La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

20/12/2016 | FRANCE | N°16NC00451

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre - formation à 3, 20 décembre 2016, 16NC00451


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme D...B...ont demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler le commandement de payer la somme de 133 397,67 euros émis par le comptable du Trésor de Forbach le 13 novembre 2014 à l'encontre de Mme B...ainsi que la décision portant rejet de leur recours gracieux.

Par une ordonnance n° 1501290 du 5 novembre 2015, la présidente de la 3ème chambre du tribunal administratif de Strasbourg a rejeté cette demande.

M. et Mme B...ont demandé au tribunal administratif de Strasbourg

d'annuler les huit avis à tiers détenteur émis le 9 juillet 2015 par le comptable du...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme D...B...ont demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler le commandement de payer la somme de 133 397,67 euros émis par le comptable du Trésor de Forbach le 13 novembre 2014 à l'encontre de Mme B...ainsi que la décision portant rejet de leur recours gracieux.

Par une ordonnance n° 1501290 du 5 novembre 2015, la présidente de la 3ème chambre du tribunal administratif de Strasbourg a rejeté cette demande.

M. et Mme B...ont demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler les huit avis à tiers détenteur émis le 9 juillet 2015 par le comptable du Trésor de Forbach ainsi que la décision du 16 septembre 2015 portant rejet de leur recours gracieux.

Par une ordonnance n° 1505921 du 12 février 2016, la présidente de la 3ème chambre du tribunal administratif de Strasbourg a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés sous le n° 16NC00001, les 4 janvier et 18 octobre 2016, M. et MmeB..., représentés par MeC..., demandent à la cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 1501290 du 5 novembre 2015 ;

2°) d'annuler le commandement de payer du 13 novembre 2014 et la décision portant rejet de leur recours gracieux ;

3°) de mettre à la charge de l'État le versement de la somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- c'est à tort que le premier juge a rejeté leur demande comme irrecevable au vu de leur intention de voir le litige tranché au fond ;

- le premier juge pouvait requalifier leur demande ;

- réclamer une somme de 167 741 euros au titre des frais de poursuite est contraire à l'article 1912 du code général des impôts qui limite le montant de ces frais à 500 euros ;

- les intérêts moratoires ne sont pas davantage justifiés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 1er juin 2016, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens soulevés n'est fondé.

Par un mémoire, enregistré le 18 octobre 2016, M. et Mme B...demandent à la cour de transmettre au Conseil d'État la question prioritaire de constitutionnalité relative à la conformité aux articles 1 et 8 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen de l'article 1912 du code général des impôts dans sa rédaction antérieure à la loi 2010-1658 du 29 décembre 2010.

Ils soutiennent que :

- l'administration fiscale invoque ces dispositions ;

- la constitutionnalité de ces dispositions n'a jamais été posée au Conseil constitutionnel ;

- le fait que l'article 1912 du code général des impôts, dans sa rédaction antérieure à la loi 2010-1658 du 29 décembre 2010, prévoit l'application de frais de poursuite sans plafond et avec un taux fixe rompt l'égalité des citoyens devant la loi et est source d'insécurité juridique ;

- l'existence de frais de poursuite constitue une sanction qui vient se cumuler avec la majoration de 10 % ; il est ainsi porté atteinte au principe de non cumul des peines.

Par un mémoire, enregistré le 23 novembre 2016, le ministre de l'économie et des finances conclut à ce qu'il n'y a pas lieu de transmettre la question prioritaire de constitutionnalité au Conseil d'État dès lors qu'elle est dépourvue de caractère sérieux.

