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10/11/2016 | FRANCE | N°15NC02066

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 10 novembre 2016, 15NC02066


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...C...a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler l'arrêté en date du 7 mars 2014 par lequel le ministre de la défense lui a infligé la sanction disciplinaire de radiation des cadres.

Par un jugement n° 1400714 du 3 août 2015, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 5 octobre 2015, M. A...C..., représenté par Me B..., demande à la cour :

1) d'annuler ce jugement du tribunal ad

ministratif de Besançon du 3 août 2015 ;

2) d'annuler la décision du ministre de la défense du 7 mars...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...C...a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler l'arrêté en date du 7 mars 2014 par lequel le ministre de la défense lui a infligé la sanction disciplinaire de radiation des cadres.

Par un jugement n° 1400714 du 3 août 2015, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 5 octobre 2015, M. A...C..., représenté par Me B..., demande à la cour :

1) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Besançon du 3 août 2015 ;

2) d'annuler la décision du ministre de la défense du 7 mars 2014 ;

3) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement attaqué a méconnu le principe d'égalité des armes, le ministre de la défense ayant mis onze mois pour produire un mémoire en défense ;

- les premiers juges ont omis de répondre au moyen tiré de l'existence d'un délai excessif entre la survenance des faits qui lui sont reprochés et le prononcé de la sanction ;

- le jugement critiqué comporte une contradiction dans ses motifs ;

- le rapport de l'officier rapporteur est irrégulier ;

- le délai imparti au conseil d'enquête pour remettre son avis n'a pas été respecté ;

- l'avis du ministre de l'intérieur n'a pas été recueilli préalablement à la décision contestée ;

- la sanction disciplinaire n'a pas été prononcée dans un délai raisonnable ;

- la décision contestée est entachée d'une erreur d'appréciation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 30 mars 2016, le ministre de la défense conclut au rejet de la requête au motif qu'aucun des autres moyens soulevés par le requérant n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la défense ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Fuchs,

- et les conclusions de M. Collier, rapporteur public.

1. Considérant que par un arrêté du 7 mars 2014, le ministre de la défense a infligé à M.C..., militaire de carrière alors affecté au peloton mobile de gendarmerie de Belfort, la sanction disciplinaire de radiation des cadres ; que le requérant relève appel du jugement du 3 août 2015 par lequel le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant, en premier lieu, que le tribunal administratif de Besançon a répondu au point 6 du jugement en litige au moyen tiré de l'absence de délai raisonnable entre les faits justifiant la sanction disciplinaire et le prononcé de cette sanction ; qu'ainsi, M. C...n'est pas fondé à soutenir que le jugement serait irrégulier pour ce motif ;

3. Considérant, en deuxième lieu, que l'existence d'une contradiction de motifs dans le jugement attaqué, à la supposer même avérée, n'est pas de nature à entacher celui-ci d'irrégularité ;

4. Considérant, enfin, que la seule circonstance que l'administration a laissé s'écouler un délai de plusieurs mois avant de produire un mémoire en défense n'est pas de nature à entacher d'irrégularité la procédure suivie devant le tribunal administratif ;

Sur la légalité de l'arrêté du 7 mars 2007 :

En ce qui concerne la légalité externe :

5. Considérant, en premier lieu, que l'autorité militaire, qui envisageait le prononcé d'une sanction du troisième groupe à l'encontre de M.C..., a convoqué un conseil d'enquête conformément aux dispositions de l'article L. 4137-3 du code de la défense ; que le chef du bureau des compétences de la région de gendarmerie Franche-Comté, désigné comme rapporteur, a lu son rapport devant le conseil d'enquête qui s'est tenu le 22 novembre 2013 ; qu'il ne ressort pas des termes de ce rapport que cet officier aurait porté des " jugements de valeur " ainsi que le soutient le requérant ; que celui-ci s'est en effet borné à faire état des constatations de fait, en particulier en soulignant que l'intéressé avait dirigé son arme vers les militaires présents, tout en précisant que les coups de feu avaient été déclenchés en l'air et vers le sol ; que si, dans la partie consacrée à la situation personnelle du gendarme mis en cause, il a indiqué que " ce gradé détient un véritable arsenal à son domicile ", cette circonstance, compte tenu des faits reprochés à l'intéressé et de son histoire personnelle, rappelée par le rapport, était de nature à éclairer le conseil d'enquête ; qu'il s'ensuit que le moyen tiré du défaut d'impartialité de l'officier rapporteur devant le conseil d'enquête doit être écarté ;

6. Considérant, en deuxième lieu, que M. C...se borne à reprendre, sans apporter d'élément nouveau, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article R. 4137-66 du code de la défense, relatives au délai dans lequel le conseil d'enquête doit rendre son avis ; qu'il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus par les premiers juges ;

