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15/11/2016 | FRANCE | N°15NC02117

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre - formation à 3, 15 novembre 2016, 15NC02117


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Nancy de condamner l'Etat à lui verser la somme de 130 500 euros en réparation des préjudices, financier et moral, causés par les décisions illégales par lesquelles le préfet des Vosges a refusé de lui délivrer un agrément pour exercer la profession de convoyeur de fonds.

Par un jugement n° 1301106 du 24 mars 2015, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 1

3 octobre 2015, M. A...B..., représenté par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugem...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Nancy de condamner l'Etat à lui verser la somme de 130 500 euros en réparation des préjudices, financier et moral, causés par les décisions illégales par lesquelles le préfet des Vosges a refusé de lui délivrer un agrément pour exercer la profession de convoyeur de fonds.

Par un jugement n° 1301106 du 24 mars 2015, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 13 octobre 2015, M. A...B..., représenté par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nancy du 24 mars 2015 ;

2°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 243 900 euros en réparation de ses préjudices financier et moral ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- les décisions lui refusant l'agrément pour exercer la profession de convoyeur de fonds méconnaissent l'article 10 de la loi du 6 janvier 1978 ;

- ces décisions sont entachées d'erreur de fait dès lors que les faits mentionnés dans le fichier STIC ont fait ensuite l'objet d'un classement sans suite ;

- ces décisions lui ont causé un préjudice financier et un préjudice moral.

Par un mémoire en défense, enregistré le 9 février 2016, le préfet des Vosges conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- la demande de première instance était irrecevable ;

- les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

M. B...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision en date du 24 septembre 2015.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 ;

- la loi n° 83-629 du 12 juillet 1983 ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Kohler, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Laubriat, rapporteur public.

1. Considérant que M. B...relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à l'indemniser des préjudices résultant pour lui de l'illégalité des décisions par lesquelles le préfet des Vosges a refusé de lui délivrer un agrément pour l'exercice de la profession de convoyeur de fonds ;

Sur la recevabilité de la demande de première instance :

2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 421-3 du code de justice administrative : " Toutefois, l'intéressé n'est forclos qu'après un délai de deux mois à compter du jour de la notification d'une décision expresse de rejet : 1°) En matière de plein contentieux ; (...) " ; que si le préfet soutient que la demande de première instance, qui fait suite à une demande d'indemnisation préalable transmise par le conseil de M. B...le 8 février 2013, était irrecevable faute d'avoir été enregistrée dans le délai de deux mois à compter de la décision expresse du 9 août 2012 rejetant une précédente demande d'indemnisation préalable, il ne produit aucun élément de nature à établir la date de notification de cette décision ; que, dans ces conditions, le préfet des Vosges n'est pas fondé à soutenir que la demande de première instance était irrecevable ;

Sur la responsabilité de l'Etat :

3. Considérant qu'aux termes de l'article 6 de la loi du 12 juillet 1983 alors applicable : " Nul ne peut être employé pour participer à une activité mentionnée à l'article 1er : (...) 2° S'il a fait l'objet d'une condamnation à une peine correctionnelle ou à une peine criminelle inscrite au bulletin n° 2 du casier judiciaire ou, pour les ressortissants étrangers, dans un document équivalent, pour des motifs incompatibles avec l'exercice des fonctions ; (...) 4° S'il a commis des actes, éventuellement mentionnés dans les traitements automatisés de données personnelles gérés par les autorités de police, contraires à l'honneur, à la probité ou aux bonnes moeurs ou de nature à porter atteinte à la sécurité des personnes ou des biens, à la sécurité publique ou à la sûreté de l'Etat ; 5° S'il ne justifie pas de son aptitude professionnelle selon des modalités définies par décret en Conseil d'Etat (...) " ;

4. Considérant que ces dispositions imposent au préfet, saisi d'une demande d'autorisation préalable pour participer à une activité de transport de fonds, d'apprécier si l'intéressé remplit les conditions posées par ces dispositions ; qu'il doit ainsi apprécier si les actes commis par un demandeur ne sont pas contraires à l'honneur, à la probité ou aux bonnes moeurs, alors même qu'ils n'auraient pas donné lieu à une condamnation pénale ou qu'ils auraient été effacés du système de traitement automatisé des infractions constatées ;

