situation de la société Wig France ne pourrait pas être aggravée par l'appel principal de la société Lagarde et Meregnani ; que, par suite, les conclusions de la société Wig France tendant à l'annulation de la condamnation prononcée à son encontre au titre des fissures ne sont pas recevables ;

En ce qui concerne la garantie de parfait achèvement :

4. Considérant qu'aux termes de l'article 44 du cahier des clauses administratives générales applicable aux marchés de travaux (CCAG) : " Le délai de garantie est, sauf stipulation différente du marché et sauf prolongation décidée comme il est dit au 2 du présent article, d'un an à compter de la date d'effet de la réception, ou de six mois à compter de cette date si le marché ne concerne que des travaux d'entretien ou des terrassements. / Pendant le délai de garantie, indépendamment des obligations qui peuvent résulter pour lui de l'application du 4 de l'article 41, l'entrepreneur est tenu à une obligation dite "obligation de parfait achèvement" au titre de laquelle il doit : a) Exécuter les travaux ou prestations éventuels de finition ou de reprise prévus aux 5 et 6 de l'article 41 ; b) Remédier à tous les désordres signalés par le maître de l'ouvrage ou le maître d'oeuvre, de telle sorte que l'ouvrage soit conforme à l'état où il était lors de la réception ou après correction des imperfections constatées lors de celle-ci ; (...) " ; qu'aux termes de l'article 41 du même cahier " (...) 41.6. Lorsque la réception est assortie de réserves, l'entrepreneur doit remédier aux imperfections et malfaçons correspondantes dans le délai fixé par la personne responsable du marché ou, en l'absence d'un tel délai, trois mois avant l'expiration du délai de garantie défini au 1 de l'article 44. (...) ".

5. Considérant qu'il résulte de ces stipulations que la garantie de parfait achèvement s'étend à la reprise, d'une part, des désordres ayant fait l'objet de réserves dans le procès-verbal de réception, d'autre part, de ceux qui apparaissent et sont signalés dans l'année suivant la date de réception ; que, dans le cas où la réception a été prononcée avec réserves et que celles-ci sont levées, l'effet rétroactif de la levée des réserves a nécessairement pour conséquence de faire regarder la réception comme ayant été donnée sans réserves, ce qui empêche alors le maître d'ouvrage de rechercher la responsabilité de l'entrepreneur sur le terrain de la garantie de parfait achèvement ;

6. Considérant qu'il résulte de l'instruction que des fissures sont apparues sur l'ensemble des façades en cours de chantier et ont été mentionnées dans les comptes-rendus de chantier notamment des 5 octobre 2009, 19 octobre 2009 et 14 décembre 2009 ; que le procès-verbal des opérations préalables à la réception établi le 22 mars 2010 mentionne, à la rubrique " prestations non conformes " : " Reprise des fissures sur voile [béton armé] de la façade est " ; que le procès-verbal de levée des réserves établi par le maître d'oeuvre le 26 avril 2010 et signé le même jour par l'entreprise mentionne, au titre des imperfections et malfaçons non corrigées, des " fissures sur façades " ; que, par une décision du 24 août 2010, le maître d'ouvrage a prononcé la réception des travaux du lot n°2 sans réserve avec effet rétroactif au 13 juillet 2010 ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que, contrairement à ce que soutient le centre hospitalier, ces réserves n'auraient concerné que des micro-fissures sans lien avec les désordres en litige ; que, dans ces conditions, dès lors que les réserves relatives aux fissures apparues antérieurement à la réception ont été levées, le centre hospitalier ne pouvait pas rechercher la responsabilité des entrepreneurs sur le terrain de la garantie de parfait achèvement ; que la société Lagarde et Meregnani est ainsi fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a prononcé sa condamnation sur ce fondement ;

En ce qui concerne la garantie décennale :

7. Considérant qu'ainsi qu'il vient d'être dit, les désordres étaient apparents à la date de la réception ; qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport d'expertise que les fissures ne sont pas infiltrantes ; que si l'expert indique qu'elles doivent être traitées pour éviter une carbonatation du béton qui pourrait favoriser une corrosion des armatures métalliques qu'il contient, le maître d'ouvrage ne produit aucun élément de nature à établir que cette évolution, compte tenu de l'ampleur actuelle des désordres, est certaine ; que, dans ces conditions, ces désordres ne sont pas de nature à engager la responsabilité décennale des constructeurs ;

