Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
L'EURL Exodus a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2006, 2007 et 2008 et des majorations correspondantes, ainsi que des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er octobre 2005 au
31 décembre 2008 et des majorations correspondantes.
Par un jugement n° 1103774,1103775 du 21 avril 2015, le tribunal administratif de Strasbourg a prononcé la décharge totale des impositions litigieuses.
Procédure devant la cour :
Par un recours, enregistré le 22 mai 2015, le ministre des finances et des comptes publics demande à la cour :
1°) d'annuler l'article 1er du jugement du 21 avril 2015 du tribunal administratif de Strasbourg ;
2°) de rétablir les impositions invalidées en première instance ;
3°) de réformer en ce sens le jugement entrepris.
Il soutient que :
- le tribunal s'est trompé dès lors qu'il est clairement établi que la durée des opérations de vérification sur place n'a pas excédé le délai de trois mois ;
- si les éléments obtenus dans le cadre de la procédure de vérification de la société Alsalor ont confirmé l'analyse de la vérificatrice, à aucun moment l'exploitation de ces informations n'a nécessité un nouvel examen des documents comptables de l'EURL, ni sur place, ni dans les locaux du service, postérieurement au contrôle sur place.
Par un mémoire du 11 décembre 2015, l'EURL Exodus, représentée par MeA..., conclut au rejet de la requête ;
Elle soutient que :
- l'administration n'était pas en possession, à la date du 5 juin 2009, de tous les éléments nécessaires pour apprécier valablement le caractère probant des factures litigieuses de la société Exodus ; ces éléments manquants ne lui ont été procurés qu'à la suite de la vérification de comptabilité de la société Alsalor ;
- la procédure d'imposition est irrégulière, faute pour l'administration d'avoir mis en oeuvre la procédure de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales, alors qu'elle s'est fondée sur le caractère fictif des factures en cause.
Par un mémoire du 15 janvier 2016, le ministre des finances et des comptes publics conclut aux mêmes fins que la requête par les mêmes moyens.
Par un mémoire du 24 août 2016, l'EURL Exodus conclut aux mêmes fins que ses précédentes écritures.
Vu :
- les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Didiot,
- et les conclusions de Mme Peton-Philippot, rapporteur public.
1. Considérant que l'EURL Exodus, qui exerce une activité de marchand de biens, rénovation, construction et gestion immobilière, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité au titre de la période du 1er octobre 2005 au 30 septembre 2008, étendue jusqu'au
31 décembre 2008 en matière de taxe sur la valeur ajoutée ; que par une proposition de rectification en date du 17 novembre 2009, l'administration lui a notifié des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et des rehaussements d'impôt sur les sociétés ; que par deux requêtes enregistrées le 26 juillet 2011, l'EURL Exodus a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2006, 2007 et 2008 et des majorations correspondantes, ainsi que des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du
1er octobre 2005 au 31 décembre 2008 et des majorations correspondantes ; que par un jugement n° 1103774,1103775 du 21 avril 2015, le tribunal administratif de Strasbourg a prononcé la décharge totale des impositions litigieuses ; que par le présent recours, le ministre des finances et des comptes publics demande à la cour d'annuler ce jugement et sollicite le rétablissement des impositions dont le tribunal a prononcé la décharge ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article 13 du livre des procédures fiscales : " Les agents de l'administration des impôts vérifient sur place, en suivant les règles prévues par le présent livre, la comptabilité des contribuables astreints à tenir et à présenter des documents comptables (...) " ; que l'article 52 du même code prévoit que : " I.-Sous peine de nullité de l'imposition, la vérification sur place des livres ou documents comptables ne peut s'étendre sur une durée supérieure à trois mois en ce qui concerne : 1° Les entreprises industrielles et commerciales ou les contribuables se livrant à une activité non commerciale dont le chiffre d'affaires ou le montant annuel des recettes brutes n'excède pas les limites prévues au I de l'article 302 septies A du code général des impôts (...) " ; que son article R. 13-1 dispose que : " Les vérifications de comptabilité mentionnées à l'article L. 13 comportent notamment : a) La comparaison des déclarations souscrites par les contribuables avec les écritures comptables et avec les registres et documents de toute nature, notamment ceux dont la tenue est prévue par le code général des impôts et par le code de commerce (...) " ;
3. Considérant que le ministre soutient que les dispositions précitées ont été respectées, dès lors que le contrôle sur place a débuté le 12 mars 2009 pour s'achever le 5 juin 2009, date à laquelle le service avait examiné l'ensemble des livres et documents comptables de la société ; qu'il résulte toutefois de l'instruction qu'au cours de la vérification de comptabilité, l'administration a fait le constat d'une importante discordance entre les factures comptabilisées au niveau du compte fournisseur de la société Alsalor et les paiements minimes effectués à destination de cette dernière ; qu'il résulte des termes mêmes tant de la proposition de rectification du 17 novembre 2009, que de la réponse aux observations du contribuable du
26 févier 2010 et de la décision de rejet de la réclamation du 1er juin 2011 que, postérieurement à l'expiration du délai de trois mois suivant le début du contrôle, l'administration a effectué une vérification de comptabilité de la société Alsalor, au cours de laquelle elle a confronté la copie de pièces comptables de l'EURL Exodus, en l'occurrence les factures litigieuses, avec les propres éléments de la comptabilité de la société Alsalor et poursuivi l'examen critique desdites factures ; que les données n'ayant pu être intégralement recoupées, les factures correspondantes présentées par l'EURL Exodus ont été considérées comme fictives ; que la conclusion ainsi tirée de l'exploitation des éléments d'information recueillis auprès de la société Alsalor a explicitement fondé le rehaussement litigieux sur ce point, sans que l'administration puisse se prévaloir du caractère superfétatoire des investigations en cause, dès lors qu'elle indique expressément avoir voulu attendre leur réalisation avant de décider de l'issue de la vérification de comptabilité de l'EURL Exodus ; qu'ainsi, eu égard à leur objet, c'est à bon droit que le tribunal a estimé que ces démarches entreprises auprès d'un tiers, avant la notification de la proposition de rectification à la société Exodus, se rattachaient à la vérification de comptabilité entreprise auprès de cette dernière, alors même que cette intervention n'avait pas été effectuée dans les locaux de l'entreprise ; que dès lors qu'elles sont postérieures au délai de trois mois prévu par les dispositions précitées de l'article L. 52 du livre des procédures fiscales, l'EURL est fondée à soutenir qu'elle a fait l'objet d'une vérification de comptabilité qui a excédé la durée maximale de trois mois ; que ces démarches ont ainsi privé la société requérante de la garantie spéciale prévue par l'article L. 52 du livre des procédures fiscales ; qu'une telle irrégularité a été de nature à vicier la procédure d'imposition et, par suite, à entacher de nullité les impositions établies à la suite de cette procédure ;
4. Considérant que, par suite, le ministre des finances et des comptes publics n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a prononcé la décharge totale des impositions litigieuses ;
D É C I D E :
Article 1er : Le recours du ministre des finances et des comptes publics est rejeté.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'économie et des finances et à l'EURL Exodus.
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N° 15NC01155