5. Considérant qu'en l'espèce, le préfet a apprécié le comportement de M. B...au regard notamment de faits pour lesquels l'intéressé a été mis en cause en 1997 et 1999 ; que, contrairement à ce que soutient le préfet, M. B...conteste la matérialité des faits qui lui sont reprochés ; que le préfet fait valoir que les " menaces d'atteinte aux personnes sous conditions " qu'aurait commis le requérant en 1997, et les violences sur une personne chargée d'une mission de service public dans l'exercice de ses fonctions perpétrées en 1999 ont été mentionnés dans le fichier " système de traitement des infractions constatées " ; que si les faits de 1997 ont été classés sans suite pour insuffisance de charges, ceux constatés en 1999 l'ont été en raison d'une médiation pénale de nature à établir leur matérialité ; qu'il résulte toutefois de l'instruction que ces derniers faits dataient de plus de six ans lors du premier refus de délivrance d'un agrément en qualité de convoyeur de fonds et ne pouvaient dès lors suffire à justifier ce refus ; que, dans ces conditions, le préfet des Vosges, en refusant à partir de 2005 de délivrer un agrément à M. B...pour l'exercice de la profession de convoyeur de fonds, a fait une inexacte application des dispositions précitées de la loi du 12 juillet 1983 ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B...est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Nancy a considéré que la décision de refus d'agrément du 27 juin 2005 était légale et ne pouvait donc engager la responsabilité de l'Etat ;

7. Considérant qu'il appartient à la cour, saisie par l'effet dévolutif de l'appel, de statuer sur l'indemnisation des préjudices subis par M.B... ;

Sur la demande d'indemnisation :

8. Considérant qu'en principe, toute illégalité commise par l'administration constitue une faute de nature à engager sa responsabilité, pour autant qu'il en soit résulté un préjudice direct et certain ;

9. Considérant que M. B...soutient que la décision du 27 juin 2005 par laquelle le préfet des Vosges a refusé de lui délivrer un agrément pour exercer la profession de convoyeur de fonds, confirmée les 9 février 2006, 3 avril 2006, 15 novembre 2006, 30 janvier 2009, 17 avril 2009 et 15 juillet 2009, lui a causé un préjudice financier résultant de la perte de revenus et de la perte d'épargne salariale ;

10. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société Sécuritas a introduit la demande initiale d'agrément au profit de M. B... pour l'exécution d'un contrat à durée déterminée valable du 1er décembre 2004 au 29 octobre 2005 ; que M. B...a été rémunéré pendant toute cette période par la société Sécuritas ; que l'intéressé ne produit aucun élément de nature à établir qu'à l'issue de cette période, il aurait pu bénéficier d'un nouveau contrat ; que, par suite, M. B... n'établit pas que la perte de revenus et d'épargne salariale dont il se prévaut a été causée par l'intervention de cette décision de refus ;

11. Considérant que M. B...indique également avoir subi un préjudice moral résultant du suivi psychiatrique dont il a bénéficié entre octobre 2011 et février 2012 ; qu'il ne produit toutefois aucun élément de nature à établir que l'intervention des décisions de refus d'agrément en litige auraient rendu nécessaire un tel suivi ;

12. Considérant qu'il résulte de ce qui vient d'être dit que M. B...n'établit pas de lien de causalité entre les préjudices dont il demande la réparation et la faute résultant de l'illégalité du refus d'agrément qui lui a été opposé ;

13. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur l'exception de prescription quadriennale opposée par le préfet des Vosges, que M. B...n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet des Vosges.

2

N° 15NC02117


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15NC02117
Date de la décision : 15/11/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

49-05 Police. Polices spéciales.


Composition du Tribunal
Président : M. MARINO
Rapporteur ?: Mme Julie KOHLER
Rapporteur public ?: M. LAUBRIAT
Avocat(s) : PICOCHE

Origine de la décision
Date de l'import : 27/12/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2016-11-15;15nc02117 ?
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