7. Considérant, en troisième lieu, que si les actes administratifs doivent être pris selon les formes et conformément aux procédures prévues par les lois et règlements, un vice affectant le déroulement d'une procédure administrative préalable, suivie à titre obligatoire ou facultatif, n'est de nature à entacher d'illégalité la décision prise que s'il ressort des pièces du dossier qu'il a été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou qu'il a privé les intéressés d'une garantie ;

8. Considérant qu'aux termes de l'article R. 4137-41 du code de la défense : " La radiation des cadres des sous-officiers de carrière de la gendarmerie nationale est prononcée par le ministre de la défense, après avis du ministre de l'intérieur " ; que s'il est constant que l'avis du ministre de l'intérieur n'a en l'espèce pas été recueilli, cette absence de consultation ne constitue pas une garantie pour l'intéressé et n'a pas eu pour effet d'affecter la compétence de l'auteur de l'arrêté attaqué ; que ce vice de procédure n'est pas susceptible, en l'espèce, d'avoir exercé une influence sur le sens de la décision contestée ; qu'ainsi, ce vice de procédure n'est pas de nature à entacher d'illégalité cette décision ;

9. Considérant enfin, et contrairement à ce que soutient le requérant, qu'aucun texte ni aucun principe général du droit n'enferme dans un délai déterminé l'exercice de l'action disciplinaire à l'égard d'un fonctionnaire ; qu'au demeurant, il ressort des pièces du dossier qu'une sanction a été demandée par le commandant en second de la région de gendarmerie de Franche-Comté moins d'un mois après les faits en litige, soit le 15 novembre 2012 ; que l'autorité militaire de deuxième niveau a demandé que soit réuni un conseil d'enquête le 3 avril 2013 ; que ce conseil d'enquête s'est tenu le 22 novembre 2013 ; qu'à la suite de cette procédure, la décision contestée a été prise le 7 mars 2014, soit dix-sept mois après les faits reprochés ; que, par suite, et en tout état de cause, le moyen tiré du délai anormalement long qui se serait écoulé entre la date à laquelle l'autorité disciplinaire a eu connaissance des faits reprochés et le moment auquel elle a décidé de lui infliger une sanction doit être écarté ;

En ce qui concerne la légalité interne :

10. Considérant que M. C...soutient que la sanction de radiation des cadres est disproportionnée au regard des faits qui lui sont reprochés, mais aussi de ses états de service au sein de la gendarmerie ;

11. Considérant qu'aux termes de l'article L. 4137-2 du code de la défense : " Les sanctions disciplinaires applicables aux militaires sont réparties en trois groupes : (...) 3° Les sanctions du troisième groupe sont : a) Le retrait d'emploi, défini par les dispositions de l'article L. 4138-15 ; b) La radiation des cadres ou la résiliation du contrat " ;

12. Considérant qu'il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi de moyens en ce sens, de rechercher si les faits reprochés à un agent public ayant fait l'objet d'une sanction disciplinaire constituent des fautes de nature à justifier une sanction et si la sanction retenue est proportionnée à la gravité de ces fautes ;

13. Considération qu'il ressort des pièces du dossier que, le 27 mars 2012, M. C... a fait partie d'une équipe qui a été appelée à procéder à des constatations sur place à la suite du vol d'une partie du chargement d'un camion ; que par un courrier d'un de ses collègues en date du 8 octobre 2012, il a été mis en cause pour avoir, lors de ces constatations, pris part au vol de produits cosmétiques ; qu'il a été entendu à ce sujet par la section de recherches de Besançon le 17 octobre 2012 ; qu'à l'annonce de son placement en garde en vue à la suite de cet entretien, il a sorti son arme de service, a placé le canon de celle-ci sous son menton et a tenté de s'enfuir de la caserne ; qu'il a ensuite mis en joue les personnes qui le poursuivaient, les a menacées et a tiré deux coups de feu, en l'air et au sol, avant d'être maîtrisé ; que ces graves manquements professionnels constituent une faute disciplinaire de nature à justifier une sanction ;

14. Considérant que le requérant se prévaut de ses bons états de service depuis qu'il a intégré l'école de gendarmerie en 1990 ; que toutefois, eu égard à la nature et la gravité des faits mentionnés ci-dessus, et alors que le requérant a déjà subi en 2002 la sanction du blâme et été muté d'office dans l'intérêt du service après avoir menacé avec son arme de service le commandant de brigade, c'est à bon droit que les premiers juges ont écarté le moyen tiré de l'erreur d'appréciation commise par le ministre de la défense ;

15. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. C...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...C...et au ministre de la défense.

Copie en sera transmise au ministre de l'intérieur.

2

N° 15NC02066


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15NC02066
Date de la décision : 10/11/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-09 Fonctionnaires et agents publics. Discipline.


Composition du Tribunal
Président : Mme DHIVER
Rapporteur ?: M. Olivier FUCHS
Rapporteur public ?: M. COLLIER
Avocat(s) : SCP BONNOT BOUVIER EUVRARD

Origine de la décision
Date de l'import : 27/12/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2016-11-10;15nc02066 ?
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