II. Par une requête, enregistrée sous le n° 16NC00451, le 14 mars 2016, M. et Mme B..., représentés par MeC..., demandent à la cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 1505921 du 12 février 2016 ;

2°) d'annuler les avis à tiers détenteur du 9 juillet 2015 ;

3°) de mettre à la charge de l'État le versement de la somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- les frais de poursuite ne sont pas justifiés ;

- ces frais sont plafonnés en vertu de l'article 1912 du code général des impôts et ne peuvent excéder 500 euros par acte de poursuite ;

- Mme B...n'est en conséquence plus redevable d'aucune somme ;

- elle doit par suite être déchargée de l'obligation de payer les sommes dont le recouvrement est recherché par les actes de poursuite litigieux.

Par un mémoire en défense, enregistré le 2 juin 2016, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que la requête n'est pas recevable dès lors que M. et Mme B...ne peuvent demander l'annulation pour excès de pouvoir d'actes de poursuite et qu'aucun des moyens soulevés n'est fondé.

Par un mémoire, enregistré le 18 octobre 2016, M. et Mme B...demandent à la cour de transmettre au Conseil d'État la question prioritaire de constitutionnalité relative à la conformité aux articles 1 et 8 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen de l'article 1912 du code général des impôts dans sa rédaction antérieure à la loi 2010-1658 du 29 décembre 2010.

Ils soutiennent que :

- l'administration fiscale invoque ces dispositions ;

- la question de la constitutionnalité de ces dispositions n'a jamais été posée au Conseil constitutionnel ;

- le fait que l'article 1912 du code général des impôts, dans sa rédaction antérieure à la loi 2010-1658 du 29 décembre 2010, prévoit l'application de frais de poursuite sans plafond et avec un taux fixe rompt l'égalité des citoyens devant la loi et est source d'insécurité juridique ;

- l'existence de frais de poursuite constitue une sanction qui vient se cumuler avec la majoration de 10 % ; il est ainsi porté atteinte au principe de non cumul des peines.

Par un mémoire, enregistré le 23 novembre 2016, le ministre de l'économie et des finances conclut à ce qu'il n'y a pas lieu de transmettre la question prioritaire de constitutionnalité au Conseil d'État dès lors qu'elle est dépourvue de caractère sérieux.

Par lettres du 29 septembre 2016, la cour a, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, informé les parties qu'elle était susceptible de soulever d'office des moyens d'ordre public.

Par un mémoire, enregistré le 18 octobre 2016, M. et Mme B...ont présenté des observations en réponse aux moyens d'ordre public.

Vu :

- les autres pièces des dossiers.

Vu :

- la Constitution du 4 octobre 1958, et notamment son article 61-1 et la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen ;

- l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, notamment ses articles 23-1 à 23-12 ;

- la loi organique n° 2009-1523 du 10 décembre 2009 relative à l'application de l'article 61-1 de la Constitution, notamment ses articles 2, 3, 4 et 5 ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de commerce ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Etienvre,

- les conclusions de Mme Peton-Philippot, rapporteur public,

- et les observations de MeA..., représentant M. et MmeB.redevables au titre des années 2007 et 2008 pour un montant de 5 649 euros déduction faite de la somme de 513 euros dont ceux-ci se sont acquittés

1. Considérant que les requêtes enregistrées sous le n° 16NC00001 et le n° 16NC00451 sont présentées par les mêmes requérants et tendent à juger des mêmes questions ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;

Sur les conclusions de la requête n° 16NC00001 tendant à l'annulation du commandement de payer du 13 novembre 2014 et de la décision du 5 février 2015 portant rejet du recours gracieux de M. et MmeB... :

2. Considérant que les actes de mise en recouvrement d'une imposition, qui ne sont pas détachables de cette procédure de recouvrement, ne peuvent donner lieu à un recours pour excès de pouvoir mais seulement aux voies de recours spécifiques prévues aux articles L. 281 et R. 281-1 et suivants du livre des procédures fiscales ;

