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15/12/2016 | FRANCE | N°15NC02314

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre - formation à 3, 15 décembre 2016, 15NC02314


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Aubéole a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler les arrêtés du 26 novembre 2013 par lesquels le préfet de l'Aube a refusé de faire droit à ses demandes de permis de construire relatives à la réalisation d'un parc de huit éoliennes.

Par un jugement n°1401208-1401209-1401210-1401211-1401212-1401213 du 22 septembre 2015, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté les demandes de la société Aubéole.

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Par une requête enregistrée le 20 novembre 2015, la société Aubéole, représentée par Mes Marais...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Aubéole a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler les arrêtés du 26 novembre 2013 par lesquels le préfet de l'Aube a refusé de faire droit à ses demandes de permis de construire relatives à la réalisation d'un parc de huit éoliennes.

Par un jugement n°1401208-1401209-1401210-1401211-1401212-1401213 du 22 septembre 2015, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté les demandes de la société Aubéole.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 20 novembre 2015, la société Aubéole, représentée par Mes Marais et Rossi, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n°1401208-1401209-1401210-1401211-1401212-1401213 du 22 septembre 2015 du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne ;

2°) d'annuler les arrêtés du 26 novembre 2013 ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Aube de procéder au réexamen de leurs demandes de permis de construire ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La société Aubéole soutient que :

- la décision du tribunal est entachée d'erreur de droit et d'erreur d'appréciation ;

- les arrêtés et les avis du ministre de la défense sont entachés d'erreur de droit et d'erreur d'appréciation dès lors que le préfet n'a pas procédé à un examen au cas par cas, que ses critères d'appréciation ne sont pas pertinents et qu'il ne justifie pas de la réalité des risques pour la sécurité qui fondent le refus opposé au projet de parc éolien au regard de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme.

Par un mémoire en défense enregistré le 16 mars 2016, le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par la société Aubéole sont les mêmes qu'en première instance et ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 31 mars 2016, l'instruction a été close au 21 avril 2016.

Des mémoires de production de pièces présentés pour la société Aubéole ont été enregistrés le 14 et le 21 novembre 2016 après clôture de l'instruction et n'ont pas été communiqués.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'aviation civile ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Richard, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Favret, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La société Aubéole a déposé, le 3 janvier 2013, six demandes de permis de construire pour l'implantation d'un parc de huit éoliennes sur les communes de Gelannes et Saint-Hilaire sous-Romilly. A la suite de l'avis défavorable rendu par le ministre de la défense le 17 juillet 2013, le préfet de l'Aube a refusé de délivrer les permis de construire sollicités par des arrêtés du 26 novembre 2013. La société Aubéole relève appel du jugement du 22 septembre 2015 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation des arrêtés du 26 novembre 2013.

I. Sur la régularité du jugement :

2. La société Aubéole soutient que les premiers juges ont entaché leur analyse d'une erreur de droit et d'une erreur d'appréciation. De tels moyens ne sont toutefois pas de nature à entacher le jugement d'irrégularité dès lors qu'ils relèvent d'une analyse du bien fondé de la décision contestée.

II. Sur la légalité des arrêtés du 26 novembre 2013 :

3. Pour refuser la délivrance des permis de construire sollicités par la société Aubéole par ses arrêtés du 26 novembre 2013, le préfet de l'Aube, après avoir notamment visé l'avis du général de brigade de la zone aérienne de défense Nord du 17 juillet 2013, s'est fondé sur les motifs tirés de ce que le projet, composé de huit éoliennes, était de nature à porter atteinte à la sécurité publique au regard des perturbations radioélectriques générées, susceptibles d'empêcher le bon fonctionnement du radar militaire de Prunay-Belleville.

