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09/02/2017 | FRANCE | N°16NC00397

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre - formation à 3, 09 février 2017, 16NC00397


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SARL Salaisons Muller-Weber a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler les décisions par lesquelles l'office de tourisme et des congrès de Colmar a refusé de lui accorder des emplacements au titre des marchés de Noël des années 2012, 2013 et 2014 et de condamner ce dernier à lui verser la somme de 300 000 euros majorée des intérêts au taux légal.

Par un jugement n° 1403619 du 20 janvier 2016, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté la demande de la SARL Salaisons Mu

ller-Weber comme portée devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaît...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SARL Salaisons Muller-Weber a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler les décisions par lesquelles l'office de tourisme et des congrès de Colmar a refusé de lui accorder des emplacements au titre des marchés de Noël des années 2012, 2013 et 2014 et de condamner ce dernier à lui verser la somme de 300 000 euros majorée des intérêts au taux légal.

Par un jugement n° 1403619 du 20 janvier 2016, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté la demande de la SARL Salaisons Muller-Weber comme portée devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 1er mars 2016 et des mémoires enregistrés le 27 mai 2016, la SARL Salaisons Muller-Weber, représentée par la Selas Cayol-Cahen et associés, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1403619 du 20 janvier 2016 du tribunal administratif de Strasbourg ;

2°) d'annuler les décisions par lesquelles l'office de tourisme et des congrès de Colmar a refusé de lui accorder des emplacements au titre des marchés de Noël des années 2012, 2013 et 2014 ;

3°) de condamner l'office de tourisme et des congrès de Colmar à lui verser la somme de 300 000 euros majorée des intérêts au taux légal ;

4°) d'enjoindre à l'office de tourisme et des congrès de Colmar, sous astreinte, de lui accorder les deux emplacements qu'elle occupait lors des marchés de Noël à Colmar à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

5°) de mettre à la charge de la commune de Colmar et de l'office de tourisme et des congrès de Colmar une somme de 10 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La SARL Salaisons Muller-Weber soutient que :

- sa requête est recevable ;

- le tribunal a estimé à tort que la juridiction administrative était incompétente pour connaître de sa demande ;

- l'office de tourisme et des congrès de Colmar a commis une faute de nature à engager sa responsabilité en ne lui attribuant pas les places demandées dès lors que les décisions étaient insuffisamment motivées, qu'elles indiquaient à tort qu'elles étaient " sans appel " et étaient entachées de détournement de pouvoir ;

- ses préjudices financiers et moraux doivent être réparés en condamnant l'office de tourisme et des congrès de Colmar à lui verser les sommes de 255 000 et 45 000 euros.

Par un mémoire en défense enregistré le 23 mai 2016, l'office de tourisme et des congrès de Colmar, représenté par Me Cahnet associés, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 100 000 euros soit mise à la charge de la SARL Salaisons Muller-Weber à titre de dommages et intérêts et une somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens de la SARL Salaisons Muller-Weber ne sont pas fondés et que sa demande de première instance était en tout état de cause irrecevable et mal fondée.

Par un mémoire en défense enregistré le 17 juin 2016, la commune de Colmar, représentée par la Selarl D4 Avocats Associés, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 4 000 euros soit mise à la charge de la SARL Salaisons Muller-Weber au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La commune soutient que les moyens soulevés par la SARL Salaisons Muller-Weber ne sont pas fondés.

Un mémoire en réponse au moyen relevé d'office a été enregistré le 13 juillet 2016 pour la SARL Salaisons Muller-Weber.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code du tourisme ;

- le code général de la propriété des personnes publiques ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Richard, premier conseiller,

- les conclusions de M. Favret, rapporteur public,

- et les observations de Me Cahenpour la SARL Salaisons Muller-Weber, ainsi que celle de Me Cahnpour l'office de tourisme et des congrès de Colmar.

Considérant ce qui suit :

1. La société Salaisons Muller-Weber exerce une activité de vente de produits alimentaires sur les marchés. Depuis l'année 2001, elle s'est vu octroyer un ou plusieurs emplacements sur le marché de Noël de Colmar. L'office de tourisme et des congrès de Colmar a rejeté ses demandes de participation aux éditions 2012, 2013 et 2014 du marché de Noël de Colmar. La SARL Salaisons Muller-Weber a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler ces décisions et la condamnation de l'office de tourisme à lui verser une somme de 300 000 euros en réparation des préjudices subis en raison de ces décisions, qu'elle estime illégales. La société requérante relève appel du jugement du 20 janvier 2016 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande comme portée devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître.

Sur la régularité du jugement :

2. La SARL Salaisons Muller-Weber estime que c'est à tort que le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté ses demandes comme portées devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître dès lors qu'il existe des liens étroits entre la commune de Colmar et l'office de tourisme et des congrès de Colmar, le second s'étant en outre vu confier une mission de service public par la première.

3. Il ressort des pièces du dossier que l'office de tourisme et des congrès de Colmar est une association de droit local autorisée par la commune de Colmar, au titre des années 2012 à 2014, à occuper plusieurs places du domaine public communal pour y implanter des chalets qu'elle loue, dans le cadre du marché de Noël, à des marchands et exposants, à l'issue d'une sélection des candidatures opérée par un comité de sélection constitué par ses soins.