3. Considérant que la demande que M. et Mme B...ont présentée devant le tribunal administratif de Strasbourg avec le ministère d'un avocat tendait expressément à " l'annulation " des décisions administratives contestées et se présentait explicitement comme un " recours pour excès de pouvoir " dirigé contre le commandement de payer établi le 13 novembre 2014 à l'encontre de Mme B...pour paiement notamment de cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales ainsi que la décision du 5 février 2015 par laquelle le directeur régional des finances publiques de Lorraine et du département de la Moselle a rejeté le" recours gracieux " de M. et MmeB... ; qu'ainsi, compte tenu des termes dans lesquelles étaient formulées ces conclusions, qu'il n'y avait pas lieu pour le tribunal en l'occurrence de requalifier, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que le premier juge a accueilli la fin de non recevoir opposée par l'administration et a rejeté, par l'ordonnance attaquée, leur demande comme manifestement irrecevable ; qu'il s'ensuit également qu'il n'y a, en conséquence, pas lieu de transmettre au Conseil d'État la question prioritaire de constitutionnalité présentée en appel par M. et Mme B... ;

Sur les conclusions de la requête n° 16NC00451 relatives aux avis à tiers détenteur et à la décision du 16 septembre 2015 portant rejet de la demande préalable de M. et Mme B... :

En ce qui concerne la régularité de l'ordonnance attaquée :

4. Considérant qu'aux termes de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, dans sa rédaction applicable à la date de l'ordonnance attaquée : " Les présidents de tribunal administratif et de cour administrative d'appel, le vice-président du tribunal administratif de Paris et les présidents de formation de jugement des tribunaux et des cours peuvent, par ordonnance : (...) 4° Rejeter les requêtes manifestement irrecevables, lorsque la juridiction n'est pas tenue d'inviter leur auteur à les régulariser ou qu'elles n'ont pas été régularisées à l'expiration du délai imparti par une demande en ce sens (...) 7° Rejeter, après l'expiration du délai de recours ou, lorsqu'un mémoire complémentaire a été annoncé, après la production de ce mémoire, les requêtes ne comportant que des moyens de légalité externe manifestement infondés, des moyens irrecevables, des moyens inopérants ou des moyens qui ne sont assortis que de faits manifestement insusceptibles de venir à leur soutien ou ne sont manifestement pas assortis des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé (...) " ;

5. Considérant qu'il résulte de l'examen de la demande introductive d'instance que M. et Mme B...ont contesté l'obligation de payer les sommes de 5 136 euros et 162 290,90 euros, que les services du Trésor ont cherché à recouvrer en établissant les avis à tiers détenteur litigieux, au motif que ces sommes n'étaient pas exigibles ; qu'au soutien de leur moyen, ils ont fait valoir que les sommes en cause ne correspondaient qu'à des frais de poursuite injustifiés au regard des dispositions de l'article 1912 du code général des impôts lequel disposait, à la date des avis à tiers détenteur, que de tels frais ne pouvaient excéder 500 euros ; qu'ils ont également soutenu que ces sommes ne pouvaient correspondre ni aux intérêts moratoires prévus aux articles 1727 et 1730 du code général des impôts ni aux frais accessoires prévus à l'article 415 de l'annexe III au code général des impôts ; que, dans ces conditions, c'est à tort que le premier juge a considéré que la demande de M. et Mme B...ne comportait que des moyens assortis de faits manifestement insusceptibles de venir à leur soutien et a rejeté celle-ci sur le fondement du 7° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative ; que cette ordonnance doit être dès lors annulée ;

6. Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. et Mme B...devant le tribunal administratif de Strasbourg ;

En ce qui concerne les fins de non-recevoir opposées par le ministre :

7. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 281 du livre des procédures fiscales : " Les contestations relatives au recouvrement des impôts, taxes, redevances et sommes quelconques dont la perception incombe aux comptables publics compétents mentionnés à l'article L. 252 doivent être adressées à l'administration dont dépend le comptable qui exerce les poursuites. Les contestations ne peuvent porter que : 1° Soit sur la régularité en la forme de l'acte ; 2° Soit sur l'existence de l'obligation de payer, sur le montant de la dette compte tenu des paiements effectués, sur l'exigibilité de la somme réclamée, ou sur tout autre motif ne remettant pas en cause l'assiette et le calcul de l'impôt (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 281-1 du même livre : " Les contestations relatives au recouvrement prévues par l'article L. 281 peuvent être formulées par le redevable lui-même ou la personne solidaire (...) " ;

