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05/08/2016 | FRANCE | N°15NC01407

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre - formation à 3, 05 août 2016, 15NC01407


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D...E...épouse B...a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 13 février 2015 par lequel le préfet de la Moselle a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1501235 du 20 mai 2015, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 19 juin 2015, Mme E...épouseB..., représ

entée par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Str...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D...E...épouse B...a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 13 février 2015 par lequel le préfet de la Moselle a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1501235 du 20 mai 2015, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 19 juin 2015, Mme E...épouseB..., représentée par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 20 mai 2015 ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 13 février 2015 ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Moselle de lui délivrer un titre de séjour, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ou au besoin et dans l'attente de la délivrance d'un titre de séjour, lui délivrer un récépissé de titre de séjour et procéder au réexamen de sa demande ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à son conseil en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du

10 juillet 1991.

Elle soutient que :

Sur la décision de refus de titre de séjour :

- cette décision est insuffisamment motivée ;

- elle est intervenue à l'issue d'une procédure irrégulière en l'absence de saisine de la commission du titre de séjour ;

- le préfet a méconnu les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation ;

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- cette décision est entachée d'incompétence ;

- elle n'est pas motivée ;

- cette décision doit être annulée en conséquence de l'illégalité du refus de titre de séjour ;

- le préfet a méconnu les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il a entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 16 juin 2016, le préfet de la Moselle conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.

La demande d'aide juridictionnelle présentée par Mme B...a été rejetée par décision du bureau d'aide juridictionnelle de Nancy du 7 janvier 2016.

Vu

- les autres pièces du dossier ;

Vu :

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée alors en vigueur ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Guidi.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne la décision de refus de titre de séjour :

1. Considérant, en premier lieu, que la décision portant refus de titre de séjour à

Mme B...vise les stipulations applicables de l'accord franco-algérien ; qu'elle précise que l'intéressée a sollicité un titre de séjour en qualité d'étranger malade et indique que le médecin de l'agence régionale de santé a rendu un avis le 8 décembre 2014, selon lequel l'état de santé de Mme B...nécessite une prise en charge dont le défaut ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'un traitement approprié est disponible dans son pays d'origine ; que le préfet, qui s'est approprié les motifs de l'avis rendu par le médecin de l'agence régionale de santé, a indiqué les raisons pour lesquelles il a considéré que Mme B...ne remplissait pas les conditions pour obtenir le titre de séjour qu'elle sollicitait ; qu'ainsi, il a suffisamment énoncé les considérations de droit et de fait sur lesquelles il s'est fondé pour rejeter la demande de titre de séjour pour raison de santé dont il avait été saisi ; que le moyen tiré de l'insuffisance de motivation doit être écarté ;

2. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien modifié du 27 décembre 1968 : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 7) au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays " ;

3. Considérant qu'il résulte de ces stipulations qu'il appartient à l'autorité administrative, lorsqu'elle envisage de refuser la délivrance d'un certificat de résidence à un ressortissant algérien qui en fait la demande au titre des stipulations de l'article 6 de l'accord franco-algérien, de vérifier, au vu de l'avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé, que cette décision ne peut avoir de conséquences d'une exceptionnelle gravité sur l'état de santé de l'intéressé et, en particulier, d'apprécier, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, la nature et la gravité des risques qu'entraînerait un défaut de prise en charge médicale dans le pays dont l'étranger est originaire ; que lorsque le défaut de prise en charge risque d'avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur la santé de l'intéressé, l'autorité administrative ne peut légalement refuser le titre de séjour sollicité que s'il existe des possibilités de traitement approprié de l'affection en cause dans son pays d'origine ; que si de telles possibilités existent mais que l'étranger fait valoir qu'il ne peut en bénéficier, soit parce qu'elles ne sont pas accessibles à la généralité de la population, eu égard notamment au coût du traitement ou à l'absence de modes de prise en charge adaptés, soit parce qu'en dépit de leur accessibilité, des circonstances exceptionnelles tirées des particularités de sa situation personnelle l'empêcheraient d'y accéder effectivement, il appartient à cette même autorité, au vu de l'ensemble des informations dont elle dispose, d'apprécier si l'intéressé peut ou non bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine ;

4. Considérant que dans son avis du 8 décembre 2014, le médecin de l'agence régionale de santé indique que l'état de santé de Mme B...nécessite une prise en charge médicale, dont le défaut ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'il existe un traitement approprié dans son pays d'origine ; que les certificats médicaux produits par MmeB..., antérieurs à la décision de refus de titre de séjour qui lui a été opposée, n'établissent pas que le défaut de traitement serait susceptible d'avoir des conséquences particulièrement graves sur son état de santé ; qu'au surplus, il ne résulte pas de ces éléments que l'intéressée ne pourrait pas effectivement bénéficier dans son pays d'origine d'un traitement approprié à son état de santé et accessible ; que, dans ces conditions, la décision de refus de titre de séjour opposée à Mme B...n'est pas contraire aux stipulations précitées de l'article 6,7° de l'accord franco-algérien ; que le préfet n'a pas davantage commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de cette décision sur la situation personnelle de MmeB... ;

5. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 312-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Dans chaque département, est instituée une commission du titre de séjour (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 312-2 du même code : " La commission est saisie par le préfet lorsque celui-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné aux articles L. 314-11 et L. 314-12 (...) " ; qu'il résulte des dispositions de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que la commission du titre de séjour instituée dans chaque département est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné aux articles L. 314-11 et L. 314-12, ainsi que dans le cas prévu à l'article L. 431-3 du même code ; que si l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 régit de manière complète les conditions dans lesquelles les ressortissants algériens peuvent être admis à séjourner en France, cet accord n'a cependant pas entendu écarter les ressortissants algériens de l'application des dispositions de procédure qui s'appliquent à tous les étrangers en ce qui concerne la délivrance de titres de séjour, au nombre desquelles figure la consultation de la commission du titre de séjour prévue par l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, toutefois, en application des dispositions précitées, le préfet n'est tenu de saisir cette commission que des seuls étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues par les articles susvisés, ou, dans le cas d'un ressortissant algérien, par les stipulations équivalentes de l'accord franco-algérien, et non de tous ceux qui s'en prévalent ; qu'il résulte de ce qui précède que Mme B...ne pouvait pas obtenir de plein droit un certificat de résidence sur le fondement de l'article 6,7° de l'accord franco-algérien ; que, dès lors, le préfet de la Moselle n'était pas tenu de soumettre son cas à la commission du titre de séjour avant de rejeter sa demande ; que, par suite, ce moyen doit être écarté ;

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

6. Considérant, en premier lieu, que la décision contestée a été signée par M. Alain Carton, secrétaire général de la préfecture de la Moselle ; que, par un arrêté du 11 avril 2014, régulièrement publié au recueil des actes administratifs des services de l'Etat dans le département de la Moselle le 14 avril 2014, le préfet de la Moselle a donné délégation de signature à M. C... à l'effet de signer " tous arrêtés, décisions, circulaires, rapports et correspondances relevant des attributions de l'État dans le département de la Moselle " ; que la décision litigieuse ne figure pas au nombre des exclusions de la délégation ; que, par ailleurs, cette délégation n'est pas subordonnée à la condition que le préfet ait été absent ou empêché ; qu'il s'ensuit que le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de la décision en litige manque en fait et doit être écarté ;

7. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I.- L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne (...) lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré (...) La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I, sans préjudice, le cas échéant, de l'indication des motifs pour lesquels il est fait application des II et III. " ;

8. Considérant que lorsqu'une obligation de quitter le territoire français assortit un refus de séjour, lequel, par nature, déclare implicitement illégal le séjour de l'étranger en France, la motivation de cette mesure se confond avec celle du refus de titre de séjour dont elle découle nécessairement et n'implique pas, par conséquent, dès lors que ce refus est lui-même motivé, de mention spécifique ; qu'en l'espèce, le refus de séjour comporte les considérations de droit et de fait qui le fondent et satisfait à l'obligation de motivation ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire serait insuffisamment motivée manque en fait ;

9. Considérant, en troisième lieu, qu'il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de l'exception d'illégalité de la décision de refus de titre de séjour doit être écarté ;

10. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé (...) " ; qu'ainsi qu'il a été dit au point 4, il ne ressort pas des pièces du dossier que le défaut de prise en charge médicale emporterait des conséquences d'une exceptionnelle gravité pour MmeB..., ni qu'elle ne pourrait pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine ; que, par suite, l'intéressée n'est pas fondée à soutenir que le préfet aurait méconnu les dispositions précitées du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en décidant de l'éloigner du territoire français ; qu'il ne ressort pas davantage des pièces du dossier que le préfet de la Moselle aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la mesure sur la situation personnelle de la requérante ;

11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

12. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions tendant à l'annulation des décisions attaquées, n'implique aucune mesure particulière d'exécution ; que, par suite, les conclusions susvisées ne peuvent être accueillies ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

13. Considérant que l'État, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, ne saurait être condamné à verser à l'avocat de Mme B...une somme en application de ces dispositions ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de Mme E...épouse B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D...E...épouse B...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Moselle.

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N°15NC01407


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15NC01407
Date de la décision : 05/08/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. MARTINEZ
Rapporteur ?: Mme Laurie GUIDI
Rapporteur public ?: M. LAUBRIAT
Avocat(s) : ECA

Origine de la décision
Date de l'import : 18/10/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2016-08-05;15nc01407 ?
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