4. Aux termes de l'article R. 423-50 du code de l'urbanisme : " L'autorité compétente recueille auprès de personnes publiques, services ou commissions intéressés par le projet, les accords, avis ou décisions prévus par les lois ou règlements en vigueur ". Aux termes de l'article R. 423-51 du même code : " Lorsque le projet porte sur une opération soumise à un régime d'autorisation prévu par une autre législation, l'autorité compétente recueille les accords prévus par le chapitre V du présent titre ". Aux termes de l'article R. 425-9 du même code : " Lorsque le projet porte sur une construction susceptible, en raison de son emplacement et de sa hauteur, de constituer un obstacle à la navigation aérienne, le permis de construire ou le permis d'aménager tient lieu de l'autorisation prévue par l'article R. 244-1 du code de l'aviation civile dès lors que la décision a fait l'objet d'un accord du ministre chargé de l'aviation civile et du ministre de la défense ". L'article R. 244-1 du code de l'aviation civile dispose : " A l'extérieur des zones grevées de servitudes de dégagement en application du présent titre, l'établissement de certaines installations qui, en raison de leur hauteur, pourraient constituer des obstacles à la navigation aérienne est soumis à une autorisation spéciale du ministre chargé de l'aviation civile et du ministre de la défense. / Des arrêtés ministériels déterminent les installations soumises à autorisation ainsi que la liste des pièces qui doivent être annexées à la demande d'autorisation. / L'autorisation peut être subordonnée à l'observation de conditions particulières d'implantation, de hauteur ou de balisage suivant les besoins de la navigation aérienne dans la région intéressée. / Le silence gardé à l'expiration d'un délai de deux mois à compter de la date de réception de la demande d'autorisation vaut accord. (...) ". Selon l'article 1er de l'arrêté du 25 juillet 1990 susvisé, " les installations dont l'établissement à l'extérieur des zones grevées de servitudes aéronautiques de dégagement est soumis à autorisation du ministre chargé de l'aviation civile et du ministre chargé des armées comprennent : a) En dehors des agglomérations, les installations dont la hauteur en un point quelconque est supérieure à 50 mètres au-dessus du niveau du sol ou de l'eau (...) ".

5. Il résulte de ces dispositions que l'autorité administrative compétente pour délivrer le permis de construire doit, lorsque la construction envisagée en dehors d'une agglomération est de nature à porter atteinte à la sécurité aérienne à raison de sa hauteur qui dépasse 50 mètres, saisir de la demande le ministre chargé de l'aviation civile et le ministre de la défense et qu'à défaut d'accord de l'un de ces ministres, cette autorité est alors tenue de refuser le permis de construire.

6. La société Aubéole fait valoir que le préfet de l'Aube s'est fondé sur un avis irrégulier du ministre de la défense qui entache les arrêtés litigieux d'illégalité. Elle soutient qu'aucun examen particulier des risques que son projet est susceptible d'engendrer pour la sécurité publique n'a été effectué et qu'en l'absence d'un tel risque, c'est à tort que le ministre de la défense a émis un avis défavorable.

7. Il ressort toutefois des termes mêmes de l'avis du 17 juillet 2013 que le ministre de la défense a procédé à l'examen spécifique du projet envisagé par la société Aubéole portant sur huit éoliennes d'une hauteur de 230 mètres en bout de pale au regard de la nature des constructions envisagées, de leur situation et de l'existence d'un radar de détection militaire situé à moins de 20 kilomètres servant à la défense aérienne du territoire situé à l'est de la région parisienne. Le ministre a estimé que malgré l'implantation envisagée pour limiter l'angle d'interférence des éoliennes, ce projet, compte tenu de ses caractéristiques, était susceptible de créer des perturbations pour les capacités de détection du radar militaire de Prunay-Belleville notamment par un " effet de masque " en basse altitude, soit des phénomènes constatés dans le cadre d'une campagne de mesure réalisée en octobre 2009. En refusant son accord en raison de la nécessité d'interdire l'implantation d'éoliennes dans ce secteur à partir de l'altitude de 177,44 mètres NGF, le ministre de la défense dont les éléments ne sont pas sérieusement contredits par la société Aubéole, n'a entaché ce refus d'aucune erreur de droit ou d'appréciation.

8. Il s'ensuit que dès lors que le ministre de la défense avait légalement refusé son accord exigé par les dispositions précitées de l'article R. 244-1 du code de l'aviation civile et l'article R. 423-51 du code de l'urbanisme, le préfet de l'Aube ne pouvait que refuser de faire droit à la demande de la société Aubéole.

9. Le moyen de la société Aubéole tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme ne peut ainsi et en tout état de cause qu'être écarté.

III. Sur les conclusions à fin d'injonction :

10. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative: " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution ".

11. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions tendant à l'annulation des arrêtés attaqués, n'implique aucune mesure particulière d'exécution. Par suite, les conclusions susvisées ne peuvent être accueillies.

IV. Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que la société Aubéole demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

Par ces motifs,

DECIDE :

Article 1er : La requête de la société Aubéole est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société Aubéole et au ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer.

Copie en sera adressée au ministre de la défense et au préfet de l'Aube.

2

N° 15NC02314


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15NC02314
Date de la décision : 15/12/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Urbanisme et aménagement du territoire - Permis de construire - Nature de la décision - Refus du permis.

Urbanisme et aménagement du territoire - Permis de construire - Légalité interne du permis de construire - Légalité au regard de la réglementation nationale - Règlement national d'urbanisme.


Composition du Tribunal
Président : M. MESLAY
Rapporteur ?: M. Michel RICHARD
Rapporteur public ?: M. FAVRET
Avocat(s) : GENESIS

Origine de la décision
Date de l'import : 27/12/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2016-12-15;15nc02314 ?
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