8. Considérant, d'une part, que la demande de M. et Mme B...ayant été présentée sur le fondement de l'article L. 281 du livre des procédures fiscales en vue de contester l'obligation de payer les sommes en cause et ayant satisfait à l'exigence de demande préalable auprès de l'administration fiscale, elle doit être regardée, non comme un recours pour excès de pouvoir, mais comme une contestation dirigée contre les avis à tiers détenteur du 9 juillet 2015 se rattachant au contentieux du recouvrement au sens de cet article ; que la fin de non recevoir opposée par l'administration doit être dès lors écartée ;

9. Considérant, d'autre part, qu'il résulte de l'instruction que les sommes dont les services du Trésor recherchent le recouvrement correspondent à des impositions dues par le foyer fiscal que M. B...composait avec son épouse ainsi qu'à des pénalités dont ces droits ont été assortis ; qu'il s'ensuit que M. B...a intérêt à contester l'obligation de son épouse de payer lesdites sommes alors même que seule Mme B...est adhérente des organismes de retraite destinataires des actes de poursuite en litige ; que, par suite, la fin de non recevoir opposée par l'administration doit être également écartée ;

10. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article L. 641-9 du code de commerce applicable à la date de l'introduction de la demande au tribunal administratif : " Le jugement qui ouvre ou prononce la liquidation judiciaire emporte de plein droit, à partir de sa date, dessaisissement pour le débiteur de l'administration et de la disposition de ses biens même de ceux qu'il a acquis à quelque titre que ce soit tant que la liquidation judiciaire n'est pas clôturée. Les droits et actions du débiteur concernant son patrimoine sont exercés pendant toute la durée de la liquidation judiciaire par le liquidateur (...) " ;

11. Considérant que les règles ainsi posées n'étant édictées que dans l'intérêt des créanciers, seul le liquidateur peut s'en prévaloir pour s'opposer à ce que le débiteur se pourvoie seul contre une décision qui lui est préjudiciable ; qu'en revanche, elle n'ont pas pour effet d'ôter au contribuable mis en liquidation judiciaire, la qualité de débiteur de l'impôt ; que, dès lors, la fin de non-recevoir opposée par l'administration, tirée de ce que M. B... ne peut contester les actes de recouvrement en litige dès lors qu'il était placé en liquidation judiciaire et que, par suite, seul le liquidateur avait compétence pour exercer cette contestation, ne peut qu'être écartée ;

En ce qui concerne la question prioritaire de constitutionnalité :

12. Considérant qu'aux termes de l'article 61-1 de la Constitution : " Lorsque, à l'occasion d'une instance en cours devant une juridiction, il est soutenu qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit, le Conseil constitutionnel peut être saisi de cette question sur renvoi du Conseil d'État ou de la Cour de cassation qui se prononce dans un délai déterminé. Une loi organique détermine les conditions d'application du présent article " ; qu'aux termes de l'article 23-1 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, modifiée par la loi organique susvisée du 10 décembre 2009 relative à l'application de l'article 61-1 de la Constitution : " Devant les juridictions relevant du Conseil d'État (...) le moyen tiré de ce qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution est, à peine d'irrecevabilité, présenté dans un écrit distinct et motivé. Un tel moyen peut être soulevé pour la première fois en cause d'appel (...) " ; qu'aux termes de l'article 23-2 de la même ordonnance : " La juridiction statue sans délai par une décision motivée sur la transmission de la question prioritaire de constitutionnalité au Conseil d'État ou à la Cour de cassation. Il est procédé à cette transmission si les conditions suivantes sont remplies : 1° La disposition contestée est applicable au litige ou à la procédure, ou constitue le fondement des poursuites (...) " ;

