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02/02/2017 | FRANCE | N°16NC01379

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre - formation à 3, 02 février 2017, 16NC01379


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler l'arrêté du 6 mars 2016 par lequel le préfet du Doubs lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1600401 du 31 mai 2016, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 8 mars 2016, M.B..., représenté par MeC..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement

du 31 mai 2016 du tribunal administratif de Besançon ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet du Doubs du 6 m...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler l'arrêté du 6 mars 2016 par lequel le préfet du Doubs lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1600401 du 31 mai 2016, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 8 mars 2016, M.B..., représenté par MeC..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 31 mai 2016 du tribunal administratif de Besançon ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet du Doubs du 6 mars 2016 ;

3°) d'enjoindre au préfet du Doubs de lui délivrer un titre de séjour temporaire dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, à défaut de réexaminer sa situation dans le même délai ;

4°) de mettre à la charge de l'État une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- il n'a pas été mis en mesure de faire valoir ses observations avant l'édiction de la décision attaquée, notamment son embauche en contrat de travail à durée indéterminée en tant qu'ingénieur, sa présence en France depuis onze ans et sa relation avec sa compagne de nationalité française depuis trois ans ; le préfet n'a dès lors pu procéder à un examen de sa situation personnelle ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales pour les mêmes motifs ;

Sur la décision fixant le pays de renvoi :

- cette décision doit être annulée en conséquence de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

Par un mémoire en défense enregistré le 21 octobre 2016, le préfet du Doubs conclut au rejet de la requête ;

Il fait valoir qu'aucun des moyens soulevés n'est fondé ;

Vu :

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 dont les dispositions ont été notamment reprises par l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Didiot.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

1. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

2. Considérant que M.B..., ressortissant togolais, est entré en France sous couvert d'un passeport revêtu d'un visa en 2005 pour poursuivre ses études ; qu'après l'obtention de son baccalauréat technologique en spécialité " génie civil " avec la mention bien en 2007, il a intégré l'école supérieure d'ingénieurs des travaux de la construction de Metz, et a obtenu le 1er juillet 2014 son diplôme d'ingénieur ; qu'il a à cet effet bénéficié de sept cartes de séjours temporaires régulièrement renouvelées jusqu'en 2012, puis de récépissés de demande de renouvellement de titre dont le dernier a expiré le 31 janvier 2014, sans que l'intéressé ne poursuive ses démarches de régularisation de sa situation administrative ; qu'il est constant qu'il a été embauché en contrat de travail à durée indéterminée à compter du 13 octobre 2014 au centre hospitalier de Haguenau (Bas-Rhin) en qualité d'ingénieur hospitalier contractuel ; que son maintien irrégulier sur le territoire a été constaté au moment de son interpellation le 6 mars 2016 ; que si son employeur, prévenu de la situation, a immédiatement mis fin à son contrat de travail par décision du 7 mars 2016, il ressort des pièces du dossier qu'il a formé dès le 11 mars suivant une demande d'autorisation de travail afin de pouvoir embaucher M. B...par le biais d'un nouveau contrat ; qu'en outre, le requérant se prévaut de sa relation depuis 2013 avec sa compagne de nationalité française, rencontrée pendant ses études ; que si le couple n'a résidé ensemble que pendant une courte période, les intéressés s'en justifient compte tenu du déroulé de leurs études respectives d'une part, puis de motifs professionnels d'autre part, sa compagne ayant trouvé un premier emploi en qualité d'ingénieur-chimiste à Alès à la fin de l'année 2015 ; que

M. B...produit de nombreuses factures téléphoniques attestant la fréquence et de la régularité de leurs échanges, ainsi que plusieurs pièces justificatives des trajets effectués pour voir sa compagne, attestant par là même de l'intensité et de la stabilité de leur relation ; qu'il s'ensuit que, dans les circonstances particulières de l'espèce, le manque de diligence apporté par M. B...à la régularisation de son séjour en France, pour regrettable qu'il soit, ne saurait à lui seul, au vu des éléments susmentionnés de sa situation privée et familiale, suffire à justifier la mesure d'éloignement en cause ; qu'il est dès lors fondé à soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire français a méconnu les dispositions précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que par suite, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, la décision portant obligation de quitter le territoire sans délai doit être annulée, ainsi que, par voie de conséquence, la décision fixant le pays de destination ;

3. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande en annulation ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

4. Considérant qu'il y a lieu, eu égard aux motifs de l'annulation susmentionnée, d'enjoindre au préfet du Doubs de réexaminer la situation de M. B...dans un délai d'un mois suivant la notification du présent arrêt ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

5. Considérant qu'il y a lieu, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'Etat, une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par l'intéressé et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement n°1600401 du 31 mai 2016 du tribunal administratif de Besançon est annulé.

Article 2 : L'arrêté du 6 mars 2016 par lequel le préfet du Doubs a fait obligation à M. B...de quitter le territoire français sans délai et a fixé le pays de destination est annulé.

Article 3 : Il est enjoint au préfet du Doubs de réexaminer la situation de M. B...dans un délai d'un mois suivant la notification du présent arrêt.

Article 4 : L'Etat versera à M. B...une somme de 1 000 euros (mille euros) en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...et au ministre de l'intérieur.

Une copie du présent arrêt sera adressée au préfet du Doubs.

2

N°16NC01379


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16NC01379
Date de la décision : 02/02/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Analyses

335-03-02 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière. Légalité interne.


Composition du Tribunal
Président : M. MARTINEZ
Rapporteur ?: Mme Sandra DIDIOT
Rapporteur public ?: Mme PETON
Avocat(s) : SOCIETE D'AVOCATS FIDAL BESANCON

Origine de la décision
Date de l'import : 21/02/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2017-02-02;16nc01379 ?
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