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26/01/2017 | FRANCE | N°16NC01511

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 26 janvier 2017, 16NC01511


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...A...a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler l'arrêté du 14 août 2015 par lequel le préfet du Doubs a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné à l'expiration de ce délai.

Par un jugement n° 1501779 du 2 février 2016, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une

requête et un mémoire, enregistrés les 17 juillet et 23 septembre 2016, M. C... A..., représenté par Me B...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...A...a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler l'arrêté du 14 août 2015 par lequel le préfet du Doubs a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné à l'expiration de ce délai.

Par un jugement n° 1501779 du 2 février 2016, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 17 juillet et 23 septembre 2016, M. C... A..., représenté par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Besançon du 2 février 2016 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet du Doubs du 14 août 2015 ;

3°) d'enjoindre au préfet du Doubs de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ou, à défaut, de réexaminer sa situation dans le même délai et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour durant la durée de ce réexamen ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, à verser à Me B...en vertu de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

En ce qui concerne la décision de refus de séjour :

- le tribunal a omis de répondre au moyen tiré de ce que le préfet aurait dû faire usage de son pouvoir de régularisation ;

- le préfet n'a pas procédé à un examen réel et sérieux de sa situation personnelle ;

- la décision contestée méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

- cette décision est illégale en raison de l'illégalité de la décision lui refusant le séjour ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

- c'est à tort que le préfet a estimé qu'il était lié par la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides pour prendre la décision contestée ;

- il démontre les risques auxquels il est exposé en cas de retour en Albanie ; la décision méconnaît donc l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense enregistré le 7 septembre 2016, le préfet du Doubs conclut au rejet de la requête au motif qu'aucun des moyens soulevés par le requérant n'est fondé.

M. A...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 23 juin 2016.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement convoquées à l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de M. Fuchs a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que M. C...A..., ressortissant albanais né le 3 juin 1994, est entré régulièrement en France le 3 septembre 2014 ; qu'il a sollicité le 23 septembre 2014 la qualité de réfugié, demande qui a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) le 31 juin 2015 ; que, par l'arrêté contesté du 14 août 2015, le préfet du Doubs a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné à l'expiration de ce délai ; que le requérant relève appel du jugement du 2 février 2016 par lequel le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant que le tribunal administratif de Besançon a omis de répondre dans le jugement attaqué au moyen, soulevé par M. A...dans sa demande et qui n'était pas inopérant, tiré de l'erreur manifeste d'appréciation commise par le préfet du Doubs en ne procédant pas à la régularisation de sa situation ; que, par suite, son jugement doit être annulé ;

3. Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. A...devant le tribunal administratif de Besançon ;

Sur la décision portant refus de séjour :

4. Considérant, en premier lieu, que la décision de refus de séjour mentionne que le requérant a sollicité l'asile et que sa demande, examinée selon la procédure prioritaire a été rejetée par l'OFPRA ; que la même décision précise qu'il est célibataire et sans enfant et qu'il n'est pas dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine où résident ses parents ; qu'enfin, cette décision relève que le requérant n'établit pas encourir des risques en cas de retour en Albanie et qu'une mesure de régularisation exceptionnelle ne paraît pas justifiée ; que, par suite, et alors même que la décision de refus de séjour ne mentionne pas la présence de son frère sur le territoire français, le requérant n'est pas fondé à soutenir que préfet du Doubs n'aurait pas procédé à un examen particulier de sa situation personnelle ni qu'il aurait insuffisamment motivé sa décision ;

5. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

6. Considérant que M. A...soutient que le centre de ses intérêts privés et familiaux est en France et qu'il a accompli de nombreux efforts pour s'intégrer ; que, toutefois, le requérant, qui est célibataire et sans enfant, était présent sur le territoire depuis moins d'un an à la date de la décision contestée ; qu'il est constant qu'il n'est pas dépourvu d'attaches dans son pays d'origine ; qu'ainsi, et nonobstant la circonstance, à la supposer avérée, selon laquelle il serait bien intégré, M. A...n'est pas fondé à soutenir, eu égard à la durée et aux conditions de son séjour, que la décision contestée a porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts poursuivis ; qu'elle n'a donc pas méconnu les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

7. Considérant, en dernier lieu, que M. A...soutient que le préfet aurait dû régulariser sa situation en raison des violences qu'il a subies en Albanie du fait d'une vendetta menée par une autre famille au cours de laquelle deux membres de sa famille sont décédés et lui-même a été victime d'une violente agression en 2003 ; que, toutefois, il ressort des pièces du dossier que le récit de vie produit par l'intéressé est insuffisamment étayé et demeure confus sur de nombreux points ; qu'aucun des autres éléments produits ne permet d'établir qu'il serait personnellement exposé à des risques de traitements inhumains ou dégradants en cas de retour dans son pays d'origine ; que l'OFPRA a au demeurant rejeté sa demande en se fondant sur les propos insuffisamment précis de l'intéressé par une décision du 30 juin 2015 ; que la circonstance que son frère aurait obtenu la protection subsidiaire n'est pas de nature à faire regarder que le requérant établit des craintes réelles et personnelles de persécutions ou de violences en cas de retour dans son pays d'origine ; qu'ainsi, et compte tenu également des éléments mentionnés au point 6, M. A...n'est pas fondé à soutenir que le préfet aurait commis une erreur manifeste d'appréciation en ne procédant pas à la régularisation de sa situation ;

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

8. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ce qui précède que M. A...ne peut soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire français doit être annulée en raison de l'illégalité de la décision portant refus de séjour ;

9. Considérant, en second lieu, que pour les mêmes motifs que ceux évoqués au point 6, le moyen tiré de la violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;

Sur la légalité de la décision fixant le délai de départ volontaire :

10. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A...ne peut soutenir que la décision fixant le délai de départ volontaire doit être annulée en raison de l'illégalité de la décision portant refus de séjour et de celle portant obligation de quitter le territoire français ;

Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :

11. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ce qui précède que M. A...ne peut soutenir que la décision fixant le pays de destination doit être annulée en raison de l'illégalité des décisions précédentes ;

12. Considérant, en second lieu, que pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 7, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la décision en litige méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

13. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêté du préfet du Doubs en date du 14 août 2015 ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent également être rejetées ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Besançon du 2 février 2016 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. A...devant le tribunal administratif de Besançon est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...A...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée pour information au préfet du Doubs.

2

N° 16NC01511


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16NC01511
Date de la décision : 26/01/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : Mme ROUSSELLE
Rapporteur ?: M. Olivier FUCHS
Rapporteur public ?: M. COLLIER
Avocat(s) : DRAVIGNY

Origine de la décision
Date de l'import : 07/02/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2017-01-26;16nc01511 ?
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