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28/02/2017 | FRANCE | N°16NC00693

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre - formation à 3, 28 février 2017, 16NC00693


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... B...a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 26 octobre 2015 par lequel le préfet du Haut-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être renvoyée.

Par un jugement n° 1506766 du 9 mars 2016, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistr

e le 19 avril 2016, Mme B..., représentée par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugemen...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... B...a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 26 octobre 2015 par lequel le préfet du Haut-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être renvoyée.

Par un jugement n° 1506766 du 9 mars 2016, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 19 avril 2016, Mme B..., représentée par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 9 mars 2016 ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, les décisions du 26 octobre 2015 portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français prises à son encontre par le préfet du Haut-Rhin ;

3°) d'enjoindre au préfet du Haut-Rhin de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation administrative dans le délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer pendant cet examen une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à son conseil sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient :

S'agissant de la décision de refus de titre de séjour, que :

- cette décision méconnaît les dispositions des articles L. 122-1 et L. 121-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français, que :

- cette décision méconnaît les dispositions précises et inconditionnelles de l'article 28 de la directive 2004/38/CE du 29 avril 2004 ;

- elle méconnaît les dispositions du 4° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 511-3-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'elle ne peut voyager sans risque.

Par un mémoire en défense, enregistré le 11 août 2016, le préfet du Haut-Rhin conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 122-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est inopérant ;

- les autres moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.

Mme B...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 26 mai 2016.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la directive 2004/38/CE du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Michel, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que MmeB..., ressortissante bulgare née le 11 avril 1955, est entrée en France pour la dernière fois au mois d'avril 2002 ; que par un arrêté du 26 octobre 2015, le préfet du Haut-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être renvoyée ; que Mme B... relève appel du jugement du 9 mars 2016 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sur la décision de refus de titre de séjour :

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 121-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, tout citoyen de l'Union européenne, tout ressortissant d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse a le droit de séjourner en France pour une durée supérieure à trois mois s'il satisfait à l'une des conditions suivantes : / 1° S'il exerce une activité professionnelle en France ; / 2° S'il dispose pour lui et pour les membres de sa famille tels que visés au 4° de ressources suffisantes afin de ne pas devenir une charge pour le système d'assistance sociale, ainsi que d'une assurance maladie (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 122-1 du même code : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, le ressortissant visé à l'article L. 121-1 qui a résidé de manière légale et ininterrompue en France pendant les cinq années précédentes acquiert un droit au séjour permanent sur l'ensemble du territoire français " ; qu'aux termes de l'article R. 121-4 du même code dans sa rédaction alors applicable : " Les ressortissants qui remplissent les conditions mentionnées à l'article L. 121-1 doivent être munis de l'un des deux documents prévus pour l'entrée sur le territoire français par l'article R. 121-1. / L'assurance maladie mentionnée à l'article L. 121-1 doit couvrir les prestations prévues aux articles L. 321-1 et L. 331-2 du code de la sécurité sociale. / Lorsqu'il est exigé, le caractère suffisant des ressources est apprécié en tenant compte de la situation personnelle de l'intéressé. En aucun cas, le montant exigé ne peut excéder le montant forfaitaire du revenu de solidarité active mentionné au 2° de l'article L. 262-2 du code de l'action sociale et des familles ou, si l'intéressé remplit les conditions d'âge pour l'obtenir, au montant de l'allocation de solidarité aux personnes âgées mentionnée à l'article L. 815-1 du code de la sécurité sociale. / La charge pour le système d'assistance sociale que peut constituer le ressortissant mentionné à l'article L. 121-1 est évaluée en prenant notamment en compte le montant des prestations sociales non contributives qui lui ont été accordées, la durée de ses difficultés et de son séjour " ; qu'aux termes de l'article L. 121-4 de ce code : " Tout citoyen de l'Union européenne, tout ressortissant d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse ou les membres de sa famille qui ne peuvent justifier d'un droit au séjour en application de l'article L. 121-1 ou de l'article L. 121-3 ou dont la présence constitue une menace à l'ordre public peut faire l'objet, selon le cas, d'une décision de refus de séjour, d'un refus de délivrance ou de renouvellement d'une carte de séjour ou d'un retrait de celle-ci ainsi que d'une mesure d'éloignement prévue au livre V " ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme B...ne justifie d'aucune activité professionnelle en France ; que les pièces produites par la requérante et notamment les extraits de mouvement de comptes bancaires n'établissent pas qu'elle disposerait de ressources suffisantes afin de ne pas devenir une charge pour le système d'assistance sociale au sens des dispositions susmentionnées de l'article L. 121-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, dès lors, Mme B...ne remplit pas les conditions posées par ces dispositions pour bénéficier d'un droit au séjour en France pour une durée supérieure à trois mois ; que, par voie de conséquence, elle ne peut davantage soutenir avoir résidé de manière légale en France au cours des cinq dernières années et avoir acquis un droit au séjour permanent sur l'ensemble du territoire français au titre des dispositions susmentionnées de l'article L. 122-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

4. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme B...est entrée en France en 2002 à l'âge de quarante-sept ans, selon ses déclarations ; qu'elle ne justifie pas depuis son entrée sur le territoire français d'élément particulier d'intégration et ne maîtrise pas la langue française alors qu'elle n'établit pas, ainsi qu'elle le soutient, ne pas pouvoir avoir accès à des cours d'apprentissage du français ; que, par ailleurs, si Mme B...fait valoir qu'elle est suivie médicalement en France, elle n'établit pas l'absence d'un traitement approprié à son état de santé en Bulgarie ; qu'en outre, alors qu'il est constant qu'elle n'a pas d'attache familiale en France, Mme B... ne justifie pas, quand bien même ses parents seraient décédés, être dépourvue de toute attache en Bulgarie où elle a vécu la majeure partie de sa vie ; que, par suite, dans les circonstances de l'espèce, la décision de refus de séjour n'a pas porté au droit de Mme B...au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise ; que, dès lors, le moyen tiré de l'inexacte application des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ; que pour les mêmes motifs, doit être écarté le moyen tiré de ce que la décision en litige serait entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

6. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 28 de la directive 2004/38/CE du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 : " 1. Avant de prendre une décision d'éloignement du territoire pour des raisons d'ordre public ou de sécurité publique, l'État membre d'accueil tient compte notamment de la durée du séjour de l'intéressé sur son territoire, de son âge, de son état de santé, de sa situation familiale et économique, de son intégration sociale et culturelle dans l'Etat membre d'accueil et de l'intensité de ses liens avec son pays d'origine. / 2. L'Etat membre d'accueil ne peut pas prendre une décision d'éloignement du territoire à l'encontre d'un citoyen de l'Union ou des membres de sa famille, quelle que soit leur nationalité, qui ont acquis un droit de séjour permanent sur son territoire sauf pour des raisons impérieuses d'ordre public ou de sécurité publique. / 3. Une décision d'éloignement ne peut être prise à l'encontre des citoyens de l'Union, quelle que soit leur nationalité, à moins que la décision ne se fonde sur des motifs graves de sécurité publique définis par les États membres, si ceux-ci: / a) ont séjourné dans l'Etat membre d'accueil pendant les dix années précédentes (...) " ; que ces dispositions, qui figurent au chapitre VI de la directive, relatif à la limitation du droit d'entrée et du droit de séjour pour des raisons d'ordre public, de sécurité publique et de santé publique, ne s'appliquent qu'à l'éloignement forcé d'un citoyen de l'Union Européenne ou d'un membre de sa famille ordonné pour des raisons d'ordre public, de sécurité publique ou de santé publique ;

7. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et notamment des termes de la décision en litige que l'éloignement de Mme B...est fondé sur le motif tiré de ce qu'elle ne remplit pas les conditions du 2° de l'article L. 121-1 susmentionné du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et non sur des raisons d'ordre public, de sécurité publique ou de santé publique ; que, par suite, et alors d'ailleurs que les dispositions de l'article 28 de la directive n° 2004/38/CE du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 ont été transposées en droit interne par la loi n° 2006-911 du 24 juillet 2006 relative à l'immigration et à l'intégration et le décret n° 2007-371 du 21 mars 2007, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article 28 de la directive n° 2004/38/CE du 29 avril 2004 est inopérant et ne peut donc qu'être écarté ;

8. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-3-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative compétente peut, par décision motivée, obliger un ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse, ou un membre de sa famille à quitter le territoire français lorsqu'elle constate : / 1° Qu'il ne justifie plus d'aucun droit au séjour tel que prévu par les articles L. 121-1, L. 121-3 ou L. 121-4-1 ; / (...) L'autorité administrative compétente tient compte de l'ensemble des circonstances relatives à sa situation, notamment la durée du séjour de l'intéressé en France, son âge, son état de santé, sa situation familiale et économique, son intégration sociale et culturelle en France, et de l'intensité de ses liens avec son pays d'origine " ;

9. Considérant que pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 5 et alors que le certificat médical du 17 novembre 2015 produit par la requérante n'est pas suffisamment précis pour justifier qu'elle ne pourrait pas voyager accompagnée d'une tierce personne, le moyen tiré de l'inexacte application des dispositions susmentionnés de l'article L. 511-3-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté ;

10. Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction alors applicable : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) 4° L'étranger qui réside régulièrement en France depuis plus de dix ans, sauf s'il a été, pendant toute cette période, titulaire d'une carte de séjour temporaire portant la mention " étudiant " " ;

11. Considérant ainsi qu'il a été dit au point 3, Mme B...ne justifie pas avoir résidé régulièrement sur le territoire français au regard des dispositions susmentionnées des articles L. 121-1 et L. 122-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par suite, et en tout état de cause, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions susmentionnées du 4° de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté ;

12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... B...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Haut-Rhin.

4

N° 16NC00693


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16NC00693
Date de la décision : 28/02/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. MARINO
Rapporteur ?: M. Alexis MICHEL
Rapporteur public ?: M. LAUBRIAT
Avocat(s) : BOHNER

Origine de la décision
Date de l'import : 14/03/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2017-02-28;16nc00693 ?
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