13. Considérant qu'aux termes de l'article 1912 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable à la date des avis à tiers détenteur litigieux : " 1. Les frais de poursuites mis à la charge des redevables au titre des produits recouvrés par le comptable public chargé du recouvrement sont calculés par application d'un pourcentage qui ne peut excéder 5 % du montant total des créances dont le paiement leur est réclamé, dans la limite de 500 €. Un décret en Conseil d'État fixe, pour chaque catégorie d'acte, le tarif des frais applicables et les modalités d'application du présent alinéa. Les frais accessoires aux poursuites sont fixés par décret. 2. Ces frais sont recouvrés par le comptable public chargé du recouvrement des produits mentionnés au 1 " ;

14. Considérant qu'aux dates auxquelles ont été établis les avis à tiers détenteur du 9 juillet 2015, seuls actes de poursuites contestés par le présent recours, les dispositions de l'article 1912 du code général des impôts dont l'administration pouvait faire application étaient celles issues de l'article 55 de la loi n° 2010-1658 du 29 décembre 2010 ; que si l'instruction tend à révéler que d'autres actes de poursuites ont été établis antérieurement, l'administration, qui pour sa part ne donne aucune information précise sur ces actes, ne soutient pas que la somme réclamée par les avis à tiers détenteur litigieux au titre des frais de poursuite concerne pour partie des frais supportés lors de l'établissement de tels actes ;

15. Considérant qu'il s'ensuit que si M. et Mme B...demandent à la cour de transmettre au Conseil d'État la question de la constitutionnalité des dispositions de l'article 1912 du code général des impôts dans leur rédaction antérieure à la loi n° 2010-1658 du 29 décembre 2010, ces dispositions n'étaient plus en vigueur aux dates auxquelles les avis à tiers détenteur ont été établis ; qu'elles ne sont, par suite, pas applicables au litige au sens de l'ordonnance susvisée du 7 novembre 1958 ; qu'il n'y a, en conséquence, pas lieu de transmettre la question prioritaire de constitutionnalité présentée par M. et MmeB... ;

En ce qui concerne l'obligation de payer les sommes de 5 136 euros et 162 290,90 euros :

16. Considérant qu'il résulte de l'instruction que les avis à tiers détenteur émis en vue du recouvrement de la somme de 5 136 euros ont été établis pour paiement des cotisations de contributions sociales dont M. et Mme B...demeurent... ; que les avis à tiers détenteur émis en vue du recouvrement de la somme de 162 290,90 euros ont été établis pour paiement, d'une part, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 1996, 1997, 2006, 2007 et 2008, ainsi que de diverses taxes dues au titre de l'année 2008 et des pénalités dont ces droits ont été assortis pour un montant global de 305 394,87 euros, pour paiement, d'autre part, des majorations de 10 % dont ces sommes ont été assorties sur le fondement de l'article 1730 du code général des impôts pour un montant total de 30 539,48 euros et de " frais " d'un montant total de 165 453,90 euros ;

17. Considérant qu'en application des dispositions précitées de l'article 1912 du code général des impôts, dans leur rédaction issue de la loi n° 2010-1658 du 29 décembre 2010, le montant des frais de poursuite pouvant être mis à la charge de M. et MmeB..., qui comme il a été dit plus haut doit être regardé comme se rapportant aux seuls avis à tiers détenteur litigieux, ne pouvait pas excéder un montant de 500 euros par avis à tiers détenteur ;

18. Considérant, par ailleurs, que l'administration indique que les frais litigieux correspondent également pour un montant de 1 618,75 euros aux intérêts moratoires mis à la charge des contribuables à compter du 2 janvier 2014 sur le fondement de l'article L. 209 du livre des procédures fiscales ;