4. Il ressort des pièces du dossier que l'office de tourisme et des congrès de Colmar est une association dont l'objet statutaire excède le seul périmètre de la commune de Colmar, laquelle ne désigne, au vu des statuts de l'association, qu'un tiers des membres du conseil d'administration. Il ne ressort pas des pièces du dossier que la commune de Colmar procurerait à l'association l'essentiel de ses ressources et exercerait un contrôle sur les orientations de l'organisme. Dans ces conditions et alors même que ses statuts prévoient que le président du bureau est désigné sur proposition de la commune de Colmar, l'office de tourisme et des congrès de Colmar ne peut être regardé comme agissant pour le compte de la commune de Colmar.

5. Par ailleurs et sous réserve de l'exercice des pouvoirs traditionnellement conférés à l'autorité de police administrative et au gestionnaire du domaine public, la commune n'exerce pas de contrôle sur l'organisation et les modalités de fonctionnement du marché de Noël qui se tient sur son territoire. Il ne ressort pas des pièces du dossier que la commune ait fait usage des dispositions de l'article L. 133-1 du code du tourisme qui prévoient que le conseil municipal peut charger l'office du tourisme de l'organisation de fêtes locales. Ainsi, alors même que la manifestation traditionnelle du marché de Noël, qui contribue à l'animation touristique de la commune de Colmar, revêt un caractère d'intérêt général, la commune de Colmar ne peut être regardée en l'espèce comme ayant organisé une activité de service public et confié sa gestion à l'office de tourisme et des congrès de Colmar malgré les autorisations temporaires d'occupation du domaine public et l'aide matérielle et financière accordées chaque année à l'association pour permettre la tenue de cette manifestation.

6. Aux termes de l'article L. 2331-1 du code général de la propriété des personnes publiques : " Sont portés devant la juridiction administrative les litiges relatifs : / 1° Aux autorisations ou contrats comportant occupation du domaine public, quelle que soit leur forme ou leur dénomination, accordées ou conclus par les personnes publiques ou leurs concessionnaires ; (...) ".

7. Si l'office de tourisme et des congrès de Colmar a été autorisé, ainsi qu'il a été dit aux points 3 à 5, par la commune de Colmar à occuper plusieurs places du domaine public communal pour y implanter des chalets qu'il loue, dans le cadre du marché de Noël, à des marchands et exposants, sans que ceux-ci bénéficient d'autorisations d'occupation du domaine public, il n'est pas délégataire de service public et ne peut non plus être regardé comme concessionnaire de la personne publique au sens et pour l'application des dispositions de l'article L.2331-1 du code général de la propriété des personnes publiques.

8. Enfin, si les litiges qui opposent des personnes privées portant sur des décisions prises par l'une de celles-ci en vertu de prérogatives de puissance publique sont susceptibles de relever de la compétence de la juridiction administrative, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'organisation du marché de Noël par l'office de tourisme et les décisions prises dans ce cadre, telles que les décisions litigieuses opposées à la SARL Salaisons Muller-Weber, ont donné lieu à l'exercice par l'office de prérogatives de puissance publique.

9. En conclusion de tout ce qui précède, la SARL Salaisons Muller-Weber n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement contesté, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande comme portée devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître. Il s'ensuit que la cour n'est pas non plus compétente pour connaître des conclusions reconventionnelles tendant au versement de dommages et intérêts présentées par l'office de tourisme et des congrès de Colmar à l'encontre de la SARL Salaisons Muller-Weber.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

10. Le présent arrêt n'implique aucune mesure d'exécution. Les conclusions à fin d'injonction de la SARL Salaisons Muller-Weber ne peuvent ainsi qu'être rejetées.

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'office de tourisme et des congrès de Colmar qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que la SARL Salaisons Muller-Weber demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

12. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de l'office de tourisme et des congrès de Colmar et de la commune de Colmar présentées sur le fondement de ces mêmes dispositions.

Par ces motifs,

DECIDE :

Article 1er : La requête de la SARL Salaisons Muller-Weber est rejetée.

Article 2 : Les conclusions indemnitaires de l'office de tourisme et des congrès de Colmar sont rejetées.

Article 3 : Les conclusions de l'office de tourisme et des congrès de Colmar et de la commune de Colmar tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Salaisons Muller-Weber, à l'office de tourisme et des congrès de Colmar et à la commune de Colmar.

2

16NC00397


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

17-03-02 Compétence. Répartition des compétences entre les deux ordres de juridiction. Compétence déterminée par un critère jurisprudentiel.


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. MESLAY
Rapporteur ?: M. Michel RICHARD
Rapporteur public ?: M. FAVRET
Avocat(s) : CAYOL CAHEN et ASSOCIES

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Date de la décision : 09/02/2017
Date de l'import : 01/08/2017

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 16NC00397
Numéro NOR : CETATEXT000034061964 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2017-02-09;16nc00397 ?
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