8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société Lagarde et Meregnani est fondée à demander l'annulation du jugement attaqué, en tant que, par ce jugement le tribunal administratif l'a condamnée à indemniser le centre hospitalier Ravenel au titre des fissures en façade ;

En ce qui concerne les conclusions d'appel incident présentées par la société Coulon architectes et M.F... :

9. Considérant que, par le jugement attaqué, et en dépit de l'erreur matérielle affectant l'article 2 de ce jugement, le tribunal administratif a condamné la société Coulon architectes et M. F... à garantir la société Lagarde et Meregnani à hauteur de 50% de la condamnation prononcée à son encontre au titre des fissures ;

10. Considérant que, compte tenu de l'annulation de la condamnation prononcée à l'encontre de la société Lagarde et Meregnani au titre des fissures, il y a lieu de faire droit aux conclusions d'appel incident présentées par la société Coulon architectes et M. F...et tendant à l'annulation de leur condamnation à garantir cette société ;

En ce qui concerne les conclusions d'appel provoqué présentées par le centre hospitalier Ravenel :

11. Considérant que l'annulation de la condamnation prononcée à l'encontre de la société Lagarde et Meregnani a pour effet d'aggraver la situation du centre hospitalier Ravenel qui perd le bénéfice de la réparation d'une partie des conséquences des fissures ; que le centre hospitalier est par suite recevable à demander, à titre subsidiaire, la condamnation des entrepreneurs et du maître d'oeuvre sur le fondement de la garantie décennale, ou celle du maître d'oeuvre sur le fondement du manquement à l'obligation de conseil lors des opérations de réception, à réparer ces désordres ;

12. Considérant, en premier lieu, qu'ainsi qu'il a été dit au point 7, les fissures ne constituent pas des désordres de nature à engager la responsabilité décennale des constructeurs ; que les conclusions du centre hospitalier tendant à la condamnation de la société Wig France, de la société Coulon architectes et de M. F...sur ce fondement doivent dès lors être rejetées ;

13. Considérant, en deuxième lieu, que la responsabilité des maîtres d'oeuvre pour manquement à leur devoir de conseil peut être engagée, dès lors qu'ils se sont abstenus d'appeler l'attention du maître d'ouvrage sur des désordres affectant l'ouvrage et dont ils pouvaient avoir connaissance, en sorte que la personne publique soit mise à même de ne pas réceptionner l'ouvrage ou d'assortir la réception de réserves ; qu'il importe peu, à cet égard, que les vices en cause aient ou non présenté un caractère apparent lors de la réception des travaux, dès lors que le maître d'oeuvre en avait eu connaissance en cours de chantier ;

14. Considérant qu'il résulte de l'instruction que le maître d'oeuvre a signalé des fissures dans des comptes-rendus de chantier ; qu'il a fait figurer ces fissures dans le procès-verbal des opérations préalables à la réception du 22 mars 2010, dans sa proposition au maître d'ouvrage de prononcer la réception avec réserves du 31 mars 2010 et sur le procès-verbal de levée des réserves du 26 avril 2010 ; que la réception a été prononcée sans réserve le 24 août 2010 avec effet au 13 juillet 2010 ; que la société Coulon architectes et M. F...soutiennent sans être contredits que le maître d'ouvrage a décidé seul de la levée des réserves ; que si le maître d'ouvrage soutient qu'il n'avait pas connaissance de ces désordres et que le maître d'oeuvre aurait dû appeler son attention sur les risques tenant à la levée des réserves, il résulte toutefois de l'instruction qu'il a été destinataire des comptes-rendus de chantier faisant état de ces fissures et que son représentant était présent lors des opérations préalables à la réception ; que, dans ces conditions, et alors que le maître d'oeuvre avait fait toutes diligences pour que des réserves soient prononcées relativement à la présence de fissures en façades, le centre hospitalier Ravenel ne produit aucune explication à la levée des réserves en juillet 2010 alors que les fissures n'avaient, semble-t-il, pas été réparées ; que, par suite, le manquement du maître d'oeuvre à son obligation de conseil lors des opérations de réception n'est pas établi ; que les conclusions du centre hospitalier tendant à la condamnation de la société Coulon architectes et de M. F...sur ce fondement doivent dès lors être rejetées ;

Sur les désordres affectant les joints de dilatation :