19. Considérant que, contrairement à ce que les requérants soutiennent, l'article L. 209 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable le 2 janvier 2014, n'interdisait pas que les intérêts moratoires qu'il prévoit pussent être mis à leur charge au motif que l'administration avait fait application par ailleurs des majorations de 10 % prévues à l'article 1730 du code général des impôts ;

20. Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'à la date des quatre avis à tiers détenteur émis en vue du recouvrement de la somme de 162 290,90 euros et des quatre autres avis émis en vue du recouvrement de la somme de 5 136 euros, le montant des droits et pénalités auxquels M. et Mme B...ont été assujettis au titre des années 1996, 1997, 2006, 2007 et 2008 s'élevait à la somme de 236 630,66 euros ; que le montant des majorations de 10 % dont cette somme a été assortie sur le fondement de l'article 1730 du code général des impôts s'élevait à 23 663,06 euros ; que le montant des frais de poursuite pouvant être mis à la charge de Mme B...ne pouvait pas excéder, comme il a été dit au point 17, le montant de 500 euros par acte ; que le montant des intérêts moratoires s'élevait, selon les écritures de l'administration, à la somme de 1 618,75 euros ; que le montant de la somme dont l'administration pouvait rechercher le paiement s'élevait en conséquence à 262 412,47 euros ; que selon ces mêmes avis à tiers détenteur, M. et Mme B...avaient procédé au paiement d'une somme de 309 070,87 euros ; qu'il s'ensuit que les requérants sont fondés à soutenir que Mme B...n'a pas l'obligation de payer les sommes de 162 290,90 euros et 5 136 euros dont le paiement était recherché par l'administration avec l'établissement des huit avis à tiers détenteur litigieux ; que Mme B...doit en conséquence être déchargée de l'obligation de payer lesdites sommes ;

Sur les conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

21. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'État le versement d'une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. et Mme B...et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de transmettre au Conseil d'État la question prioritaire de constitutionnalité soulevée en appel par M. et MmeB.redevables au titre des années 2007 et 2008 pour un montant de 5 649 euros déduction faite de la somme de 513 euros dont ceux-ci se sont acquittés

Article 2 : La requête n° 16NC00001 de M. et Mme B...est rejetée.

Article 3 : L'ordonnance n° 1505921 du 12 février 2016 est annulée.

Article 4 : Il est accordé à Mme B...décharge de l'obligation de payer la somme de 162 290,90 euros dont le recouvrement était recherché par l'administration par l'établissement des quatre avis à tiers détenteurs du 9 juillet 2015 auprès de l'établissement de Lorraine du Régime Social des Indépendants, de l'union de mutuelles Mutex, de la Caisse Nationale de l'Assurance Vieillesse des Travailleurs Salariés (CARSAT) d'Alsace-Lorraine et la caisse de retraite complémentaire Malakoff Mederic retraite ARCCO.

Article 5 : Il est accordé à Mme B...décharge de l'obligation de payer la somme de 5 136 euros dont le recouvrement était recherché par l'administration par l'établissement des quatre avis à tiers détenteurs du 9 juillet 2015 auprès de l'établissement de Lorraine du Régime Social des Indépendants, de l'union de mutuelles Mutex, de la Caisse Nationale de l'Assurance Vieillesse des Travailleurs Salariés (CARSAT) d'Alsace-Lorraine et la caisse de retraite complémentaire Malakoff Mederic retraite ARCCO.

Article 6 : L'État versera à M. et Mme B...une somme de 1 500 (mille cinq cents) euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme D...B...et au ministre de l'économie et des finances.

2

N° 16NC00001,16NC00451


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16NC00451
Date de la décision : 20/12/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

19-01-05 Contributions et taxes. Généralités. Recouvrement.


Composition du Tribunal
Président : M. MARTINEZ
Rapporteur ?: M. Franck ETIENVRE
Rapporteur public ?: Mme PETON-PHILIPPOT
Avocat(s) : WELZER

Origine de la décision
Date de l'import : 10/01/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2016-12-20;16nc00451 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award