15. Considérant que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a condamné solidairement, sur le fondement de la garantie décennale, la société Wig France, la société Lagarde et Meregnani, la société Coulon architectes et M. F...à indemniser le centre hospitalier de Ravenel des conséquences des désordres affectant les joints de dilatation extérieurs ; qu'il a également condamné les sociétés Wig France et Coulon architectes et M. F...à garantir la société Lagarde et Meregnani à hauteur de 40% chacun, les sociétés Wig France et Lagarde et Meregnani à garantir la société Coulon architectes et M. F...à hauteur respectivement de 40% et de 20% et la société Coulon et M. F...à garantir la société Wig France à hauteur de 40% ;

En ce qui concerne l'appel principal :

16. Considérant que les joints de dilatation en façade ne sont étanches ni à l'air ni à l'eau, ce qui a notamment des conséquences sur le fonctionnement du chauffage ; que de tels désordres, qui ne permettent pas d'assurer l'étanchéité du bâtiment, destiné à accueillir une maison d'accueil spécialisée, rendent l'ouvrage impropre à sa destination ;

17. Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport d'expert, que le cahier des clauses techniques particulières du lot " gros oeuvre " ne prévoyait pas d'étanchéité à l'air ni aucun traitement d'étanchéité vertical et que la méthode d'accroche du couvre-joint à l'intérieur du joint de dilatation était une demande de la maîtrise d'oeuvre ; que la société Coulon architectes a adressé à la société Carpentier un courriel le 11 septembre 2009 lui indiquant qu'elle pouvait supprimer les joints de dilatation extérieurs ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que cette prestation ait alors été contractuellement confiée à une autre entreprise ; que, dans ces conditions, les désordres affectant les joints de dilatation doivent être regardés comme exclusivement imputables à un défaut de conception de l'ouvrage et non à un défaut dans l'exécution des travaux ; que, par suite, la société Lagarde et Meregnani est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy l'a condamnée à indemniser le centre hospitalier Ravenel au titre de ces désordres ;

En ce qui concerne les conclusions d'appel provoqué :

18. Considérant que l'annulation de la condamnation prononcée à l'encontre de la société Lagarde et Meregnani a pour effet d'aggraver la situation des sociétés Wig France et Coulon architectes et de M.F..., ainsi que celle du centre hospitalier Ravenel ; que les conclusions de la société Wig France et de la société Coulon architectes et de M. F...tendant à l'annulation des condamnations prononcées à leur encontre au titre des désordres affectant les joints de dilatation sont donc recevables, ainsi que les conclusions du centre hospitalier tendant à ce que les condamnations prononcées à leur encontre soient confirmées ;

19. Considérant qu'ainsi qu'il a été dit, les désordres sont exclusivement imputables à un défaut de conception de l'ouvrage et par suite à la société Coulon architectes et à M.F... ; que la société Wig France est dès lors fondée à demander l'annulation de sa condamnation à indemniser le centre hospitalier des conséquences de ces désordres ; qu'en revanche, la condamnation prononcée à l'encontre de la société Coulon architectes et de M. F...à ce titre doit être confirmée ;

20. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées par la société Wig France et par le centre hospitalier Ravenel sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D É C I D E :

Article 1er : L'article 2 du jugement n°1300824 du tribunal administratif de Nancy du 8 décembre 2015 est annulé.

Article 2 : Les sociétés Lagarde et Meregnani et Wig France sont déchargées de la condamnation prononcée à leur encontre à l'article 3 du jugement du 8 décembre 2015.

Article 3 : L'article 3 du jugement du 8 décembre 2015 est réformé en ce qu'il a de contraire à l'article 2 du présent arrêt.

Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la société Lagarde et Meregnani, au centre hospitalier Ravenel, à la société Wig France, à la Société Coulon architectes et à M. F....

2

N° 16NC00207


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16NC00207
Date de la décision : 18/04/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-06-01 Marchés et contrats administratifs. Rapports entre l'architecte, l'entrepreneur et le maître de l'ouvrage. Responsabilité des constructeurs à l'égard du maître de l'ouvrage.


Composition du Tribunal
Président : M. MARINO
Rapporteur ?: Mme Julie KOHLER
Rapporteur public ?: M. LAUBRIAT
Avocat(s) : VOILQUE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/05/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2017-04-18;16nc00207 ?
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